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le président. La parole est à Armengaud,

M. Armengaud. Mes chers collègues, il va de soi qu'après . les explications de M. le secrétaire d'État aux affaires étran­

gères, je retire mon amendement.

Je prends acte simplement de ce que le représentant du Gou­

vernement a fait siennes les observations que nous avons pré­

sentées sur l'ensemble des charges improductives de l'État.

Il est donc indispensable qu'avant la fin de l'année un débat clair et précis s'instaure sur cette question.

M. le président. L'amendement est retiré.

•Par amendement (n° 7), MM. Rochereau, Armengaud, Valen­

tin, René Dubois proposent d'insérer in fine un article addition­

nel ainsi rédigé :

« 11 est .institué un conseil national du marché commun, com­

posé de douze membres désignés par décret pris en conseil des ministres, qui seront inamovibles et choisis dans les conditions ci-après :

« Un conseiller d'État, président;

« Cinq personnalités choisies parmi les membres du Conseil économique et des grands corps de l'État;

« Six personnalités choisies à raison de leur compétence en matière industrielle, agricole et financière, et des responsabi­

lités professionnelles qui sont, ou ont été, les leurs, dans les divers secteurs de l'activité nationale.

« Le conseil adressera deux fois par an au Gouvernement un rapport sur la situation de la France dans le Marché commun.

Le Gouvernement devra soumettre à son avis les projets de loi et les projets de décret relatifs à la mise en œuvre des mesures prévues à l'article 2.

« Un règlement d'administration publique déterminera en tant que de besoin, dans un délai de deux mois, les conditions d'ap­

plication du présent article. » La parole est à M. Rochereau.

M. Rochereau. Je voudrais tout d'abord remercier M. le secré­

taire d'État aux affaires étrangères de la réponse qu'il m'a * donnée à la demande que j'avais formulée l'autre jour, qui

tend à la création d'un conseil national du marché commun.

Je voudrais simplement faire une observation sur cette réponse.

M. Maurice Faure m'a dit que, d'accord sur le principe du conseil national du marché commun, il ne pouvait donner de réponse précise quant à la composition de ce conseil qui pour­

rait être ou bien une commission ad hoc parementaire, ou bien au contraire une commission extraparlementaire.

Sans vouloir lui demander une réponse qu'il ne peut pas me donner, je le sais, car la décision appartient non seulement au ministre des affaires étrangères mais aussi probablement au Gouvernement tout entier, je voudrais tout de même lui indi­

quer nos préférences. Elles vont incontestablement au conseil extraparlementaire pour la raison bien simple que ce conseil devra être constitué par des personnalités ayant des connais­

sances très précises en la matière. Je préfère que les hommes politiques restent des hommes politiques et qu'ils ne confondent par leurs fonctions politiques avec des compétences techniques que peut-être ils n'ont pas.

M. Durand-Réville. Très bien!

M. Rochereau. Je voudrais que ce conseil comprenne à la fois des professionnels, des juristes de haut grade et des écono­

mistes. C'est la raison pour laquelle les auteurs de l'amende­

ment préfèrent que ce conseil soit extraparlementaire.

• Il m'est impossible, pour une autre raison, de demander une réponse à M. le secrétaire d'État. La motion préjudicielle de M. Durand-Réville a été votée par le Conseil. Elle prévoit notam­

ment la création, au niveau de la présidence du conseil, d'un comité de la zone franc, création que nous avons toujours

réclamée ici.

Pourrons-nous maintenir les deux conseils ? Ces deux conseils fusionneront-ils ? Y aura-t-il un organisme commun ? Il est bien tôt pour répondre. Vraisemblablement, monsieur le minis­

tre, vous ne pouvez pas le faire et je vous comprends très bien. L'objet de mon intervention se limitera d'abord à préciser que nous voulons un conseil extraparlementaire pour les raisons que j'ai indiquées; ensuite, de vous remercier de votre réponse.

Je retire l'amendement.

M. le président. L'amendement est. retiré.

Par amendement (n° 8 rectifié), MM. Armengaud et René Dubois proposent d'insérer in fine un article additionnel ainsi rédigé :

« Les délégués de la France à l'Assemblée unique instituée par l'article 1er de la convention relative à certaines institutions

1752 CONSEIL DE LA REPUBLIQUE — 2e SEANCE DU 23 JUILLET 1957

communes aux communautés européennes adressent chaque année un rapport d'information à l'Assemblée qui les a dési­ gnés. »

La parole est à M. Armengaud.

