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2.1. Définitions, développement normal et liens cliniques

2.1.3. Le schéma corporel et la notion de corps propre

2.1.3.1. Définitions

Le schéma corporel est un concept défini par Bonnier en 1893. Il le définit comme une représentation permanente, une figuration spatiale du corps et des objets.39

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B. FEUILLERAT (2011), p.209.

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Pour Alain Berthoz :

« (…) il y aurait au moins quatre types de processus nous permettant de nous représenter notre corps. Le premier traiterait les informations sémantiques et lexicales sur les parties du corps ; le deuxième les représentations spécifiques visuo-spatiales du corps propre et aussi des objets de l’environnement, c’est-à-dire la place des parties les unes par rapport aux autres (…) et leurs frontières ; le troisième constituerait une référence corporelle à partir d’un schéma corporel ; enfin, le quatrième processus serait composé des mouvements eux-mêmes qui sont organisateurs de la perception du corps. »40. Espace et schéma corporel sont donc intimement liés.

La représentation corporelle regroupe les notions de schéma corporel, image du corps et image spéculaire du corps41.

Dans le cadre de ce mémoire, je ne développerai que ce qui concerne le schéma corporel.

Pour le psychomotricien Eric Pireyre, les termes schéma et image sont étymologiquement trop proches. Plutôt que le terme schéma corporel, il préfère la dénomination des neurophysiologistes (Richard et Orsal, 2001) de « sensibilité somato-viscérale », qui serait une composante même de « l’image composite du corps »42.

Nous avons vu ci-dessus le lien entre espace et schéma corporel (Alain Berthoz). L’apport de la phénoménologie*, fait quant-à-elle, le lien entre le schéma corporel et la dimension temporelle. En effet, pour Maurice Merleau- Ponty, c’est du fait de la structure temporelle de notre corps, que nous pouvons garder une fois adulte le souvenir de notre corps d’enfant. « Il ne faut donc pas dire que notre corps est dans l’espace ni d’ailleurs qu’il est dans le temps. Il habite l’espace et le temps. »43.

40 A. BERTHOZ (1997), p.250. 41 A. FERNANDEZ-ZOÏLA, P. SIVADON (1986), p.179. 42 E. PIREYRE (2011), p.111. 43 M. MERLEAU-PONTY (1945), p.174.

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Au cours de ce mémoire, plusieurs références à la phénoménologie* seront faites car ce point de vue m’a semblé constituer un éclairage fort intéressant pour le sujet qui nous intéresse ici et pour la psychomotricité de manière plus vaste.

Ainsi, selon Max Aurières, « La prise en charge en psychomotricité rencontre des modalités d’expériences différenciées : celle de la corporéité, de l’espace, du mouvement, de l’expérience sensible. Cette expérience vécue en séance de psychomotricité peut-être rapprochée, à notre sens, à l’aide de concepts fondamentaux issus de la phénoménologie »44.

Merleau-Ponty a également développé la notion de corps propre définie par Husserl et je retiendrai une très belle phrase de cet auteur à ce propos : « Le corps propre est dans le monde comme le cœur dans l’organisme : il maintient continuellement en vie le spectacle visible, il l’anime et le nourrit intérieurement, il forme avec lui un système. »45.

Merleau-Ponty replace donc ici le corps dans le contexte de l’espace et des relations qu’il entretient avec celui-ci. Le corps propre désigne donc le corps subjectif, le corps vécu par le sujet lui-même46 et c’est en cela que cette notion nous intéresse.

2.1.3.2. Troubles du schéma corporel chez les enfants IMC

Jean-Claude Reinhardt avance que les enfants IMC présentent des lacunes et des troubles importants du schéma corporel47. Ajuriaguerra et Stucki rejoignent ce postulat48 et ajoutent que ces troubles vont avoir un impact sur l’action volontaire, le côté le moins mobile étant souvent fortement désinvesti (les difficultés motrices ne le justifiant pas entièrement). 44 M. AURIÈRES (2011), p. 195. 45 M. MERLEAU-PONTY, op.cit., p.245. 46 M. AURIERES, loc.cit., p.196. 47 J-C. REINHARDT (1990), p.211. 48

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Le schéma corporel étant le référentiel de base permettant à l’enfant de se situer dans l’espace, j’ai donc entrepris avec Agnès un travail autour de celui-ci.

En effet, pour Benoît Lesage :

« (…) avant de déployer le geste dans l’espace et d’entrer dans un travail d’expressivité, le propos est de spatialiser le corps, d’en instruire les contours, de le densifier. Au-delà de cette différenciation fondatrice, dedans et dehors s’organisent et se structurent conjointement. Au-dedans, c’est la mise en place d’un squelette et de références qui différencie les éléments et les qualifie. Le dedans n’est donc pas une bouillie informe, une « soupe primitive », mais acquiert une structure et des qualités qui font écho à celles du dehors (…) »49.

Lorsque j’ai commencé ces petits jeux avec Agnès, j’ai eu un peu cette impression de « soupe primitive ».

Un jour alors que j’accrochais une petite pince à linge sur son pantalon et lui demandait de la décrocher, Agnès a pu dire qu’elle était sur le pantalon, par contre quand je lui ai demandé quelle partie de son corps se trouvait dans son pantalon, Agnès m’a répondu « le pantalon », puis « le jogging », puis finalement, « le dos »…

Émilie Charpentier précise que la restriction des mouvements entraîne une déstructuration du schéma corporel et que le toucher thérapeutique va tenter de réunifier celui-ci en apportant la sensation d’enveloppement, de contenance et de solidité50. C’est donc vers la médiation par le toucher, que mon choix s’est tourné, afin d’entamer un travail sur l’espace corporel.

2.2. Les percussions corporelles : instruire les limites du corps