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CHAPITRE 4. Synthèse des résultats et recommandations

4.2. La réactivité, représentations et antécédents

La réactivité revêt un caractère pluriel. A la réactivité du franchiseur et du franchisé (niveaux individuels), s’ajoute en effet la réactivité du réseau qui se situe, quant à elle, à un niveau collectif. Concernant le franchiseur, sa réactivité est présentée comme étant intrinsèque à son métier lui-même et à ses compétences. N’est-ce pas du ressort du franchiseur que d’avoir une « vision » stratégique et donc, d’adapter en permanence son concept commercial et les techniques d’animation du réseau ? La réactivité du franchiseur a, par ailleurs, une dimension très concrète pour les franchisés : un franchiseur est réactif quand il répond rapidement à leurs demandes et qu’il entretient avec eux des relations permanentes, directes (c’est-à-dire en personne) ou indirectes (par le biais des animateurs de réseau). Si les franchisés comptent sur la réactivité de leur franchiseur, ils ne se défaussent pas pour autant vis-à-vis de lui. Ils revendiquent leur propre réactivité : ils sont sur le terrain, proches de leurs clients et savent, dans ces conditions, mieux que quiconque, comment réagir par exemple quand un concurrent devient plus agressif. Cela ne signifie pas que tous les franchisés sont réactifs car des composantes individuelles interviennent. Des questions de tempérament ou d’état d’esprit font que certains franchisés sont plus passifs et moins dynamiques que d’autres.

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La réactivité est apparue complexe à étudier du fait de la diversité des acteurs, de leurs relations, des compétences requises, des étapes à parcourir, etc. Le terme d’alchimie est venu à l’esprit des répondants. Quand un réseau est réactif, c’est que quelque chose se passe, sans qu’on puisse vraiment en donner la recette. Est donc posée la question des moyens managériaux capables d’améliorer la réactivité, en particulier au moment où les franchiseurs doivent faire accepter leurs décisions. L’une des réponses possibles réside dans le leadership exercé, ce qui conforte les travaux conduits par El Akremi et al. (2009), et plus généralement, les travaux conduits sur la gestion des canaux de distribution (Filser, 1989).

Le management du réseau est constitué des phases d’analyse, d’action et d’évaluation, ce qui n’est pas sans rappeler les différentes étapes du processus de décision telles qu’elles ont été étudiées par Simon (1960) en particulier8. Etre réactif,

c’est d’abord aller jusqu’au bout du processus. Ainsi, la seule analyse des faits ne suffit pas. Il faut qu’elle débouche sur des moyens opérationnels à discuter entre franchisés et franchiseurs, avant leur diffusion dans le réseau. La réactivité, ainsi décrite, n’est pas un processus mécanique mais un processus relationnel dans lequel la confiance et la communication entre les partenaires jouent un rôle clé. Ce sont effectivement les franchiseurs qui décident in fine pour leur réseau mais ils ne peuvent le faire sans l’accord des franchisés. En d’autres termes, les franchiseurs ne peuvent remporter le défi de la réactivité qu’en convainquant les franchisés du bien-fondé de leur démarche et en aucun cas, en leur imposant des décisions. Ceci converge avec la position de Gillis et Combs (2009) pour qui l’une des compétences essentielles du franchiseur sera de faire « passer le message » sur le caractère incontournable des transformations d’un réseau dans l’intérêt des franchisés.

Bien que l’idée ne soit pas radicalement novatrice, notamment par rapport aux travaux antérieurs de Blair et Lafontaine (2005), la franchise analysée sous l’angle singulier de la réactivité fait ressortir plus que jamais son caractère « hybride ». La réactivité dépend du leadership impulsé par le franchiseur et de l’adhésion à un projet productif commun de la part des franchisés. Les franchiseurs voudraient parfois aller plus vite dans la mise en œuvre opérationnelle et l’application du système de réussite commerciale, mais ce n’est pas toujours possible compte tenu de la liberté de décision des franchisés. Au demeurant, dans les réseaux mixtes, la franchise ne serait pas plus réactive que la partie du réseau intégré. La forme organisationnelle, à savoir succursalisme vs franchise, n’est pas apparue comme un élément important de la réactivité. Pis encore, la franchise est même désignée comme ayant une certaine inertie en contexte de mixité.

La mixité tend à augmenter la réactivité du réseau dans son ensemble dans la mesure où les magasins détenus en propre par le franchiseur lui donnent l’opportunité de se rapprocher de son marché et de mieux le cerner, ce qui le sensibilise davantage aux problématiques des franchisés et lui permet de diffuser auprès de ses derniers des modifications du concept commercial après les avoir éprouvées. Ces magasins font en même temps office de vitrine du savoir-faire du franchiseur, à l’attention des franchisés. De plus, le franchiseur a la possibilité de faire évoluer, de façon provisoire, son parc de magasins en modifiant la répartition entre succursales et franchises. En période de crise, les magasins franchisés peuvent ainsi être rachetés, afin de ne pas perdre l’emplacement commercial au profit de la

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concurrence et en période de croissance ; des succursales peuvent devenir des magasins franchisés afin de favoriser un développement rapide de l’enseigne.

Dans un réseau de franchise, par nature, il s’agit de gérer des commerçants indépendants associés au projet productif commun pré-cité. Le franchiseur ne peut imposer par la coercition son système de réussite commerciale, au risque de générer un contre-pouvoir plus ou moins organisé de certains franchisés annihilant l’action. Il faut réussir convaincre par la confiance, la communication et un leadership à la fois directif et participatif. Nos résultats convergent avec la recherche de Croonen (2008), dans la mesure où ils confirment que le franchiseur peut « institutionnaliser » la confiance du franchisé dans le réseau de franchise en influençant positivement ses perceptions, et non en exerçant une contrainte. La question centrale consiste ici à instaurer un climat favorable à l’acceptation du changement.

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