M. Armengaud. Cet amendement tend simplement à demander au Conseil de la République — il en serait de même à l'Assem­

blée nationale — d'inviter ses représentants à l'assemblée com­

mune à faire rapport tous les ans de tout ce qui s'est passé au sein de la C. E. C. A. afin que notre assemblée soit mieux infor­

mée qu'elle ne l'a été jusqu'ici des difficultés rencontrées par vos délégués.

Il se trouve qu'au moment où j'ai déposé cet amendement j'apprenais que M. François Valentin avait dans son .rapport sur le règlement prévu un article 111 tendant au même but.

Si donc le Gouvernement veut bien confirmer qu'il ' est d'accord sur ces dispositions, et qu'il invitera nos collègues l'Assemblée nationale à agir de même, je retirerai bien volontiers cet amendement qui serait une tautologie de la pro­

position de M..Francis Valentin.

M. le ministre. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre. Le Gouvernement estime que le principe à savoir que les délégués de l'assemblée ou un organisme fassent au moins chaque année un rapport d'information à l'assemblée qui les a désignés est parfaitement normal. On peut regretter que cela n'ait pas été fait pour les organismes existants. Cela regarde en réalité chacune des assemblées mais le Gouvernement est favorable à cette solution..

M. Alain Poher. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Poher.

M. Alain Poher. Monsieur le ministre je voudrais appuyer lin peu les explications de M. Rochereau et relayer M. Armen­ gaud.

Je pense qu'il serait préférable que les délégués soient extra parlementaires. Cela n'empêcherait pas le groupe des deux assemblées, Assemblée nationale et Conseil de la République, de se réunir et de travailler en collaboration avec les comités désignés. Je souhaiterais qu'il soit un peu internationalisé. Je ne sais ce que l'on jeut faire pour arranger les choses. Je pense que c'est à retenir pour l'avenir.

M. le secrétaire d'État. Incontestablement, nous aurons à résoudre tous ces problèmes.

M. le président. L'amendement est-il maintenu i

M. Armengaud. J'ai indiqué que j'étais tout disposé à l'avance à retirer l'amendement et cela pour deux raisons: la première, c'est que j'attendais une réponse favorable du Gou­

vernement et elle est arrivée ; la deuxième, c'est que M. Valen­

tin avait prévu dans les modifications du règlement les mêmes dispositions.

M. le président. L'amendement est retiré.

Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Delrieu qui désire expliquer son vote.

M. Delrieu. Mes chers collègues, rassurez-vous, je serai très bref dans mon explication de vote.

Je regrette que la commission de l'intérieur du Conseil de la République n'ait pas été appelée à donner son avis sur le traité de la communauté économique européenne. En effet, l'article 227 créé pour l'Algérie a un régime particulier d'inté­

gration progressive dant ladite communauté. Or ces questions relèvent normalement de la compétence de la commission de l'intérieur.

N'appartenant pas aux commissions ayant eu à connaître de ces problèmes et ne possédant pas plus les uns que les autres d'ailleurs la faculté d'amender le traité, je désire attirer l'atten­

tion du Gouvernement sur quelques points importants.

Pour l'heure, la plus grande richesse des départements algé riens réside dans leur potentiel humain. La démographie de ces régions pose le problème ma jeur du plein emploi de la jeunesse. Nous savons tous qu'il demeure insoluble sur le seul plan local. Ce phénomène de distorsion entre la démo­

graphie et l'économie constitue l'une des causes les plus pro­

fondes du malaise algérien. C'est lui qui alimente le mécon tentement des jeunes et provoque pour partie leurs recherches désspérées d'une formule politique nouvelle,

Je vois dans les possibilités offertes à la main-d'œuvre algé*

rienne pat le marché commun une solution exceptionnelle.

C'est pourquoi je déplore le non automatisme en faveur des départements algériens des articles du traité concernant les

travailleurs et les mesures sociales.

La question est grave. Je signale au Gouvernement le danger"

de toute faute politique dans ce domaine. Je souhaite qu'il utilise très rapidement son crédit auprès du conseil européen pour résoudre les difficultés d'application et les éventuelles réserves des cosignataires.

Je prends acte de la déclaration faite tantôt par M le secré­

taire d'État à ce sujet et je l'en remercie.

De plus, je souhaite que les chapitres réservés par l'arti­

cle 227 soient étendus dès que possible aux départements algé­

riens.

En matière de transports, par exemple, je ne pense pas que le monopole du pavillon puisse être maintenu dans l'avenir.

