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Les nouvelles formes d’emploi interrogent également les modalités

Dans le document 7 rapport France Stratégie 2015 (Page 35-38)

CHAPITRE 1 – LES ENJEUX

1. La réalité du marché du travail en France

1.3. Les nouvelles formes d’emploi interrogent également les modalités

En parallèle des formes traditionnelles d’emploi salarié (contrats à durée limitée, CDI) se développent de nouvelles formes d’emploi, reflets d’une plus grande aspiration à l’autonomie ou de la recherche d’un complément de revenu3.

Le travail non salarié a connu un renouveau ces dernières années. Après une chute continue de sa part dans l’emploi total jusqu’aux années 1990 (sous l’effet de la

(1) Pak M. (2013), « Le temps partiel en 2011 : des profils et des conditions d’emploi très contrastés selon que le temps partiel est “choisi” ou “subi” » », Dares Analyses, n° 005, janvier.

(2) Salariés des entreprises de 10 salariés et plus. Moschion J. et Muller L. (2010), « Interruptions de carrière professionnelle et salaires des hommes et des femmes en 2006 », Premières informations, premières synthèses, n° 011, Dares, février 2010.

(3) Conseil d’orientation pour l’emploi (2014), « L’évolution des formes d’emploi », op. cit.

baisse du nombre d’exploitants agricoles), les effectifs des non-salariés (hors agriculteurs) ont progressé de 26 % de 2006 à 2011, particulièrement dans le secteur du conseil de gestion, du design et de l’informatique. Ainsi, 2,8 millions de personnes fin 2011 exercent une activité non salariée à titre principal ou en complément d’une activité salariée, ce qui représente environ 11,2 % de l’emploi total1.

En termes de flux, les entrées en non-salariat restent pourtant assez minoritaires (voir tableau 1). L’accès au statut d’indépendant, s’il est en hausse sur la période post-crise 2008-2013, demeure surtout le fait de chômeurs et de salariés en CDD, en lien avec l’instauration de dispositifs ciblés de soutien à la création d’entreprise. Du fait de formalités administratives simplifiées et de son régime fiscal attractif, l’auto-entrepreneuriat représente une part de plus en plus importante du non-salariat. Fin 2011, ce statut concerne plus d’un non-salarié sur cinq et tient souvent lieu d’un complément de revenu : c’est le cas pour trois auto-entrepreneurs sur dix contre un indépendant sur dix2. Le développement du travail indépendant reste en partie précaire et la continuité de l’ensemble de la protection sociale n’est pas garantie en cas de changement de statut.

Tableau 1. Taux de transition annuels entre formes d’emploi de 2003 à 2013 (en %)

Situation en n+1

* L’année 2013 marque une rupture de série, non corrigée ici, qui rend difficile les comparaisons avec les années précédentes.

Lecture : en moyenne annuelle, parmi les personnes non-salariées une année donnée sur la période 2003-2008, 1,0 % sont devenus salariés en CDI un an après. Elles sont 1,3 % sur la période 2008-2013.

Source : Insee, enquêtes Emploi 2003-2013, données du panel, calculs France Stratégie.

(1) Omalek L. et Rioux L. (2015), « Panorama de l’emploi et des revenus des non-salariés », in Emploi et revenus des indépendants, coll. Insee Références, février, p. 11-28.

(2) Ibid.

Malgré leur lente évolution, les statuts à la frontière du salariat et du travail indépendant redessinent notamment le lien de subordination dans le travail qui caractérise l’emploi salarié. Plusieurs formes d’emploi non standard coexistent (même s’ils ne s’accompagnent pas tous de précarité) : emplois externalisés auprès d’une entreprise sous-traitante ou d’un indépendant, portage salarial, coopératives d’activité et d’emploi, groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification, détachement de travailleurs ou encore travail en régie.

Le portage salarial1 concerne ainsi près de 42 000 personnes en 2012, soit cinq fois plus qu’en 20022. Dans le même temps, le nombre de salariés détachés a progressé de 7 000 en 2000 à un peu plus de 210 000 en 20133. Le développement de ces emplois aux statuts juridiques hybrides soulève l’enjeu d’une meilleure prise en compte des mobilités entre différents statuts d’emploi. Il pose par exemple un problème de lisibilité de calcul des droits en matière de retraite pour les actifs qui sont affiliés successivement à plusieurs régimes de retraite.

La multi-activité, nouvelle modalité du travail, se développe : selon Eurostat, en 2013, 3,4 % de la population active occupée en France exerce un deuxième emploi, contre 2,7 % en 20034. Le fait d’exercer le même métier chez plusieurs employeurs est très souvent réalisé dans le cadre d’un temps partiel et est plus fréquent dans les métiers de services aux particuliers, spécifiquement les aides à domicile, les employés de maison et les assistantes maternelles5. En revanche, les salariés qui exercent plusieurs métiers sont plus jeunes et plus diplômés. Cette nouvelle modalité du travail était particulièrement mal prise en compte par notre système de protection sociale.

C’est pourquoi, depuis le 1er octobre 2014, la durée d’indemnisation des salariés

« multi-employeurs » a été prolongée : lorsqu’un salarié perd successivement deux emplois, il se voit dorénavant verser une allocation chômage qui intègre, en plus des droits à indemnisation ouverts au titre du premier emploi perdu, ceux du deuxième.

(1) Selon l’article L.1254-1 du code du travail, le portage salarial désigne l’ensemble organisé constitué par : d’une part, la relation entre une entreprise dénommée « entreprise de portage salarial » effectuant une prestation au profit d’une entreprise cliente, qui donne lieu à la conclusion d’un contrat commercial de prestation de portage salarial ; d’autre part, le contrat de travail conclu entre l’entreprise de portage salarial et un salarié désigné comme étant le « salarié porté », lequel est rémunéré par cette entreprise.

(2) Everaere C. (2014), Les emplois atypiques. Quelles réponses au besoin de flexicurité ?, Wolters Kluwer, Éditions Liaisons sociales.

(3) Direction générale du travail (2014), « Analyse des déclarations de détachement des entreprises prestataires de services en France en 2013 », Rapport de la DGT, novembre.

(4) http://ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php/File:Persons_working_part-time_or_with_a_second_job,_2003-13_%28%25_of_total_employment%29_YB14-fr.png.

(5) Beffy M. (2006), « En 2005, plus d’un million de salariés ont plusieurs employeurs », Insee Première, n° 1081, mai 2006.

En revanche, les travailleurs indépendants, ne cotisant pas à l’assurance chômage, n’ont pas de prestation spécifique lorsqu’ils cessent leur activité, sauf à souscrire volontairement un contrat d’assurance perte d’emploi. C’est le cas des auto-entrepreneurs, qu’ils soient multi-actifs ou non. Ces évolutions de l’emploi, amplifiées par les opportunités offertes par la révolution numérique1, bousculent l’organisation de la protection sociale et posent la question de l’adaptation des normes en matière de droit social et de droit du travail pour garantir la protection des travailleurs. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) ont de nombreuses répercussions sur le marché du travail. Parce qu’elles entraînent une disparition de l’unité de temps et de lieu qui caractérise le salariat, elles bouleversent l’organisation du travail et modifient la nature même du lien de subordination. De plus, elles peuvent conduire, comme on l’observe aux États-Unis, à une polarisation de l’emploi2, au détriment des qualifications intermédiaires. Cette réflexion dépasse le seul cadre institutionnel français comme en témoignent les récentes décisions de la justice américaine3.

2. Sécuriser les parcours professionnels, une idée déjà

Dans le document 7 rapport France Stratégie 2015 (Page 35-38)