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La sécurité d’approvisionnement sur le Marché Intérieur de l’Electricité (MIE)

3.1. Le MIE dans la politique énergétique de l’UE

3.1.1. Le MIE face aux défis de la politique énergétique : l’environnement et la dépendance extérieure

Le chapitre 2 a montré que la définition de la sécurité énergétique et de la politique énergétique étant une conséquence directe du bilan énergétique de l’acteur donné et de sa position dans le système énergétique international, varie d’une région à l’autre.

Quelle est alors la perspective européenne ? Les défis majeurs sont la dépendance vis-à-vis de l’énergie importée et la lutte contre le changement climatique. Les deux constituent pareillement un défi pour la sécurité d’approvisionnement en électricité. Parallèlement le MIE est vu comme un moyen pour les affronter.

En ce qui concerne le premier enjeu, la production d’énergie primaire de l’UE ne suffit aujourd’hui à satisfaire que 50 % de sa consommation. Le reste manquant doit donc inévitablement être importé (voir Annexe 2). Cette situation n’étonne pas, vu que l’ensemble des régions d’Europe, mises à part quelques exceptions dans la Mer du Nord, ne possèdent pas de ressources pétrolières ou gazeuses.

La situation se renverse quand on parle de l’électricité, où l’Europe est presque autosuffisante. En 2004, moins de 0,2% de l’électricité nécessaire pour satisfaire la consommation a été importée de pays hors de l’UE102. Mais le « courant » n’est qu’une énergie issue de la transformation d’autres sources ; si l’on regarde la part des matières premières dans la production brute d’électricité (voir le Graphique 6), la première place revient au nucléaire, puis aux combustibles solides (essentiellement le charbon) et finalement au gaz naturel, pour les plus importants. A la quatrième position on trouve les énergies renouvelables et enfin, le pétrole.

102 Jean-Marie CHEVALIER, Jacques PERCEBOIS, op. cit., p. 23.

Graphique 6. Production brute d’électricité par source d’énergie en 2002 (UE-25)

Source : Elaboration de l’auteur d’après : COMMISSION EUROPÉENNE, Livre vert : Une stratégie pour une énergie sûre, compétitive et durable, COM (2006) 105 final, Bruxelles, le 8 mars 2006.

Bien que le charbon reste une question de politique nationale103, car cette ressource est assez abondante en Europe et ses marchés internationaux concurrentiels, l’uranium voit aussi son prix mondial dicté par le marché. La situation du gaz est compliquée. Les contraintes infrastructurelles rendent impossible le changement rapide de ses fournisseurs, qui sont respectivement la Russie, l’Algérie et la Norvège.

L’investissement dans un gazoduc lie pour longtemps le client et le producteur, ce qui est un facteur de renforcement de la dépendance. En 2000, l’UE a importé 40 % de ses besoins de ce combustible104 et les prévisions pour l’an 2030 indiquent que cette dépendance va monter jusqu'à 80 %105.

La situation peut être inquiétante quand on constate que la demande de gaz va augmenter davantage, selon les deux scénarios désignés par l’AIE (voir Graphique 7). Cette montée sera alimentée, en outre, par le nombre croissant des turbines à gaz combinées à haute performance. Même si l’on a démontré (voir p. 53) que la libéralisation, per se, n’engendre pas une grande augmentation de la consommation du gaz, en Europe c’est une matière fossile relativement accessible et bon marché. De plus, le gaz naturel dispose d’avantages écologiques, comparé aux autres combustibles, avec notamment une teneur moins élevée en gaz carbonique et moins d’émissions de gaz nocifs que le charbon et le pétrole. Pour cette raison, l’utilisation du gaz pour la génération électrique croît, même si l’approvisionnement en charbon reste relativement bon marché.

103 David M. NEWBERRY, op. cit., p. 2.

104 COMMISSION EUROPEENNE, Livre vert : Une stratégie pour une énergie…, op. cit., p. 3.

105 Ibid.

Graphique 7. Composition des sources d’électricité dans l’UE-25 en 2004 et 2030

Source : IEA 2006, dans Jan Horst KEPPLER, op. cit., p. 11.

