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1. Contexte général de l’étude

1.4. Forçages dynamiques influant sur la variabilité de l’ozone

1.4.4. Les Oscillations Australes El-Niño (ENSO)

Description

L’ENSO (El Niño-Southern Oscillation) est un phénomène climatique et océanique reliant le phénomène El-Niño et les oscillations australes de la pression atmosphérique. Ce phénomène très actif dans l’océan Pacifique est caractérisé par des anomalies de température de la surface de la mer (SST) et un changement de la circulation atmosphérique (Dijkstra, 2006; Kirtman, 2010). Il est rapporté qu’en moyenne tous les 4 ans, la SST dans le Pacifique oriental en zone équatoriale présente quelques degrés de plus par rapport à la normale (Shiotani, 1992). Dans la zone proche des côtes sud-américaines, cette anomalie de température atteint normalement son maximum aux environs de la période de noël. Très connu par les pêcheurs péruviens, ces derniers appellent ceci El Niño, l’expression espagnole pour signifier « le petit garçon en référence de Jésus christ ». Une situation inverse à celle d’El-Niño peut souvent avoir lieu et porte le nom de La Niña, une expression espagnole qui signifie « la petite fille » pour traduire son comportement opposé à celui d’El-Niño. Ces épisodes s’alternent dans un cycle interannuel irrégulier appelé communément le cycle d’ENSO. Il peut être simplement traduit comme le

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renforcement/affaiblissement irrégulier des alizés, lié aux changements de pression atmosphérique entre les régions du Pacifique est et ouest qui accompagnent ces épisodes. Les alizés sont affaiblis pendant l’El-Niño et renforcés en période de La Niña.

Dans la zone équatoriale de l’océan Pacifique, il existe un fort gradient de température appelé « thermocline » qui sépare les eaux de surface (chaudes) des eaux situées en profondeur de l’océan (froides). Les anomalies de la hauteur du niveau de la mer et de la profondeur de la thermocline varient approximativement en phase avec El-Niño et en opposition de phase avec La Niña. La variabilité interannuelle de la SST, des vents de surface et de la thermocline caractérisent donc les évènements ENSO (Neelin et al., 1998). De tels événements sont une conséquence des interactions fortes et étendues entre l’océan et l’atmosphère. Ils provoquent des perturbations locales pouvant générer de vastes changements dans le système climatique et qui peuvent durer plusieurs mois (Pavalakis et al., 2007). Parmi les changements majeurs portés par l’ENSO sur le climat tropical, on note des modifications sur le comportement des circulations de la cellule de Hadley et de celle de Walker. Pour une revue complète du phénomène, le lecteur peut consulter Dijkstra, (2006).

Figure 1. 16 : (a) Anomalie de température de la surface de la mer (SST) pendant les phases El-Niño (gauche) et La Niña (droite) (http://la.climatologie.free.fr/enso/ENSO-PDO.htm). (b) Variation mensuelle des anomalies de SST dans la région équatoriale du pacifique central (5°N-5°S 120W°-170°W) (http://www.metoffice.gov.uk).

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La figure 1.16 (a) présente les deux évènements en opposition. Les définitions scientifiques utilisées pour définir un épisode El-Niño ou La Niña varient. Cependant, la persistance d’anomalie de température de magnitude supérieure à 0.5° K sur plusieurs mois peut être considérée comme preuve d’un évènement ENSO. Un épisode pourrait typiquement durer trois ou quatre saisons, avec un pic maximal en hiver boréal. Le cycle ENSO est illustré à la figure 1.16 (b). Il est tout à fait clair à travers la figure que le même type d’évènement peut se produire rapidement ou s’étaler sur plusieurs années.

Mécanisme

Ici nous allons faire une description du mécanisme générant les oscillations australes associé à l’évènement El Niño, qui est le phénomène ayant un impact majeur sur la variabilité de l’ozone aux tropiques.

Figure 1. 17 : Climatologies de la SST et du vent de surface en avril (a) et en octobre (b) pour la période 1961-1990. La SST est représentée par les contours séparés par un intervalle de 2°C et la tension du vent (m2·s-2) est présentée par les flèches orientées vers la direction de la circulation du vent. D’après Dijkstra, (2006).

En général, la couche superficielle océanique est une zone de mélange d’une profondeur d’environ 50 m. La température dans cette couche de mélange change à partir de ses échanges avec la couche la plus profonde de l’océan ou à partir des processus d’advection et d’interaction avec l’atmosphère.

