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CHAPITRE III - LE POINT DE VUE DES INTERLOCUTEURS CLÉS DE L’ÉTABLISSEMENT DE DÉTENTION DE HULL,

3.2. Le recrutement et la référence des participants

Il y a plusieurs façons de recruter et de référer les détenus au projet.

L’endroit où se situe le local de la CMO et de l’agent de liaison communautaire dans l’établissement de détention, soit le pavillon socioculturel et sportif, est un endroit où sont également situés l’école des adultes, le bureau de l’aumônier et la bibliothèque. Les détenus y circulent librement, ce qui favorise les rencontres informelles avec eux. La CMO et l’agent de liaison communautaire vont à leur rencontre dans le corridor pour se présenter et offrir leurs services. La porte de leur local est toujours ouverte, de sorte que le détenu peut venir les rencontrer. Une grande partie du recrutement des détenus se fait de cette façon.

« C’est sûr que ça circule beaucoup, ma porte est ouverte […], je suis devant la porte ou je suis dans le corridor. C’est sûr qu’on se présente, on dit ce qu’on fait là et juste ça, c’est une grosse partie du recrutement. »

14 L’agent de liaison communautaire se rend également dans les autres secteurs de l’établissement de détention pour rencontrer les détenus et leur présenter ses services.

« En détention, je me promène souvent à l’intérieur, je vais voir les différents intervenants, je vais parler aux détenus. On essaie de faire du recrutement de cette façon-là. »

Le recrutement des participants au projet se fait également au cours d’une activité intitulée

« l’accueil », qui a lieu toutes les deux semaines et qui s’adresse aux personnes nouvellement incarcérées. Réalisée par des intervenants de la commission scolaire, cette activité vise à informer les détenus de ses différents programmes et services ainsi que ceux que les autres partenaires offrent aux personnes en détention. Une période de 15 à 20 minutes est alors allouée à la CMO et à l’agent de liaison communautaire pour leur permettre de présenter leurs services, notamment l’accompagnement offert dans le cadre du projet. Lors de cette présentation, la CMO remet aux détenus une feuille (fiche de détermination des besoins) et les invite à cocher ce dont ils estiment avoir besoin en termes d’accompagnement et de recherche d’emploi à leur sortie de détention. L’instauration de cette activité (qui n’existait pas au début du projet) a, selon certaines des personnes interrogées, facilité le recrutement de détenus.

Les services offerts par la CMO et l’agent de liaison communautaire sont également annoncés dans les journaux à l’interne. Ceux-ci paraissent deux fois par année, dont notamment autour de la Saint-Jean-Baptiste, ce qui permet de rappeler aux détenus qu’ils peuvent venir les rencontrer tout l’été, car ceux-ci les associent souvent à l’année scolaire et croient qu’ils n’offrent pas de services durant cette période.

Le recrutement et la référence se font également par l’intermédiaire de l’enseignant, de l’aumônier ou des agents des services correctionnels de l’établissement de détention qui peuvent soumettre le nom d’un détenu qui souhaite les rencontrer à la CMO ou à l’agent de liaison communautaire. Ces intervenants peuvent aussi remettre aux détenus la fiche de détermination des besoins (tous en ont à leur disposition) qu’ils pourront remplir et remettre à la CMO ou à l’agent de liaison communautaire lors de leur rencontre.

« Avec les partenaires à l’interne, les agents correctionnels nous référaient certains cas précis, surtout lorsqu’ils avaient des échanges avec des détenus et que ces détenus leur mentionnaient vouloir trouver du travail ou qu’ils avaient des problématiques en lien avec leur réinsertion. »

Pour les détenus du secteur maximum, le processus de référence vers la CMO ou l’agent de liaison communautaire est sensiblement le même qu’au secteur minimum (le pavillon socioculturel et sportif relève du secteur minimum), sauf que ces détenus ne peuvent circuler librement dans l’établissement de détention et se présenter à leur local. Ils doivent donc faire leur demande par écrit, au moyen d’un mémo12.

