• Aucun résultat trouvé

Le cas d’une assurance maladie universelle

Dans le document Assurance maladie et tests génétiques (Page 70-74)

1.3 La valeur sociale de l’information dans les diff´ erentes r´ egulations

1.3.3 Le cas d’une assurance maladie universelle

Dans un syst`eme d’assurance maladie universelle, la prime est ind´ependante du risque individuel. La d´ecision individuelle d’acqu´erir l’information g´en´etique n’expose donc pas l’individu au risque de classification. Une personne non inform´ee a int´erˆet `a acqu´erir l’information, pour un test non coˆuteux, afin de fournir un effort de pr´even- tion adapt´e `a son risque. En revanche, cette acquisition d’information peut affecter les comportements d’al´ea moral, qui impactent n´egativement le surplus social. En effet, en pr´esence d’une assurance publique, les individus n’internalisant pas le coˆut

financier de la pr´evention secondaire peuvent effectuer des choix de pr´evention col- lectivement inefficaces. C’est dans ce contexte que Filipova-Neumann et Hoy [2014] ´etudient les cons´equences de l’acquisition de l’information sur le surplus social et sur les choix de pr´evention secondaire, dans le cadre d’une assurance publique. Ils ne s’int´eressent pas tant au processus d’acquisition de l’information qu’`a son impact sur le surplus social et les comportements d’al´ea moral, dans un contexte o`u les individus peuvent entreprendre un effort non observable permettant de d´etecter la maladie `a un stade pr´ecoce. Cet effort permet de g´en´erer un b´en´efice m´edical, mais ces actions de pr´evention sont coˆuteuses. Il s’agit de d´eterminer les conditions sous lesquelles l’acquisition de l’information g´en´etique am`ene les individus `a surinvestir (ou sous-investir) dans des actions de pr´evention secondaire, ce qui impacte n´ega- tivement le surplus social. Selon leurs r´esultats, si le niveau d’effort individuel croˆıt avec le niveau de risque, en revanche, le niveau d’effort socialement optimal ne croit pas forc´ement avec le niveau de risque. En particulier, lorsque le coˆut du traitement est plus ´elev´e si la maladie est d´etect´ee `a un stade pr´ecoce, tous les individus ont tendance `a surinvestir dans des actions de pr´evention secondaire.

Par ailleurs, en raison de l’al´ea moral relatif `a l’intensit´e de l’effort de pr´even- tion secondaire, l’acquisition de l’information peut diminuer ou augmenter le surplus social. Son impact d´epend de la nature de la fonction du coˆut global de prise en charge des assur´es par rapport `a la probabilit´e de tomber malade. Si ce coˆut croˆıt avec la probabilit´e d’apparition de la maladie mais `a un taux d´ecroissant, alors l’introduction d’un test g´en´etique am´eliore le surplus social. En revanche, si cette fonction est strictement convexe, le surplus social peut augmenter ou diminuer avec l’introduction d’un test g´en´etique selon l’efficacit´e de l’effort de pr´evention secondaire des deux types de risque. L’intuition sous-jacente `a ce r´esultat est la suivante. Un

test g´en´etique correspond `a un ´etalement `a moyenne constante de la probabilit´e d’apparition de la maladie et donc, si la fonction de coˆut est convexe par rapport `

a cette probabilit´e, alors l’introduction d’un test g´en´etique conduit `a une augmen- tation du coˆut global de la prise en charge. Bien que l’acquisition de l’information am`ene les individus `a fournir un effort en fonction de leur risque de sant´e, de ses b´en´efices et de son coˆut du point de vue individuel, la non-internalisation des coˆuts financiers de la pr´evention et du traitement en cas d’apparition de la maladie con- duit `a des choix de pr´evention socialement non optimaux. Par cons´equent, si le coˆut croˆıt plus vite que les b´en´efices, cela affecte n´egativement le surplus social. Ainsi, le niveau d’effort de pr´evention secondaire de l’individu s’´eloigne de l’optimum social. Pour se rapprocher du niveau socialement optimal, l’assureur peut limiter l’acc`es aux actions de pr´evention ou d´efinir une politique incitative en fonction des instru- ments dont il dispose (subvention partielle, responsabilisation des individus etc.), en sachant que les agents n’internalisent pas le coˆut social.