Dans les conditions normales (figure 1.17), la région équatoriale de l’océan Pacifique est sous l’influence des vents de surface orientés vers l’ouest, les alizées. Ces alizés conduisent à un cumul d’eau chaude dans la couche superficielle du Pacifique ouest et donc à une augmentation de 50 cm de la hauteur de l’océan à l’ouest par rapport à l’est. La domination de ces vents d’est sur le système air-océan entraine une augmentation de pression de la couche superficielle dans le Pacifique ouest par rapport à l’est et une

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diminution de la profondeur de la thermocline à l’est. Cette situation « normale» est associée à des mouvements convectifs ascendants des masses d’air dans le Pacifique ouest permettant le maintien de la circulation de Walker. Cette dernière bloque généralement en altitude les vents d’ouest.

Figure 1. 18: Aperçu global des processus océaniques et atmosphériques intervenant sur le mécanisme de couplage du système océan-atmosphère en période « normale ». D’après Dijkstra, (2006).

Notons qu’aux tropiques les alizées sont générés par la déviation vers l’ouest de la circulation de Hadley par la force de Coriolis. De ce fait, la circulation vers l’ouest est importante pendant l’accélération de la circulation de Hadley généralement associé à des fortes convections. Lorsque l’activité convective diminue dans la zone occidentale de l’océan Pacifique, les alizées s’affaiblissent induisant une perturbation de la circulation de Walker et un déséquilibre du système. Les vents d’ouest auparavant bloqués peuvent atteindre une intensité suffisamment importante pour renverser la direction de la circulation vers une orientation est. Ce processus permet à l’eau chaude empilée dans la zone occidentale de l’océan Pacifique de dévaler la pente vers la zone est de l’océan Pacifique, induisant au passage une perturbation des courants marins et une augmentation de la SST à l’est du Pacifique. La couche superficielle s’amincit en amont (ouest) et s’enfonce en aval (est). Vers l’est, l’enfoncement est équilibré à partir des ondes de Kelvin océaniques. Ces ondes ont une vitesse de phase zonale ayant la même structure spatiale que la thermocline et se propagent avec une vitesse d’environ 2 m·s-1. Elles prennent environs 3 mois pour traverser le bassin Pacifique (largeur du bassin est de 15000 km) en empêchant les eaux froides de remonter en surface. L’enfoncement de la thermocline facilite le transfert des masses d’eau chaudes vers l’est induisant par la

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suite des anomalies positives de la SST et un échauffement de vent de surface dans le Pacifique est. A l’ouest, la remontée de la thermocline se fait par la propagation d’onde de Rossby (Dijkstra, 2006).

Impact sur la variation de l’ozone

Les évènements ENSO induisent une modification non négligeable sur la variabilité interannuelle de l’ozone aux tropiques et subtropiques en influent sur la circulation de Brewer-Dobson dans la basse stratosphère (Rieder et al., 2013; Randel et al., 2009; Randel et Wu, 2007; Randel et Thompson, 2011). Randel et Thompson, (2011) ont observé une réponse négative liée à la contribution de l’ENSO à l’ozone dont la magnitude est d’environ 6% dans la basse stratosphère. Zerefos et al. (1992) ont rapporté que si la signature du cycle solaire et les oscillations saisonnières et quasi-biennales sont enlevées sur le signal temporel de l’ozone, une large partie de la variabilité restante serait expliquée par les évènements ENSO aux tropiques. Cette large variabilité s’observe sur la variation de la moyenne zonale de l’ozone dans la basse stratosphère. Randel et al. (2009) ont démontré que les évènements ENSO modifient de façon significative les mouvements ascendants des masses d’air associées à la circulation de Hadley aux tropiques, conduisant par la suite à une modification du bilan de l’ozone.

En Effet, comme expliqué au paragraphe précédent, l’oscillation ENSO est caractérisée par des anomalies positives de la SST dans le Pacifique est et des anomalies négatives de la SST à l’ouest. Le renforcement de ces anomalies entraine un renforcement de la convection à l’est du Pacifique et une suppression de la convection à l’ouest du Pacifique. La convection renforcée conduit à une accélération de la circulation de Hadley et un soulèvement de la tropopause à l’est (Ziemke et Chandra, 2003). Ce phénomène a pour conséquence, le renforcement du transport de l’ozone vers les subtropiques et une diminution de l’ozone à l’est du pacifique et parallèlement une augmentation de l’ozone à l’ouest (Shiotani, 1992; Randel et Thompson, 2011).