• Aucun résultat trouvé

Les différents niveaux de génération de significations

5.3. Les formes du mélange culturel dans les publicités

5.3.2. Les différents niveaux de génération de significations

Notre quatrième chapitre a présenté certaines caractéristiques des 75 publicités de notre corpus ne pouvant être classées sur l’axe d’hybridation inspiré des écrits de Burke (2009). De ces publicités, 71 publicités présentaient d’autres formes de mélanges culturels. En effet, les descriptions des trois niveaux d’hybridation culturelle ne nous permettaient pas de les inclure. Ceci nous amène à nous questionner sur le meilleur outil théorique pour décrire les disparités entre les formes de mélanges culturels des différents axes analysés dans notre recherche : les valeurs, les langues étrangères et les imageries culturelles. Ainsi, comme vu dans notre cadre méthodologique, il y a plusieurs manières de faire sens. Nous proposons d’explorer le modèle des niveaux de génération de signification (Semprini, 1995) pour explorer des avenues expliquant pourquoi le mélange culturel se présente de diverses manières dans les trois composantes.

En effet, notre analyse des valeurs était basée sur les messages textuels et visuels de nos publicités. La prise en compte des diverses formes observables nous a permis de dégager une ou plusieurs traces de valeurs appartenant au registre culturel japonais ou global. La présentation de nos résultats au Chapitre 4 a permis de voir la grande propension de valeurs globales dans notre corpus. En parallèle, notre analyse de l’imagerie culturelle révélait que les traces d’imagerie japonaise étaient nettement supérieures aux traces d’imagerie globale. Ce paradoxe nous apparaît intéressant

puisqu’il semble être une des indications marquant la diversité de formes de mélange culturel dans notre corpus. En d’autres termes, nos résultats nous permettent d’avancer que le mélange culturel dans les valeurs est différent du mélange culturel dans la langue, et les deux sont à leur tour différents des formes de mélange culturel remarquées dans l’axe d’imagerie culturelle de notre corpus. Les valeurs, les langues étrangères et l’imagerie réfèrent à un niveau de signification du discours publicitaire différent, ce que permet de mieux illustrer le modèle des niveaux de signification de Semprini (1995).

Les valeurs japonaises et les valeurs globales recensées dans notre analyse permettaient de proposer au lectorat des styles de vie désirables. Les valeurs japonaises (le consensus de groupe, l’importance accordée à la hiérarchie sociale, la famille, le statut social et l’harmonie avec la nature) se présentent normalement comme des valeurs reconnaissables et rassurantes pour le consommateur (Mueller, 1987). En parallèle, les valeurs globales (individualisme/indépendance, modernité/jeunesse, manipulation de la nature, matérialisme et plaisir) ont un caractère normalement moins familier pour le consommateur japonais (Mueller, 1987). La présence de ces deux registres de valeurs dans notre corpus nous a amenées à nous interroger sur l’évolution des valeurs. Comme mentionné précédemment, les changements sociaux, entre autres liés à la mondialisation, ont encouragé l’intégration de certaines valeurs globales dans les mœurs japonaises. Cela ne veut pas dire que les valeurs japonaises aient disparu de la société. Au contraire, elles font partie d’un niveau profond du discours publicitaire (Semprini, 1995). Ce niveau profond présente un ensemble d’images et d’expressions qui manifestent les mœurs sociales (Semprini, 1995). Ainsi, le niveau du discours publicitaire incarnant des valeurs n’est pas le même que celui des langues étrangères et des imageries culturelles.

122

Notre analyse a permis d’avancer que les langues étrangères dans notre corpus servaient une fonction de transmission d’information et de complément d’information. En ce sens, l’utilisation du katakana et de l’alphabet latin non traduit dans les publicités du corpus nous permet d’avancer que les langues étrangères servent une fonction pratique et stratégique. D’une part, la fonctionnalité des langues étrangères est pratique, car l’utilisation du katakana est un des indicateurs de l’intégration des langues étrangères au lexique japonais (Loveday, 2008). D’autre part, elles servent une fonction stratégique, car l’utilisation de l’alphabet latin présente généralement un lien narratif fort avec nos publicités et que les langues étrangères permettent aussi d’attirer l’attention (Yabuki-Soh, 2017). L’utilisation des langues étrangères relève donc du niveau narratif et superficiel du discours publicitaire. En ce sens, les langues étrangères donnent vie aux valeurs par l’entremise d’une histoire ou d’un récit et concourent à la mise en scène des images (Semprini, 1995).

