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CHAPITRE 1 : Etat de l’art - Chaîne de traction des Tramways actuels

V. Le module de puissance du Tramway

V.4 Les limites de l’IGBT et de la diode Silicium

La technologie à base d’IGBT et de diodes Silicium présente de nombreux avantages qui justifient son utilisation pour l’ensemble des chaînes de traction ferroviaire. Malgré tout, la structure de l’IGBT comporte des limites intrinsèques, comme par exemple la queue de courant, le déclenchement du thyristor parasite ou « latch-up » et la limite en température de jonction.

V.4.1 La queue de courant d’un IGBT :

Lors de l’analyse du blocage du composant nous avons expliqué l’origine de la queue de courant (voir la partie V.3.2 et Figure 19). Ce phénomène de traînage du courant à l’ouverture est l’inconvénient de l’utilisation de porteurs minoritaires. Cette queue de courant amène à faire un compromis lors du choix d’un IGBT entre les pertes en conduction lié à la chute de tension à l’état passant et la rapidité au blocage. En effet, la queue de courant conduit à des pertes en commutation supplémentaires lors du blocage de l’IGBT. Cette augmentation des pertes en commutation peut se traduire par différentes conséquences sur le fonctionnement du convertisseur. Une des conséquences peut être une limitation de la fréquence de découpage.

V.4.2 Le déclenchement du thyristor parasite : verrouillage ou « latch-up » :

Comme nous avons pu le voir lorsque nous avons présenté la structure de l’IGBT, nous retrouvons dans celui-ci deux transistors bipolaires NPN et PNP imbriqués (voir Figure 3). Ces deux transistors bipolaires peuvent sous certaines conditions former un thyristor parasite et lorsque celui-ci est mis en conduction, nous avons le « latch-up » de l’IGBT. Il s’agit d’une perte du contrôle de l’IGBT par déclenchement du thyristor parasite qui oblige à annuler le courant anode-cathode pour bloquer le composant. Le déclenchement du thyristor parasite constitue donc un problème intrinsèque à la technologie IGBT.

Le schéma électrique équivalent présenté à la Figure 22 permet de mettre en évidence de façon simple la condition de déclenchement du « latch-up ».

Figure 22 - Schéma électrique équivalent élémentaire de la structure « latch-up » de l’IGBT [19]. Le processus de déclenchement est lié, d’une part à la concentration moyenne du caisson P qui fixe la valeur de la résistance latérale (Rp), et d’autre part à la composante de courant de trous se déplaçant latéralement dans cette zone de diffusion P. Il en résulte une chute de tension latérale qui peut, sous certaines conditions, provoquer la mise en conduction du transistor NPN et donc alimenter la base du transistor PNP, ce qui rend le thyristor parasite passant. Si le phénomène dure, l’IGBT sera détruit par dissipation excessive de puissance (destruction par dépassement des limites thermiques). Il existe donc un courant critique à ne pas dépasser pour s’éviter le « latch-up ». Cela se concrétise sur les documents constructeurs de l’IGBT par un courant maximal ICM, pour une tension VGE donnée, pour laquelle le fonctionnement du composant est garanti sans risque de « latch-up ».

Nous pouvons noter deux types de « latch-up » : le « latch-up » statique en conduction et le « latch-up » dynamique lors de l’ouverture de l’IGBT. A l’état passant, il correspond à une augmentation anormale du courant dans l’IGBT qui dépasse une valeur critique. Lors de l’ouverture de l’IGBT, il correspond à un courant et une tension aux bornes de l’IGBT importantes. En fait, lors d’une fermeture rapide de la section MOS, le courant de trous peut être trop important et être suffisamment grand pour polariser en direct la jonction émetteur N+ / caisson P. Dans ce cas, la solution peut être de limiter les vitesses des commutations par augmentation de la résistance de grille.

Les paramètres qui influencent le niveau de déclenchement de cet effet « latch-up » sont : la valeur du dopage du caisson P, le nombre de cellules élémentaires mises en parallèle et la température. Néanmoins, des améliorations constantes ont permis de repousser les limites de déclenchement de ce thyristor parasite.

Aujourd’hui, le « latch-up » statique est complètement éliminé dans les IGBT modernes. Il reste le « latch-up » dynamique dans certaines conditions. Il n’y a plus de risques de déclenchement de ce thyristor parasite jusqu’au courant de court-circuit, seulement certains points en régime dit « sévère » peuvent causer des « latch-up » localisés sur certaines cellules de la puce.

V.4.3 Les limites en température

Une des causes principales de destruction des packs IGBT est thermique par le dépassement des températures de jonction. Cela peut aboutir à la destruction des puces IGBT et des diodes. Les origines de ces emballements thermiques sont par exemple le délaminage des brasures du module de puissance qui provoque l’augmentation de la résistance thermique entre la jonction et la semelle et entraîne une mauvaise évacuation de la chaleur entre les puces et le refroidisseur. Ce délaminage des brasures peut être accéléré par un fort cyclage en température du composant (lié au système global). Nous pouvons aussi citer la dégradation des fils de bondings qui peut se traduire par une augmentation de la chute de tension directe entre collecteur-émetteur Vce.

