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I. La vectorisation en Cancérologie

I.3. Les vecteurs cellulaires

Il existe principalement trois familles de vecteurs cellulaires : les nanoparticules qui exploitent les anomalies des tissus cancéreux, les peptides de translocations (CPP) permettant

l’entrée cellulaire et des systèmes plus complexes comme les vecteurs viraux. Pour délivrer

un composé vers une cellule, le choix du système doit tenir compte de la nature de la cellule ciblée ainsi que la nature de la molécule à vectoriser.

I.3.1. Les Nanoparticules

Figure 11 : Types de nano-vecteur 66

Les importantes avancées en nanotechnologie ont permis de développer des systèmes

de nanovecteurs dans le domaine de l’imagerie et la thérapie anticancéreuse. Les

nanoparticules sont des composés de taille comprise entre 5 et 200 nm. Leur utilisation offre un meilleur contrôle pharmacocinétique et permet une biodistribution de molécules à délivrer en grande quantité. Ces vecteurs permettent de protéger le composé jusqu’à sa cible en limitant sa dégradation et en diminuant leurs interactions prématurées avec l’environnement.

Par ailleurs, leur taille conséquente diminue fortement leur clairance rénale ce qui induit une durée de vie dans le plasma de plusieurs jours. Le ciblage passif exploite les caractéristiques physiologiques des tumeurs qui permettent aux nanovecteurs de s'accumuler dans la tumeur par effet EPR (enhanced permeability and retention).65 Cet effet spécifique aux tissus tumoraux est dû à la grande perméabilité des vaisseaux sanguins et au disfonctionnement du drainage lymphatique. Ainsi, l’absorption du médicament dans les tissus ainsi que sa

distribution au niveau des tumeurs sont améliorées de manière significative. Plusieurs types

65

Matsumura, Y.; Maeda, H., A new concept for macomolecular therapeutics in cancer-chemotherapy-mechanism of tumoritropic accumulation of proteins and the antitumor agent smancs. Cancer Res 1986, 46 (12), 6387-6392.

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de nano-vecteurs ont été développés comme les polymères, les particules polymériques, les nanotubes de carbone, les nanoparticules inorganiques, les dendrimères et les liposomes (Figure 11).66 Selon la nature du nanovecteur, le composé à délivrer peut être soit directement

greffé par lien covalent (polymère, micelle, dendrimère), soit encapsulé à l’intérieur d’une

cavité dans le cas des liposomes ou autres particules polymériques. Ces nano-vecteurs ont été

étudiés pour une grande variété d’applications comme la vectorisation d’anticancéreux,

l’imagerie, l’ablation ou l’irradiation des tumeurs (Tableau 4).67 Cependant, la taille

importante des nanovecteurs présente quelques limitations car certaines tumeurs solides ne

présentent pas l’effet EPR ce qui a pour conséquence de réduire fortement la biodistribution et

la rétention du médicament. Par ailleurs, ces vecteurs étant uniquement guidés par une vectorisation passive présentent une très faible spécificité envers les cellules tumorales. Pour compenser ces inconvénients, la surface des nanovecteurs peut être modifiées par des ligands

afin qu’ils interagissent spécifiquement avec les cellules tumorales (cf. p31).

Type de nano-vecteur Molécule vectorisée Nom commercial Description

Styrene (polymère) Neocarzinostatin

(proteine) Zinostatin/Stimalmer Cancer des hépatocytes

PEG L-asparaginase Oncaspar Leucémie lymphoïde chronique

Liposomes Doxorubicine Myocet Cancer du sein récurent et Sarcome de

Kaposi Nanoparticule

d'albumine Paclitaxel Abraxane Cancer métastasique du sein

Tableau 4 : Exemples de nanovecteurs conjugués sur le marché

I.3.2. Peptides et protéines de translocations

Durant les dix dernières années, un certain nombre de peptides ayant la particularité de traverser les membranes cellulaires ont été identifiés. Certains de ces peptides appelés CPP (Cell Penetrating Peptide)68 sont relativement courts (10 à 27 résidus) et proviennent

d’origines diverses (Tableau 5). Certains ont été inspirés par des séquences de protéines

naturelles comme des protéines de surface de virus et de bactéries, alors que d'autres sont purement synthétiques.

