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La raréfaction de l’élection professionnelle dans l’entreprise

PARTIE I. L’AFFAIBLISSEMENT DE LA STRUCTURE SYNDICALE DANS

Chapitre 1. La raréfaction de l’élection professionnelle dans l’entreprise

la faisant dépendre des élections professionnelles, lesquelles ont été raréfiées dans l’entreprise (Chapitre 1). Cette fragilisation de la représentativité s’est répercutée sur le mandat du délégué syndical (Chapitre 2).

Chapitre 1. La raréfaction de l’élection professionnelle dans

l’entreprise

184. Le critère de l’audience électorale, instauré par la loi du 20 août 2008, fait dépendre

la représentativité des organisations syndicales dans l’entreprise à la tenue des élections professionnelles. Or, encore faut-il que les conditions relatives à leur organisation, notamment l’atteinte de certains seuils d’effectifs, soient satisfaites pour pouvoir organiser les élections. Le critère de l’audience électorale, censé renforcer la légitimité des organisations syndicales représentatives s’avère en réalité être un talon d’Achille par lequel le législateur fragilise cette qualité. En effet, à la suite de la loi du 20 août 2008, le nombre d’élections professionnelles dans l’entreprise a été diminué (Section 1). La tenue de ces dernières dépend en outre des seuils d’effectifs dont les conditions d’atteinte ont été complexifiées (Section 2).

Section 1. La diminution du nombre d’institutions représentatives du

personnel dans l’entreprise

185. En conditionnant la représentativité à l’audience électorale, la loi du 20 août 2008 a

précisé que le score d’au moins 10 % des suffrages exprimés pouvait être obtenu au premier tour des différentes élections des instances représentatives du personnel dans l’entreprise569. Le législateur a ensuite diminué leur nombre, réduisant en conséquence les chances des syndicats de démontrer bénéficier d’une audience électorale suffisante. Les instances représentatives du

personnel ont en outre été fusionnées dans un premier temps de manière facultative (A) puis, dans un second temps, de manière obligatoire (B).

A. La fusion facultative des institutions représentatives du personnel

186. La loi du 20 août 2008 a précisé que le score d’au moins 10% des suffrages

exprimés, nécessaire à la représentativité du syndicat, pouvait être obtenu au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants570.

187. Les premiers représentants des travailleurs ont été institués par la loi 18 juillet

1890571 créant les délégués mineurs, élus par les ouvriers. À la suite des accords de Matignon572, la loi du 24 juin 1936573 a institué, entre autres, les délégués ouvriers. Interdits sous régime de Vichy, ces représentants ont été rétablis à la Libération. Le « rétablissement des délégués d’atelier » prévu par le programme du Conseil National de la Résistance du 15 mars 1944 a été réalisé par la loi du 16 avril 1946574 prévoyant l’élection de « délégués dans tous les établissements industriels,

commerciaux ou agricoles, les offices ministériels, les professions libérales, les sociétés civiles, les syndicats professionnels, les associations quels que soient leur forme et leur objet, où sont occupés habituellement plus de dix salariés »575. La loi du 28 octobre 1982576 a conditionné leur mise en place à l’atteinte d’un effectif « d’au moins onze salariés » pendant « douze mois,

consécutifs ou non, au cours des trois années précédentes »577.

188. Conquête sociale liée également au mouvement de libération sociale de

l’après-guerre, les comités d’entreprise ont été créés par l’ordonnance du 22 février 1945578 afin d’associer les travailleurs à la direction de l’économie et à la gestion des entreprises industrielles et commerciales « employant habituellement, dans un ou plusieurs établissements, au moins cent

570 Ibid.

571 Loi du 8 juillet 1890 sur les délégués à la sécurité des ouvriers mineurs - JORF du 9 juillet 1890.

572 Dont l’article 5 prévoyait que « dans chaque établissement comprenant plus de dix ouvriers [...] il sera institué

deux titulaires ou plusieurs délégués ouvriers (titulaires ou suppléants), suivant l’importance de l’établissement ».

573 JORF 26 juin.

574 Loi n°46-730 du 16 avril 1946, préc., art. 1. 575 C. trav., art. L. 420-1 ancien.

576

Loi n°82-915 du 28 octobre 1982, préc., art. 16. 577 C. trav., art. L. 421-1 ancien.

salariés »579. La loi du 12 août 1950 a fixé l’effectif minimum à cinquante salariés580. La loi 28 octobre 1982581 a précisé quant à elle que l’effectif devait être atteint « pendant douze mois,

consécutifs ou non, au cours des trois années précédentes ».

