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Chapitre I Etude bibliographique

I.3. Le titane comme biomatériau

I.3.2. La transformation allotropique

Le titane présente une transformation allotropique α ↔ β de type martensitique. Elle a lieu sans diffusion, il est donc impossible de retenir la phase β à température ambiante même par trempe utra-rapide.

Le mécanisme de la transformation α ↔ β implique des propriétés importantes : • un caractère faiblement durcissant lié à la formation de peu de défauts ;

• un effet mémoire particulièrement fort lié à l’hérédité structurale due à la conservation des plans d’accolement des phases α et β.

a c a 0 C B A Transus β 882 1670 Température °C

Le titane commercialement pur presente plusieurs qualités (Tableau I.13), contenant des quantités variables d’oxygène dissous et de fer ; sa résistance mécanique augmente avec la teneur en oxygène.

La nuance 1 du titane est caractérisée par une grande ductilité et une résistance en traction de l’ordre de 240 MPa. Le titane de nuance 4 présente une grande résistance élastique en traction (500 MPa) qui peut être augmentée par écrouissage à froid jusqu’à 800 MPa. Cette nuance est utilisée pour les implants dentaires.

Elément,% Nuance 1 Nuance 2 Nuance 3 Nuance 4

Azote, % 0,03 0,03 0,05 0,05 Carbone, % 0,1 0,1 0,1 0,1 Hydrogène,% 0,0125 0,0125 0,0125 0,0125 Oxygène, % 0,18 0,25 0,35 0,45 Fer 0,15 0,2 0,25 0,3 Titane 99,5275 99,4075 99,2375 99,0875

Tableau I.13. Compositions chimiques des nuances de titane non allié (ASTM).

Des propriétés mécaniques élevées ont été obtenues par l’emploi du titane sous forme d’alliages. Deux alliages de titane sont couramment utilisés aujourd’hui. Ils sont d’utilisation plus récente que celle des aciers inoxydables ou des alliages cobalt-chrome :

- Le F 136, plus connu sous le nom de Ti6Al4V (ou TA6V), contient 90 % de titane, 6 % d’aluminium et 4 % de vanadium. Il est l’alliage commercial le plus répandu, très utilisé dans les applications aérospatiales. Par rapport au titane pur, les alliages Ti6Al4V présentent surtout l’avantage d’une conductivité thermique environ moitié moindre et d’une limite de fatigue supérieure d’environ 50 %.

- Dans les 15 dernières années les préoccupations concernant les effets négatifs du relargage du vanadium dans l’organisme ont stimulé le développement de l’alliage Ti5Al2,5Fe.

L’alliage F 136 est décrit comme un alliage α + β en relation avec l’addition d’aluminium qui est un élément alpha. La présence de deux phases majeures et la possibilité

d’agir sur leur microstructure par des traitements chimiques et thermiques permettent d’obtenir une très large variété de microstructures en rapport avec les propriétés mécaniques.

Les propriétés d’élasticité du titane sont inférieures à celles de l’acier inoxydable ou des alliages cobalt chrome, elles sont plus proches de celles de l’os. La résistance mécanique du TA6V est relativement élevée (elle n’est dépassée que par celles de certains alliages chrome-cobalt forgés) et sa ductilité est faible. L’un des intérêts du Ti5Al2,5Fe est sa ductilité plus élevée, permettant une mise en forme plus aisée.

Le titane est amagnétique et présente une très haute résistance électrique. Ses alliages peuvent êtres mis en forme par plusieurs techniques : moulage, métallurgie des poudres, forgeage et usinage, mais ils sont très sensibles aux traitements thermomécaniques. Dans tous les cas, le paramètre important à prendre en compte est celui de la structure métallographique obtenue, car elle détermine de façon bien plus importante que pour l’acier inoxydable la résistance à la fatigue. Par contre, pour un état structural donné, il y a peu de différence entre les limites d’endurance à l’air ou dans un environnement biologique simulé.

L’alliage TA6V présente une excellente tenue à la corrosion et à la fatigue-corrosion, mais il faut remarquer que ces propriétés optimales ne peuvent être obtenues que par des techniques industrielles rigoureuses. L’élimination des irrégularités de surface et des contaminants lors de la réalisation d’un matériel destiné à l’implantation est importante, comme pour tous les métaux.

La grande sensibilité à l’usure du titane, qui peut induire des particules d’oxydes de titane ou d’alliages de titane, peut provenir de frottements (surfaces articulaires), de micromouvements (contact avec l’os ou avec le ciment), de l’abrasion (par les tissus environnants) et du contact métal-métal (délibéré ou involontaire). Des solutions à ces problèmes sont la nitruration en surface par plasma froid ou l’implantation ionique d’azote.

