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2. Etude bibliographique

2.4. Latence

2.4.1. Définition

Le phénomène de latence correspond à la persistance du virus dans l’organisme en l’absence de détection possible de celui-ci. Le virus peut persister ainsi de nombreuses années. La latence se met en place après une infection primaire, une réactivation ou la vaccination avec un vaccin vivant atténué ou délété (53). Après la phase de multiplication et de dissémination, le virus persiste uniquement dans le noyau des neurones qu’il a infectés, sous forme d’ADN. Aucun agent infectieux ou antigène viral ne peut être mis en évidence chez l’hôte (10). Pendant la latence, l’animal ne présente aucun signe clinique. Seuls des tests sérologiques peuvent mettre en évidence le passage du virus.

2.4.2. Localisation

Les sites de latence du virus BHV1 sont principalement les neurones sensitifs du ganglion trigéminé lors d’une infection de l’appareil respiratoire (IBR) (2). Lors de l’atteinte de l’appareil génital le site de latence principal sera le ganglion sacral (1). BHV1 peut parfois établir une latence dans les cellules mononuclées du sang (110) ainsi que dans les tissus lymphoïdes, notamment les amygdales. En effet, on peut mettre en évidence l’infection par le BHV1 des lymphocytes TCD4+ des amygdales et des nœuds lymphatiques adjacents. Lors de la

phase d’infection aiguë le virus provoque leur apoptose. Pendant la phase de latence seul le transcrit LR est détectable dans les amygdales et en faible quantité, soit parce que peu de cellules contiennent de l’ADN viral, soit parce qu’il est transcrit de façon peu importante. La capacité de BHV1 à se mettre en latence dans les amygdales et à être réactivé à cet endroit joue un rôle important dans sa transmission (116).

2.4.3. Mise en place de la latence

Après sa réplication dans les muqueuses nasales, BHV1 pénètre dans les terminaisons nerveuses des nerfs sensitifs de la cavité nasale et remonte le long des axones jusqu’au corps cellulaire du neurone infecté, situé dans le ganglion régional correspondant (72). Il reste alors en latence.

Lors de la phase de latence on peut mettre en évidence la formation d’un infiltrat inflammatoire chronique de cellules mononuclées dans le ganglion trigéminé. Il produit des facteurs de régulation de l’équilibre entre latence et réactivation : des cytokines. En cas de rupture de cet équilibre entre facteurs viraux, facteurs cellulaires et cytokines, il y a réactivation du virus (10). Un faible niveau de réactivation spontanée permanente du virus maintient cet infiltrat en activité (118).

2.4.4. Rôles du gène LR

L’étude de l’expression des gènes viraux au cours de la latence a révélé que durant cette période seul le gène LR (Latency Related) est transcrit. Le produit de ce gène est une protéine localisée dans le noyau de la cellule infectée (45). Le gène LR possède plusieurs propriétés (43).

On a pu remarquer qu’il était anti-sens du gène bICP0 et le chevauchait. Or bICP0 est responsable de l’activation de l’infection productive. L’ARN de LR a donc la capacité de réguler la synthèse de bICP0. L’extrémité 3’ du gène est essentielle pour cette fonction. L’expression d’ARN du gène LR en quantité élevée dans les neurones sensitifs est un des facteurs qui empêchent la multiplication virale et permettent à la latence de s’établir. La synthèse de la protéine LR n’est pas indispensable à ce fonctionnement (32).

Le gène LR a également pour fonction de maintenir le neurone en vie pendant la latence. Il inhibe la mort cellulaire programmée des neurones infectés (16). Pour se faire il interagit avec des protéines de régulation du cycle cellulaire : les cyclines.

Figure 5 : Rappels sur le cycle cellulaire et sa régulation (4)

Le produit du gène LR interagit avec les complexes cdk-cyclines, bloquant ainsi leur fonction et empêchant le déroulement du cycle cellulaire (45). De plus l’infection d’un neurone par le BHV1 induit la synthèse de cycline A en quantité importante (119). Cette protéine permet l’entrée de la cellule en phase S du cycle cellulaire, elle peut également induire l’apoptose du neurone lorsqu’elle est synthétisée de façon inappropriée. La protéine LR interagit avec la cycline A pour bloquer son action et empêcher l’apoptose du neurone infecté. Les produits du gène LR doivent également empêcher la progression du cycle cellulaire ou l’apoptose du neurone en cas d’échec de réactivation et/ou permettre à la réactivation d’être complète en empêchant la mort prématurée du neurone. Pour que BHV1 persiste dans l’animal infecté il est plus intéressant que les neurones survivent à plusieurs épisodes de réactivation (83).

