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le syndrome de Mayer-Rokitansky-Küster-Hauser (MRKH)

I. Développement du tractus génital interne féminin et anomalies müllériennes

Chez la femme, la différenciation normale des canaux de Müller en trompes, utérus, col de l’utérus et partie supérieure du vagin est un processus accompli en trois grandes phases successives (Figure 18) :

- une première phase organogénétique au cours de laquelle les canaux müllériens se mettent en place suivant une séquence elle-même divisible en trois étapes : spécification de cellules à la surface de l’épithélium cœlomique, invagination de celles-ci dans le sens crânio-caudal puis élongation des canaux de Müller jusqu’à la partie postérieure du sinus urogénital auquel ils fusionneront pour donner le 1/3 inférieur du vagin (fusion verticale),

- une phase de fusion latérale mutuelle des canaux de Müller aboutissant in fine à la formation de l’utérus, du col et des 2/3 supérieurs du vagin, les extrémités les plus antérieures non fusionnées donnant naissance aux trompes utérines et à leur(s) pavillon(s),

- une phase de résorption de la cloison médiane (ou inter-müllérienne), structure consécutive à la fusion préalable des canaux de Müller.

Les anomalies müllériennes correspondent à un ensemble de malformations utéro-vaginales congénitales résultant d’un défaut de développement, de fusion ou de résorption des dérivés müllériens. La classification la plus courante, proposée par l’American Fertility

Society (AFS) (1988), les range en 7 catégories distinctes, le type de malformations observées

dépendant essentiellement du stade morphogénétique perturbé ou interrompu (Figure 19). Ainsi, le développement incomplet de l’un ou des deux conduits paramésonéphrotiques lors de la phase d’organogenèse peut conduire à une agénésie ou une hypoplasie utéro-vaginale plus ou moins sévère (classe I) ou à la formation d’un utérus unicorne (classe II). A un stade plus tardif, des défauts de fusion latérale conduiront à un utérus didelphe (classe III) si les deux canaux de Müller restent totalement indépendants, ou à un utérus bicorne (classe IV) si le processus de fusion est partiel. Les classes V (utérus cloisonné) et VI (utérus à fond arqué) ont pour origine un défaut de résorption de la cloison d’accolement des canaux müllériens, la classe VI étant souvent considérée comme un variant anatomique naturel. Enfin, la classe VII

Figure 19. Anomalies développementales des dérivés müllériens et impact sur la morphologie du tractus génital féminin. Selon l’âge gestationnel de survenue de

l’atteinte embryonnaire, donc selon le stade développemental interrompu, on différencie plusieurs types de malformations utérines. L’absence totale de fusion latérale des canaux de Müller aboutit à la formation d’un utérus didelphe compatible avec la gestation, chaque corne étant un utérus entièrement développé (A). L’utérus bicorne résulte quant à lui d’une fusion latérale partielle des canaux müllériens (B) et est associé le plus souvent à un col de l’utérus unique. Des troubles de résorption de la cloison inter-müllérienne conduisent à un utérus septé (ou cloisonné) total (C) ou partiel selon l’ampleur du défaut de résorption. D’après (Ferreira et al., 2007).

Figure 20. Séquence de Rokitansky. Le syndrome MRKH se

caractérise par l’absence d’utérus et des 2/3 supérieurs du vagin associée à une aplasie plus ou moins importante des trompes, chez des femmes aux caractères sexuels secondaires normaux dus à la présence d’ovaires normaux et fonctionnels. L’aplasie utéro-vaginale est vraisemblablement liée à un arrêt précoce de la différenciation des canaux de Müller dont la cause est inconnue. D’après (Jones, 1988).

Bicorne Didelphe Septé A B C Atteinte embryonnaire précoce Absence +/- Canaux de Müller

regroupe les malformations utéro-vaginales (utérus en forme de T) liées à l’exposition in

utero au diéthylstilbestrol, un analogue œstrogénique au fort pouvoir tératogène (Kaufman et al., 1977; Newbold, 2008).

