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C) U N SPECTROMETRE RQN PAR IMPULSIONS

1) Les différents éléments constituant le spectromètre RQN

Le spectromètre de Résonance Quadrupolaire Nucléaire [17] comme nous le montre le schéma de principe de la figure II.9 est un appareillage que l’on peut assimiler à une console RMN simplifiée. Notre prototype a été construit à partir d’éléments et composants fiables, totalement maîtrisés et contrôlés par les logiciels décrits au chapitre III.

Figure II.9 : Schéma de principe d’un spectromètre de Résonance Quadrupolaire Nucléaire

L’unité nommée « Pulser » génère tous les signaux requis par l’expérience de Résonance Quadrupolaire Nucléaire. Le synthétiseur de fréquences est basé sur la technologie DDS (Direct Digital Synthesis) et fournit grâce à ses deux canaux indépendants, des sinusoïdes déphasées de 90 °. S est un « switch » qui produit une impulsion radiofréquence dirigée ensuite vers l’amplificateur de puissance noté A. Le circuit de diodes tête-bêche et le circuit D

isolent respectivement l’émission et la réception au cours de l’expérience (les diodes isolent l’émission lors de la réception et D fait l’inverse). PA est un préamplificateur, M1 et M2 sont des « mixers » qui convertissent le signal RQN haute fréquence en deux signaux de basse fréquence (détection en quadrature). Les circuits R sont des circuits de réception basse- fréquence qui sont constitués de filtres passe-bas analogiques et d’amplificateurs. A la sortie de ces circuits, le signal est envoyé vers l’entrée du module d’acquisition puis affiché en temps réel sur l’écran de l’ordinateur-maître.

Nous allons maintenant procéder à la description physique des différents modules de la figure II.9, l’aspect logiciel étant couvert essentiellement par le chapitre 3.

a) Le synthétiseur de fréquences

Ce module est basé sur la technique de la Synthèse Numérique Directe ou DDS (Direct Digital Synthesis). De par sa nature (numérique), un synthétiseur DDS est très performant pour modifier rapidement la fréquence, la phase et l’amplitude de son signal de sortie. La DDS est une méthode permettant la création numérique de signaux sinusoïdaux à partir d’une horloge qui sert de référence au synthétiseur et qui est utilisée dans l’architecture de la DDS pour calculer les mots numériques à placer dans les blocs de données afin de générer le signal désiré. Dans notre cas, le mot numérique a une taille de 32 bits.

Dans sa représentation la plus simple (figure II.10), un générateur DDS comporte une horloge de référence, un compteur d’adresses, une mémoire de type PROM (Programmable Read Only Memory) et un convertisseur numérique analogique. L’algorithme de conversion de la figure II.10 fait nécessairement appel à un microprocesseur. C’est un accroissement de la rapidité des différents circuits, qui a permis, il y a quelques années, l’apparition de ces

nouvelles techniques de synthèse de fréquence. Actuellement, les fréquences maximales que l’on peut atteindre sont de l’ordre d’une centaine de MHz (360 MHz dans notre cas).

Figure II.10 : Schéma de principe d’un synthétiseur de fréquence basé sur la technique DDS

Dans notre cas, nous utilisons une carte d’évaluation de type AD 9954 (figure II.11) (Analog Devices, Norwood, USA) comprenant deux synthétiseurs DDS indépendants ; nous permettant ainsi de disposer de deux canaux indépendants mais déphasés de 90 ° (nécessaires à la détection en quadrature). Les spécifications de ce composant sont les suivantes :

Horloge interne de 400 MSPS Phases et amplitude programmables

Gamme de fréquence : 1 kHz -- 400 MHz (résolution 0.1 Hz) Résolution pour la programmation des phases : 0.02 °

Mot numérique de 32 bits pour la programmation de la fréquence Mot numérique de 14 bits pour la programmation de la phase Excellentes performances dynamiques

Quatre profils de programmation indépendants (dans notre cas : 0°, 90°, 180° et 270 °) Alimentation : 1.8 V

Figure II.11 : Diagramme des constituants du composant électronique AD 9954

Les avantages de l’utilisation d’un tel synthétiseur sont nombreux : tout d’abord, toute la génération est entièrement numérique et donc peut être programmée et contrôlée par un ordinateur distant (la modification des différents paramètres étant quasi instantanée (moins de 2 secondes)). Ensuite, l’architecture numérique de la DDS élimine les erreurs de réglages et les approximations manuelles et assure une conservation de la phase. Finalement, cette technique permet facilement de travailler en quadrature car les deux voies sont parfaitement identiques.