Dans cette perspective la Russie, qui détient les plus grands gisements de gaz au monde, est appelée à devenir un fournisseur incontournable pour l’Europe. Déjà à l’heure actuelle, plus de 46% du gaz consommé par l’UE est d’origine russe106. Ce pourcentage ne représente que la moyenne communautaire et cache des réalités contrastées. Dès lors, les pays Baltes, la Finlande et la Slovaquie dépendent à 100% du gaz russe, tandis que la Roumanie n’en dépend que pour 29%, l’Italie, et la France pour 26% (voir le Graphique 8).

Le niveau de la dépendance du gaz pour la production de l’électricité n’est bien sûr pas le même dans tous les Etats membres. Il dépend de la structure des parcs de production électrique. Celle-ci a été influencée par la même logique de planification qui est à la base des investissements faites sur les prévisions de demande à long terme et par la disponibilité des ressources énergétiques domestiques. Par exemple, en France, le parc nucléaire est le résultat d’une volonté de pallier la rareté des ressources en énergies fossile et de réduire la dépendance vis-à-vis des hydrocarbures. De la même façon, les barrages construits dans les Alpes quelques décennies auparavant furent les premiers grands investissements électriques, qui permettent d’exploiter le très fort potentiel hydraulique des massifs montagneux français.

106 Origine de l’exportation de gaz à l’UE 27 en 2005 : 46% la Russie, 27% la Norvège, 20% l’Algérie, 7% autres, Source : Jean-Arnaud VINOIS, Directorate General for Energy and Transport, « Security of gas supply: Gas CoordinationGroup », Presentation for European Energy Forum Dinner Debate, Brussels, 27 February 2008, http://eurogas.waxinteractive3.com/uploaded/European%20Energy%20Forum%20Dinner%20debate%20Gas%20 Coord%20Group.pdf.

Graphique 8. Taux de dépendance de certains pays européens envers le gaz russe

Source : Bichara KHADER, « Géopolitique européenne de l’énergie », Diplomatie, no 25, mars-avril 2007, p. 42.

L’Allemagne, l’Espagne et les pays de l’Europe centrale (voir Graphique 9) ont développé leur système autour de centrales à charbon afin d’exploiter les ressources locales. Et si le Royaume-Uni a pu basculer de la houille au gaz, c’est avant tout parce que d’importantes réserves ont été découvertes en mer du nord britannique.

Il a donc existé un fort déterminisme quant au choix des techniques de production fondé sur les dotations en ressources naturelles. Mais les progrès techniques réalisés sur les turbines à gaz et la réorganisation du marché du gaz naturel ont provoqué un retournement de tendance: bien que la plupart des pays d’Europe soient de gros importateurs, les projets d’investissement électrique sont, dans une grande partie, à partir de gaz naturel107. Pour cette raison, la dépendance de gaz ne peut pas être négligée car elle fait peser sur l’Europe et son secteur électrique un nouveau risque: celui de l’évolution du prix du gaz et de la dépendance envers de la Russie.

Sauf quelques épisodes (par ex. : différend ukraino-russe), la fourniture du gaz russe est stable depuis une trentaine d’années, assurée par les contrats à long terme. La dépendance de l’UE envers ses approvisionnements est néanmoins perçue comme une menace pour la sécurité de la génération de l’électricité en Europe. Il y a plusieurs raisons à cela.

107 Dans les pays comme la Grande-Bretagne, mais aussi en France, Belgique, Italie, voir Jan Horst KEPPLER, op.

cit., p. 11.

Graphique 9. Production nette d'électricité pour différents pays d'Europe en 2002

Source: Sylviane TABARLY, « Électricité en réseau : solidarités et dépendances », Géoconfluences, Brève no 5, 2003, http://geoconfluences.ens-lsh.fr/doc/breves/2003/03-5.htm.

Tout d’abord, comme le souligne Khader108, la Russie et l’UE ne partagent pas la même vision de la gestion des ressources énergétiques. En Europe, le marché gazier fait l'objet d'une libéralisation, même si elle progresse plus lentement que celle du marché électrique109. En dépit de cela, les principes du marché ouvert, promus par l’Union, restent intacts ; ils encouragent la suppression des barrières politiques qui limiteraient l’accès à l’infrastructure et aux ressources pétrolières et gazières.