Bien que les valeurs globales soient prépondérantes dans notre corpus, le Tableau 5.1 montre que l’imagerie culturelle associée au Japon est plus présente que l’imagerie globale. En effet, 91 publicités présentent des traces de l’imagerie culturelle japonaise. De ces 91 publicités, 70 d’entre elles proposent uniquement des formes observables en lien avec l’imagerie culturelle japonaise et 21 publicités proposent un mélange culturel entre les deux registres à l’étude. Par conséquent, notre corpus présente une majorité de personnages, d’éléments de décor, de récits et d’objets japonais, car elles incarnent un contexte culturel et social qui est reconnaissable pour le public (Cornu, 1990). Les images font partie du niveau de surface du discours publicitaire (Semprini, 1995). Elles sont d’ordre plus superficiel que les valeurs (niveau profond). La mise en scène des différentes traces du registre culturel japonais permet de schématiser l’histoire et les valeurs présentent dans les publicités (Semprini, 1995).

Ainsi, les différents niveaux (profond, narratif et surface) peuvent générer différentes significations pour le consommateur (Semprini, 1995). Ce que confirment nos résultats qui présentent une différente forme de mélange culturel en fonction des trois paliers. La combinaison des différentes significations permet de saisir le message d’une publicité (Semprini, 1995). La variation dans les résultats de notre analyse comme présentée dans le Tableau 5.1. Synthèse des résultats, pourrait donc provenir d’une disparité dans les traces du mélange culturel dans chaque palier. Dès lors, en analysant nos publicités non seulement sur un axe d’hybridité culturelle, mais aussi comme une expression tripartie de génération de significations nous arrivons à saisir les subtilités dans l’expression du mélange culturel relevé dans notre analyse.

Cette discussion nous a permis de mettre en perspective et en contexte les résultats de notre analyse. Nous avons remarqué la disparité dans notre axe d’hybridation culturelle, et nous l’avons questionné. Ceci nous a amenés à théoriser sur l’origine de la disparité dans nos résultats. Nous avons proposé qu’elle soit liée aux différents niveaux de générations de significations (Semprini, 1995), mais aussi au contexte de mondialisation.

CONCLUSION

Cette recherche nous a permis de nous interroger sur l’hybridité culturelle au Japon et, plus précisément, l’interaction des traces de la culture japonaise et de la culture globale dans un contexte de mondialisation. Nous avons recensé les différentes traces en lien avec la culture japonaise et la culture globale sous trois axes : les valeurs, les langues étrangères et l’imagerie culturelle. En effectuant cette analyse, nous avons remarqué une disparité dans la manière dont les traces culturelles étaient proposées dans chaque dimension. Nous l’avons d’ailleurs confirmé en plaçant une partie des publicités présentant des formes de mélange culturel sur un axe d’hybridation culturelle composé de trois catégories : imitation et emprunt, négociation et appropriation et, finalement, hybridité culturelle et glocalisation.

Notre mémoire nous a permis d’aller au-delà de notre analyse pour approfondir notre compréhension du mélange culturel dans notre corpus, en nous interrogeant sur l’impact de la mondialisation dans l’interaction des cultures globales et japonaises. Nous avons présenté des réflexions pertinentes à la compréhension de la disparité dans nos résultats qui, nous l’espérons, contribueront à faire avancer la question de l’hybridité culturelle dans le discours publicitaire japonais. De plus, nous croyons que notre mémoire contribue à la littérature sur les publicités dans les publications gratuites.

Cette recherche nous a donc permis d’explorer plusieurs facettes du mélange culturel dans la publicité japonaise à l’ère de la mondialisation. Cela dit, nous avons aussi dû

composer avec plusieurs limites pour terminer notre travail. Ceci nous amène à proposer aussi des pistes de réflexion pour des recherches futures.