189. La délégation unique du personnel est un organe de représentation du personnel qui

rassemble en une seule institution plusieurs instances représentatives. La loi quinquennale du 20 décembre 1993582 a esquissé un premier rapprochement entre les délégués du personnel et le comité d’entreprise au sein de la DUP. Prudent, le législateur de l’époque a limité cette possibilité aux seules entreprises de moins de deux cent salariés. Elle a donné la faculté au chef d’une entreprise de moins de deux cent salariés de constituer une délégation unique du personnel regroupant les délégués du personnel et le comité d’entreprise583. La décision ne pouvait toutefois être prise qu'après avoir consulté les délégués du personnel et, le cas échéant, le comité d’entreprise.

190. Dans les entreprises dont les effectifs comprenaient au moins cinquante salariés

pendant douze mois, consécutifs ou non, au cours des trois années précédentes, les syndicats avaient ainsi deux occasions de démontrer satisfaire au critère de l’audience électorale. Ils pouvaient démontrer avoir récolté au moins 10 % des suffrages exprimés lors des élections du comité d’entreprise ou lors des élections des DP. Toutefois, dans les entreprises dans laquelle les DP et le comité d’entreprise avaient été fusionnés au sein d’une DUP, et dans lesquelles ne se tenait en conséquence qu’une seule élection professionnelle, les syndicats n’avaient qu’une seule occasion de démontrer satisfaire au critère de l’audience électorale. La DUP restait toutefois limitée aux entreprises dont les effectifs étaient inférieurs à deux cent salariés.

191. La loi « Rebsamen » du 17 août 2015584 a étendu la mise en place de la délégation unique du personnel aux entreprises de moins de trois cent salariés585. Elle a donc élargi le champ des entreprises pouvant fusionner les instances représentatives en DUP (elle a en outre inclus dans la nouvelle DUP le comité d’hygiène de santé et sécurité au travail (CHSCT)). Prudentes, les lois de 1993 et 2015 ont conservé à la délégation unique du personnel un caractère facultatif. Ne la mettaient en place que les entreprises qui le voulaient bien, après consultation des instances

579 Ibid, art. 1.

580 C. trav., art. L. 431-1 ancien.

581 Loi n°82-915 du 28 octobre 1982, préc., art. 28.

582 Loi n°93-1313 quinquennale du 20 décembre 1993, préc. 583

C. trav., art. L. 431-1-1 ancien.

584 Loi n°2015-994 du 17 août 2015, préc., art. 13. 585 C. trav., art. L. 2326-1 ancien.

représentatives du personnel. Les entreprises ayant un effectif d’au maximum trois cent salariés, dans lesquelles l’employeur n’avait pas institué de DUP, les syndicats bénéficiaient toujours de deux élections : celles des DP et du comité d’entreprise, pour démontrer bénéficier d’une audience électorale nécessaire. L’ordonnance du 22 septembre 2017586 a toutefois contraint la fusion des instances représentatives en une seule : le comité social et économique.

B. La fusion contrainte des institutions représentatives du personnel

192. Institué par l’ordonnance du 22 septembre 2017587, le comité social et économique a remplacé les instances représentatives du personnel que connaissaient jusqu’alors les entreprises, à savoir le comité d’entreprise, le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail et les délégués du personnel. La création du comité social et économique est le produit d’une lente maturation législative, dont l’avènement a été préparé par les réformes précitées588. La mise en place du CSE doit être réalisée au plus tard le 1er janvier 2020, dans toutes les entreprises dont l'effectif d'au moins onze salariés a été atteint pendant douze mois consécutifs589.

193. Selon le droit antérieur à l’ordonnance du 22 septembre 2017590, l’audience était calculée sur l’élection des DP à défaut d’élection du comité d’entreprise591. Les résultats des élections des DP étaient pris en compte pour apprécier la représentativité syndicale s'il ne s'était pas tenu d'élection des membres du comité d’entreprise592. Le régime antérieur offrait ainsi deux chances à la tenue d’élections professionnelles dans l’entreprise pour calculer l’audience électorale, à moins que l’employeur n’ait mis en place une DUP. Cette option était toutefois facultative et ne concernait que les entreprises dont l’effectif était inférieur à trois cent salariés. Désormais, il n’y a plus qu’une seule élection dans toutes les entreprises : celle du CSE. Tous les syndicats n’ont désormais plus qu’une seule chance de démontrer satisfaire au critère de

586 Ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017, préc., art. 1. 587

Ibid.