A l’opposé, pour la Russie, l’énergie permet de garder sa position et sa puissance sur la scène internationale et de réaliser ses ambitions stratégiques. Un certain « nationalisme énergétique » l’incite à maintenir le contrôle sur ces ressources stratégiques. Le gazier russe, Gazprom, détenteur d’un monopole, est sous gestion de l’Etat qui contrôle aussi tous les gisements. Ainsi s’explique la réticence russe à signer le protocole pour le transit de l’Energie lié à la Charte de l’Energie110, qui régit l'échange de l'énergie au niveau européen et qui dans sa forme actuelle, autorise les compagnies étrangères à accéder au réseau

108Bichara KHADER, « Géopolitique européenne de l’énergie », Diplomatie, no 25, mars-avril 2007, p. 41.

109 COMMISSION EUROPEENNE, Communication de la Commission au Conseil et au Parlement Européen. Rapport sur l’état d’avancement de la création du marché intérieur du gaz et de l’électricité, COM (2005) 568 final, 15 novembre 2005, p. 3.

110 La Charte Européenne de l'Energie est un premier accord relatif à l’aménagement de l’échange de l’énergie au niveau du continent européen. Elle fut signée en décembre 1991 par les 37 Etats de l’OECD et 12 républiques de l’ex-URSS. Cette Charte, conçue dans le respect de la souveraineté de pays signataires, les oblige à développer le marché de l’énergie en Europe selon le principe de la non-discrimination, du libre développement des prix des matières énergétiques et dans le respect de l’environnement. Son but était de créer un accord sur la fourniture des ressources énergétiques de l’Est, notamment celle du gaz et du pétrole, vers les pays de la CE, qui s’engageaient à partager leur technologie. Seule la Russie n’a jamais signé la Charte.

russe de gazoducs111. Evidemment, cela contredit les intérêts de la Russie qui considère son infrastructure gazière comme un avantage concurrentiel sur le marché et qui voudrait exercer sa position dominante soit à des fins économique, soit à des fins politiques. Ces intérêts ont été acquis au cours d’années d’investissements colossaux dans le secteur et devraient aujourd’hui être rémunérés112.

L’attitude nationaliste russe pose un problème à l’UE qui craint une cartellisation des infrastructures de transit qui mettrait l’UE à la merci d’un chantage politique (comme celle de Ukraine ou Russie-Géorgie).

De plus, l’enjeu devient d’autant plus important que les deux acteurs ont besoin l’un de l’autre. Pour la Russie, l’UE représente l'acheteur principal de l’énergie exportée et elle a besoin de ces crédits pour financer tous ses investissements infrastructurels113. Dans le cas de l’Europe, le voisin de l’Est est un fournisseur primordial pour satisfaire la demande. En même temps, les deux font des efforts pour réduire cette dépendance mutuelle : la Russie cherche des marchés chez les Chinois et les Indiens114, tandis que la Communauté essaie de diversifier les sources d’énergie utilisée (voir pp. 29).

Pour l’ensemble de ces raisons, il est impossible pour l'Europe de fonder la sécurité d’approvisionnement exclusivement sur les mécanismes du marché. Le recours aux mécanismes diplomatiques, comme décrit dans le chapitre 2.3.4., est nécessaire.

Le problème de la dépendance énergétique acquiert une nouvelle dimension quand on ajoute à ceci les enjeux environnementaux. La transformation et la consommation de l’énergie primaire sont responsables au niveau mondial, de plus de 90% des émissions globales de dioxyde de carbone (CO2)115- jugé comme le premier responsable du changement climatique. La prise de conscience de ce fait est aujourd’hui largement partagée par la majorité de l’opinion publique. Toutes les plus importantes organisations internationales comme l’ONU l’AIE et d’autres préconisent des politiques alternatives agissant sur les émissions de CO2.

Les objectifs fixés dans le protocole de Kyoto ne sont qu’une première étape116.

L’Europe est une des régions les plus avancées en ce qui concerne l’introduction de standards environnementaux. Depuis que le Conseil européen de Göteborg de 15-16 juin 2001117 a précisé la dimension sociale et économique de la Stratégie de Lisbonne de mars 2000118, en y incluant une dimension environnementale, celle-ci est présente dans chaque stratégie communautaire.

Or, les préoccupations environnementales obligent les acteurs européens à prendre les décisions qui au niveau politique présenteraient plus de contraintes, mais qui dans un rapport environnemental seraient plus raisonnables119. Ainsi, le repli vers le charbon, une ressource relativement abondante en Europe, qui diminuerait la dépendance envers les importations d’autres matières premières, n’est plus envisageable à cause des pollutions engendrées par la transformation du charbon.