Les différentes productions industrielles ou agricoles des dépar­

tements algériens risqueraient d'être écrasées par ce handi­

cap.

Je m'élève aussi, contre la mesure discriminatoire qui écarte l'agriculture algérienne du bénéfice du fonds d'orien

tation.

En bref, je reproche aux négociateurs d'avoir admis trop facilement, par l'article 227, des différenciations qui repré­

sentent autant de fêlures dans notre ensemble politique.

Je comprends fort bien que certaines mesures puissent être différées en vue de la réussite finale. Mais le rapprochement des disciplines sociales, et économiques devra être très rapide sous peine de faillite du système.

Pour conclure, j'accepte les précautions de l'article 227, sous la réserve du règlement réel de ces problèmes dans le délai de deux ans prévu par les cocontractants.

Je fais davantage confiance à l'esprit qu'à la lettre du traité.

C'est pourquoi, malgré ces réserves, je le voterai. (Applaudis -sements.)

M. le président. La parole est à M. Berthoin.

M. Jean Berthoin. 'Mes chers collègues, au terme de ce vaste et très beau débat au cours duquel des thèses diverses ont été exposées avec autant de clarté, d'ampleur que de talent, la mission m'est échue d'expliquer le vote favorable qui sera celui de la quasi-unanimité des membres du groupe de la gauche démocratique.

Cette explication sera brève. Elle sera grave aussi, comme la décision que nous allons prendre par laquelle la nation sera engagée sur un très rude chemin probablement sans retour.

Combien il serait facile, du moins en apparence, de dire tout simplement non aux traités qui nous sont proposés. Cependant, je vous le demande, mes chers collègues, après toutes les interventions sur ce point concordantes que nous avons enten­

dues dans cette enceinte, oui pourrait un seul instant penser que, avec ou sans marché commun, nous pourrions continuer de vivre dans l'état de choses où, trop longtemps, nous nous sommes complus ?

Tout s'est jusqu'ici passé comme si la France était une immense usine à l'intérieur de laquelle, sans souci du lende­

main, on consommerait l'essentiel de la production, en oubliant que l'énergie qui fait tourner cette usine est, pour une part décisive, commandée par un compteur placé au dehors, que le relevé de ce compteur nous est présenté et que nous n'avons qu'un moyen simple, honnête et digne d'acquitter la note, c'est de consommer moins pour nous-mêmes, et de faire en sorte de vendre à l'extérieur une partie suffisante de notre production si nous ne voulans pas que l'on nous coupe le courant ou nous voir réduits à demander toujours de nouveaux délais, de nouveaux crédits dans lesquels nous finirions par engloutir ce qui nous reste de richesses propres, par hypothé­ quer nos espérances et aliéner ce que, dans le monde actuel, il est possible de conserver encore d'indépendance et de liberté.

Parce que, mes chers collègues, nous aurons préféré l'immé­

diat et le plus commode. voilà où nous' sommes parvenus et voilà à quoi, avec ou sans marché commun, il faut de toute manière que remède soit porté. Rejeter le traité ? Hélas! n'en doutons pas, le passé récent est là pour le prouver, ce serait, comme si c'était possible, une fois encore repousser l'effort, se boucher les yeux devant l'inévitable, ce serait reculer devant la voie sévère, la seule pourtant désormais qui demeure ouverte pour nous! Mais combien cette voie nous apparaît plus redou­

table si nous devons nous y engager, selon l'expression juste de M. le président Rochereau, sous la loi de la jungle, dans une lutte solitaire et sans merci I

CONSEIL DE LA REPUBLIQUE — 2° SEANCE ' DU 23 JUILLET 1957 1753

Accepter les traités ? c'est accepter l'effort, mais l'accepter

dans un cadre défini, avec des garanties réciproques, selon 1 des

étapes fixées qui sont autant de buts à atteindre l'un après

l'autre et qui, par conséquent, vont nous obliger, dans une discipline ordonnée, à laquelle constamment le pays doit être

appelé, au rajeunissement de certaines de nos structures, de nos conceptions économiques sans quoi, pour nous, de toute

manière, il n'y aurait plus de salut! * • Les contacts vont s'établir et se multiplier entre les pays ■ membres, entre les groupements professionnels et syndicaux,

entre les parlements, entre les administrations. Pourquoi

serions-nous les plus faibles, les vaincus d'avance dans cette

compétition, nous qui sommes le peuple d'Europe à l'expé­

rience la plus longue et la plus diverse, nous qui serons demain le peuple à la jeunesse la plus nombreuse, donc le plus ardent parmi nos associés ?

