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1.2 Comportements mécaniques

1.2.3 Lien vers l'échelle microscopique

Le risque que peut induire un endommagement non contrôlé réside notamment en l'aug- mentation de la surface de combustion (ssure, décohésion) qui peut créer une surpression et nalement l'éclatement du propulseur.

Chapitre 1. Présentation générale du projet de recherche

Figure 1.16: Observations AFM des petites particules (a) de compositions à liant inerte avec

des interfaces importantes et percolantes et (b) de composition à liant nitré pour lequel les interfaces sont quasiment absentes. Les analyses ont été réali- sées sur deux appareils diérents d'où la modication des échelles de couleur (ArianeGroup).

Figure 1.17: Comportement en traction uniaxiale à 5mm.min−1 et 20°C d'un propergol à

liant inerte avec suivi de sa variation de volume. Les liens avec les phénomènes microstructuraux sont illustrés par des observations MEB réalisées au début de chacune des étapes de l'endommagement.

1.2. Comportements mécaniques

De ce fait, la compréhension de l'endommagement, qui est majoritairement causé par les décohésions, est capitale pour les propergols. Les études les plus récentes ont donc cherché à établir des liens entre ce phénomène microscopique et le comportement global du composite (Toulemonde,2016). Nevière (2006) et Azoug (2010) ont ainsi proposé une première décompo- sition du comportement des propergols, celle-ci ayant été par la suite enrichie grâce aux études postérieures (Figure 1.17) :

 Aux petites déformations, la réponse du composite est presque linéaire et, du fait de son caractère quasi-incompressible, aucune variation de volume n'est enregistrée. L'adhésion liant/charge permet la transmission des eorts sans décohésion, le matériau est sain.  Pour un niveau de déformation supérieur, on note un assouplissement de la réponse du

matériau et un début de variation de volume. Les observations MEB sur matériau chargé révèlent l'apparition de décohésions (en surface). Ces analyses conrment le lien entre l'adoucissement et la variation de volume à l'échelle macroscopique et l'apparition de décohésions liant/charge. Dans certains cas, pour ce niveau de sollicitation, des brilles sont visibles dans les décohésions (observation MEB du milieu de la Figure 1.17). Elles permettent une transmission réduite, mais persistante, des eorts.

 Pour des déformations proches de la rupture, la variation de volume suit une évolution quasi-linéaire alors que le comportement atteint un plateau. Ce phénomène est classi- quement relié à la fois à l'accroissement des décohésions qui sont dans ce cas complètes (Nevière,2006) et la coalescence des interfaces rompues qui induisent localement des s- sures (Oberth et Bruenner,1965). Il semble que ces phénomènes soient responsables d'une localisation instable que Toulemonde(2016) associe à la rupture du matériau.

La localisation à l'échelle microscopique et la rupture nale sont en eet liées. À partir de travaux de Liu et al. (2004), ce phénomène a été considéré comme un critère de rupture dans les simulations de Toulemonde (2016). Néanmoins, des analyses par corrélation d'images sur propergols ont révélé que des localisations interviennent à de multiples endroits et bien avant la rupture. Comme on peut l'observer sur la Figure 1.18(a) et (b), ce phénomène est présent aussi bien dans les compositions à liant inerte et que celle à liant nitré, mais il les aecte d'une manière très diérente. Les analyses MEB sur échantillons maintenus en relaxation ont également révélées la présence de nombreuses localisations à l'échelle microscopique, bien avant qu'intervienne la rupture (Figure1.18(c)). Ces observations remettent en question le lien exclusif entre localisation et rupture globale du propergol. Néanmoins, elles conrment l'intervention des coalescences évoquées parOberth et Bruenner(1965) lors de la dernière phase du comportement du matériau.

Pour compléter la validation de la cohérence des matériaux modèles vis-à-vis des propergols, des liens similaires ont été établis avec le composite chargé en particules sphériques. Des obser- vations tomographiques ont été menées sur une éprouvette maintenue en relaxation par deux plaques de verre an de ne pas perturber les acquisitions (Toulemonde,2016). Des coupes échan- tillonnées à l'état initial puis à 5, 10 et 15% sont reportées sur la Figure 1.19. À l'état initial, seul les particules (blanc) et la matrice (gris) sont visibles. À 5% de déformation, de nombreuses cavités (noir) sont réparties de manière homogène dans le matériau, localisées à l'interface ma- trice/particule alors que la réponse du matériau s'est adoucie (Figure 1.13). Par la suite à 10% de déformation, quelques zones de localisation de l'endommagement peuvent être dénombrées, vraisemblablement dû à la coalescence de décohésions. À l'échelle macroscopique, elles inter- viennent au niveau de déformation pour lequel le comportement macroscopique est aecté par l'infection singulière évoquée précédemment (Figure1.13). Enn, lorsque le matériau est proche de la rupture (15% de déformation), le nombre de zones de localisation est largement supérieur.

Chapitre 1. Présentation générale du projet de recherche

Figure 1.18: Localisations intervenant pour des déformations au moins 20% inférieures à

la rupture : (a) Champs de déformation longitudinale d'un propergol à liant inerte soumis à une traction (20%), de nombreuses zones ponctuelles de loca- lisation sont réparties uniformément. (b) champs de déformation longitudinale d'un propergol à liant nitré soumis à une traction (16%), trois zones de localisa- tion macroscopique sont visibles. (c) Observations MEB d'un propergol à liant nitré sollicité en traction uniaxiale (7%), la localisation de l'endommagement par coalescence des décohésions est nettement visible. Images obtenues sur le MEB Zeiss JSM-6510 du CRB (ArianeGroup) pour une accélération de faisceau de 10 kV.

Deux sont visibles sur la dernière coupe de la Figure 1.19, bien que leur ouverture (mode I) respective semble être restée constante. Ainsi, les diérentes observations du composite sous sol- licitation mécanique démontrent d'une part un lien clair entre la réponse globale du matériau et les modes d'endommagement à l'échelle microscopique, d'autre part une cohérence remarquable avec l'endommagement des propergols à l'échelle des inclusions. Enn, malgré l'intervention de localisations dès 10% de déformation, la rupture a lieu au-delà de 15% de déformation. Cette observation souligne une fois encore la complexité de la dénition d'un critère de rupture à partir de la simple observation de localisation.

Les matériaux modèles reproduisent ainsi de manière satisfaisante les propriétés clés des propergols, en particulier au niveau de l'endommagement et quel que soit l'échelle d'analyse. Ils constituent donc un outil d'intérêt pour caractériser les propriétés morphologiques qui aectent leur comportement. Néanmoins, ils ne sauraient se substituer à des outils de simulation numérique qui sont utiles dans un premier temps à la compréhension des comportements mécaniques et dans un second temps à leur prédiction.