111 Jos VAN GENNIP, op. cit., p. 5.

112 Nina KULIKOVA, « Mojet li enrgodialog Rossii s Evropoi stat rezultativnim ? », Fondsk.ru, 28 février 2007, http://www.fondsk.ru/print.php?id=599.

113 Bichara KHADER , « Géopolitique européenne de l’énergie », op. cit., p. 41.

114 Ibid.

115 Franco ROMERIO, op. cit, p. 31.

116 Les pays signataires du Protocole de Kyoto (les pays développés ou en transition vers une économie de marché comme la Russie) ont accepté globalement de réduire de 5,5% leurs émissions de gaz à effet de serre sur la période 2008-2012 par rapport au niveau atteint en 1990, par l’introduction du système de l’échange des droits à émettre entre pays industrialisés et même entre ces derniers et les pays en développement.

117 CONSEIL EUROPÉEN, Conclusions de la Présidence. Conseil européen de Göteborg de 15-16 juin 2001, SN 200/1/01 REV 1, http://www.consilium.europa.eu/ueDocs/cms_Data/docs/pressData/fr/ec/00200-r1.f1.pdf.

118 CONSEIL EUROPÉEN, Conclusions de la Présidence. Conseil européen de Lisbonne de 23-24 mars 2000, SN 100/00, http://www.ac-versailles.fr/orientation/Europe/documents/lisbone.pdf.

119 Ivan Antonino SOSA ESPINOSA, De la politique énergétique à la sécurité énergétique de l’Union européenne : vers une approche multidimensionnelle ?, Genève, Institut Européen de l’Université de Genève, 2008, p. 34.

Dans la stratégie récente inscrite dans les Conclusions de la Présidence du Conseil européen de Bruxelles 8-9 Mars 2007120 qui vise la politique environnementale et énergétique commune, les 27 Etats membres se sont mis d'accord sur les objectifs environnementaux ambitieux qui tendent à diminuer la consommation d'énergie, augmenter la part des énergies renouvelables et diminuer les émissions des gaz à effet de serre (voir p. 60).

Il faut noter que le secteur électrique est particulièrement ciblé dans cette lutte contre le réchauffement climatique. Un défi principal est de changer le bouquet énergétique et technologique et plus spécifiquement, diminuer la part des installations polluantes et augmenter celle des énergies renouvelables et des technologies « propres ». En conséquence, le niveau des investissements nécessaires pour augmenter la part des sources renouvelables dans le bilan énergétique constitue un défi pour tout le secteur électrique en Europe, pas seulement dans les Etats qui, comme la Pologne, basent leur génération électrique sur le charbon.

Pour conclure, les deux défis de la politique énergétique sont communs pour la sécurité d’approvisionnement sur le MIE. La dépendance accrue au gaz met la génération de l’électricité à la merci de ses exportateurs, en l’occurrence la Russie. Les engagements environnementaux représentent pour le secteur électrique un effort financier gigantesque qui va se refléter dans les prix croissants du courant.

De l’autre côté, le MIE est vu comme la réponse à ces deux défis. S’il apportait les bénéfices attendus, comme l’efficacité accrue et les prix moins chers, l’électricité pourrait remplacer les sources d’énergie dont les fournitures rendent l’Europe plus dépendante comme le pétrole dans le secteur du transport.

Malheureusement cela n’est possible qu'à une petite échelle121.

D’ailleurs, la Commission a toujours souligné que le marché est la meilleure garantie de la sécurité d’approvisionnement en matières premières si seulement ses règles sont respectées par tous les participants :

«The overarching concern of governments in producing and consuming countries is the same: we cannot afford to have energy become a geopolitical bargaining chip. More international rules can provide stability and fill the legal vacuum that is currently the source of international tension and insecurity...Trade policy can help producer countries find foreign markets, and consumer countries find resources beyond their borders. In providing a set of binding rules it can create the conditions for the huge investments - as much as $20 trillion according to the latest World Energy Outlook – that are needed in exploration and infrastructure in the next twenty five years»122.

Peter Mendelson, le Commissaire au commerce de l’UE argumente que le marché, via l’échange, est capable de gérer lui-même les approvisionnements en matières premières si seulement les conditions nécessaires pour son fonctionnement sont assurées et si l’énergie n’est pas utilisée comme un argument dans les duels politiques.

De même, en ce qui concerne les questions environnementales, comme déjà mentionné dans le chapitre 1.3.4., les mécanismes du marché, avec l’établissement des prix réels et une meilleure allocation des ressources en premier lieu, devrait de son côté inciter les consommateurs à économiser l’énergie.

