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Les arbres à la jonction entre de nombreux acteurs dans les territoires agricoles

De nombreux acteurs peuvent être concernées par les espaces arborés, c'est-à-dire en avoir des attentes ou des perceptions. C'est particulièrement le cas dans les territoires ruraux européens, car ces derniers sont (Lebeau 2012) :

- fortement humanisés et accessibles (voie de communication, aménagements de vie, espaces gérés),

- globalement constitués de petites propriétés et de parcellaires très découpés, notamment en France où, suite à la Révolution, les grands domaines aristocratiques ont été partagés,

- diversifiés en matière d'activités, historiquement et souvent encore actuellement, - intégrés dans un maillage territorial et administratif complexe.

De ces caractéristiques résultent la présence, la proximité et le côtoiement de divers acteurs au sein de ces territoires et de diverses utilisations ou perceptions de portions de ces territoires. Cela est particulièrement le cas lorsque ces portions sont des espaces arborés, car les attentes et les perceptions à leur égard peuvent être très différentes. Dès lors que l'on souhaite considérer ces espaces dans des projets partagés de territoire, il semble indispensable de gérer la diversité de ces attentes et perceptions.

Les acteurs des espaces arborés, c’est-à-dire les personnes prenant des décisions et agissant sur ces espaces, sont nombreux dans les territoires agricoles. En effet, bien qu'ils soient souvent un seul à intervenir par espace arboré, parfois deux lorsque les arbres sont à l'interface entre deux activités (une haie entre les parcelles de deux agriculteurs, une

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lisière entre la parcelle d'un agriculteur et celle d'un forestier), les gestionnaires de l'ensemble des espaces arborés d'un territoire sont divers et différents d'un espace arboré à l'autre (exploitants agricoles, exploitants forestiers, services publics, entrepreneurs). D'autres personnes peuvent également prendre part aux décisions concernant l'usage et la gestion de ces espaces (propriétaire, pouvoirs publiques). En outre, ces gestionnaires et décideurs ne sont pas les seules personnes concernées par les espaces arborés. D'autres acteurs dans les territoires agricoles ont aussi des attentes et des perceptions concernant ces espaces (habitants, chasseurs, apiculteurs, touristes, naturalistes). Dans mes travaux de thèse, je m'intéresse à tous ces acteurs des territoires agricoles concernés par les espaces arborés. Pour mentionner ces acteurs de façon concise, j'utilise le terme "acteurs concernés" ou me limite même parfois à "acteurs". Le terme "bénéficiaires" est souvent utilisé pour désigner ces acteurs. Mais je ne l'emploie pas, car, à mon sens, il exclut les acteurs qui ne perçoivent pas positivement les espaces arborés, c'est-à-dire les acteurs pour qui les arbres occasionnent des préjudices (obstacle à la mécanisation agricole ou assombrissement d'un lieu de vie par exemple).

Des acteurs différents engagés dans les structures d'encadrement et de conseil en agroforesterie

La diversité des acteurs concernés par les espaces arborés s'observent jusque parmi les structures d'encadrement et de conseil en agroforesterie. Les fondateurs et parfois encore les administrateurs actuels des associations locales de développement de l'agroforesterie sont différents d'une association à l'autre (Balny et al. 2015) :

- des forestiers, comme c'est le cas de la Mission Haies (Auvergne) dont l'objectif est de sensibiliser, préserver, replanter et valoriser les haies et le bocage (Mission Haies 2016),

- des structures agricoles et environnementalistes, comme c'est le cas pour la Mission bocage (Maine-et-Loire) qui contribue au développement durable du territoire grâce à la multifonctionnalité des arbres champêtres et des haies (Mission Bocage 2018), - des agriculteurs et agroforestiers, comme c'est le cas pour Arbre et paysage du Gers

ou Arbres et paysages d'Autan qui promeuvent l'arbre de pays pour la sauvegarde et la restauration du paysage (Arbre et paysage 32 2013 ; Arbres et paysages d’Autan 2018),

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- des habitants et des élus, comme c'est le cas pour Prom'Haies (Poitou-Charentes) dont l'objectif est d'informer sur les intérêts et d'agir en faveur de la haie, de l'arbre hors forêt et de l'agroforesterie (Prom’Haies 2017).

Ces associations sont généralement soutenues par les collectivités locales (communes, communautés de communes, départements). De plus, en partenariat ou en complément de ces associations, diverses autres structures locales proposent aussi un appui technique pour développer des projets agroforestiers : les chambres d'agriculture, telles que celle de l'Ariège (Chambre d’agriculture de l’Ariège 2018), les départements, tels que celui de la Haute-Garonne (Conseil général 31 2014), les fédérations de chasseurs, telles que celle de la Haute-Garonne (Fédération des chasseurs de la Haute-Garonne 2018).

La variété des structures d'encadrement et de conseil en agroforesterie atteste de la diversité des acteurs concernés par les espaces arborés dans les territoires agricoles. Ces différents acteurs n'ont pas tous les mêmes attentes et perceptions des arbres et espaces arborés. Celles-ci peuvent transparaître dans les motivations et objectifs des structures d'encadrement et de conseil en agroforesterie ainsi que dans les objectifs des projets agroforestiers.

Deuxième défi de l'agroforesterie : prendre en compte tous les acteurs concernés par les espaces arborés des territoires agricoles

Divers acteurs des territoires agricoles sont ainsi concernés par les arbres et les espaces arborés. Toutefois, ils ne les perçoivent pas de la même manière ou n'en ont pas les mêmes attentes. De plus, des antagonismes apparaissent entre leurs attentes ou perceptions. Par conséquent et de prime abord, tous les acteurs ne s'accordent pas forcément sur les fonctions des espaces arborés et les moyens, concernant leur gestion par exemple, d'atteindre ces fonctions. Le projet APIL illustre cette diversité des acteurs concernés et des points de vue. Cette diversité ressort avec les différentes problématiques selon les situations, c'est-à-dire selon les trois zones (plaine, coteaux, piémont) et, au sein de ces zones, selon les acteurs concernés (agriculteurs, éleveurs, gestionnaires des rivières, collectivités) et selon les espaces arborés (haies, ripisylves, alignements intraparcellaires, accrus, bois).

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Un deuxième défi consiste donc à impliquer tous les acteurs concernés dans les projets agroforestiers. De cette façon, leurs différentes perceptions et attentes des espaces arborés pourront être prises en compte dans les pratiques et les systèmes agroforestiers. Il sera alors possible de parvenir à des projets partagés par le plus grand nombre et qui s'inscrivent dans le développement durable des territoires.

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