588 A. Cormier Le Goff, J. Krivine, « De la négociation sur le comité social et économique à celle du conseil d'entreprise, seul habilité à négocier », Dr. social, 2019, p. 204.

589 C. trav., art. L. 2311-2. 590

Ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017, préc., art. 1. 591 Cass. soc., 13 juillet 2010, n°10-60.148, Bull. civ. V, n°176. 592 Cass. soc., 14 décembre 2010, n°10-60.221, Bull. civ. V, n°292.

l’audience électorale593. Cette mesure se répercute également sur le délégué syndical, qui doit être désigné par un syndicat représentatif dans l’entreprise ou l’établissement594.

194. Le phénomène de raréfaction des élections professionnelles dans l’entreprise est en

outre accentué par le durcissement des conditions d’atteinte et de calcul des effectifs, nécessaires à la tenue de l’élection professionnelle et donc à la satisfaction du critère de l’audience électorale. Un effectif minimum est également nécessaire à la nomination du délégué syndical (et du représentant de section syndicale).

Section 2. Le durcissement des conditions d’effectifs

195. Le durcissement des conditions d’atteinte des effectifs pénalise le syndicat

puisqu’il rend plus compliqué, voire incertain, la mise en place de l’élection du comité social et économique lors de laquelle il peut démontrer satisfaire au critère de l’audience électorale. Ce durcissement pénalise également la nomination du délégué syndical par le syndicat représentatif. La nomination de ce dernier dépend de l’atteinte d’un seuil d’effectif minimum dans l’entreprise. De plus, le nombre de délégués syndicaux dépend du nombre de salariés composant les effectifs. La satisfaction de ces derniers est durcie par l’accroissement de la durée d’atteinte des seuils (A) mais aussi par l’exclusion de certains salariés (B).

A. L’accroissement de la durée d’atteinte des seuils

196. La durée d’atteinte des seuils nécessaires pour organiser l’élection du comité social

et économique (1) ainsi que pour désigner un ou plusieurs délégués syndicaux (2) a été modifiée en la défaveur des syndicats.

1. Pour la tenue de l’élection du comité social et économique

197. Remplaçant toutes les instances représentatives par une seule, l’ordonnance du 22

septembre 2017595 a complexifié les conditions d’organisation de l’élection du comité social et économique, lequel doit être institué lorsque l’effectif dans l’entreprise est d’au moins onze salariés. Auparavant, pour l’élection des DP ou du comité d’entreprise, l’effectif devait avoir été

593

Cf infra Partie 1, Titre 2, Chapitre 1. 594 C. trav., art. L. 2143-3.

atteint pendant douze mois, consécutifs ou non, au cours des trois années précédentes. Il devait être établi mois par mois et non en effectuant la moyenne de chacune des trois années596. L'effectif au titre d'un mois donné devait se calculer à la fin de la période considérée. Ainsi, les salariés titulaires d'un contrat à durée indéterminée à temps plein étaient pris en compte, pour une unité, dans l'effectif du mois au cours duquel ils ont été engagés, sans qu'il soit nécessaire de proratiser en fonction du nombre de jours travaillés597. Pour chaque mois, il convenait donc de prendre en compte les salariés en contrat à durée indéterminée, employés le mois en question, et l'effectif moyen des salariés employés en contrat à durée déterminée ou mis à disposition, peu importe qu'ils ne fassent plus partie des effectifs le mois considéré.

198. Désormais, le seuil doit avoir été atteint pendant douze mois consécutifs concernant

le comité social économique598. L’effectif minimum est, avec ce nouveau calcul, bien plus difficile à atteindre. En effet, il suffit à l’employeur de repasser sous le seuil exigé, avant les douze mois précédent l’échéance électorale pour faire courir à nouveau les délais et se trouver dispensé de toute obligation. À l'expiration du mandat de ses membres, l'instance du CSE n'est pas renouvelée si l'effectif de l'entreprise est resté en dessous du seuil des onze salariés pendant au moins douze mois consécutifs599.

199. La durée d’atteinte des seuils nécessaires à la désignation du délégué syndical a

également été modifiée.

