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III. Immunité et CMV

2. La réponse immunitaire adaptative cellulaire et humorale

Les réponses de l’immunité adaptative dans le contexte d’une infection congénitale ou périnatale ont été plus explorées que la réponse innée (146). La réponse adaptative fait intervenir la réponse cytotoxique des cellules T et la réponse humorale des lymphocytes B/ plasmocytes sécrétant les anticorps dirigés contre les épitopes du virus (5,146).

La réponse à médiation cellulaire T est prédominante dans les mécanismes de défense

et de contrôle d’une infection à HCMV, même si elle n’est pas suffisante pour éradiquer le

virus. Les lymphocytes CD8, CD4 et γδT sont impliqués dans le contrôle et la restriction de la

réplication virale (5). In vitro, la stimulation des cellules T de sujets séropositifs pour le

HCMV par des antigènes viraux, permet une production importante de cytokines (IFNγ,

TNFβ) mais également de perforine et de granzyme par les lymphocytes T CD4 et CD8

(176,177). Les T CD4 et CD8 sont dirigés contre de très nombreuses protéines virales de structure (capside, tégument, glycoprotéines) et de régulation (protéines impliquées dans la réplication virale et dans l’immuno-évasion) (5). Chez l’adulte, la réponse CD4 vis-à-vis du HCMV est précoce après la primo-infection, orientée Th1 et précède la mise en place et le

maintien de la réponse T CD8 (178,179) . Le rôle des T CD4 est considéré comme indirect car

il alimente la réponse humorale et permet l’expansion de la population des T CD8 (5) mais les

T CD4+ sont aussi directement cytotoxiques par la sécrétion d’IFN-γ, l’expression de

perforine et granzyme B et induisent l’apoptose des cellules infectées. En transplantation, un faible taux de T CD4 anti-HCMV est corrélé de façon significative au risque de maladie à HCMV(180). Chez les enfants immunocompétents infectés par le CMV une excrétion urinaire

et salivaire prolongée est en lien avec un déficit persistant et spécifique en T CD4 (181). La

réponse antivirale T CD8+ est primordiale pour le contrôle de l’infection à HCMV. Chez les souris mutantes T CD8-, on observe une dissémination importante du MCMV (Mouse CMV) allant même jusqu’à des maladies parfois létales (5). Chez les personnes transplantées, la réponse des T CD8 permettrait de limiter la virémie et de protéger contre une maladie à HCMV (5).

 Chez les fœtus infectés par le HCMV :

Les T CD8 matures (différentiation terminale CD28- et produisant de l’IFN) sont observés in

vivo dès 22 semaines de gestation (182). L’étude des cellules T CD4 et CD8 dans le sang

périphérique de fœtus infectés ou de nouveau-nés infectés in utero montrent que l’expansion des cellules T CD4+ différenciées est beaucoup moins importante que chez l’adulte infecté

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alors que l’expansion des cellules T CD8+ différenciées est identique dans les 2 groupes

(183). En revanche, l’efficacité de la réponse anti-HCMV est diminuée à la fois pour les cellules T CD4+ et pour les cellules T CD8+ chez le nouveau-né infecté par rapport à l’adulte infecté.

Cette moins bonne efficacité se manifeste :

1) par une diminution de l’amplitude du répertoire des cellules T chez le nouveau-né avec un pourcentage d’antigènes HCMV reconnus par les cellules T du nouveau-né très inférieur à celui de l’adulte infecté

2) par une diminution significative de la réponse cytokinique aux antigènes HCMV

(sécrétion de IFNγ, IL2 et TNFα) des cellules T du nouveau-né infecté par rapport à l’adulte

infecté (183).

