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1. LES FONCTIONS DES GAGS VIA LEURS INTERACTIONS AVEC

1.2. Les caractéristiques biochimiques et structurales d’une interaction GAG-

L’interaction d’un GAG avec une protéine est principalement de nature électrostatique. Elle a lieu d’une manière générale entre certaines régions anioniques des chaînes oligosaccharidiques et des sites peptidiques ou protéiques de nature cationique tels que les groupements ammonium des lysines ou des arginines (NH3+), le guanidinium de

l’arginine (pKa = 13,6) ou l’imidazolium de l’histidine (plus rare). Des centaines de protéines ont été identifiées comme interagissant avec l’héparine qui est le GAG le plus sulfaté et donc le plus anionique de tous. Cette propriété est d’ailleurs utilisée pour la purification de protéines par chromatographie d’affinité sur colonne d’héparine. Dans la plupart des cas, les interactions GAG-protéines pourraient paraître n’être que peu spécifiques (Lindahl et al., 1998 ; Salmivirta et al., 1996 ; Kreuger et al., 2006). Cependant, de nombreuses données permettent de penser que certaines séquences glycanniques ou du moins certaines régions glycanniques (domaines NS, NA/NS, NA) sont organisées pour interagir spécifiquement avec des protéines et contrôler ainsi leurs activités (Lindahl et al., 1998 ; Turnbull et al., 2001 ; Salmivirta et al., 1996).

Les domaines de fixation à l’héparine (Heparin Binding Domains) ont été déterminés dans de nombreuses protéines (Hileman et al., 1998). Ils sont composés d’un nombre

Figure 19: Conformation et flexibilité de l’acide uronique de l’Hp et des HS

A : Représentation des différentes configurations de l’acide uronique dans l’héparine ou les HS. Tout au long d’une chaîne d’HS ou d’Hp, les résidus GlcN et GlcA sont stables dans la conformation 4C

1, alors que le résidu IdoA peut osciller entre les conformations d’énergie équivalente qui sont la 1C

4(chaise) et la 2S0 (bateau).

B : Structure de l’héparine obtenue par RMN. A gauche les IdoA sont dans une conformation 1C

4, et à droite dans une conformation 2S0. Les sulfates sont représentés en rouge et jaune.

(D’après Coombe et Kett 2005)

A.

structure du complexe FGF-2 avec un hexasaccharide par diffraction au rayon X a également révélé que des groupements fonctionnels de chaînes latérales d’autres acides aminés peuvent également interagir avec l’héparine, comme la fonction amine des chaînes latérales de l’arginine et de la glutamine (Faham et al., 1996). Les séquences consensus riches en acides aminés basiques sont du type : XBBBXXBX, XBBXBX et XBBBXXBBBXXBBX avec B comme acide aminé basique et X pour un acide aminé hydropathique (Rabenstein, 2002). Ces séquences consensus peuvent ensuite adopter une structure secondaire qui permet le rassemblement des acides aminés basiques à l’extérieur et l’orientation des "X" vers l’intérieur de la protéine (Hileman et al., 1998).

Les propriétés électrostatiques de l’interaction GAG-protéine ont suscité la prise en considération de la présence ou non de cations (en particulier pour le cas du Zinc et du Cuivre) dans les interactions. En effet, de nombreuses protéines se fixent mieux sur l’Hp/HS en présence d’ions positifs. C’est le cas de la protéine du précurseur béta-amyloide, de l’interleukine 5 (IL-5), de la protéine prion, de "l’héparine cofactor II" ou encore de l’endostatine (Bush et al., 1994 ; Olsen et al., 1996 ; Lipscombe et al., 1998 ; Gonzales- Iglesias et al., 2002 ; Eckert et al., 2003 ; Ricard-Blum et al., 2004). Les cations peuvent avoir tout d’abord un effet sur les protéines. Ils peuvent favoriser l’oligomérisation, ce qui dans certains cas, facilite l’interaction des protéines avec l’héparine (Gonzalez-Iglesias et al., 2002). Ils peuvent également induire un changement conformationnel permettant l’interaction de la protéine avec l’héparine, comme dans le cas de l’héparine co-facteur II (Eckert et al., 2003). L’interaction de cations avec les GAGs ne dépend pas uniquement des forces électrostatiques puisque le Zn2+, par exemple, va interagir sélectivement avec l’Hp et pas avec les autres GAGs (Parrish et Fair, 1981). Des données de RMN indiquent que l’acide iduronique est l’ose préférentiel pour la fixation des cations. Ces derniers seraient même capables de favoriser la conformation 1C4 par rapport à la 2S0 (Whitfield et Sarkar, 1991 ;