2. Pour la désignation du délégué syndical

200. Créés par la loi du 27 décembre 1968600, les délégués syndicaux sont désignés par une organisation syndicale représentative de l’entreprise ou l’établissement ayant constitué une section syndicale601 sous condition d’effectif minimum. Depuis la loi du 28 octobre 1982602, la désignation d'un délégué syndical par un syndicat représentatif peut intervenir lorsque l'effectif d'au moins cinquante salariés a été atteint. Ce seuil peut être abaissé par voie d'accord collectif

596 Cass. soc., 17 décembre 1984, n°84-60.491. 597 Cass. soc., 8 décembre 2010, n°09-65.380.

598 C. trav., art. L. 2311-2. 599 C. trav., art. L. 2313-10. 600

Loi n°68-1179 du 27 décembre 1968, préc. 601 Ibid, art. 8.

pour permettre la désignation d'un délégué syndical distinct603. Une convention collective ou un accord collectif peut en effet toujours prévoir des dispositions plus favorables que celles de la loi et abaisser le seuil en dessous de cinquante salariés604. De même, l'existence d'un délégué syndical dans une entreprise de moins de cinquante salariés peut résulter d'un usage. Tant qu’il n'a pas été dénoncé, cet usage peut être revendiqué605. Indépendamment de l'existence d'usage, au nom du principe constitutionnel d’égalité, un employeur ne saurait refuser la désignation d'un délégué syndical au motif que l'effectif n’atteint pas cinquante salariés, dès lors qu'il a accepté la désignation, dans les mêmes conditions, d'un délégué syndical par un autre syndicat représentatif606.

201. Jusqu’à la loi du 29 mars 2018607, le seuil de cinquante salariés devait être atteint pendant douze mois, consécutifs ou non, au cours des trois années précédant la nomination608. Le calcul devait donc être réalisé mois par mois609 et la moyenne annuelle pour chacune des années considérées ne pouvait être prise en compte610. Toutefois, la simple constatation que l'effectif atteigne cinquante salariés depuis quelques mois et qu'il se maintienne à ce niveau à l'avenir n'était pas suffisante611. La loi du 29 mars 2018612 a modifié ces dispositions. L'ordonnance rectificative du 20 décembre 2017613 a aligné les règles de décompte des effectifs des délégués syndicaux sur celle du comité social et économique614, en exigeant que désormais la désignation d'un délégué syndical ne puisse intervenir que lorsque l'effectif d'au moins cinquante salariés a été atteint pendant douze mois consécutifs615. Ce mode de calcul est bien moins favorable aux syndicats. Si l’employeur descend sous le seuil exigé avant les douze mois précédent l’échéance électorale, il

603 Cass. soc., 4 mars 1998, n°96-60.313. 604

Cass. soc., 16 décembre 1998, n°97-60.525, Bull. civ. V, n° 564, p. 421. 605 Cass. soc., 27 mai 1999, n°98-60.364.

606 Cass. soc., 5 mai 2004, n°03-60.175, Bull. civ. V, n°119. 607

Loi n°2018-217 du 29 mars 2018, préc., art. 6 (V). 608 C. trav., art. L. 412-11 ancien.

609 C. trav., art. L. 2143-3, al. 3 ancien. 610

Cass. soc., 17 décembre 1984, n°84-60.491.

611 Cass. soc., 15 décembre 1983, n°83-60.989, Bull. civ. V, p. 449. 612 Loi n°2018-217 du 29 mars 2018, préc.

613 Ordonnance n°2017-1718 du 20 décembre 2017 visant à compléter et mettre en cohérence les dispositions prises en application de la loi n°2017-1340 du 15 septembre 2017 d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social - JORF du 21 décembre 2017.

614 Ibid.

fait alors courir à nouveau les délais et la nomination du délégué syndical est impossible. L’atteinte des seuils est très importante pour la nomination du délégué syndical et la détermination, le cas échéant, du nombre de délégués syndicaux désignés en fonction de l’effectif de l’entreprise.

202. Au-delà de cinquante salariés, l’article R. 2143-2 du Code du travail fixe dans les

entreprises le nombre des délégués syndicaux comme suit : « 1° De 50 à 999 salariés : 1 délégué ;

2° De 1 000 à 1 999 salariés : 2 délégués ; 3° De 2 000 à 3 999 salariés : 3 délégués ; 4° De 4 000 à 9 999 salariés : 4 délégués ; 5° Au-delà de 9 999 salariés : 5 délégués. »

203. Dans les entreprises d'au moins cinq cent salariés, un syndicat représentatif qui a

obtenu, lors des élections du CSE, à côté de ses élus dans le premier collège, au moins un élu dans le deuxième collège (maîtrise) ou dans le troisième collège (cadres) peut désigner un délégué syndical supplémentaire parmi ses adhérents appartenant à l'un ou l'autre de ces deux collèges616.