Les anomalies müllériennes ont une incidence moyenne estimée à 4 % dans la population générale ainsi que chez les femmes fertiles, alors qu’elle est proche de 12 % chez les femmes sujettes à des avortements spontanés (Grimbizis et al., 2001), les malformations les plus fréquemment rencontrées étant les utérus cloisonnés (35 %) et bicornes (25 %). Le développement embryonnaire du tractus génital interne étant intimement lié au développement du système urinaire, les anomalies müllériennes sont retrouvées associées à des malformations rénales dans 30 % des cas, notamment des agénésies rénales et, dans une moindre mesure, des hypoplasies rénales ou des reins en fer à cheval (Li et al., 2000). Les malformations osseuses sont en fréquence la deuxième malformation associée aux anomalies utérines.

L’étiologie des anomalies müllériennes est encore inconnue pour la plupart d’entre elles. D’un point de vue embryologique, l’association non aléatoire de malformations génitales, urinaires et squelettiques suggère toutefois une atteinte embryonnaire précoce du mésoderme intermédiaire.

II. Le syndrome de Mayer-Rokitansky-Küster-Hauser (MRKH)

A) Définition du syndrome MRKH et données cliniques

Décrit pour la première fois en tant que syndrome par Mayer (Mayer, 1829) puis étudié successivement par Rokitansky (Rokitansky, 1838), Küster (Küster, 1910) et Hauser (Hauser and Schreiner, 1961), le syndrome éponyme MRKH (OMIM 277000) appartient à la classe I définie par l’AFS et correspond à une pathologie malformative congénitale du tractus génital féminin dont la caractéristique clinique première est l’absence d’utérus et des 2/3 supérieurs du vagin (Figure 20). D’une incidence estimée à 1/4500 naissances (Griffin et al., 1976; Folch et al., 2000), l’aplasie utéro-vaginale est le plus souvent diagnostiquée à l’adolescence chez des patientes atteintes d’aménorrhée primaire, signal d’appel principal de cette pathologie. Ces femmes montrent cependant un développement sexuel secondaire normal, imputable à la présence d’ovaires normaux et fonctionnels (Fraser et al., 1973), permettant un diagnostic clinique différentiel (Morcel et al., 2007). Outre l’aplasie utéro-vaginale isolée (ou MRKH de type I), il existe des formes associées à d’autres malformations, principalement rénales et squelettiques. Le syndrome est alors qualifié de MRKH de type II,

ou d’association MURCS (MÜllerian duct aplasia, unilateral Renal aplasia, and Cervicothoracic Somite dysplasia – OMIM 601076) (Duncan et al., 1979) . Longtemps considéré comme sporadique, le syndrome MRKH, qui concerne des femmes au caryotype très généralement normal 46,XX (Sarto, 1974), a toutefois été décrit sous des formes familiales (Jones and Mermut, 1972; Griffin et al., 1976; Tiker et al., 2000), suggérant l’existence de formes transmises du syndrome. Au sein des familles informatives décrites dans la littérature, il a été observé de fréquentes associations de l’aplasie utéro-vaginale avec des malformations rénales et squelettiques. Les malformations du tractus urinaire (le plus souvent une agénésie ou une ectopie rénale unilatérale) et les anomalies squelettiques (essentiellement cervico-thoraciques) associées concernent respectivement environ 50 % et 25 % des patientes (Griffin et al., 1976). Par ailleurs, ces études familiales suggèrent une transmission génétique sur un mode dominant couplé à un degré de pénétrance incomplet et à une expressivité variable (Opitz, 1987; Pavanello Rde et al., 1988).

Cette association de malformations congénitales s’explique vraisemblablement par l’origine embryologique commune des structures affectées, toutes dérivant du mésoderme intermédiaire. L’hypothèse généralement avancée pour expliquer le syndrome MRKH consiste à mettre en cause une atteinte embryonnaire précoce des blastèmes des somites cervico-thoraciques et du mésonéphros (Duncan et al., 1979), lesquels ont une ultime (et intime) relation spatiale vers la fin de la quatrième semaine de vie fœtale.

B) Revue bibliographique

Cette revue bibliographique, publiée dans le « Journal de Gynécologie Obstétrique et Biologie de la Reproduction », se propose de détailler l’aspect clinique du syndrome MRKH et d’en aborder l’étiologie.

Morcel, K., Guerrier, D., Watrin, T., Pellerin, I., and Leveque, J. (2008). [The Mayer-Rokitansky-Kuster-Hauser (MRKH) syndrome: clinical description and genetics]. J Gynecol