120 CONSEIL EUROPÉEN, Conclusions de la Présidence. Conseil européen de Bruxelles 8-9 Mars 2007 », CONCL 1, 7224/07, REV 1, http://www.consilium.europa.eu/ueDocs/cms_Data/docs/pressData/fr/ec/93141.pdf.

121 COMMISSION EUROPÉENNE, Énergie — Maîtrisons notre dépendance, Office des publications officielles des Communautés européennes, Luxembourg 2002, p. 18.

122 Peter MANDELSON, Trade Policy and stable, secure and sustainable energy, Conference on Strategic Energy Policy Chart S3, Brussels, 21 November 2006,

http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=SPEECH/06/718&format=HTML&aged=0&language

=EN.

3.1.2. Le MIE et la sécurité d'approvisionnement comme les actions prioritaires dans le cadre de la politique énergétique de l’UE

3.1.2.1. Les objectifs de la politique énergétique

Depuis l’établissement de la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier (1950) et par la suite l’Euratom (1957), le processus de l’intégration européenne s’est impliqué dans la problématique des matières énergétiques. Pourtant, la politique énergétique en tant que telle est l’une des grandes absentes du traité de la Communauté Economique Européenne - CEE (1957) ainsi que de tous les traités de révision qui suivirent les Traités de Rome.

Les premières tentatives pour introduire le sujet dans l’agenda européen datent du 25 juin 1962, quand les trois exécutifs des Communautés Européennes ont communiqué au Conseil de la CEE un Mémorandum sur la politique énergétique123. Ce document a présenté un programme à connotation explicitement libérale; il faisait appel à l’établissement d’un marché commun de l’énergie et se référait à la sécurité d’approvisionnement énergétique, ainsi qu’à des mesures d’économie d’énergie et le respect de l’environnement. Depuis, ces trois objectifs sont restés inchangés.

La réponse du Conseil (ou plutôt le manque de la moindre action communautaire) a démontré la position que les Etats membres ont suivie jusqu’aujourd’hui : ils préfèrent toujours avoir le contrôle sur les décisions prises dans ce secteur. La réticence des Etats membres peut être expliquée par l’importance de l’énergie pour le fonctionnement de l’économie et de toute la société, ce qui rend toutes les décisions la concernant politiquement et socialement délicates. Les autres raisons sont : la dotation en ressources énergétiques, la structure du secteur énergétique et le rôle accordé aux différentes technologies énergétiques ainsi que le niveau différent de la dépendance énergétique et, en conséquence, les objectifs différents de la politique énergétique dans chaque Etat. La Grande-Bretagne, par exemple, est marquée par l’ouverture au marché international, les pays scandinaves, par les préoccupations environnementales, l’Europe centrale par les contraintes de la sécurité d’approvisionnement.

Pour ces raisons le développement de la politique énergétique commune progresse lentement. Même la crise du pétrole des années 70, n’a pas encouragé son développement. Les Etats ont préféré développer chacun leur propre système énergétique (dans le cas du gaz et de l’électricité) et résoudre indépendamment leurs problèmes d’approvisionnement (dans le cas du pétrole et du gaz). Suite à la relance du projet d’intégration dans les années 80 et 90, l’idée du marché intérieur a laissé de côté l’idée d’un marché de l’énergie, un concept qui n’a pas été repris avant 1993.

En revanche, la Commission n’a jamais cessé de promouvoir l’idée d’une politique énergétique et du marché intérieur d’énergie au niveau communautaire, en publiant constamment des rapports concernant la situation énergétique en Europe. Ces efforts ont été présentés depuis les années 90 sous la forme des livres « blancs » et « verts ».

A travers ces documents, trois objectifs de la politique énergétique émergent : la sécurité d’approvisionnement en énergie, la lutte contre le changement climatique et l’augmentation de la compétitivité de l’économie européenne. Pour la première fois ils ont été explicités dans le Livre vert de mars 2006, Une stratégie européenne pour une énergie sûre,

A travers ces documents, trois objectifs de la politique énergétique émergent : la sécurité d’approvisionnement en énergie, la lutte contre le changement climatique et l’augmentation de la compétitivité de l’économie européenne. Pour la première fois ils ont été explicités dans le Livre vert de mars 2006, Une stratégie européenne pour une énergie sûre,