Même si aujourd’hui le titane apparait comme le métal le plus résistant à la corrosion, ce métal est peu noble en lui-même. Paradoxalement, sa haute réactivité le rend très résistant à l’attaque par les environnements aqueux. La couche d’oxyde qui se forme spontanément à sa surface est très adhérente et résistante à la corrosion. A l’air, à température ambiante, l’épaisseur de la couche d’oxyde après deux jours est d’environ 1,7 nm et, après 40 jours, de l’ordre de 3,5 nm, et pouvant atteindre 200 nm après 6 ans (cas de certains implants dentaires). Il est important de savoir que la couche d’oxyde ne se compose pas seulement de

dioxyde de titane (TiO2 ou rutile), mais consiste en plusieurs oxydes : TiO, TiO2, Ti2O3, Ti3O4.

Cette formation d’oxydes est dénommée passivation et est considérablement plus marquée dans l’os qu’à l’air [Kasemo1983] et fait du titane un des métaux très utilisés en orthopédie.

Plusieurs études montrent que la couche d’oxyde est au début hydratée et ensuite recouverte par des couches moléculaires d’eau [Healy&Ducheyne1992].

La biocompatibilité de chaque métal est régie par le degré de corrosion et la toxicité des ions métalliques libérés. Pour le titane, son excellente résistance à la corrosion et le taux très bas de diffusion des ions métalliques à l’intérieur des tissus, associés à l’apparente absence d’effets biologiques du métal, laissent augurer d’une bonne biocompatibilité. Ceci a été confirmé par diverses études cliniques et expérimentales, toutes en faveur d’une réponse tissulaire minimale à ce métal. Même lorsque du titane est observé sous forme visible (coloration) au niveau d’un tissu (par exemple à un taux de plusieurs centaines de ppm, le taux normal de titane dans les tissus étant de 50 ppm), ce tissu est toujours viable et l’on ne voit que rarement des cellules géantes multinucléées. Les parties observées dans les tissus entourant certains implants en alliage de titane paraissent plutôt être des produits d’usure avec la même composition élémentaire que des précipités de produits de corrosion, comme cela a été démontré pour les aciers inoxydables et les alliages à base de cobalt.

La suggestion d’une sensibilisation induite par la libération d’ions titane par usure du Ti6Al4V doit être traitée avec prudence, car le métal se retrouve en fait sous la forme d’oxyde de titane pour lequel un rôle biologique est peu probable. La libération ionique à partir des alliages de Ti6Al4V augmenterait la largeur de la zone amorphe de liaison à l’interface os- métal par comparaison au titane pur.

En résumé, le titane présente un certain nombre d’avantages. Il est bien accepté par les tissus durs ou mous, sa résistance à la fatigue-corrosion est nettement supérieure à celle des autres alliages utilisés en implantologie, grâce à une couche de passivation spontanée (25 – 100 Å), faiblement soluble. Son élasticité est plus proche de celle de l’os (deux fois celle de l’acier). Les produits de corrosion sont en général bien tolérés et il n’y a pas de réactions immunologiques défavorables (hypersensibilité, allergie) décrites chez l’homme.

Au-delà de son coût plus élevé, ses inconvénients sont essentiellement un médiocre comportement à l’usure (qui peut être amélioré par implantation ionique ou nitruration) et la

survenue de colorations bleue ou noire dans les tissus voisins. Par ailleurs, il présente une tendance à la formation de complexes, notamment avec l’acide oxalique et les fluorures. Enfin des cas de sensibilisation ont été décrits chez l’animal et récemment chez l’homme : elles sont en général le fait des alliages (TiAlV). La biocompatibilité du titane et de ses alliages n’est pas toujours idéale en raison de la destruction de la couche de passivation (oxydes de titane) par les forces de cisaillement. Les modifications qui en résultent dans les charges de surface peuvent conduire à des modifications majeures de la conformation des protéines adsorbées, qui vont, à leur tour, entraîner une réaction biologique.

Le titane et l’alliage TA6V sont assez largement utilisés en orthopédie et en chirurgie cardio-vasculaire, et la tendance générale est de les préférer de plus en plus aux autres métaux. Il en est de même en chirurgie orale et maxillo-faciale, notamment au niveau de nombreux implants dentaires, des attelles porte-greffons, dans la reconstruction mandibulaire, les plaques d’ostéosynthèse et la reconstruction crânienne.

Dans ces utilisations, quand il y a contact avec l’os, les recherches ont démontré que les implants en titane soumis à des contraintes mécaniques voient apparaître une encapsulation fibreuse à leur périphérie.

De nouvelles solutions, comme le recouvrement avec une phase céramique, ont été adoptées. La meilleure céramique semble être l’hydroxyapatite, qui a la composition la plus proche du tissu osseux. Dans des conditions identiques d’implantation, on n’observe plus de tissu fibreux, l’os se forme même à la surface de l’implant [Girleanu2005].

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