Whitfield et al., 1992 ; Whitfield et Sarkar, 1992). Le changement de conformation d’un acide iduronique dans une chaîne de GAG offre une flexibilité qui semble être importante et même nécessaire dans certaines interactions. De plus, ce changement conformationnel permet de contrôler la manière dont le groupement 2-O-sulfate de l’IdoA (dans le cas où il est présent) peut s’agencer pour permettre les interactions avec les protéines (Coombe et Kett, 2005) (Figure 19).

De ce fait, si les cations sont capables de favoriser une conformation plutôt qu’une autre, il est évident que cela aura une répercussion au niveau des interactions avec les protéines. In

Figure 20: Le glycocalyx

Le glycocalyx est une couche de polyholosides présente sur la surface membranaire externe des cellules animales ainsi que sur les parois externes de certaines bactéries. Sur cette image de microscopie électronique, le glycocalyx constitue une large bande sombre à la surface de la cellule. Dans certains épithéliums, l’épaisseur de cette couche peut atteindre 0,5 µm.

spatio-temporelle (Coombe et Kett, 2005). Par exemple, le taux circulant de Zn2+ dans le sang est très faible. En revanche, il est 30 à 60 fois plus élevé dans les plaquettes. Celles-ci contiennent également les PGs de type décorine et biglycan, connus pour avoir des cores protéiques qui stockent le zinc. Dans les sites où les plaquettes sont activées, une augmentation de la concentration en zinc pourrait alors avoir un rôle dans les interactions qui concernent les GAGs (Coombe et Kett, 2005).

Enfin, bien que la majorité des études d’interactions in vitro soient réalisées à pH neutre, il ne faut pas oublier qu’in vivo, le pH peut localement varier, et la nature électrostatique de l’interaction GAG-protéine peut être dépendante du pH. Par exemple, des lésions inflammatoires sont responsables d’une acidification locale créée par la production d’acide lactique par les neutrophiles (Lardner, 2001). Le pH des fluides issus de sites d’inflammation est de l’ordre de 6.1 (Trevani et al., 1999). Le microenvironnement tumoral est également plus acide, avec un pH d’environ 5.5 (Helminger et al., 1997). Les interactions GAG- protéines peuvent être réellement dépendantes du pH et notamment lorsque celles-ci mettent en jeu les histidines. Par exemple, "l’histidine-proline-rich glycoprotein" et la protéine prion, toutes deux dépendantes de cations, n’interagiront pas de la même façon via leur histidine lorsque le pH sera supérieur ou non au pKa de celle-ci (Borza et Morgan, 1998 ; Gonzalez- Iglesias et al., 2002). D’autres protéines sont sensibles au pH dans l’interaction avec les GAGs. C’est le cas de la forme non fibrillaire du peptide béta-amyloide, du GM-CSF (granulocyte macrophage colony stimulating factor) et même du VEGF (Gupta-Bansal et al., 1995 ; Wettreich et al., 1999). Dans le cas du VEGF, l’isoforme (VEGF121) qui ne possède

pas la région d’interaction avec les GAGs, est capable, à un pH acide, d’interagir tout de même avec les HS (Goerges et Nugent, 2003). Le VEGF165 qui possède la région

d’interaction avec les GAGs a une affinité pour les HS augmentée lorsque le pH est abaissé. L’acidification permet en fait l’exposition d’un nouveau site de fixation aux HS dans les régions partagées par les deux isoformes du VEGF (Goerges et Nugent, 2003).