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3. Acquisition des données biologiques

3.1. Les réseaux trophiques pucerons – parasitoïdes – hyperparasitoïdes

Les pucerons et leurs parasitoïdes ont été échantillonnés dans les cultures de céréales en mélange ou non avec les légumineuses en 2018 et 2019. L’abondance en pucerons et la mesure du taux de parasitisme a été réalisée via des comptages sur les plants des pucerons vivants et momifiés. Les momies ont été récoltées et conservées dans des tubes Eppendorfs fermés par des cotons à température ambiante, jusqu’à émergence du parasitoïde (primaire ou secondaire). Les méthodes d’échantillonnages sont détaillées dans le chapitre 1.

Les pucerons vivants et momifiés ont été identifiés sous loupe binoculaire selon les critères d’identification morphologiques de Blackman and Eastop (2000).

Deux méthodes complémentaires ont été utilisées pour l’identification des parasitoïdes primaires :

- La détermination morphologique a été utilisée par Christelle Buchard,

Stéphanie Llopis, Morgane Ferrand et Emma Jeavons, sous loupe binoculaire et microscope optique. Les différentes espèces d’Aphidius sont proches phylogénétiquement et se distinguent principalement grâce à des critères morphologiques tels que le nombre d’articles antennaires et la striation du pétiole (le premier tergite, Fig. 4).

Figure 4 : Vue latérale des pétioles de (A) Aphidius ervi et (B) A. avenae. Source : Ghaliow et al., 2018

- La détermination moléculaire a été réalisée par Franck Duval, Estelle Postic et

Emma Jeavons. Deux catégories de méthodes moléculaires basées sur l’ADN peuvent être distinguées : le séquençage d’une partie du génome (« barcoding »), et la PCR (Polymerase Chain Reaction) de diagnostic. C’est cette deuxième méthode qui a été utilisée, car, une fois au point pour le système étudié, elle est plus rapide et moins onéreuse (Traugott et al., 2008). Cette méthode consiste à amplifier des séquences d’ADN avec des paires d’amorces spécifiques à un groupe ou à une espèce, puis de détecter la présence de ces séquences grâce à une électrophorèse sur gel. Pour notre système pucerons de céréales – parasitoïdes, nous avons suivi le protocole de Traugott et al. (2008) et Ye et al. (2017).

Les hyperparasitoïdes ont pu être identifiés au genre grâce à des critères morphologiques (Powell, 1982). Les analyses moléculaires (par PCR) ont aussi pu permettre la mesure d’un taux d’hyperparasitisme en utilisant une amorce généraliste des hyperparasitoïdes. Toutefois, la détermination moléculaire à l’espèce n’a pu être réalisée dû à l’absence d’amorces spécifiques de chaque espèce d’hyperparasitoïde, ceux-ci n’ayant jamais été examinés en région Bretagne.

Complémentarité des méthodes :

Dans notre étude, l’identification moléculaire par PCR de diagnostic a été utilisée sur des momies dégradées (e.g. présence de moisissures) et/ou dont le parasitoïde n’avait pas émergé. Cette méthode a donc permis d’augmenter le nombre d’échantillons pour l’analyse des réseaux trophiques pucerons-parasitoïdes. Un autre avantage de cette méthode est de pouvoir tester le parasitisme des pucerons avant formation de la momie, et donc de mesurer le taux de parasitisme réel de la parcelle à un instant t. Néanmoins, le taux de parasitisme via cette méthode peut être surestimé puisque certains parasitoïdes peuvent ne pas terminer leur développement (Traugott et al., 2008). Ces analyses ont été effectuées sur des pucerons récoltés dans les champs étudiés en 2018 par Maximilien Abomes au cours d’un stage de M2 co-encadré IGEPP – ECOBIO. Cette méthode n’a pas fonctionné correctement, probablement dû à un problème d’extraction d’ADN, et les résultats ne sont donc pas présentés dans cette thèse. De plus, l’analyse moléculaire de pucerons peut permettre de détecter le multi-parasitisme, c’est-à-dire la présence de plusieurs œufs/larves de parasitoïdes d’espèces différentes au sein d’un même puceron (Traugott et al., 2008). De telles informations sont intéressantes pour l’étude des

interactions entre parasitoïdes dans les champs (Ortiz-Martínez et al., 2019), mais ne permettent pas de connaître le parasitoïde émergent, contrairement à la détermination morphologique. Enfin, l’analyse moléculaire des déjections d’hyperparasitoïdes peuvent permettre l’identification des parasitoïdes primaires, et donc de construire des réseaux complets pucerons – parasitoïdes – hyperparasitoïdes (Ye et al., 2017). Ce travail n’a pas encore pu être réalisé avec les échantillons récoltés durant la thèse, mais fait partie des perspectives de travail ce celle-ci.

Contrairement à la détermination morphologique, la détermination moléculaire est une méthode onéreuse et qui demande un temps de mise au point important, en particulier pour la création d’amorces spécifiques. Ces amorces doivent aussi être testées, et possiblement corrigées, en fonction de la zone géographique des espèces étudiées. Ces amorces spécifiques peuvent être difficiles à créer, par exemple pour les espèces paraphylétiques (Derocles et al., 2016). Ainsi, les amorces utilisées aux cours de nos analyses n’ont pas permis de détecter de façon fiable A. matricariae. Ceci n’a pas posé de problème majeur dans notre étude, puisque A. matricariae ne représentait que 1.7% de la guilde de parasitoïdes primaires au printemps, mais cela représente une limite importante pour l’étude des réseaux trophiques pucerons de céréales – parasitoïdes en hiver par exemple, où A. matricariae représente près d’un tiers des espèces. La méthode d’identification moléculaire par PCR de diagnostic et celle par critère morphologiques sont donc complémentaires dans la compréhension fine des réseaux trophiques pucerons – parasitoïdes – hyperparasitoïdes.

Le séquençage d’individus peut quant à lui permettre de confirmer ou non une identification morphologique, en particulier dans le cas de complexes d’espèces (Ghaliow, 2018). Par exemple, au cours de cette thèse, nous avons cherché à déterminer la communauté de parasitoïdes du puceron du pois, Acyrthosiphon pisum, très présent dans nos champs de mélanges céréaliers. En plus du parasitoïde généraliste A. ervi que nous avons aussi retrouvé dans les pucerons des céréales, d’autres espèces de parasitoïdes ont été détectées, telles que A. eadyi et A. smithi. Or, certains individus avaient des caractéristiques morphologiques ressemblant à A. banksae (Fig. 5), une espèce n’ayant pas encore été détectée en Bretagne. Aphidius eadyi, A. smithi et A. banksae forment un complexe d’espèces, difficile à identifier avec des critères morphologiques, et ont donc fait l’objet de mise au point de méthodes moléculaires pour aider à leur identification

(Ghaliow, 2018). Le séquençage à venir de ces individus devrait nous permettre de confirmer ou non la présence d’A. banksae en Bretagne. Les résultats préliminaires de ces analyses ne sont pas présentés dans cette thèse car ne rentrent pas dans les questions de recherche.

Figure 5 : Vue dorsale des propodeum de (A) A. eadyi et (B) A. banksae. Source : Ghaliow et al., 2018

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