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III) TRAITEMENTS HORMONAUX DE LA MENOPAUSE : IMPLICATION DE L’ESTRADIOL

3) La progestérone : stimulant respiratoire ou antioxydant ?

Bien que la majorité des preuves sont en faveur des effets protecteurs de l’estradiol contre l’apnée du sommeil à travers ses effets antioxydants, on peut penser à un rôle indirect de stimulant respiratoire de la part de l’estradiol. En effet, l’estradiol en se fixant sur ses récepteurs (ERs) est capable de stimuler la synthèse du récepteur nucléaire de la progestérone (nPR) dans le système nerveux central, permettant une meilleure réponse de la progestérone (Bayliss et al., 1990; Behan and Wenninger, 2008). La progestérone, en se fixant sur son récepteur nucléaire, est un stimulant respiratoire capable de diminuer les instabilités respiratoires chez la souris

(Marcouiller et al., 2014) et chez le rat (Yamazaki et al., 2005). De plus, la progestérone est capable de stimuler la ventilation en augmentant la fréquence respiratoire et le volume courant, par l’intermédiaire du récepteur nucléaire de la progestérone (Marcouiller et al., 2014). Chez la chatte anesthésiée, l’injection de progestérone directement au niveau du NTS augmente l’activité du nerf phrénique responsable de la contraction du diaphragme (Bayliss and Millhorn, 1992). L’estradiol joue un rôle important dans la réponse ventilatoire provoquée par la progestérone puisque l’injection sous-cutanée d’estradiol et de progestérone augmente trois fois plus l’activité du nerf phrénique que l’injection de progestérone seule chez la chatte (Bayliss et

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al., 1990) et chez la ratte (Brodeur et al., 1986). Ces études suggèrent qu’un niveau élevé de progestérone et de ses récepteurs nucléaires sont requis pour stimuler la ventilation.

Cependant, l’hypothèse que les effets protecteurs de l’estradiol contre la survenue des apnées du sommeil passent par la progestérone est peu probable, car notre modèle est ovariectomisé, signifiant que le niveau de progestérone circulante et cérébrale est faible, mais non négligeable, même s’il y a une élévation de la synthèse des récepteurs nucléaires de la progestérone. Il en demeure néanmoins important de se questionner sur les effets protecteurs de la progestérone dans un modèle d’apnées du sommeil. Nous avons ainsi conduit la même étude qu’au chapitre I, en remplaçant l’estradiol des pompes par de la progestérone (4 mg/kg) afin de voir si les effets sur les paramètres systémiques cardio-respiratoires et sur le stress oxydatif obtenus par le traitement par la progestérone sont similaires à ceux obtenus avec l’estradiol. Les résultats sur les paramètres systémiques (cardio-respiratoires) sont illustrés figure V.2.

Figure V.2 : Paramètres cardio-respiratoires chez des rattes traitées avec de la progestérone

Nos résultats montrent que contrairement à ceux obtenus avec l’estradiol, la progestérone ne réduit pas l’élévation de pression artérielle (figure V.2A), mais comme l’estradiol, réduit la survenue des soupirs et des apnées post-soupir (figure V.2B-C). On remarque que l’estradiol réduit plus fortement les apnées post-soupir que le traitement avec de la progestérone suggérant deux mécanismes distincts entre les deux hormones stéroïdiennes. On peut penser que les effets de la progestérone passent par ses effets de stimulant respiratoire alors que ceux de l’estradiol par ses effets antioxydants. De plus, rien ne montre que la progestérone régule l’activité sympathique ce qui peut expliquer qu’il n’y a pas de changement sur la pression artérielle. Toutefois, la progestérone possède également des effets antioxydants selon nos résultats, ils sont présentés figure V.3 et V.4.

80 90 100 110 120 mmHg

Mean Arterial Pressure

**** 0 5 10 15 20

Post sigh apnea

# events/hour ** 0 5 10 15 20 25 # events / hour Sigh * A B C

Pression artérielle (A) apnées post-soupir (B) et soupirs (C) chez des rattes traitées avec du véhicule ou de la progestérone (4 mg/kg) exposées ou non à l’HI. Les valeurs sont exprimées en moyennes ± SEM, n=6 pour chaque groupe. *, ** et **** représentent respectivement p< 0.05, 0.01 et 0.001par rapport au groupe OVX-Veh AIR.

133 Figure V.3 : Peroxydation lipidique chez des rattes traitées avec de la progestérone

Figure V.4 : Activité de la superoxyde dismustase (SOD) chez des rattes traitées avec de la progestérone

Nos résultats sur les dommages oxydatifs des lipides rapportent que le traitement avec de la progestérone protège contre la peroxydation lipidique induite par l’exposition à l’hypoxie intermittente dans le cortex et le tronc cérébral (figure V.3A-B). De même, la progestérone évite la diminution de l’activité de la SODCuZn induite par l’HI dans le cortex sans modification

dans le tronc cérébral (figure V.4 A-B). Ces résultats sont en tout point similaires avec ceux obtenus avec l’estradiol, suggérant que la progestérone protège contre le stress oxydatif. En effet, il a été rapporté que chez des rattes ménopausées l’administration d’un combiné estradiol et progestérone augmentent l’activité de la SODCuZn plus fortement qu’avec de l’estradiol seul

0 1 2 3 nmol/ mg protein Cortex * 0 1 2 3 4 nmol/ mg protein Brainstem *

A

B

0 1 2 3 4 nmol/min/µg protein Cortex ** 0 2 4 6 8 10 nmol/min/µg protein Brainstem

A

B

Niveau du MDA(malondialdéhyde) dans le cortex (A) et le tronc cérébral (B) chez des rattes traitées avec du véhicule ou de la progestérone (4 mg/kg) exposées ou non à l’HI. Les valeurs sont exprimées en moyennes ± SEM, n=6 pour chaque groupe. * représentent p< 0.05 par rapport au groupe OVX- Veh AIR.

Activité de la superoxyde dismutase cytosolique (SODCuZn) dans le cortex (A) et le tronc cérébral (B)

chez des rattes traitées avec du véhicule ou de la progestérone (4 mg/kg) exposées ou non à l’HI. Les valeurs sont exprimées en moyennes ± SEM, n=6 pour chaque groupe. ** représentent p< 0.01 par rapport au groupe OVX-Veh AIR.

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(Moorthy et al., 2005). Cependant, le pouvoir antioxydant de l’estradiol est reconnu comme étant plus fort que celui de la progestérone (Doshi and Agarwal, 2013; Moorthy et al., 2005). Lors de la ménopause, la diminution drastique du niveau d’estradiol est associée au déclin du niveau de la progestérone (Santoro and Randolph, 2011) et peut expliquer l’augmentation des apnées du sommeil. Par exemple, chez les femmes ménopausées, la progestérone est 2,8 fois moins importante chez les femmes subissant des apnées du sommeil (Netzer et al., 2003).

L’indice d’apnées du sommeil est 30 % plus faible chez les femmes traitées avec de la progestérone et de l’estradiol, quel que soit l’indice de masse corporelle (Shahar et al., 2003).

4) HIF-1 et HIF-2 : modulateurs des ROS induits par l’hypoxie