Enfin la protéine LR est responsable de l’excrétion virale dans les sécrétions oculaires de l’animal infecté, pendant la phase aiguë de l’infection. Elle n’a pas d’influence sur l’excrétion virale nasale. En effet le produit du gène LR stimule la multiplication du virus pendant l’infection aiguë dans certains types de cellules : yeux, nerfs optiques (42).

2.4.5. Réactivation 2.4.5.1. Généralités

Le virus BHV1 peut sortir de sa latence jusqu’à plusieurs années après l’infection primaire, suite à divers stimuli. Après réactivation il y a synthèse de nouveaux virions dans le

du site de latence. Dans le cas du BHV1 on peut détecter des particules virales après réactivation dans les cellules de Schwann, les cellules gliales, les cellules satellites et le mucus nasal dès 10 jours après la réactivation (74). On détecte également de l’ADN viral dans les follicules lymphoïdes des amygdales (116). Les particules virales migrent le long des axones vers la périphérie, sortent du neurone et gagnent l’épithélium par lequel elles étaient entrées. Il peut alors y avoir réexcrétion virale et transmission à d’autres individus, selon l’immunité de l’hôte. De même l’expression de signes cliniques n’est pas systématique.

2.4.5.2. Stimuli

Les éléments déclenchant la réactivation du virus sont de différentes sortes. Le traitement à la dexaméthasone correspond à une réactivation induite par un stress dans la nature qui entraîne une augmentation des glucocorticoïdes endogènes. Les glucocorticoïdes sont des régulateurs de l’expression des gènes cellulaires et viraux. Ce sont également des agents immunosuppresseurs. L’injection de dexaméthasone a des effets rapides sur les interactions virus/neurones, elle induit des changements dans le ganglion trigéminé (79). La dose permettant la réactivation virale est de 0,1 mg/kg/jour pendant 5 jours.

Le transport des animaux est un stimulus qui est suivi de réexcrétion virale chez 40% des animaux infectés latents, le lendemain du voyage. Cela est important à prendre en compte lors des rassemblements d’animaux car le pic d’excrétion est atteint quand ils sont en contacts, la transmission virale est alors majeure (91).

La parturition peut également être à l’origine d’une réactivation virale. En effet, elle provoque chez la vache un pic de cortisol, lié au stress de la mise bas et aux efforts expulsifs du part (92).

L’infestation par des larves de Dictyocaulus viviparus est responsable de la réactivation du BHV1 chez les animaux infectés latents. Elle est suivie, une à trois semaines après l’infestation larvaire, par la réexcrétion du virus, l’apparition de signes cliniques et de lésions d’IBR (70).

2.4.5.3. Mécanisme de la réactivation

Après réactivation dans les neurones du ganglion trigéminé, BHV1 débute un cycle de réplication lytique qui peut conduire à la mort du neurone. On peut détecter de la

neuronophagie, une dégénérescence des neurones et l’inflammation du ganglion trigéminé dans les trois jours suivant un traitement à la dexaméthasone chez un animal porteur latent du virus (79). Les nouveaux virions gagnent leur site d’entrée par voie axonale comme lors de la dissémination par voie nerveuse. Les protéines de la membrane virale sont transportées séparément de la capside et du tégument. Les sites d’assemblage et de sortie des particules virales sont répartis le long de l’axone et au niveau de ses terminaisons. Ces sites de sorties permettent l’infection des cellules gliales étroitement accolées au neurone. Par contre le virus ne peut pas ensuite passer de la cellule gliale infectée à une autre cellule non nerveuse. Les cellules gliales et autres cellules non nerveuses accolées à l’axone limitent ainsi la diffusion du virus (97).

La réactivation du virus dans les amygdales entraîne l’apoptose des cellules des follicules lymphoïdes. La multiplication virale et la libération de virions à cet endroit jouent un rôle important dans la transmission du virus à d’autres individus (116).

On retrouve également le virus dans les sécrétions oculaires dans les 24 à 48 heures qui suivent le traitement à la dexaméthasone. La multiplication du virus au niveau de la muqueuse nasale et sa réexcrétion dépendent du statut immunitaire préexistant de l’hôte et de sa réponse immunitaire à la réactivation. La réactivation du virus dans les deux mois suivants l’infection primaire ne donnera pas un taux élevé de réexcrétion virale. De plus des animaux ayant un taux élevé en anticorps neutralisants après la première infection ne réexcréteront pas le virus après réactivation (72).

Enfin le phénotype des nouveaux virions influence la réactivation. En effet des virus délétés de gE établissent une latence mais ne se réactivent pas après traitement (64).

Figure 6 : Bilan du cycle latence - réactivation (46)

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