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2.9 L'approche experimentale

2.9.2 La spectroscopie infrarouge

L'essentiel de l'information sur la poussiere interstellaire provient des spectres in-frarouges des regions eteintes. Ceux-ci presentent de nombreuses bandes en emission ou en absorption dues a la vibration des liaisons moleculaires constituant les grains de poussiere. La spectroscopie infrarouge donne donc acces a la composition et, pour certains types de poussiere comme les silicates, a la structure de la poussiere.

Pour pouvoir comparer les spectres infrarouges avec les donnees observationnelles, il est necessaire que les echantillons etudies aient une geometrie la plus semblable pos-sible au cas interstellaire (distribution de particules en suspension dans le vide). La technique des pastilles, dans laquelle l'echantillon a analyser est sous forme de pe-tites particules en suspension dans un milieu transparent a l'infrarouge, est un bon moyen d'approcher une telle con guration. Il s'agit de melanger a une poudre d'un materiau transparent dans l'infrarouge une petite quantite de poudre du mineral etudie. Le melange est ensuite presse a n d'obtenir un disque compact : la pastille. Les materiaux constituant la matrice des pastilles sont generalement du bromure de potassium (KBr), de l'iodure de cesium (CsI) et du polyethylene (PE) qui sont trans-parents respectivement sur la gamme de longueur d'onde 0.23 - 25 m, 0.24 - 70 m et 16 - 1000 m. L'utilisation de l'un ou l'autre de ces materiaux introduit un leger decalage spectral des bandes. Ainsi on observe que CsIpic  KBrpic , videpic  KBrpic et que PEpic  CsIpic . Colangeli et al. (1995) ont montre que le decalage des bandes, en micron, entre le vide et le KBr n'excede pas quelques pourcents. Pour la fabrication des pastilles de 13 mm de diametre utilisees dans l'infrarouge proche et moyen, env-iron 300 mg de CsI ou KBr et quelques dixiemes de milligramme d'echantillon sont necessaires. Pour l'infrarouge lointain, environ 120 mg de PE et 1 mg d'echantillon sont utilises.

Les spectres en transmission ont ete mesures a l'IAS avec un spectrometre a

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Transformee de Fourier (Brucker IFS66V) couvrant une gamme de longueur d'onde s'etendant de l'UV au domaine millimetrique avec une resolution spectrale allant jusqu'a  = 0.12 cm 1. La source utilisee dans l'infrarouge moyen et lointain est constituee d'un barreau de carbure de silicium (SiC) chau e a 1200 K emettant comme un corps noir (Glow Bar). Il est possible d'obtenir des spectres continus sur toute la gamme du spectrometre SWS d'ISO, entre 2 et 45 m, a l'aide d'une separatrice en CsI et d'un detecteur DTGS (Deuterated Triglycine Sulfate) recouvert d'une fen^etre en CsI (transmission entre 2 et 45 m). Au dela de 45 m un jeu de separatrice en Mylar permet de couvrir la gamme de longueur d'onde LWS, entre 45 et 200 m, un bolometre refroidi a l'helium permet d'obtenir des spectres aux longueurs d'onde superieures a 50 m.

Les spectres en transmission sont obtenus en divisant le spectre de la pastille avec echantillon avec le spectre de reference d'une pastille sans echantillon.

Ces mesures

en transmission sont directement comparables aux bandes en absorption

des spectres astronomiques

. Elles sont en e et proportionnelles a l'ecacite d'ex-tinction par unite de taille (a) :

Qext=a= 4r2

3m ln(T) (2.36)

ou  est la densite du mineral etudie, m la masse du mineral contenue dans la pastille, r le rayon de la patille et T la transmittance mesuree.

La technique des pastilles utilise des echantillons sous forme de poudre, c'est-a-dire que le spectre resultant est celui d'une population de grains de granulometrie et de distribution de forme quelconques. Les mineraux solides sont au prealable ne-ment broyes dans des mortiers en agate. Les tailles ainsi atteintes sont de l'ordre du micron et submicroniques. Il est possible de selectionner les grains en dessous d'une certaine taille par sedimentation.

Les bandes des silicates se situant a des

longueurs d'onde superieures a 8



m, on peut negliger, pour des grains

submicroniques, les e ets de la di usion. De plus, la forme des bandes

n'est pas alteree par la distribution de taille des grains (Paragraphe 2.5).

