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En revanche, un point qui fait consensus entre les auteurs sont les difficultés relatives à la modélisation des RUTP (e.g. Ahyerre et al. 1998; Kanso et al. 2003; Bertrand-Krajewski 2007a; Obropta et Kardos 2007) avec en particulier les difficultés d’utilisation dans un contexte opérationnel. Les trois principales difficultés identifiées par les auteurs sont présentées dans les paragraphes suivants.

1.3.1 La complexité des processus et le manque de connaissances

Kanso (2004, chapitre 1) rappelle la difficulté de décrire de manière mécaniste les processus de génération des flux polluants par temps de pluie sur la surface d’un bassin versant et dans le réseau d’assainissement. De l’amont vers l’aval, les difficultés spécifiques aux différents processus identifiés sont les suivantes :

- Les apports de l’atmosphère par temps de pluie. Les études sur le sujet sont pour l’instant limitées et les données encore rares. Becouze (2010) propose une synthèse bibliographique approfondie sur cet aspect.

- L’accumulation des polluants sur la surface du bassin versant, l’érosion et l’entrainement des polluants par temps de pluie vers le réseau. Une des principales

difficultés de représentation de ces processus est la variabilité spatio -temporelle des phénomènes, liée notamment à la complexité des surfaces urbaines. L’extrapolation à l’échelle du bassin versant des résultats observés à des échelles réduites n’est pas évidente (Kanso 2004), étant donnée la diversité des mécanismes qui influencent la quantité de sédiments présents sur les surfaces du bassin versant (e.g. l’érosion par le vent ou le nettoyage des voiries (Kanso 2004).

- Les processus de transport solide en réseau avec les phénomènes de déposition/resuspension des particules et le charriage des sédiments (Kanso 2004). L’hétérogénéité et la nature organique des particules ainsi que la variabilité de leurs caractéristiques au cours du temps (Chebbo et Gromaire 2004) rendent difficile la compréhension des dynamiques de transport des polluants. La validité des modèles de transport solide, pour la plupart transposés des modèles d’hydrodynamique fluviale, reste critiquable du fait de : i) l’hétérogénéité des solides, ii) des régimes transitoires et de la discontinuité des processus dans le temps et l’espace et iii) des apports des flux polluants de type domestique dans le cas des réseaux unitaires. Les modèles de sédimentation et de remise en suspension des dépôts, proposés sur la base d’expérimentations en laboratoire sont difficiles à extrapoler à l’échelle du bassin versant et à valider in situ dans des conditions réelles. De plus les observations entre les différents sites sont variables et le nombre de données limité.

- Les processus biochimiques dans les canalisations, dont certains polluants sont l’objet. Leur représentation reste un des points faibles de la modélisation de la qualité. Si des progrès dans la compréhension des processus et leur intégration dans les modèles ont été récemment obtenus (Yongsiri et al. 2003; Vollertsen et al. 2008; Sharma et al. 2008), la limitation du nombre de données et la complexité des modèles restent un frein pour la proposition de modèles opérationnels.

Le manque de connaissances actuel sur les phénomènes de production des flux polluants se répercute directement sur les structures des modèles, qui sont entachées d’approximations et d’incertitudes nombreuses. Avec l’acquisition de davantage de données dans des contextes variés, la complexité et la variabilité des processus apparaissent encore plus évidentes. Les observations montrent une forte variabilité spatiale entre les sites instrumentés. Cependant de récents travaux effectués dans le cadre d’OPUR (Observatoire des Polluants Urbains, à Paris) sur plusieurs bassins versants parisiens sont encourageants. Gasperi et al. (2008) suggèrent une homogénéité des processus pour des sites d’occupation des sols et de caractéristiques de réseau comparables.

1.3.2 Le manque de données en qualité et en quantité

Bertrand-Krajewski (2007) rappelle que les modèles ne sont pas encore suffisamment explicatifs mais reproduisent seulement les observations disponibles pour leur construction et/ou leur calage. Le manque de données en qualité et en quantité dans la plu part des études constitue aujourd’hui une raison majeure de la discutabilité des modèles.

La quantité de données requise est d’autant plus indispensable que les modèles sont complexes. Un nombre important de paramètres à caler requiert une base de données suffisante afin d’éviter les problèmes de surparamétrisation des modèles lors de la procédure de calage

(Beven 2009). Beven (2009, partie 1.1) souligne la difficulté de disposer de mesures à l’échelle de laquelle les prédictions veulent être faites.

1.3.3 La difficulté des procédures de calage et de calcul des

incertitudes

L’incertitude sur les structures des modèles et le manque de données rendent difficile la mise en œuvre des procédures de calage. Il n’est en général pas possible de trouver un jeu optimal de paramètres (Duan et al. 1992; Kuczera et Parent 1998), et les surfaces de réponse des modèles sont d’autant plus complexes que le nombre de paramètres est élevé. L’évaluation des incertitudes de prédiction des modèles est une étape incontournable pour une utilisation fiable des modèles. La mise en œuvre des outils statistiques pour l’évaluation des incertitudes devient d’autant plus que difficile que la complexité des modèles augmente (voir Partie 2).

1.3.4 Conclusion

Face à ces difficultés, les auteurs s’accordent donc à l’heure actuelle sur les trois points suivants :

- Il est nécessaire de continuer à acquérir davantage de données afin de mieux comprendre les facteurs régissant les processus de production des polluants par temps de pluie.

- Il n’y a pas un bon modèle, mais le choix du modèle et de son niveau de complexité doit prendre en compte les besoins et objectifs de l’étude ainsi que la quantité de données disponibles. Ainsi le modèle le plus simple qui permet de répondre aux objectifs de l’étude est-il préconisé (Harremoës et Madsen 1999; Rauch et al. 2002; Doherty et Johnston 2003). Cette approche est d’autant plus pertinente dans les cas où les modèles de qualité des RUTP sont intégrés comme sous-modèles dans un modèle plus large du système d’assainissement (Rauch et al. 2002; Obropta et Kardos 2007; Freni et al. 2010a; Willems 2010).

- Il est nécessaire d’évaluer les incertitudes lors du calage des modèles, afin de garantir une utilisation ultérieure assortie de l’évaluation de son niveau d’incertitude en prédiction. Ceci nécessite l’application d’outils et de méthodes appropriés (voir partie 2).