204. Dans les entreprises d’au moins deux mille salariés comportant au moins deux

établissements d'au moins cinquante salariés chacun, l’article L. 2143-5 du Code du travail dispose que chaque syndicat représentatif dans l'entreprise peut désigner un délégué syndical central d'entreprise, distinct des délégués syndicaux d’établissement. Ce délégué syndical central est désigné par un syndicat qui a recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité social et économique, quel que soit le nombre de votants, en additionnant les suffrages de l'ensemble des établissements compris dans ces entreprises617. Dans les entreprises de moins de deux mille salariés comportant au moins deux établissements d'au moins cinquante salariés chacun, chaque syndicat représentatif peut désigner l'un de ses délégués syndicaux d'établissement en vue d'exercer également les fonctions de délégué syndical central d'entreprise618.

205. La seule baisse des effectifs ne fait pas cesser de plein droit le mandat du délégué

syndical. L’article L. 2143-11 du Code de travail permet cette suppression « en cas de réduction

importante et durable de l'effectif en dessous de cinquante salariés, à un accord entre le chef

616

C. trav., art. L. 2143-4 al. 1.

617 L'ensemble des dispositions relatives au délégué syndical d'entreprise est applicable au délégué syndical central. 618 C. trav., art. L. 2143-5 al. 4.

d'entreprise et l'ensemble des organisations syndicales représentatives »619. À défaut d'accord, la décision de suppression du mandat du délégué syndical relève de l’autorité administrative (DIRECCTE)620. Elle « peut décider » la suppression du mandat et dispose donc d’un pouvoir d'appréciation en opportunité qui l'autorise à prendre en compte l'intérêt général621. Le recours à la DIRECCTE n'est toutefois pas requis lorsque l'institution a été mise en place par voie conventionnelle, au-dessous du seuil légal. Si l’accord collectif instituant les délégués conventionnels n'a pas prévu la situation de réduction des effectifs au-dessous du seuil minium, l'obligation de maintenir les délégués cesse dès lors que l'effectif est inférieur au seuil622. La procédure prévue à l’article L. 2143-11 du Code du travail est d’appréciation stricte, une suppression de mandat ne peut intervenir que dans ce cadre623. Contrairement à la durée d’atteinte des seuils, le Code du travail est peu précis concernant la réduction des effectifs mais se contente d’affirmer qu’elle doit être « durable ». La Cour de cassation précise que la diminution ne doit pas nécessairement apparaître comme définitive624. Lorsque l’atteinte du seuil d'effectif de douze mois, consécutifs ou non, s’appréciait sur une période de trois ans, la circulaire ministérielle du 25 octobre 1983 considérait en retour que la baisse des effectifs devait être constatée sur une période de vingt-quatre mois sur les trois années de référence. La loi du 29 mars 2018625 exige désormais que l’appréciation de l'effectif se réalise sur une période de douze mois consécutifs. Par analogie, il est donc fortement probable que la baisse de l'effectif doive se constater sur une période égale à douze mois. Cette durée d’appréciation étant réduite, le mandat du délégué syndical peut désormais être supprimé plus rapidement.

206. En dessous de cinquante salariés, il est toutefois possible qu’un délégué du

personnel626, ou désormais un membre de la délégation du personnel au CSE627, soit désigné comme délégué syndical. Mais encore faut-il que le seuil nécessaire pour la mise en place des délégués du personnel ou du CSE ait été atteint. Quand bien même l’effectif est suffisant, le

619

Cass. soc., 23 juin 1998, n°96-42.548 ; JSL, 17 septembre 1998, n°20-9. 620 C. trav., art. L. 2143-11 al. 3.

621 Circulaire du 25 octobre 1983 relative à l'application de la loi n°82-915 du 28 octobre 1982 (préc). 622

Circulaire du 25 octobre 1983, préc.

623 Ainsi, lorsqu’une organisation syndicale désigne un nouveau délégué en remplacement du précédent, le Tribunal d'instance ne peut annuler cette désignation en se fondant sur la diminution de l'effectif au-dessous du seuil des cinquante salariés (Cass. soc., 12 mai 1986, n°85-60.516, Bull. civ. V, p. 164).

624 Cass. soc., 13 mai 1980, n°78-41.826, Bull. civ. V, p. 328. 625

La loi n°2018-217 du 29 mars 2018, préc., art. 6 (V). 626 C. trav., art. L. 2143-6 ancien.

mandat de délégué syndical n'ouvre dans ce cas pas le droit à un crédit d’heures supplémentaires que celui dont le salarié bénéficie en tant que délégué du personnel ou membre de la délégation du personnel au CSE, à moins qu’un accord collectif ne le prévoie. Le temps dont il dispose pour l'exercice de son mandat peut être utilisé dans les mêmes conditions pour l'exercice de ses