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CHAPITRE 2 REVUE DE LITTÉRATURE

2.3 Les utilisations du phosphogypse

Plusieurs voix de revalorisation du phosphogypse ont déjà été étudiées en tant que remplaçant du gypse naturel [18, 19] :

- Dans l’industrie plâtrière (après traitement pour éliminer les impuretés qu’il contient) ; - Dans la fabrication du ciment;

- Comme matériaux de construction (briques, panneaux, blocs); - Dans la construction routière (remblais, assises de chaussée, …) ;

- En agriculture (engrais, réhabilitation de sols salins, amélioration des sous-sols de sols acides chargés d’aluminium) ;

- Dans l’industrie du papier comme charge ou pigment de couchage.

Cependant, la présence de nombreuses impuretés rend l’utilisation du phosphogypse compliquée et surtout plus coûteuse que les matières premières traditionnelles. En effet, certains composants présents dans le phosphogypse, comme les métaux lourds par exemple, pourraient se répandre dans l’environnement et il est donc nécessaire de laver le phosphogypse avant de l’utiliser[7].

Pour le moment, l’utilisation majoritaire se trouve dans la fabrication du ciment de type Portland[20] qui est un ciment artificiel produit à partir de clinker. Il est utilisé en grande quantité depuis les années 50 environ dans la fabrication du béton armé courant. Le clinker est produit par la cuisson d'un mélange composé d'environ 75 % de calcaire et de 25 % de silice à une température de 1 450 °C pour obtenir une roche artificielle très dure[21]. Le clinker gris est généralement défini par la composition suivante[22] :

- Silicate tricalcique (SiO2 – 3 CaO) : 50 à 65 % (Alite)

- Silicate bicalcique (SiO2 – 2 CaO) : 15 à 20 % (Belite)

- Aluminate tricalcique (Al2O3 – 3CaO) : 5 à 15 % (Aluminate)

- Ferroaluminate tétracalcique (Al2O3 – Fe2O3 – 4 CaO) : 5 à 10 % (Ferrite)

En 1991, Ribas [23] publia un brevet sur la coproduction de clinker et de dioxyde de soufre pour la production d’acide sulfurique à partir du sulfate de calcium mais avant cela, d’autres scientifiques s’étaient déjà intéressés à la décomposition du sulfate de calcium. En 1903, Lunge

[23] suggéra pour la première fois que le sulfate de calcium chauffé dans un four avec de l’argile pouvait directement être décomposé en dioxyde de soufre et en ciment clinker. Par la suite, en 1908, Hofman et Mostowithsch [23] publièrent deux études sur les effets de la température sur la vitesse de décomposition du CaSO4 en présence d’additifs. En 1915, W. S. Mueller [23] étudia la

décomposition du CaSO4 avec additifs à l’échelle laboratoire et le procédé fut finalement

implémenté à l’échelle industrielle par H. H. Kuhne [23]. Ainsi, dans les années 20, la technologie Muller-Kuhne [23] se développa en Europe avec Marchon en Angleterre à Whitehaven et Billingham. D’autres pays construisirent ce procédé par la suite comme la France, l’Autriche, l’Afrique du Sud et la Pologne. Cependant, ce procédé requiert un coût d’investissement très élevé et il s’est avéré économiquement viable uniquement pour les industries avec certaines caractéristiques, c’est-à-dire les entreprises avec un besoin important en soufre, situées dans une région avec de grandes quantités de gypse (ou phosphogypse) et de charbon et lorsque le prix du soufre ou de son importation est élevé. De plus, avec ce procédé, certaines entreprises ont connu des difficultés d’opération ou de maintenance [24]. Par ailleurs, le gaz issu de ce procédé ne contenait qu’entre 7 et 10% de SO2 [25].

Le procédé Muller-Khune est constitué des trois étapes suivantes :

1- Le carbone réagit avec un quart de la quantité de CaSO4 à 900°-1000°C suivant la réaction

ci-dessous : 4𝐶𝑎𝑆𝑂4+ 2𝐶 ↔ 𝐶𝑎𝑆 + 3𝐶𝑎𝑆𝑂4+ 2𝐶𝑂2

2- Puis, le sulfure de calcium est décomposé en réagissant avec les trois quarts de CaSO4

restant pour former CaO et SO2 à 1200°C suivant la réaction ci-dessous :

3𝐶𝑎𝑆𝑂4+ 𝐶𝑎𝑆 ↔ 4𝐶𝑎𝑂 + 𝑆𝑂2

3- Enfin, la réaction classique de production du clinker a lieu à 1450°C avec le résidu solide mélangé à des additifs et le gaz est lavé et transporté vers les unités de production d’acide sulfurique.