Pourquoi ne pas penser que, finalement, les pays et les êtres

qui les animent, dans tous les sens du terme, gagneront à se-mieux connaître, à se se-mieux comprendre et, serait-il interdit de l'espérer, peut-être aussi finalement à se mieux aimer ? Mais voter la ratification — presque tous les orateurs l'ont déclaré, M. le secrétaire d'État à la fin de son si beau discours le laissait comprendre, et M. Michel Debré, avec une force singulière, l'a dit tout à l'heure — voter la ratification des traités, c'est prendre aussi conscience de tout ce qu'il nous faut nécessaire­

ment décider pour réveiller le civisme, pour redresser les mœurs de notre vie publique, pour adapter aux tâches du présent notre pratique de la direction, du commandement de l'État — de cet État que l'on cherche — pour ajuster au plus vite le fonctionnement des institutions de la République et, au besoin, les réformer.

Voilà où gît, en vérité, mes chers collègues, notre vraie faiblesse. C'est là aussi, pour nous parlementaires, que se situe notre pleine responsabilité dont la juste appréciation devrait enfin nous conduire par delà les questions mineures, les faux

problèmes et la démagogie qui le plus souvent les habille, à

nous rassembler tous autour de l'essentiel, à savoir pour l'immédiat, l'équilibre de la métropole et de l'outre-mer et le redressement de nos comptes.

Au moment où, délibérément, conscients de tout ce qu'un tel geste comporte d'engagement de notre part, au moment où nous allons vous suivre, messieurs les ministres, dans la voie que les traités nous proposent. je voudrais que mes collègues ïne permettent de vous dire que, plus que jamais pénétrée de son rôle, de ses devoirs et de ses droits, cette Assemblée, j'en ai du moins le sentiment, devant les objectifs qui sont mainte­

nant définis, se montrera, pour l'action gouvernementale plus attentive' plus stricte, et s'il le fallait plus sévère, car plus que jamais, elle est convaincue que la réussite ou l'échec de cette 1 entreprise grandiose est entièrement commandée par la clair­

voyance, le courage et la volonté, en bref par le caractère dont les" pouvoirs publics sauront faire preuve et dans la mesure où, ces vertus capitales, l'État se montrera capable de.les insuffler à toute la nation. ( Applaudissements .)

M. le présidant. La parole devrait être à M. Henry Torrès, ' mais, souffrant, celui-ci a prié M. Debu-Bridel de le représenter

et de lire sa déclaration. . '

La parole est à M. Debu-Bridel.

M. .Jacques Debu-Bridel, au nom de M. Henry Torrès. Mes chers collègues, M. le président vient de vous l'indiquer, je - suis chargé par mon camarade et ami Henry Torrès, souffrant, de vous lire l'explication de vote qu'il comptait présenter au nom de quelques-uns de nos amis et que voici.

M. le secrétaire d'État aux affaires étrangères a mis

l'ac-„ cent sur l'aspect politique de ce débat. C'est, à cette heure - tardive, sur le seul plan politique, le plan essentiel, que

j'entends me placer.

Je voterai contre la ratification d'Euratom et du marché com­

mun parce qu'ils constituent deux des engrenages économi­

ques du système politique de l'Europe à six, de la petite Europe.

Système arbitraire, système faux, qui prétend constituer en entité vivante une simple création de l'esprit et dont on peut dire qu'il est déjà dépassé par le mouvement de la vie et la marche de l'histoire.

L'unification de l'Europe, de toute l'Europe, est conforme à l'évolution humaine. L'unification de l'Europe à six n'est qu'un artifice qui tend, non pas à préparer, à préfacer, mais à retar­

der, à contrarier l'union du continent européen.

C'est pour cette raison majeure que j'ai combattu la Com­

munauté européenne du charbon et de l'acier comme la Com­

munauté européenne de defense et les accords de Paris. Qui pourrait contester que, dans cette Europe à six, dont l'étreinte va se resserrer encore, nous sommes prisonniers ? Prisonniers/

car nous perdons nécessairement, obligatoirement, notre

; liberté de renforcer notre alliance avec la chère Angleterre et, •

ce qui n'est pas moins grave, nous abandonnons 'délibérément • : les chances qui s'offrent à nous de nous rapprocher des nations,' européennes au cœur desquelles nous avons gardé par la seule

: force des choses tant d'amitiés. La libéralisation des échanges : humains,, don le rythme= s'accélère chaque jour derrière le rideau de ier, devrait.permettre de reprendre nos positions, commerciales, culturelles, morales dans des pays où l'influence, de la civilisation française demeure si vivante. - •

J'en appelle au témoignage de tous les membres de cette

Assemiblée, quel que soit leur parti, qui sont allés récemment'

en Pologne, en Tchécoslovaquie, en Roumanie, en Bulgarie —

et je.ne veux oublier ni d'une part la Hongrie, ni de l'autre la Yougoslavie. Partout on y espère la France. Pour notre pays,

quel proche et magnifique avenir si nous ne nous enfermions

pas nous-mêmes dans le carcan de l'Europe à six!