L’agent de liaison communautaire reçoit quotidiennement de la part des agents des services correctionnels une liste indiquant la date de libération possible des détenus sur une période d’un mois à un mois et demie. Cette information lui permet de sélectionner ceux qui sont sur le

12. Le mémo est un formulaire en trois copies que les établissements de détention utilisent beaucoup. C’est de cette façon que les détenus font une demande aux agents des services correctionnels ou à tous les autres intervenants de l’établissement de détention, que ce soit pour rencontrer le médecin, l’aumônier, la CMO ou l’agent de liaison communautaire.

15 point de sortir, d’aller les rencontrer pour leur expliquer les services qu’il offre et, s’ils sont intéressés, d’établir avec eux un plan d’action en lien avec leur libération.

« […] Avec la liste des personnes incarcérées, toute la clientèle est là, sans exception, en principe tu ne peux pas en manquer, tu ne peux pas ne pas avoir tenté d’offrir le service à une personne incarcérée. »

Le bouche-à-oreille entre les détenus permet également de recruter des personnes pour participer au projet.

C’est l’ensemble des personnes de l’établissement de détention (enseignant, aumônier, agents des services correctionnels, détenus, etc.) qui, somme toute, collabore au recrutement ou à la référence des personnes incarcérées au projet.

« […] C’est pas mal tout le monde en détention qui travaille en équipe pour nous référer des clients […] »

La priorisation des personnes référées

Parmi les détenus qui leur sont référés, ceux qui seront libérés sous peu et dont la date de sortie est connue seront rencontrés en priorité. Il s’agit bien souvent de ceux qui ont accompli le deux tiers de leur peine d’incarcération et dont la date de libération probable est connue.

« On commence par eux, puis là des fois on est quasiment sur une liste d’attente tellement on a beaucoup de monde à aider […] C’est sûr, les deux tiers on sait qu’ils sortent à cette date-là, on est capable de mettre une date puis de dire l’agent de liaison les accompagne tel jour à leur sortie. »

Ils s’attarderont ensuite aux détenus dont ils ne connaissent pas précisément la date de sortie, soient ceux qui ont fait une demande de permission de sortie préparatoire à une libération conditionnelle (un sixième de la peine d’incarcération) et ceux qui sont admissibles à la libération conditionnelle (un tiers de la peine d’incarcération).

Quant aux personnes dont la date de libération est plus éloignée, l’agent de liaison communautaire les rencontrera une fois par semaine pour leur parler quelques minutes et ainsi s’assurer de maintenir active leur demande de services d’accompagnement à leur sortie de détention.

L’établissement de détention compte aussi des détenus qui n’y demeurent pas longtemps en raison d’un transfert à un autre établissement ou parce qu’ils seront libérés prochainement.

Souvent, la CMO n’aura pas le temps de les rencontrer et de faire la partie du plan d’action traitant de leur employabilité. Dans de tels cas, c’est l’agent de liaison communautaire qui réalisera un plan d’action avec eux. Il leur remet alors de la documentation sur les services offerts dans la communauté qui pourraient les aider et s’assure également qu’ils pourront obtenir de l’aide financière de dernier recours à leur libération.

Les motifs d’acceptation pour participer au projet

Un des motifs pour accepter de participer au projet est l’aide que l’agent de liaison communautaire peut apporter aux participants à leur libération, car plusieurs ressentent une grande insécurité à cette étape. C’est un moment souvent très stressant pour eux.

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« […] Il y a des gars qui pleurent à la porte de la prison parce qu’ils […] ne savent pas où aller. »

Lorsque le détenu remplit la fiche de détermination des besoins, il prend souvent conscience de l’accompagnement que l’agent de liaison communautaire sera en mesure de lui offrir à sa libération. À ce moment-là, ils « sont comme wow… […] C’est ça que j’ai besoin ».

La possibilité pour le détenu de poursuivre ses démarches d’employabilité une fois libéré est également une raison évoquée pour participer au projet. À cela s’ajoute l’aide souhaitée pour répondre à ses besoins de base en termes de nourriture, de logement, d’aide financière de dernier recours, etc.

Le fait d’avoir accès à une ressource qui connaît l’offre institutionnelle communautaire pouvant répondre à certaines des problématiques que les détenus sont susceptibles de vivre à leur libération est un autre motif évoqué pour choisir de participer au projet. Les détenus perçoivent l’agent de liaison communautaire comme une ressource qui encadre ce processus.