D’autres phénomènes peuvent causer des destructions thermiques comme un problème d’avalanche due à un dépassement en tension lors du blocage de l’IGBT (inductance de la boucle de commutation), ou encore un court-circuit qui ne serait pas coupé rapidement.

V.4.4 Les aires de sécurité

L’aire de sécurité ou SOA (Safe Operating Aera) correspond à une zone de fonctionnement du composant dans le plan tension-courant dans laquelle le constructeur garantie le bon fonctionnement. Les aires de sécurité couramment employées sont les suivantes :

- L’aire de sécurité en commutation à l’ouverture du composant sur charge inductive de l’IGBT notée RBSOA (Reverse Biased SOA) ou aire de sécurité en polarisation inverse. La RBSOA est garantie par le fournisseur avec un essai au point maximum sur 100% des composants. Les conditions de validité de cette aire étant : la température de jonction Tj, la dynamique en tension, la tension du bus DC et l’inductance de la boucle de commutation. Suivant le fournisseur de composants l’aire de sécurité RBSOA peut être définie de différentes manières. La méthode la plus couramment employée est celle du fournisseur MITSUBISHI. Il s’agit d’un plan tension-courant en instantané. La Figure 23 donne un exemple du positionnement des commutations dans la RBSOA du pack IGBT MITSUBISHI 1700V 2x800A (CM800DZ-34H-205) lorsque celui-ci est monté sur le module de puissance ONIX850DLP3. Il s’agit ici des formes d’ondes pour les points de fonctionnement maximum du module, pour une tension de 1100V et un courant allant jusqu’à 1000A. Cet essai est généralement reproduit pour différentes températures mais est illustré ici uniquement pour la température ambiante (T=25°C). Comme nous pouvons le voir les parcours Ice=f(Vce) ne sortent pas de l’aire de sécurité fixé pour ce pack IGBT. Pour information, les dVce/dt max. relevés sont de l’ordre de 3kV/µs et les dIce/dt max. relevés sont de l’ordre de 2,5kV/µs. Sur cette figure, nous pouvons remarquer que le point de fonctionnement maximal est proche de la limite fixée par le constructeur. Ceci constitue une particularité propre aux applications ferroviaires. Le pouvoir de coupure demandé au composant est très élevé.

Figure 23 - Aire de sécurité RBSOA pour le pack IGBT MITSUBISHI 1700V 2x800A (CM800DZ-34H-205) lorsque celui-ci est monté sur le module de puissance ONIX850DLP3 [20].

- L’aire de sécurité au blocage de la diode ou RRSOA (Reverse Recovery SOA). Durant le blocage de la diode, le courant de recouvrement en inverse et la surtension de blocage ne doivent pas dépasser une limite fixée par une puissance instantanée. Les facteurs influents étant la résistance de grille (fixant la vitesse de commutation), le condensateur grille-émetteur (Cge) de l’IGBT, ou encore l’inductance de boucle. La Figure 24 donne un exemple du positionnement des commutations dans la RRSOA du pack IGBT MITSUBISHI 1700V 2x800A (CM800DZ-34H-205) lorsque celui-ci est monté sur le module de puissance ONIX850DLP3. Il s’agit ici des formes d’ondes pour les points de fonctionnement maximum du module, pour une tension de 1100V et un courant allant jusqu’à environ 1000A. Cet essai est généralement reproduit pour différentes températures mais est illustré ici uniquement pour la température ambiante (T=25°C). Comme nous pouvons le voir les parcours Irr=f(Vka) ne sortent pas de l’aire de sécurité fixée pour ces diodes. Pour information, les dVka/dt max. relevés sont de l’ordre de 9kV/µs et les dIka/dt max.

relevés sont de l’ordre de 1,5kA/µs. D’autre part, comme nous pouvons le voir sur ces relevés cette diode présente un effet « snap off » qui est plus marqué à forte tension et faible courant, mais cet effet n’a pas d’incidence sur le respect de l’aire de sécurité.

Figure 24 - Aire de sécurité RRSOA pour le pack IGBT MITSUBISHI 1700V 2x800A (CM800DZ-34H-205) lorsque celui-ci est monté sur le module de puissance ONIX850DLP3 [21]. Il existe aussi d’autres aires de sécurité, moins utilisées dans le ferroviaire, qui sont :

- L’aire de sécurité de court-circuit SCSOA (Short Circuit SOA). Lors d’un court-circuit de bras, le courant ICE augmente mais est limité par la tension de grille VGE et la valeur de la transconductance, ainsi que par le circuit extérieur. L’IGBT risque alors de se verrouiller (« latch-up » traité dans la partie V.4.2). Certains constructeurs diminuent parfois la transconductance ou le VCEsat afin de minimiser ce risque.

- L’aire de sécurité en mode linéaire, noté FBSOA (Forward Biased SOA). La FBSOA est une caractéristique liée à la fermeture du composant. Cette aire de sécurité est très peu utilisée. Elle n’a de l’intérêt que pour l’étude et la mise en œuvre de circuits de protections du composant contre les courts-circuits.

V.5 Conclusions sur les limites d’utilisation de l’IGBT et de la diode