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Les théories implicites des agresseurs sexuels d’enfants

1.3 Les théories implicites

1.3.1 Les théories implicites des agresseurs sexuels d’enfants

Ward et Keenan (1999) ont développé une typologie de ce qu’ils considèrent comme étant les principales théories implicites des agresseurs sexuels d’enfants. Leur typologie a été construite à partir des échelles de mesures psychométriques existantes. Précisément, ces instruments sont le Bumby’s Molest Scale (Bumby, 1996), le Abel and Becker’s Cognitions Scale (Abel et al., 1989), le Hanson Sex Attitude Questionnaire (Hanson et al., 1994). De plus, Ward et Keenan (1999) ont

examiné les résultats de plusieurs études descriptives sur les distorsions cognitives afin d’enrichir leur typologie (p. ex., Neidigh et Krop, 1992; Ward et al., 1998; Ward et al., 1997). Les auteurs ont analysé la totalité des distorsions issues de ces instruments psychométriques et les ont regroupées thématiquement. Les études descriptives ont permis de fournir des exemples de distorsions cognitives supplémentaires à leur typologie. Ward et Keenan (1999) ont ainsi établi cinq théories implicites qui permettent de regrouper l’ensemble des distorsions cognitives des délinquants sexuels. Ces théories implicites sont:

Le droit d’agir à sa guise (Entitlement). Cette théorie implicite est basée sur la croyance que certaines personnes seraient supérieures et plus importantes que d’autres. En raison de ce statut privilégié, ils s’accordent le droit d’assouvir leurs besoins sur les autres et s’attendent à ce que leurs gestes soient acceptés de tous. Certaines caractéristiques telles le sexe ou la classe sociale, peuvent être à la source de cette théorie implicite. Par exemple, les agresseurs utiliseront leur position tel « qu’être le chef de la famille » pour justifier leurs droits. Les exemples suivants de distorsions cognitives appartiennent à cette théorie: « Pour un homme, il est justifié d’avoir des activités sexuelles avec ses enfants si sa femme n’aime pas le sexe. »; « Je mérite un traitement particulier et l’enfant me fera sentir mieux. »; « Une personne devrait avoir du sexe quand elle le désire. »; « Un jour, la société va comprendre que les rapports sexuels entre les adultes et les enfants sont acceptables. »; « Les enfants sont supposés faire tout ce que je leur dis de faire. » (Ward et Keenan, 1999).

L’agression sexuelle ne cause pas de tort aux enfants (Nature of harm). Cette théorie est basée sur l’idée selon laquelle il existerait une gradation de torts causés à une personne. Elle inclut également l’idée selon laquelle toutes les activités sexuelles faites avec un enfant ne sont pas nuisibles, et peuvent même être bénéfiques. Des exemples de distorsions cognitives dans cette théorie incluent: « Se limiter à toucher son enfant n’équivaut pas à avoir une relation sexuelle. »; « L’enfant n’a pas saigné, donc il n’a pas eu mal. »; « Lors de l’abus, l’enfant dormait, il n’a donc pas eu

conscience de ce qui se passait. »; « Plusieurs victimes d’agression sexuelle n’auront jamais de séquelles ou de problèmes majeurs. »; « C’est préférable d’avoir une relation sexuelle avec son enfant que de commettre l’adultère. » (Ward et Keenan, 1999).

Le monde est incontrôlable (Uncontrollability). L’idée à la base de cette théorie implicite consiste à penser, pour l’agresseur, qu’il n’a pas le contrôle de ses actions et de son environnement. Il serait plutôt guidé par des facteurs extérieurs. L’agresseur se perçoit comme n’ayant aucun pouvoir personnel sur le monde, ses émotions et ses pulsions sexuelles. Des exemples de distorsions cognitives appartenant à cette théorie sont: « J’ai agi selon la volonté de Dieu. »; « Certaines personnes ne sont pas de réels agresseur sexuels d’enfants, ils sont juste incapables de se contrôler et font des erreurs. »; « Plusieurs agressions sexuelles surviennent lors d’épisodes de stress intense. »; « Si je ne peux pas me contrôler, je ne suis donc pas responsable des mes actions. »; « J’étais sous l’influence de drogues ou d’alcool lors de l’agression. » (Ward et Keenan, 1999).

Les enfants sont des objets sexuels (Children as sexual objects). Ici, les enfants sont perçus comme des êtres qui aiment et cherchent à avoir des activités sexuelles avec un adulte. Ils sont également perçus comme ayant une maturité sexuelle égale à celle d’un adulte et peuvent donc donner un consentement éclairé. De plus, tout comme les adultes, les enfants seraient motivés par un désir de plaisir, incluant un désir de plaisir sexuel. Les exemples de distorsions cognitives suivantes appartiennent à cette théorie: « Certains enfants sont curieux à propos de la sexualité et aiment cela. »; « L’enfant m’a séduit. »; « L’enfant est mature pour son âge. »; « Toucher un enfant c’est une façon de lui montrer mon affection et mon amour. » (Ward et Keenan, 1999).

Le monde est dangereux (Dangerous World). Selon cette théorie implicite, le monde est dangereux et les individus y vivent qu’en fonction de leurs propres intérêts. Il existe deux variantes à cette théorie. La première est l’idée qu’en raison de la

dangerosité du monde, la seule manière d’y vivre est de contrôler les autres, y compris les enfants. La deuxième variante fait mention que le monde est menaçant et qu’en raison du manque de fiabilité des adultes, l’agresseur se tourne vers les enfants (Ward et Keenan, 1999). Les enfants, quant à eux, sont perçus comme étant des êtres fiables non menaçants. Des exemples de distorsions cognitives appartenant à cette théorie incluent: « Les enfants savent vraiment comment aimer. »; « Les enfants sont moins rejetant et aiment plus que les adultes. »; « On ne peut pas faire confiance aux adultes. »; « Les rapports sexuels entre les adultes et les enfants sont vraiment amoureux. » (Ward et Keenan, 1999).

1.3.2 Validation empirique portant sur les théories implicites des

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