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Le corépresseur IRF-2BP2 pourrait réguler spécifiquement les isoformes

Après avoir analysé le transcriptome et le protéome spécifiques à chacune des 12 isoformes de HNF4α, nous avons ensuite tenté d’intégrer ces différents ensembles de données dans le but d’identifier des profils similaires pour certaines isoformes. Il est important de mentionner que ces analyses sont encore très préliminaires, et pour cette raison nous n’avons présenté qu’un seul exemple de protéine que nous souhaiterions étudier pour la suite de ce projet de recherche. Évidemment, plusieurs autres régulateurs potentiels

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de la fonction transcriptionnelle des isoformes de HNF4α ont été identifiés et seront les sujets d’analyses plus approfondies.

Nous avons identifié le corépresseur IRF-2BP2 comme un nouveau corégulateur de HNF4α. Un autre corépresseur hautement similaire à celui-ci, IRF-2BP1, a également été identifié de la même manière, mais nous référerons seulement à IRF-2BP2 par souci de concision lors de cette discussion. Cette protéine a initialement été montrée pour être un corépresseur du facteur de transcription IRF-2, et plus récemment pour d’autres FT comme p53 et NFAT (Childs et Goodbourn, 2003 ; Koeppel et al., 2009 ; Carneiro et al., 2011). Nous avons identifié IRF-2BP2 comme un partenaire potentiel d’un sous-groupe d’isoformes de HNF4α. L’approche BioID a montré que les isoformes qui possèdent la forme courte du domaine répresseur F n’interagissaient aucunement avec ce corégulateur. Nous avons initialement validé par co-IP l’interaction d’IRF-2BP2 avec l’isoforme α2, soit celle montrant le plus fort ratio d’enrichissement pour cette protéine. Par la suite, nous avons tenté de reproduire le profil d’interaction différentiel détecté pour les 12 isoformes selon cette approche. L’essai n’a toutefois pas permis d’observer les mêmes différences, puisque la protéine IRF-2BP2 interagissait de façon similaire avec les 12 isoformes dans ce contexte (données non présentées). En rétrospective, l’approche de co-IP que nous avons choisie n’était pas la meilleure méthode pour identifier les mêmes interactions différentielles mesurées par spectrométrie de masse. Un premier problème était le fait que nous avions surexprimé à la fois l’isoforme de HNF4α ainsi que IRF-2BP2. Par contraste avec l’approche BioID, IRF-2BP2 était identifiée à partir de ses niveaux endogènes suite à l’expression modérée de l’isoforme de HNF4α. Ainsi, l’augmentation importante de l’expression des deux protéines étudiées limitait la possibilité de reproduire la détection des variations observées à des niveaux endogènes. Également, les conditions de pull-down utilisées n’étaient pas les mêmes, puisque l’approche GFP-Trap utilisée pour les essais de co-IP ne pouvait pas être réalisée dans des conditions aussi stringentes que pour l’approche BioID. Comme mentionné précédemment, ces conditions variables peuvent avoir un effet important sur l’efficacité de la précipitation des protéines. Afin de contourner ces limitations, nous pourrions refaire les expériences de co-IP en nous servant des lignées HCT 116 HNF4α(1-12)-GFP pour retourner à des niveaux d’expression similaires à ceux utilisés lors de l’approche BioID. Nous pourrions utiliser un anticorps dirigé contre IRF-2BP2 pour sa détection en co-IP, ce qui nous permettrait d’éviter d’avoir à surexprimer la protéine en fusion avec une étiquette FLAG.

