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Le travail d’équipe à travers la politique québécoise

L’orientation originale lors de la proposition de l’obligation d’un code d’éthique, comme l’avait souhaité le Ministre Thérèse Lavoie-Roux (1985-1989) et mentionnée précédemment cherchait surtout à contraindre les comportements des employés. Il était souhaité des mesures coercitives pour les employés fautifs. Son successeur Marc-Yvan Côté (1989-1994) a introduit l’obligation du code d’éthique dans la loi sur les services de santé et les services sociaux qu’il a révisée en 1991. Il a retenu le partage des valeurs et l’inclusion de contraindre les comportements sans y inclure de mesures toutefois. Les quatre ministres qui ont suivi, Jean Rochon (1994-1998), Pauline Marois (1998-2001), Rémy Trudel (2001-2002) et François Legault (2002-2003) n’ont eu aucune intervention face aux codes d’éthique ou ne sont intervenu sur les formulations ou n’ont donné de précisions sur des attentes ministérielles.

Le Ministre Couillard (2003 à 2009) a été assez clair dans ses orientations ministérielles lors de la mise en place des équipes de visite des établissements. On l’a vu plus tôt : « Le code d’éthique constitue l’assise sur laquelle doit se fonder toutes les décisions cliniques, organisationnelles et de gestion respectant les principes directeurs inscrits dans les orientations ministérielles. »92 De plus, lors de la révision de la Loi sur les services de santé et les services sociaux du Québec, il a introduit les deux ajouts concernant la confidentialité. Il est permis de se poser la question de la réelle contribution de ces ajouts dans un code d’éthique. Cela ne fait que simplifier la vie

92

MSSS, juin 2004, Un milieu de vie de qualité pour les personnes hébergées en CHSLD : Visites d’appréciation de la qualité des services, page 41

administrative des organisations en donnant la responsabilité aux usagers de demander à ce que leur nom ne soit pas transmis aux maisons de sondage ou aux fondations.

Il est intéressant de noter que les trois ministres libéraux en santé et en services sociaux qui ont été en poste sur un horizon de 12 ans ont tous les trois agi sur la question de codes d’éthique dans les établissements du réseau, alors que les quatre ministres du Parti Québécois qui ont dirigé le ministère de la Santé et des Services sociaux pendant 10 ans furent muets à cet égard. Toutefois, le Ministre Facal, responsable de l’administration publique et du Conseil du trésor et membre du Parti Québécois a clairement reconnu en novembre 2002 :

L’éthique constitue donc pour le gouvernement une préoccupation importante et constante depuis plusieurs années et elle continuera de l’être, particulièrement dans le contexte de la modernisation en cours de l’administration publique.93

Il serait donc faux d’affirmer que cette préoccupation est la prérogative d’un parti politique seulement et de plus: « il convient de rappeler que nous nous plaçons dans un contexte démocratique et plus précisément dans un paradigme démocratique continental, dont une des caractéristiques est le primat du système politique sur le système judiciaire, en ce sens que la loi est faite principalement par le législateur. »94

Audria nous permet ici de faire le pont entre la politique et les conceptions de l’éthique et de la tension entre la conception aristotélicienne et kantienne.

Il convient également de rappeler que nous vivons dans un Etat de droit faisant référence directement au modèle kantien exposé ci-dessus qui se combine avec le paradigme aristotélicien d’une visée éthique, c’est-à-dire une recherche du Bien commun et qui, enfin, se complète d’une sagesse pratique dans laquelle nous insérons la déontologie professionnelle. L’éthique peut être comprise comme une discipline proposant une réflexion systématique sur les règles de comportement. Or, dans sa dimension normative, et au plan de l’éthique appliquée, il est important

93

Boisvert, Yves, Jutras, Magalie, Legault, Georges A, Marchildon, Allison, avec la collaboration de Louis Côté, 2003, Petit manuel d’éthique appliquée à la gestion publique, Liber, Montréal, page 12 94

Audria, Raphaël, 2004,Thèse de doctorat à la Faculté des sciences économiques et sociales de Genève, New public management et transparence : essai de déconstruction d’un mythe actuel, Genève, page 208

de faire la différence entre l’éthique et la déontologie. La déontologie se définit comme étant un ensemble de règles et de devoirs qui régissent une profession, la conduite de ceux qui l’exercent, les rapports entre ceux-ci et leurs clients ou le public. La déontologie varie donc selon chaque métier tout en reprenant les habitudes et les conceptions morales d’une société et d’une époque. En d’autres termes, elle rappelle les responsabilités du fournisseur de service tout en s’imprégnant de la morale ambiante.95

Il distinguera alors

1. l’éthique de l’administration, celle que gèrent les politiciens pour énoncer les principes, les valeurs et dicter les conduites attendues de la part des fonctionnaires,

2. de l’éthique des fonctionnaires, leur ‘morale’ personnelle confrontée aux situations de la gestion publique et

3. de l’éthique dans l’administration, soit celle du fonctionnaire comme simple citoyen.96

Ces dernières citations et les trois distinctions apportées nous permettent de bien situer le rôle du politique dans ce débat qui existera toujours quant à la place du politique dans le choix de valeurs en société et dans les instruments qu’une société ou une organisation se donne. Il est ici question de politique québécoise et Audria nous interpelle de Belgique, mais il est permis de constater l’importance du politique quant aux choix que doit faire une société et ses institutions. Rappelons simplement que l’obligation du code d’éthique est une prescription de la loi et que cette obligation peut demeurer ou se modifier au gré des révisions de cette loi en santé et services sociaux. Depuis 1991, il y a eu quelques changements et d’autres pourraient arriver éventuellement.