L’utilisation d’un oscillateur à quartz est nécessaire pour le bon fonctionnement d’un tel dispositif ; l’horloge de référence doit être la plus précise possible de façon à obtenir des signaux parfaits. Nous avons utilisé un oscillateur de type TCXO (Temperature Compensated Quartz Oscillator) compensé en température. (Rakon CFPT 900 Series, Rakon, Auckland, New Zealand).

La méthode de compensation d'un TCXO peut être analogique ou numérique. Dans les deux cas, on utilise une diode à capacité variable pour corriger la fréquence de l'oscillateur en fonction de la température. Dans notre cas, le traitement est numérique (DTCXO), on utilise un modèle numérique de compensation et un convertisseur numérique/analogique pour commander la capacité variable; la compensation numérique permet une meilleure correction et l'utilisation dans une gamme de températures plus étendue.

Nous verrons comment sont générées les différentes fréquences dans le chapitre suivant.

b) Le module « Pulser »

Ce module est constitué d’un ordinateur PC dédié dans lequel se trouve une carte programmable par le bus ISA. Précédemment conçue et construite au laboratoire par Alain Retournard (Ingénieur de Recherches) pour une unité de RMN, cette carte régit l’expérience RQN et génère tous les signaux correspondant à une séquence d’impulsions donnée. Lors d’expériences de RQN ou de RMN, la durée des impulsions est souvent de l’ordre de quelques microsecondes, le dispositif générant ces intervalles de temps doit donc posséder une précision adéquate.

La carte possède un oscillateur quartz de 10 MHz qui sert d’horloge interne et qui permet de créer des signaux d’une durée allant de 0,1 µs à 7 min. Cette carte est composée de fifos (FIFO : First In First Out) ayant une taille mémoire maximale de 4 Ko. Ces fifos sont programmables grâce à des circuits logiques CPLD (Complex Programmable Logic Device) de la compagnie Altera (Altera, San Jose, USA). Un circuit CPLD est un circuit intégré logique qui peut être reprogrammé après sa fabrication. Il existe de nombreuses variétés de composants logiques ; dans notre cas les composants Altera sont des circuits FPGA (Field Programmable Gate Array).

Ce dispositif permet donc de contrôler 16 lignes sachant que dans l’état actuel de notre dispositif expérimental, seulement 5 lignes sont nécessaires.

Les cinq sorties effectivement utilisées sont indiquées ci-après :

1) PLS : cette ligne fonctionnant en logique négative permet de créer les impulsions (généralement quelques microsecondes ou quelques dizaines de microsecondes) et délais (de quelques microsecondes à plusieurs secondes) intervenant dans la séquence RQN et active (impulsions) ou non (délais) l’émission radiofréquence. La limite inférieure de ces intervalles de temps est 0,1 µs à 420 s avec un pas de 0,1 µs.

2) BLK : ce signal est complémentaire de celui des impulsions avec cependant un délai supplémentaire de 1 µs avant et après l’impulsion. Il permet d’occulter la sortie de l’amplificateur de puissance (en dehors des impulsions radiofréquence) de manière à ne pas polluer le signal avec le bruit de fond (en sortie) de l’amplificateur (« blanking »).

3) TRIGG : le signal de déclenchement de l’acquisition des données : il est relié directement à la carte du module Acquisition du spectromètre RQN.

4) 0-90 et 5) 0-180 : Les deux canaux reliés au synthétiseur de fréquence DDS permettant le basculement automatique de la phase. On peut ainsi disposer, à l’émission, des quatre phases : 0, 90°, 180° et 270° que l’on note généralement x, y, -x, -y.

Nous expliquerons dans le chapitre suivant comment la séquence de Résonance Quadrupolaire Nucléaire est créée, puis transmise au module Pulser pour être ensuite décompilée et traitée. Comme cela a été dit plus haut, on aura généralement tout intérêt à limiter le temps d’attente entre une mesure et la suivante. Cela implique un rechargement rapide de la « fifo » et ce point sera explicité dans le chapitre 3.

c) L’unité radiofréquence

Développé entièrement au laboratoire (à nouveau par Alain Retournard), ce module est représenté sur le diagramme de la figure II.12.

Figure II.12 : Diagramme des constituants de l’unité radiofréquence

SPF est un créneau généré par le module « Pulser » qui module l’émission radiofréquence (en provenance du synthétiseur) de manière à créer une impulsion radiofréquence. Celle-ci est appliquée à l’entrée d’un amplificateur de puissance. A noter que, pour l’émission, une seule des deux sorties du synthétiseur de fréquence est utilisée. Rappelons que sa phase peut être Emission

programmée à volonté (entre 0, 90°, 180°, 270°) et qu’elle sera ramenée à 0 immédiatement après la fin de l’impulsion radiofréquence. Nous avons utilisé un amplificateur de puissance TOMCO BT 00250 (TOMCO, Norwood, Australia) (figure II.13). Il peut délivrer une puissance maximale de 300 W en sortie et sa gamme de fréquence s’étend de 1 à 30 MHz.