Cette pauci-fonctionnalité des cellules T effectrices pourrait s’expliquer par un phénomène d’épuisement des fonctions des lymphocytes T CD8 et des T CD4 comme cela a été décrit dans des infections virales chroniques notamment dans l’infection à VIH ou à VHC (Virus Hépatite C). Les cellules T épuisées perdent la capacité de produire de l’IL2, du TNF et de

l’IFNγ et sont porteuses du marqueur PD-1 (Programmed Death-1). PD-1 se lie à son ligand

PD-L1, ce dernier est exprimé dans les tissus sains comme le foie, les reins, le cœur, les poumons et les endothéliums vasculaires (184–187) ainsi que sur les cellules macrophagiques, les NK, les cellules dendritiques et les lymphocytes T et B (185,188). Le complexe PD-1 / PD-L1 est un mécanisme de suppression des lymphocytes T activés (189–191).

Dans une étude récente, les cellules CD4+ et CD8+ différenciées du sang périphérique, exprimaient un niveau de PD-1 significativement plus élevé chez le nouveau-né infecté par le CMV que chez l’adulte infecté (en phases aigüe et chronique) (183). Par ailleurs, le blocage

du PD-1 augmentait significativement la production de l’IFNγ et de MIP-1β (Macrophage

Inflammatory Protein) par les cellules T, suggérant un rôle de régulation de PD-1 sur la fonction et le contrôle de la réponse des lymphocytes T lors de la présence d’antigènes HCMV (183). Cependant l’expression de PD-L1 n’a pas été vérifiée dans ce travail.

 Les réponses cellulaires T dans le cerveau fœtal infecté :

Les résultats de deux études concernant les réponses cellulaires T dans le cerveau fœtal humain infecté sont rapportés dans la partie dédiée au cerveau fœtal dans ce manuscrit. Concernant le PD1 / PD-L1, des données intéressantes sont connues grâce au modèle de post

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encéphalite virale de la souris infectée par le MCMV. Les cerveaux infectés sont infiltrés par des lymphocytes T CD8 qui expriment PD-1 alors que la microglie exprime PD-L1 en phase aiguë comme en phase chronique. Dans ce modèle, la neutralisation de PD-1 et de PD-L1 restaure la capacité de la production de l’IFNγ et de l’IL-2 par les lymphocytes T CD8.

La réponse humorale (lymphocyte B, plasmocytes et anticorps) est dirigée contre

un panel de protéines du virus notamment contre les glycoprotéines d’enveloppe : la gH et la gB (93,192,193). Un ensemble de données de la littérature obtenu dans les modèles animaux,

ex vivo et chez l’homme indique que les anticorps neutralisants pourraient jouer un rôle protecteur dans la transmission materno-fœtale du HCMV.

Chez la souris infectée par le MCMV, la neutralisation du virus par les anticorps protègerait d’une primo-infection mais limiterait également la réactivation du virus et protègerait l’hôte

contre une infection létale (194,195).

Dans le modèle de transmission materno-fœtale du gpCMV (guinea pig CMV) du cochon d’inde, l’injection d’immunoglobulines anti gpB hyper-immunes diminue la durée de la

virémie maternelle, l’infection et l’inflammation du placenta, le pourcentage de décès de

nouveau-néset celui de nouveau-nés infectés (196).

Dans le modèle ex vivo de l’explant décidual infecté par le HCMV, la réplication virale est significativement diminuée en présence d’immunoglobulines neutralisantes (152). Chez l’Homme, lors de la séroconversion maternelle à HCMV, l’avidité des anticorps pour le virus est faible. Cette faible affinité des immunoglobulines pour le virus faciliterait le passage

transplacentaire du virus lors de primo infection à HCMV (197). Ainsi, dans une étude, une

réponse d’anticorps précoce et forte contre les protéines du pentamère gH/gL/pUL128-130-131 était significativement associée à une diminution du risque de transmission du HCMV au

fœtus (198). Le transfert des anticorps de la mère au fœtus induirait une protection fœtale

contre le virus (199).

C’est l’ensemble de ces données qui justifie l’utilisation d’immunoglobulines hyper-immunes dans le but de prévenir la transmission du virus au fœtus lors d’une primo-infection maternelle.

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