Dans un syst`eme d’assurance maladie universelle o`u la prime est d´econnect´ee du risque individuel de l’assur´e, les individus consid`erent le montant de la prime comme exog`ene. Supposons que la pr´evention soit efficace uniquement pour les individus dont le r´esultat est positif. En analysant l’impact de l’information g´en´etique sur les choix de pr´evention dans un syst`eme d’assurance universelle, les r´esultats de Hoel et Iversen [2002] am`enent `a consid´erer que l’une des fa¸cons d’inciter les assur´es `a faire de la pr´evention est d’en compenser le coˆut. En effet, lorsque la prime d’assurance est calcul´ee en fonction du risque moyen, la d´ecision de faire le test n’expose pas l’individu au risque de classification. Cependant, la r´eduction de la prime qui devrait r´esulter de son effort de pr´evention ne peut ˆetre mise en oeuvre. Si le coˆut de l’effort n’est pas compens´e et s’il n’y a aucune incitation, l’individu n’a aucun int´erˆet `a en-

treprendre des actions de pr´evention et in fine `a faire le test. Dans la pratique, il y a plusieurs limites `a la mise en place d’une telle compensation. D’abord, les probl`emes li´es `a l’introduction d’une compensation mon´etaire du coˆut de l’effort proviennent fondamentalement de la non-observabilit´e des actions de pr´evention. Ensuite, le coˆut de la pr´evention peut varier d’un individu `a un autre. Ce coˆut a deux com- posantes. La premi`ere correspond au coˆut des examens m´edicaux dont l’individu peut b´en´eficier dans le cadre du d´epistage. Dans la pratique, cette composante ne varie quasiment pas entre les agents et ces actes sont rembours´es. La deuxi`eme est relative au coˆut personnel li´e aux activit´es de pr´evention telles que les exerci- ces physiques, les r´egimes alimentaires et le temps consacr´e. C’est cette deuxi`eme composante, variable d’un individu `a l’autre, qui peut poser des probl`emes de mise en oeuvre dans le cadre d’une compensation mon´etaire, d’autant plus que ce coˆut personnel de l’effort n’est pas toujours observable. Il devient alors difficile d’en avoir une ´evaluation parfaite et objective. Si le gouvernement d´ecide de mettre en place une politique de compensation mon´etaire dont la valeur correspond au coˆut moyen de l’effort de pr´evention, tous les individus dont le coˆut est sup´erieur au coˆut moyen n’entreprennent pas les actions de pr´evention.

Dans un syst`eme d’assurance concurrentiel ou mixte, lorsque l’individu fait le test, il s’expose au risque de faire face `a une prime ´elev´ee, notamment lorsque l’assureur peut disposer de cette information. En cons´equence, un individu averse au risque est moins incit´e `a faire le test en raison du risque de classification et donc les choix de pr´evention peuvent ˆetre sousoptimaux. En outre, il en r´esulte une perte du surplus social li´ee `a la discrimination des risques. Dans la pratique, l’une des fa¸cons de lutter contre la discrimination g´en´etique est d’adopter des lois strictes visant `a interdire aux assureurs d’en tenir compte dans le calcul de la prime. Or,

une r´egulation stricte se fait au d´etriment du surplus social. Pour pallier ces prob- l`emes, Tabarrock [1994] propose d’instituer une assurance g´en´etique. Nous allons voir comment cette assurance est susceptible de r´eduire `a la fois les cons´equences de la discrimination g´en´etique et de l’antis´election.

Dans le document Assurance maladie et tests génétiques (Page 70-74)