Ces réactions ont toutes lieu dans un long four rotatif. Le matériel est injecté par le haut du réacteur et il est transporté vers le bas par la rotation du four. Le combustible est injecté et brûlé en bas du four là où a lieu la formation du clinker avec l’ajout d’oxyde de fer, de silice et d’alumine. Cette réaction utilise alors la chaleur produite par la combustion. Les gaz de combustion vont monter vers le haut du réacteur et ils sont censés apporter l’énergie requise par la réaction, fortement endothermique, de décomposition du CaS. La décomposition du CaS a lieu à 1100°-1200°C alors

que la décarbonatation de CaCO3 a lieu à 900°C et nécessite beaucoup moins d’énergie. Face à la

température élevée de fonctionnement et à l’importance de l’énergie requise à la réaction de décomposition du CaS, la faible efficacité des transferts thermiques dans un four rotatif est un problème majeur. En effet, les échanges de chaleur entre les gaz de combustion et le solide sont peu efficaces. De plus, dans un tel procédé, il est impossible de contrôler précisément les conditions de réduction du CaSO4. Il est donc impossible d’optimiser le temps de résidence et la température

de fonctionnement. Le temps de résidence utilisé est de 1h20 à 1200°C ce qui est très élevé si on compare aux réactions de combustion par exemple (réactions gaz-solide), qui nécessitent un temps de séjour du solide de quelques secondes. Ainsi, une grande quantité d’énergie est perdue et, par la taille du réacteur et par la quantité de combustible requise ce qui fait que le coût du capital pour l’équipement requis pour ce procédé est très important.

Ce brevet[23] propose un nouveau procédé, basé sur le procédé Muller-Kuhne pour la production de ciment artificiel de type Portland et de SO2 (pour la production d’acide sulfurique) à partir du

gypse. L’amélioration principale du procédé provient du fait que les trois étapes décrites précédemment sont réalisées dans trois fours différents. Ainsi, les conditions de fonctionnement de chaque étape peuvent être optimisées. Le temps de résidence pour la décomposition du CaSO4 est

réduit à 15-20 min permettant l’utilisation d’un plus petit four pour le même débit de produit. Ainsi, le coût d’investissement peut être réduit.

Un autre brevet [26] propose un procédé dérivé du procédé Muller-Kuhne en utilisant la pulpe de papier. Pour que le procédé soit efficace, il est important d'assurer un haut degré de décomposition de l'anhydrite CaSO4. Il est également important que la concentration en CaS dans le solide obtenu

ne dépasse pas un niveau maximal admissible pour éviter que le solide entre en fusion au cours de la formation du clinker. Sinon celui-ci ne peut alors pas être facilement broyé pour former le clinker de ciment. En conséquence, la qualité du clinker dépend du taux conversion de CaSO4 en CaO qui

n’était pas très élevé avec le précédent procédé Muller-Kuhne. Dans cet autre procédé[26], le gypse est mélangé à des fibres de papier et aux additifs utiles à la formation du clinker (SiO2, Fe2O3 et

Al2O3) avant d’être séché et calciné (séchoir à bande et tambour rotatif chauffé à l’aide du gaz

obtenu en sortie du procédé). Avant de réaliser ce mélange, le gypse est mis en contact avec de l’oxygène afin de convertir CaS en CaSO4. Cette étape est surtout importante pour le gypse issu

des unités de désulfurisation. Pour améliorer la cinétique de réaction, le mélange de gypse et de pulpe de papier est pressé pour former des formes compactes comme des briques. Les fibres de

papier ont le rôle de réducteur lors de l’étape de décomposition du CaSO4 afin d’obtenir un gaz

riche en SO2 et un résidu solide envoyé dans un four rotatif pour constituer le clinker. Finalement,

les fibres de papier représentent une source de carbone, dont l’optimum est, d’après cette étude[26], entre 3,4 et 6% de la masse de fibre, pour décomposer CaSO4 en minimisant la formation de CaS.

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