Je n'omettrai pas non plus, en traçant â larges traits le.

tableau d'une grande politique nationale, la Russie, notre alliée traditionnelle, notre alliée naturelle.

Dans le débat sur la ratification de la Sarre, M. Maurice Faure, "

déjà secrétaire d'État aux affaires étrangères, nous disait, le 26 décembre 1956, qu'il fallait établir des ordres de priorité et, pour parer au péril soviétique, se rapprocher de plus ea plus étroitement de l'Allemagne.

Je me refuse une fois de plus à me laisser enfermer dans ce dilemme arbitraire, mais j'entends affirmer très haut que s'il me fallait jamais opter, je ne choisirais pas l'Allemagne.

M. le président. La parole est à M. Aguesse.

M. Aguesse. Mes chers, collègues, le groupe du mouvement républicain populaire votera pour les traités du marché com­

mun et de l'Euratom. La première raison de ce vote — elle ne surprendra personne — réside dan^ la conscience que nous avons de la solidarité européenne et des exigences qu'elle impose. Certains de nos collègues — ils s'apprêtent à le mani­ fester par leur vote — se font encore mal à l'idée que cette.

solidarité doive s'affirmer et se traduire dans des formes nou- , velles pour avoir une efficacité suffisante, pour devenir une

réalité. '

A ceux qui s'apprêtent à repousser les traités au nom de , l'indépendance et de la grandeur françaises, nous disons que nous sommes sensibles à la noblesse, sinon à la légitimité, de.

leurs inquiétudes, mais nous leur demandons en retour de ne.

pas déformer les motifs qui nous font choisir une attitude dif­ férente de la leur. Nous ne pensons pas avoir à élever la voix pour rappeler à ces collègues que le bien de cette nation, son prestige, son avenir,' nous tiennent à cœur autant qu'ils leur

sont chers.

Lorsque nous affirmons la nécessité où se trouve l'Europe de s'unir, nous ne concevons pas pour autant que notre pays puisse s'effacer, ni se fondre. La France n'est pour nous ni Athènes à son déclin, ni le Texas à son aipogée. •

Nous partons simplement d'une vérité que l'histoire nous enseigne depuis longtemps et qu'elle nous a rappelée depuis quelques dizaines d'années avec une dureté accrue, à savoir que les intérêts de la France et de l'Europe sont liés, que leurs sorts sont inséparables et que notre nation et les ■ autres doi­

vent créer les moyens, qui leur ont fait cruellement défaut dans le passé, d'assurer ensemble ce destin commun.

Sans doute, les nations qui occupent la partie demeurée libre de l'Europe ont-elles aujourd'hui perdu le goût et peut-être même la possibilité de s'entre-déchirer. Mais nous pensons que leur état de faiblesse ne fait que renforcer leur commun devoir. Il leur appartient, ipar la coordination de leurs desseins et de leurs efforts, de rendre à cette partie du monde le poids et l'influence que, face aux puissances géantes, elle a précisé,-,

ment perdus. ' '

D'autres collègues s'opposent à la ratification non plus au nom

• de la grandeur, mais en plaidant la faiblesse de notre pays.

Ils nous disent que la France devrait attendre parce qu'elle n'est pas prête. On nous parlait tout à l'heure de l'Allemagne, d'après guerre. Nous avons attendu en effet,, comme le disait le ministre des affaires étrangères, avec la République alle­

mande et nous avons dû ensuite accorder à Hitler dix fois, vingt fois plus que nous n'avions refusé à Weimar. Ensuite, lorsque commença la période de l'irréparable, à chaque provocation

on nous demandait, au nom de notre prétendue impréparation

du moment, d'attendre la provocation suivante qui devait, celle-là, disait-on, faire éclater la perfection de nos préparatifs à la grande confusion des provocateurs.

De la remiUtarisation de la Rhénanie à la chute de Vienne,

à la conquête de Prague et au siège de Varsovie; de la guerr§