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Les répercussions de la dépendance aux vasoconstricteurs

2. La dépendance aux décongestionnants ou rhinite iatrogène

2.5. Les répercussions de la dépendance aux vasoconstricteurs

2.5.1. Généralités et manifestations psychologiques de la dépendance

La consommation de sprays décongestionnants est favorisée par le contexte quotidien du malade et des habitudes et rituels qu’il a eu l’habitude de prendre.

Ils sont surtout utilisés pour le soulagement de l’obstruction nasale qu'ils provoquent, de manière très ritualisée, avec des prises plus ou moins nombreuses tout au long de la journée. Les prises peuvent être moins fréquentes dans la journée mais plus importantes le soir.

Des rituels tels que l’instillation systématique du spray le soir juste avant de se coucher, ou alors précédent une séance de sport pour améliorer la respiration nasale, peuvent être continués pendant plusieurs années.

Cette dimension comportementale favorise les rechutes, même plusieurs années après l'arrêt du médicament, lorsqu'un contexte particulier réactive son souvenir (rhume accompagné de grosse congestion, nez bouché pendant la nuit)

Ces comportements s’installent dans la vie du patient et restent ancrés dans le quotidien comme une habitude tout à fait normale. Chez la plupart des personnes, cette habitude reste normale pendant des semaines, des mois, voire des années, avant de se rendre compte qu’elle est néfaste. La prise de conscience de la personne peut se faire par elle-même, par un professionnel de santé, ou par un tiers.

La dépendance psychologique qu’un individu éprouve pour un médicament comme les sprays décongestionnants comporte donc une dimension comportementale. Ces comportements s’installent quotidiennement par la crainte de l’arrêt du traitement et qu’une obstruction nasale quotidienne et handicapante perdure.

2.5.2. L’altération de la qualité de vie

Dans la population générale, l'obstruction nasale est une plainte courante lors d’une consultation médicale ou au détour d’une pharmacie.

De par la complexité du système respiratoire nasal, il est difficile d'évaluer objectivement une obstruction nasale. C’est un symptôme qui reste propre à chacun avec une intensité qui fluctue d’une personne à l’autre.

La congestion nasale est considérée comme le symptôme le plus courant et le plus gênant. L'obstruction nasale peut modifier le schéma respiratoire, ce qui entraîne de nombreux symptômes locaux, tels que des troubles de l'alimentation ou de l'odorat, et des symptômes généraux, avec une qualité de vie altérée tels que des troubles du sommeil, du stress voir de la dépression. (35)

Plusieurs études issues de la littérature démontrent que la qualité de vie de patients souffrants d’obstruction nasale chronique peut être altérée, touchant plusieurs points comme par exemple le stress et le sommeil.

- La qualité du sommeil et stress associé :

Bien que l'on ait supposé que ces déficits de qualité de vie étaient liés à leurs symptômes non nasaux, ces patients se plaignent souvent aussi de fatigue, d'un manque de sommeil, de difficultés de concentration et de troubles de la mémoire et de la productivité. Ces symptômes sont directement ou indirectement liés à la privation de sommeil à cause de l’obstruction nasale, et peuvent donc affecter la qualité de vie. Des études portant sur le sommeil et sa qualité dans les rhinosinusites chroniques ont montré que 60 à 75 % des personnes atteintes de cette pathologie se plaignent d'un mauvais sommeil, ce qui est considérablement plus élevé que la proportion de ces plaintes dans la population générale (8-18%). (36)

Dans une plus large étude de population visant à essayer de comprendre le lien entre le blocage nasal et les troubles respiratoires du sommeil, les participants de l’étude présentant des symptômes de rhinite étaient nettement plus susceptibles de déclarer une somnolence diurne excessive chronique et un sommeil chronique non réparateur que ceux qui présentaient rarement des symptômes de rhinite. (36)

Dans le même article cité précédemment, une grande étude multicentrique sur des patients atteints de rhinites allergiques, l'obstruction nasale a été associée de manière significative à une qualité de sommeil médiocre. Il est à noter que le blocage nasal subjectif a été corrélé avec le débit nasal objectif mesuré par rhinométrie acoustique (elle permet de mesurer le degré de perméabilité des fosses nasales pour l’air, de façon fiable et non invasive). (36) Par ailleurs, le blocage nasal signalé pourrait potentiellement être un marqueur fiable de la diminution du débit d'air nasal. Ce dernier a été corrélé avec l'indice de détresse respiratoire la nuit, ce qui confirme son lien avec les troubles respiratoires pendant le sommeil.

Une étude sur la chronobiologie des patients atteints de rhinite allergique a montré que le flux d'air nasal a un rythme circadien. Le blocage nasal augmente pendant la nuit et atteint son maximum à 6 heures du matin. De plus, deux études ont montré que les variations de positions pendant la nuit peuvent affecter la perméabilité nasale. (36)

Ces deux facteurs peuvent compromettre d’avantage les voies respiratoires nasales pendant le sommeil nocturne et donc participer à l’altération du sommeil du sujet atteint d’obstruction nasal chronique. (36)

Une étude a montré que la correction d'une cloison nasale déviée réduit le ronflement et la somnolence et augmente la qualité de vie spécifique à la maladie chez les patients adultes atteints d'apnée obstructive du sommeil et de cloison nasale déviée. (36)

L’obstruction nasale chronique diurne et/ou nocturne peut conduire un individu à avoir davantage de stress quotidien. L’appréhension d’être très fortement gêné au niveau de la respiration et de savoir que le sommeil ne sera pas réparateur, pousse les individus à consommer de manière régulière voir quotidienne des décongestionnants nasaux. Par exemple le stress de la personne dépendante va lui faire ressentir la peur de manquer du produit et la conduit à faire des réserves et à mettre des flacons un peu partout (voiture, bureau, sac à main…)