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1.2 L’´ecoute flottante

1.2.3 Les mod`eles d’´ecoute flottante

Une premi`ere id´ee des communications multi-parties est de les d´efinir comme des communica- tions directes, auxquelles est ajout´ee l’´ecoute flottante, c’est `a dire la possibilit´e qu’ont les agents de recevoir une partie des messages qui ne leur sont pas adress´es par l’´emetteur. Nous ´etudions dans cette section les mod`eles prenant en compte les effets indirects des communications.

Un premier concept proche des communications multi-parties est la notion de Behavorial Implicit Communication (BIC) [Tummolini et al., 2004]. Dans le cadre de syst`emes coop´eratifs de r´ealisation de tˆaches, les BICs sont l’ensemble des interactions observables de fa¸con non explicite, i.e. l’information v´ehicul´ee par les actions ou les communications des autres agents. Ces informations sont transmises grˆace `a l’environnement. Nous retrouvons ici l’objectif de tirer parti d’informations traditionnellement indisponibles. Trois propri´et´es sont n´ecessaires pour la mise en oeuvre des BICs : l’observabilit´e des actions et de leur r´esultat, la capacit´e des agents `a en d´eduire une information correcte (et ´eventuellement une action), et enfin la capacit´e des agents `a agir en pr´evoyant les effets que cette observation va provoquer. Le cadre propos´e n´ecessite des agents tr`es coop´eratifs (permettant notamment l’acc`es `a leur ´etat intentionnel), et prend en compte toutes les possibilit´es d’actions, d’interactions et de connaissances, lesquelles sont difficilement mod´elisables a priori dans un syst`eme h´et´erog`ene et ouvert.

[Gutnik et Kaminka, 2005] ont propos´e une mod´elisation des dialogues par des r´eseaux de Petri. Ces travaux sont orient´es sur la fonction de surveillance par ´ecoute flottante, l’objectif ´etant de d´eduire a posteriori les protocoles effectu´es `a partir de messages capt´es. Ces travaux ont ´et´e appliqu´es sur des protocoles standards de la FIPA [FIPA, 2002a]. Cependant, l’´ecoute flottante elle-mˆeme n’est pas mod´elis´ee. Comme pour STEAM, l’utilisation de l’´ecoute flottante n’est pas int´egr´ee au fonctionnement du syst`eme multi-agents observ´e.

A notre connaissance, le mod`ele de Platon [Platon et al., 2004] est le plus g´en´erique, consid´e- rant l’´ecoute flottante ind´ependamment du domaine d’application et des b´en´efices que l’on sou- haite tirer de son utilisation. L’introduction du T-compound comme patron de conception (de- sign pattern) permet une repr´esentation graphique de l’´ecoute flottante pour la mod´elisation des interactions, en s’appuyant sur les travaux existants dans le domaine objet.

Par ailleurs, dans [Platon et al., 2005] est mise en avant la n´ecessit´e d’impl´ementer l’´ecoute flottante sans passer par l’´emetteur, mais par l’environnement. Ce travail est approfondi dans [Platon et al., 2006], de fa¸con `a permettre un niveau sup´erieur d’interaction, les tag interactions, dont le principe est illustr´e dans les figures 1.5 et 1.6.

Ce mod`ele s’appuie sur la notion de s´eparation du corps et de l’esprit des agents. Les deux entit´es sont s´epar´ees, l’esprit ´etant l’entit´e classiquement consid´er´ee comme l’agent, auquel est ajout´e un corps virtuel qu’il ne contrˆole que partiellement. Ce corps poss`ede des ´etiquettes (tags), qui sont observable par les autres agents. L’environnement est en charge du corps, il valide ou non les influences de l’esprit. L’id´ee fondamentale est ici de permettre un contrˆole des actions des agents, y compris au niveau de leur partie publique, c’est `a dire ce qu’ils pr´esentent `a l’observation.

Figure 1.5 – Rˆole de l’environnement dans les tag interactions

La figure 1.5 illustre ce principe. Les deux sch´emas de gauche montrent un agent tentant de changer la couleur de son ´etiquette vers la couleur noire. Cette modification est valid´ee par l’environnement, grˆace `a un ensemble de r`egles qu’il poss`ede. Ces r`egles entraˆınent le passage de la couleur de l’´etiquette `a noir, le signalement de l’action `a l’esprit et l’annonce de cette modification aux alentours. Les deux sch´emas de droite montrent, pour la mˆeme action, une r´eaction de l’environnement diff´erente : cette fois-ci, l’environnement refuse de modifier la couleur de l’´etiquette, auquel cas il ne se passe rien au niveau du corps, et l’agent est inform´e de l’´echec de sa tentative.