Figure II.13 : Photographie de la façade de l’amplificateur de puissance TOMCO BT 00250

Le signal sortant de l’amplificateur de puissance TOMCO est amené vers la sonde via les circuits d’aiguillage décrits ultérieurement.

La détection du signal RQN est déclenchée par le signal « TRIGG » émis par le « pulser ». Le signal RQN (à une fréquence allant de quelques centaines de kHz à quelques MHz pour la RQN de l’azote – 14) doit être démodulé par rapport à la fréquence d’émission (rappelons que cette dernière est aussi proche que possible de la fréquence de résonance (fréquence RQN)). La tendance actuelle, chez certains constructeurs, est de mettre en œuvre une démodulation numérique, rendue possible de nos jours par des convertisseurs analogique - numérique pouvant échantillonner des signaux de plusieurs MHz. Nous sommes au fait de l’existence de telles méthodes qui peuvent parfaitement s’appliquer en l’absence de signaux parasites (sondes parfaitement blindées, environnement électromagnétique peu pollué). Ce ne sera pas forcément le cas de la RQN susceptible d’être utilisée sur le terrain. Les parasites risquent alors de complètement saturer l’entrée du convertisseur analogique. Aussi nous avons opté pour une démodulation analogique classique. Pour la détection en quadrature, deux canaux

identiques (mise à part la phase signal de référence qui diffère de 90° d’un canal à l’autre) sont nécessaires.

C’est la raison de l’atténuateur 3dB qui compense l’atténuation due au diviseur dans le canal noté F/0°. Après démodulation au moyen des mélangeurs, on obtient deux signaux basse fréquence, (l’un en cosinus, l’autre en sinus) qui reflètent les caractéristiques du signal RQN à haute fréquence. Ce cosinus et ce sinus constituent respectivement la partie réelle et la partie imaginaire du signal complexe qui sera traité par Transformée de Fourier. Rappelons les avantages de la détection en quadrature :

- la transformée de Fourier étant sensible au signe de la fréquence, la porteuse (émission) peut être placée à une fréquence très proche (sinon identique) de celle de la résonance quadrupolaire nucléaire.

- l’existence des deux canaux (ce qui revient à additionner deux signaux indépendants) se traduit par une amélioration, d’un facteur 2 , du rapport signal / bruit (figure II.14).

Figure II.14 : Illustration de l’amélioration du rapport signal-sur-bruit grâce à la détection en quadrature : expérience réalisée avec un échantillon de nitrite de sodium à une fréquence de 4.64 MHz - 1 passage. A gauche, détection en « singlature » ; à droite, détection en quadrature.

L’excellence des résultats provient de la procédure de démodulation directe (sans recourir à une fréquence intermédiaire). Cela est rendu possible par les caractéristiques du synthétiseur de fréquence (DDS) qui comporte deux sorties, strictement de même fréquence et de même amplitude, et déphasées d’exactement 90°.

d) L’unité basse-fréquence

Comme nous le montre le schéma de la figure II.15, l’unité basse-fréquence, (construite et conçue par Denis Grandclaude (maître de conférences) et Alain Retournard), est essentiellement constituée d’un circuit de type gain programmable qui peut modifier l’amplitude du signal basse-fréquence, d’un filtre basse-fréquence qui fixe la fréquence de coupure du signal (généralement la fréquence de Nyquist, appelée encore fenêtre spectrale SW) et d’un autre circuit qui permet de compenser une composante continue (décalage de la ligne de base du fid, inévitable dans le cas d’une démodulation directe). Ces éléments sont doublés dans le cas de la détection en quadrature.

Figure II.15 : Diagramme d’un canal de l’unité basse-fréquence. Les trois paramètres (gain de l’amplificateur, correction de la ligne de base, fréquence de coupure) sont transmis au dispositif par l’ordinateur maître (voir chapitre 3).