Les e ets de forme des grains ne sont, eux, pas negligeables puisqu'ils ne dependent pas de la taille des grains (Paragraphe 2.6). La Figure 2.12 montre en e et que les spectres de laboratoire sont semblables aux spectres modelises avec une distribution CDE (distribution continue d'ellipsodes) alors qu'ils sont tres di erents des spectres modelises pour des particules spheriques. Les di erences observees entre le spectre de laboratoire et le spectre CDE peuvent avoir plusieurs origines : un decalage spectral d^u a la matrice de CsI des pastilles par rapport au vide pour les spectres modelises, des

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Fig. 2.12: Comparai-son des spectres de lab-oratoire de pastilles d'o-livine (en haut) et d'en-statite cristallines (en bas) avec des spectres modelises. Trait pleins : spectres de laboratoire; pointilles-tirets : spec-tres calcules pour une distribution continue d'ellipsodes

(CDE); tirets : spectres calcules pour des par-ticules spheriques. Voir Paragraphes 2.4 et 2.7 pour les methodes de calcul.

deviations de la distribution reelle de forme des grains par rapport a la distribution CDE, une deformation des bandes suite a l'agglomeration des grains dans la pastille, le transfert de rayonnement dans la pastille.

Lorsque l'on compare les spectres

interstellaires aux spectres de laboratoire on suppose donc implicitement

que les grains ne sont pas spheriques mais ont une distribution de forme

quelconque pouvant ^etre modelisee par une distribution CDE.

Les di erences entre les spectres modelises avec une distribution de forme CDE et les spectres de laboratoire de particules de distribution de forme quelconque, quoique faibles sont cependant signi catives. En e et, elles montrent qu'il n'est pas possible de

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Fig. 2.13:Spectres infrarouges en transmission d'olivines et de pyroxenes de diverses com-positions. Les spectres ont ete mesures a l'IAS a partir de poudres d'echantillons nement broyes incorporees dans des pastilles de CsI.

determiner rigoureusement des constantes optiques de solides a partir d'echantillons sous forme de poudres. Ceci s'applique bien entendu aux etudes experimentales, mais aussi aux techniques d'inversion des codes de transfert radiatif, qui consistent a deduire des observations astronomiques les constantes optiques de la poussiere in-terstellaire.

80 Interaction de particules solides avec la lumiere

ortho clino diopside heden-enstatite heden-enstatite bergite

43.57 41.48 36.26 40.09 40.72 40.07 34.00 34.19 34.40 37.76 29.47 32.61 32.61 35.19 28.25 29.86 29.80 31.30 26.86 28.08 24.51 25.23 25.21 25.29 23.68 24.34 24.38 21.55 22.94 19.74 22.02 21.65 20.65 20.96 20.96 19.60 18.51 19.40 19.89 17.63 15.45 15.73 15.77 16.00 14.69 14.82 14.84 14.95 14.42 13.79 13.41 11.65 12.83 11.12 11.48 11.51 11.60 10.67 10.93 10.89 10.97 10.39 10.36 10.34 10.43 9.86 10.22 9.33 9.32 9.32 9.41

Tableau 2.1: Position des bandes spectrales (en m) d'olivines et py-roxenes d'inter^et astrophysique. Or-thopyroxenes : orthoenstatite (MgSiO3), clinopyroxenes : clinoenstatite (MgSiO3), diopside (CaMgSi2O6) et hedenbergite (CaFeSi2O6). Cinq solutions solides de forsterite (Mg2SiO4) et de fay-alite (Fe2SiO4) sont presentees. La com-position est indiquee par le pourcentage de forsterite contenue dans l'olivine : Fo80 represente un mineral contenant 80% de forsterite et 20 % de fayalite et donc de formule Mg2:8Fe2 2:8SiO4.

Fo100 Fo80 Fo60 Fo40 Fo00 36.39 33.89 34.00 34.60 31.42 27.51 27.80 28.30 29.30 31.90 26.12 24.81 23.78 24.17 25.23 25.93 26.87 21.13 19.71 19.82 20.29 20.65 20.90 18.44 19.11 19.35 19.47 19.70 16.38 16.59 16.94 17.34 17.75 11.91 11.95 11.98 11.99 12.07 11.28 11.29 11.35 11.38 11.45 10.90 10.42 10.55 10.40 10.79 10.88 10.13 10.20 10.30 10.42 10.56 La Figure 2.13 montre les spectres mesures en laboratoire entre 8 et 45 m d'o-livines et de pyroxenes d'inter^et astrophysique. La position des bandes est indiquee dans le Tableau 2.1. Les olivines5 etudiees ont une composition intermediaire entre