Figure 1.6 – Observation et perception spontan´ee dans les tag interactions

La seconde figure (Fig. 1.6) montre quant `a elle la fa¸con dont sont diffus´ees les informations observables. Le sch´ema de gauche montre une observation classique, l’agent observant tente d’observer par le biais de ses effecteurs l’´etat du second agent, et l’environnement fournit en retour cette observation au capteur de l’agent observant. Le sch´ema de droite montre une pro- pagation de l’´etat de l’agent observ´e sans qu’il y ait requˆete de la part de l’autre agent. C’est notamment le cas lors d’un changement d’´etat d’une ´etiquette, mais cela peut aussi ˆetre dˆu `a une r`egle propageant les ´etats d`es que deux agents sont suffisamment proches l’un de l’autre : ce sont des r`egles de l’environnement qui d´eterminent si les ´etiquettes sont diffus´ees ou non. Il s’agit de mettre en oeuvre une conscience des autres, comme lorsqu’une personne se rend compte soudainement que quelqu’un d’autre est entr´e dans la mˆeme pi`ece. Nous reviendrons sur ce concept particulier en section 1.4.

1.2. L’´ecoute flottante l’information de fa¸con ´eventuellement involontaire. Ces travaux montrent l’utilit´e de l’observabi- lit´e des agents, mˆeme lorsque ceux-ci sont purement logiciels. Cependant, ce mod`ele fait reposer toute propagation sur les r`egles de l’environnement, du fait de la s´eparation nette entre l’agent et l’environnement. Ainsi, une premi`ere limite du mod`ele est que l’agent ne peut exprimer ses besoins que de mani`ere ponctuelle, par ses effecteurs, et non en continu. De plus, la forme des r`egles de propagation (quels sont les pr´edicats accessibles, quelle formalisation des r`egles ?) n’est pas explicit´ee.

MIC* [Goua¨ıch et al., 2005] est un environnement de d´eploiement formel fortement orient´e vers l’informatique diffuse. Il s’agit d’un mod`ele ind´ependant `a la fois des mod`eles d’agents et d’interaction, et de l’impl´ementation. De la mˆeme fa¸con que pr´ec´edemment, la diffusion et la propagation des objets d’interaction sont g´er´ees par l’environnement. Une fois le message produit, il n’est plus sous la responsabilit´e de l’agent l’ayant ´emis, et le calcul des autres agents devant percevoir ce message est effectu´e par l’infrastructure. La contrainte forte de l’informatique diffuse est la connectivit´e intermittente de ses ´el´ements, MIC* est donc pr´evu pour fusionner `a la vol´ee les donn´ees ´emises par chaque agent. Les capteurs et les effecteurs sont repr´esent´es formellement de la mˆeme fa¸con que les messages, leur r´eification permettant `a l’alg`ebre propos´e de g´erer de fa¸con standardis´ee l’ensemble des concepts li´es `a l’interaction. A l’inverse des tag interactions, l’ensemble des perceptions d’un agent d´epend de la corr´elation entre ses capteurs et les effecteurs des agents ´emetteurs, l’environnement ne jouant qu’un rˆole de calcul. Ce choix a deux cons´equences : les r`egles de diffusion des messages dans l’environnement ne sont pas mod´elis´ees, et l’´emetteur n’est pas assur´e que ses messages sont transmis, puisque le r´ecepteur contrˆole enti`erement ses capteurs.

La difficult´e inh´erente au support effectif des nouvelles formes d’interaction comme l’´ecoute flottante a conduit un certain nombre de travaux `a ignorer cette probl´ematique, ou `a la poser comme hypoth`ese.

Par exemple, dans [Kamali et al., 2006], les auteurs proposent une nouvelle s´emantique pour certains actes de dialogue dans le contexte de communications de groupe, c’est `a dire les communications ´elargies du simple ´emetteur/destinataire `a un ensemble d’auditeurs. Dans ce travail, les auteurs observent que modifier la s´emantique des actes de langage en consid´erant les communications entre plusieurs agents en tant qu’unit´e, et non comme une multiplicit´e de communications un-`a-un, permet d’am´eliorer les capacit´es d’inf´erence des agents. Par contre, la fa¸con de mettre en oeuvre les hypoth`eses fortes que cette s´emantique pr´esuppose, comme la connaissance de l’´emetteur et de tous les destinataires par tous les participants, n’est pas discut´ee.

Dans [Gutnik, 2005], les auteurs proposent des strat´egies d’´ecoute flottante pour de grands groupes d’agents r´ealis´ees sur des simulations, mais n’abordent pas non plus la question du support dans le cadre de syst`emes multi-agents r´eels. D’un autre cˆot´e, des travaux comme ceux de Huget [Huget et Demazeau, 2004] pr´esentent les communications multi-parties tout en fondant leur support sur trois m´ecanismes classiques distincts, la diffusion dans un environnement spatial, les forums et les communications directes. La notion de communication unique et les avantages

qui en d´ecoulent sont alors perdus.