En tenant compte du profil différentiel d’interaction de IRF-2BP2 avec les isoformes de HNF4α, nous avons identifié des variations au niveau du transcriptome pouvant être expliquées par ces interactions préférentielles. Nous avons montré que la proportion de gènes modulés à la baisse était similaire entre les isoformes α1 et α2 (34 % et 37 % respectivement). Cette proportion chutait à 21 % au niveau de l’isoforme α3, avec au total environ 10 fois moins de gènes modulés négativement. Comme nous avions démontré par l’approche BioID que le corépresseur IRF-2BP2 interagissait spécifiquement avec les isoformes α1 et α2 par rapport à α3, nous avons émis l’hypothèse que IRF-2BP2 serait partiellement responsable de cette variation dans la régulation transcriptionnelle négative de ces isoformes. Afin de tester cette hypothèse, nous souhaiterions utiliser une stratégie d’interférence par ARN dirigée contre IRF-2BP2. S’il s’avère être un corépresseur spécifique des isoformes α1 et α2, la perte de son expression devrait être associée à un nombre réduit de gènes modulés négativement par ces isoformes. L’isoforme α3 servirait dans ce contexte de condition contrôle, et ne devrait pas être affectée par la perte d’expression d’IRF-2BP2. Différentes stratégies pourront être utilisées afin de déterminer les changements causés par l’utilisation d’un shARN contre IRF-2BP2. La méthode la plus rapide serait de séquencer l’ARN de ces échantillons et de comparer leur transcriptome aux données déjà obtenues. De façon préliminaire, nous pourrions aussi tenter d’identifier des gènes connus pour être régulés négativement par IRF-2BP2 parmi les gènes réprimés suite à l’expression des isoformes α1 et α2. Certains problèmes relatifs à l’essai d’interférence par ARN peuvent déjà être anticipés. IRF-2BP2 est exprimée en deux isoformes qui semblent être redondantes au niveau fonctionnel (Childs et Goodbourn, 2003). Nous avons cependant confirmé que les shARN ciblant IRF-2BP2 reconnaissent ses deux isoformes par immunobuvardage. Toutefois, il est possible que la perte d’expression d’IRF-2BP2 soit compensée par le corépresseur IRF-2BP1, qui est lui aussi présent dans les cellules HCT 116. La génération de shARN ciblant les domaines à doigts de zinc ou RING hautement conservés entre ces deux corépresseurs pourrait permettre de contrer cet effet de redondance en inhibant leur expression de façon simultanée.

L’hypothèse d’une répression spécifique par IRF-2BP2 en fonction du domaine F est toutefois incohérente à première vue lorsqu’on considère également les autres sous-groupes d’isoformes. Par exemple, l’expression des isoformes α7 et α8 est associée à une proportion de gènes réprimés de 50 % et 41 %, respectivement. Nous observons que

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contrairement à l’isoforme α3, α9 qui possède le même domaine F est plutôt associée à un taux plus important de gènes réprimés (55 %). Cela nous indique qu’une analyse plus en profondeur des gènes régulés par les différentes isoformes est nécessaire afin de savoir si certains d’entre eux sont spécifiquement modulés en fonction des domaines de HNF4α. D’autre part, une limitation importante de nos analyses actuelles est le fait que nous ayons uniquement considéré la structure des isoformes de façon linéaire. En d’autres mots, nous avons choisi de considérer le domaine A/B et le domaine F comme des entités indépendantes, puisqu’elles sont situées aux extrémités N- et C-terminales de HNF4α. Ainsi, nous avons analysé l’effet du domaine F de façon dissociée du domaine A/B en regroupant les isoformes partageant ce domaine, et vice-versa. Cependant, la structure tridimensionnelle de ces domaines variables n’a jamais été déterminée pour HNF4α, comme pour la majorité des RN, étant donné leur repliement en une structure tertiaire mal définie. Également, il a déjà été montré que les régions activatrices AF-1 et AF-2 de plusieurs RN pouvaient coopérer afin d’activer la transcription en liant le même coactivateur de manière synergique. C’est le cas notamment pour l’interaction de NCoA-2 avec ERα (Estrogen receptor alpha) et RARα (Benecke et al., 2000 ; Bommer et al., 2002). Dans le cas de HNF4α, il est connu que l’interaction du coactivateur CBP dépend à la fois de la présence des régions AF-1 et AF-2 afin d’atteindre un niveau de transactivation maximal (Dell et Hadzopoulou-Cladaras, 1999). Dans le même ordre d’idée, il est possible que l’interaction du corépresseur IRF-2BP2 ne soit pas suffisante pour moduler négativement l’activité de HNF4α et qu’elle nécessite le recrutement d’autres corépresseurs via le domaine A/B. En somme, un niveau de complexité important se rajoute lorsque nous tentons d’intégrer à la fois l’effet du domaine A/B et du domaine F spécifiques à chacune des 12 isoformes. Avant tout, la première étape à réaliser dans le futur consistera en une analyse plus poussée des résultats de transcriptomique, qui pourront ainsi nous permettre d’identifier des gènes modulés spécifiquement par certaines isoformes.

5. Plusieurs nouveaux interactants potentiels de HNF4α ont été