66

Faraji, A. H.; Wipf, P., Nanoparticles in cellular drug delivery. Bioorg. Med. Chem. 2009, 17 (8), 2950-2962.

67

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68 (a)

Lindgren, M.; Hallbrink, M.; Prochiantz, A.; Langel, U., Cell-penetrating peptides. Trends Pharmacol Sci

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Agents de translocation Séquence d’acides aminés Origines

Pénétratine RQIKIWFQNRRMKWKK Antennapedia

Tat (48-60) GRKKRRQRRRPPQC HIV-1

Transportan GWTLNSAGYLLKINLKALAALAKKIL Galanine et Mastoparan

Peptide amphiphile KALKLALKALKAALKLA Synthèse

Arg9 RRRRRRRRR Synthèse

Tableau 5 : Exemples d’agents de translocation

Ces agents de translocation ont été conjugués à une grande variété de composés dans le but de permettre leur pénétration intracellulaire.69 Ainsi, ils ont permis la vectorisation cellulaire de petites molécules, de peptides, de protéines, d’acides nucléiques70

ou de nanoparticules.71 Bien que ces systèmes aient montré une certaine efficacité de vectorisation in vitro et in vivo, ils ne possèdent aucune spécificité envers les tissus tumoraux. Les CPP interagissent potentiellement avec toutes les membranes cellulaires et ne peuvent être utilisés seuls dans une stratégie anticancéreuse.

I.3.1. Vecteurs viraux

Les virus sont des microorganismes qui sont capables de libérer leur matériel génétique et de se répliquer en utilisant le système cellulaire de la cellule hôte. Ces dix

dernières années, les vecteurs viraux ont pris de l’importance notamment dans le domaine de

l’oncologie. Cependant, l’utilisation des virus en thérapie nécessite un grand nombre de

modifications. Premièrement le virus doit être non pathogène tout en gardant son activité infectieuse contre les cellules humaines. Pour rendre ces virus spécifiques aux cellules tumorales, la surface des virus peut être modifiée en greffant divers ligands comme des mAb 72 ou des peptides RGD 73 reconnaissant spécifiquement des antigènes tumoraux ou des récepteurs membranaires (Figure 12a). Une fois reconnu le virus pénètre à l’intérieur de la

cellule cible et libère son matériel génétique pouvant induire une apoptose ou activer les systèmes immunitaires via le système MHC (Figure 12b). Cette stratégie a été employée avec succès : de nombreux virus oncololitiques sont actuellement en phase clinique. Le seul succès

69

Gupta, B.; Levchenko, T. S.; Torchilin, V. P., Intracellular delivery of large molecules and small particles by cell-penetrating proteins and peptides. Adv Drug Deliver Rev 2005, 57 (4), 637-651.

70

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71

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72

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73 (a)

Gollan, T. J.; Green, M. R., Redirecting retroviral tropism by insertion of short, nondisruptive peptide ligands into envelope. J Virol 2002, 76 (7), 3558-3563; (b) Borovjagin, A. V.; Krendelchtchikov, A.; Ramesh, N.; Yu, D. C.; Douglas, J. T.; Curiel, D. T., Complex mosaicism is a novel approach to infectivity enhancement of adenovirus type 5-based vectors. Cancer Gene Ther 2005, 12 (5), 475-486.

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clinique est celui de l’adenovirus oncolitique Onyx-15, approuvé uniquement par la Chine en

2005, utilisé dans les traitements du cancer du cou et de la tête.74

(a) (b)

Figure 12 : (a) Schéma de virus modifiés pour le ciblage 75 (b) Mode d’action des virus oncotiques 76

74

Khuri, F. R.; Nemunaitis, J.; Ganly, I.; Arseneau, J.; Tannock, I. F.; Romel, L.; Gore, M.; Ironside, J.; MacDougall, R. H.; Heise, C., et al., A controlled trial of intratumoral ONYX-015, a selectively-replicating adenovirus, in combination with cisplatin and 5-fluorouracil in patients with recurrent head and neck cancer. Nat Med 2000, 6 (8), 879-885.

75

Waehler, R.; Russell, S. J.; Curiel, D. T., Engineering targeted viral vectors for gene therapy. Nat Rev Genet

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