Nous avons choisi de ne pas utiliser de filtrage de type numérique comme on peut en trouver sur de nombreux spectromètres ou consoles RMN. En effet, ces filtres ont l’avantage de pouvoir être intégrés dans des circuits numériques miniaturisés à l’extrême, tels des processeurs (DSP (Digital Signal Processors) en particulier) et de ne nécessiter quasiment aucun composant analogique, mais ils présentent l’inconvénient d’être placés après le convertisseur analogique – numérique. Là encore, un signal parasite intense peut saturer le convertisseur et de ce fait totalement occulter le signal RQN. Rappelons que l’utilité d’un filtre basse-fréquence est d’éliminer les signaux en dehors de la fenêtre spectrale (fixée par le pas d’échantillonnage, voir plus bas), notamment le bruit de fond qui, par repliement, altérerait la qualité du résultats RQN.

e) La sonde

Nous utilisons des sondes [18] (figure II.16) réalisées au laboratoire (dans un premier temps par Benoît Cordier et, surtout, depuis trois ans par Maude Ferrari) et répondant aux besoins des différentes expériences de Résonance Quadrupolaire Nucléaire qui ont pu être mises en œuvre. A titre d’exemple, la sonde représentée sur la figure II.16 peut fonctionner dans une gamme de fréquences allant de 700 kHz à 6 MHz. La bobine est un solénoïde de 60 tours. Un tiroir interchangeable contient les capacités d’accord (tuning, CT) et d’adaptation en impédance (matching, CM). Ces capacités conviennent pour une zone de fréquence plus ou moins étendue, l’accord et l’adaptation de l’impédance étant ajustés finement au moyen des capacités variables C’M et C’T. Les diodes tête-bêche conduisent au moment de l’émission. Celles qui sont à la sortie de l’amplificateur de puissance isolent celui-ci lors de la phase de réception ce qui permet au signal d’être dirigé exclusivement vers le préamplificateur. Le circuit (C1, L’, C2) est accordé à la fréquence de travail. Les diodes ne conduisent pas (durant cette phase de réception), tout se passe comme si le point P était directement lié à l’entrée du préamplificateur. A l’inverse, lors de la phase d’émission, les diodes conduisent et le circuit se ramène aux seuls éléments C1, L’ qui constituent un circuit bouchon à la fréquence de travail. Ce circuit protège donc le préamplificateur et permet une jonction directe entre la sortie de l’amplificateur de puissance et la sonde. Notons que cette procédure évite l’implantation d’une ligne quart d’onde (λ/ 4) [19] qui jouerait le même rôle mais dont la longueur (à ces fréquences basses) serait assez rédhibitoire.

Figure II.16 : Photographie et schéma de principe d’une sonde de Résonance Quadrupolaire Nucléaire.

Les deux capacités CT et CM sont dans un tiroir interchangeable (cadre bleu). C’M et C’T sont des capacités ajustables et sont solidaires de la sonde (cadre rouge). Le circuit C1, L’, C2 est interchangeable (en fonction de la fréquence de travail). Il est situé dans l’unité contenant le préamplificateur (aussi près que possible de la sonde).

f) Le module acquisition

Ce module est un ordinateur PC dédié évoluant sous le système d’exploitation Linux Fedora et possédant une carte d’acquisition. Comme nous le montre la photographie de la figure II.17, cette carte qui se connecte au PC via un bus PCI, est une carte Adlink PCI 9812 (Adlink, USA). Ces caractéristiques principales sont les suivantes :

Convertisseur Analogique Numérique de 12 bits

Fréquence d’échantillonnage simultanée maximale : 20 MS/s (20 Mégasamples / s) Quatre canaux d’entrée indépendants

FIFO permettant de stocker les données acquises Horloge de référence : oscillateur Quartz de 40 MHz Déclenchement analogique ou numérique

Une entrée d’horloge réservée aux expériences non conventionnelles

De par son architecture (quatre canaux indépendants) et ses fonctionnalités (échantillonnage simultané) cette carte convient donc parfaitement pour des expériences de RQN avec détection en quadrature.

Nous verrons dans le chapitre suivant, comment cette carte est contrôlée par l’ordinateur maître et comment elle peut permettre l’affichage en temps réel des données spectroscopiques.

g) L’ordinateur-maître

Nous avons utilisé un ordinateur PC portable fonctionnant sous le système d’exploitation Linux Fedora (Red Hat, Raleigh, USA). Cet ordinateur est la clef du spectromètre RQN car il permet de gérer l’expérience grâce au logiciel développé pendant cette thèse. En effet, l’utilisateur peut, par le biais du programme, modifier la fréquence du synthétiseur de fréquence DDS avant le démarrage de l’expérience, régler les valeurs du gain programmable, du filtre basse-fréquence et de la fréquence de coupure du tiroir basse- fréquence, fixer les paramètres de l’acquisition, créer et démarrer la séquence d’impulsions envoyée à l’unité « Pulser » , lancer le démarrage de l’expérience, visualiser en temps réel les données acquises et traiter ces données (traitement classique par transformée de Fourier et traitement spécial développé au cours de cette thèse).

Dans le troisième chapitre, nous verrons comment ce logiciel présent dans l’ordinateur maître interagit avec les différents programmes des modules présentés plus haut.