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PARTIE I : INTRODUCTION GENERALE

V. L’ENDOCYTOSE DES NANOPARTICULES

5.1. Généralités sur l’endocytose

5.1.3. La pinocytose

5.1.3.1. La voie des clathrines

Depuis la description des puits recouverts de clathrines en 1964 par Roth and Porter (Roth and Porter,

1964), la voie d’endocytose dépendante des clathrines (EDC) est le mécanisme d’endocytose le mieux

décrit. C’est un mécanisme majeur commun à tous les mammifères (Sahay et al., 2010) et responsable

de 40 à 50% de l’endocytose des phases fluides (Benmerah and Lamaze, 2007). L’EDC se caractérise

par la formation de vésicules de 100 à 200 nm ((Benmerah and Lamaze, 2007; Parkar et al., 2009),

recouvertes d’un manteau protéique majoritairement composé de clathrines. Cette voie nécessite

l’implication de nombreux adaptateurs moléculaires tels que l’adaptatine AP-2, les epsines et la

1-arrestine, qui participent à la formation, la stabilisation et le transport intracellulaire des vésicules

recouvertes de clathrines (figure 5).

La vésicule formée se détache de la membrane plasmique par l’action d’une GTPase particulière

appelée dynamine. Elle est ensuite débarrassée de son manteau protéique, puis fusionne avec les

endosomes précoces dans lesquels les molécules internalisées seront triées et redirigées vers d’autres

compartiments intracellulaires (Hinshaw, 2000). La plupart des molécules empruntant la voie des

clathrines sont dirigées directement ou indirectement vers les lysosomes où elles sont dégradées. Ce

transport vésiculaire depuis l’internalisation de la molécule jusqu’à la fusion avec les endosomes est

un processus extrêmement rapide, de l’ordre de quelques secondes (Loerke et al., 2009). Il existe

plusieurs ligands endogènes caractéristiques de l’EDC. On y compte par exemple la transferrine, les

immunoglobulines, le transporteur Low Density Lipoprotein (LDL), l’epithelial Growth Factor (EGF)

et l’insuline (Benmerah and Lamaze, 2007).

Figure 5. Formation de vésicules recouvertes de clathrines (Reider and Wendland, 2011)

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5.1.3.2. Les voies d’endocytose indépendantes des clathrines

2 La voie de cavéoles

Les cavéoles sont des invaginations membranaires résistantes aux détergents, riches en cavéolines,

cholestérol et sphingolipides. La voie des cavéoles est impliquée dans l’internalisation de nombreuses

molécules telles que la toxine du choléra, les protéines liant la Glycosyl Phosphatidyl Inositol

(GPI-anchored proteins) et le virus SV40 (Kurzchalia and Parton, 1999; Pelkmans et al., 2001). Elle

participe également aux mécanismes de transcytose dans les cellules endothéliales (Doherty and

McMahon, 2009). Contrairement aux clathrines, les cavéoles sont présentes de façon variable en

fonction des tissus et des types cellulaires. En effet, elles sont abondamment exprimées dans les tissus

musculaires lisses, les pneumocytes 1, les fibroblastes et les cellules endothéliales (Parton and Simons,

2007), tandis qu’elles ne sont pas exprimées par les lymphocytes (Johannes and Lamaze, 2002). Les

vésicules issues de la voie des cavéoles sont des vésicules lisses (sans manteaux protéique) de 50 à

100 nm de diamètre (Parkar et al., 2009). Comme pour la voie des clathrines, la vésicule formée est

détachée de la membrane plasmique par l’action de la dynamine et fusionne avec un endosome

précoce. Cependant, contrairement à la plupart des autres voies de pinocytose, la voie des cavéoles

présente cette particularité que, les vésicules formées peuvent éviter les endosomes précoces et

fusionner directement avec des endosomes particuliers appelés cavéosomes (figure 6). La cavéoline est

une protéine membranaire oligomérique indispensable à la viabilité des vésicules de cavéoles. Des

cellules délétées en cavéolines sont incapables de former des vésicules de cavéoles. En revanche,

l’expression du gène de la cavéoline-1 dans des lymphocytes suffit à leur conférer la possibilité de

former des vésicules de cavéoles. Par ailleurs, le cholestérol est indispensable à la stabilité des

vésicules de cavéoles, et l’utilisation d’agents pharmacologiques déplétant le cholestérol (tels que la

filipine ou la nystatine) suffit à désorganiser les vésicules de cavéoles.

Figure 6. Vésicules de cavéoles (Galbiati et al., 2001)

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2 La macropinocytose

Décrite pour la première fois par Warren Lewis, la macropinocytose est un mécanisme qui permet

l’internalisation de grandes quantités de particules et phases fluides (Lewis, 1931). C’est un

mécanisme actine-dépendant dans lequel la cellule forme des prolongements membranaires

(lamellipodes) pour séquestrer des éléments présents dans son milieu extracellulaire (figure 7). C’est

un mécanisme dépendant de l’action des protéines kinase (exemple pak1, PKC, ras, PI3K, src) qui

stimule l’actine du cytosquelette. Les vésicules formées (macropinosomes) sont de tailles très

variables pouvant aller de 0,5 à 10µm de diamètre. En condition physiologique, la macropinocytose

est déclenchée par la fixation de facteurs de croissance sur des récepteurs tyrosine kinase (Mercer and

Helenius, 2009). Cependant, elle peut être induite par d’autres stimuli tels que des corps apoptotiques,

des cellules nécrotiques, des particules exogènes ou des bactéries (Mercer and Helenius, 2009). Elle

est également responsable de l’internalisation de certains virus comme le virus de la vaccine (Mercer

and Helenius, 2008), les adénovirus-3 (Amstutz et al., 2008) et les Coxsackievirus (Coyne et al.,

2007). Comme la plupart des vésicules de pinocytose, les macropinosomes fusionnent avec les

endosomes précoces.

Figure 7. Formation d’une vésicule de macropinocytose

2 Les autres voies de pinocytose

En plus des mécanismes décrits ci-dessus, il existe plusieurs autres voies d’endocytose. Bien que

moins bien caractérisées, elles participent de façon importante à l’internalisation de nombreuses

molécules. Les lipid RAFTS ou radeaux lipidiques sont des micro-domaines membranaires

résistants aux détergents, riches en cholestérol et sphingolipides, mais dépourvus en cavéolines (figure

8). Ils sont généralement présents sur les plans latéraux de la membrane plasmique des cellules

(Johannes and Lamaze, 2002; Sowa et al., 2001). C’est une voie d’endocytose dépendante de la

dynamine, impliquant des mécanismes très similaires à ceux de la voie des cavéoles. La voie Rho-A

est une voie d’endocytose dépendante de l’action de la GTPase Rho-A. Elle participe à la régulation de

l’actine du cytosquelette membranaire et est impliquée dans l’endocytose de molécules telles que la

chaîne béta du récepteur à l’intégrine 2 et le récepteur à l’IgE. La voie Afr-6 est une voie

dynamine-dépendante, impliquée dans le recyclage de nombreuses molécules (Donaldson et al., 2009). A cela

nous pouvons citer d’autres voies telles que la voie dépendante de la flotilline et la voie cdc-42

dépendante. Cependant ces mécanismes restent mal caractérisés.

Figure 8. Organisation membranaire des radeaux lipidiques (Galbiati et al., 2001)

5.1.4. La phagocytose

La phagocytose est un mécanisme d’endocytose réservé à des cellules spécialisées appelées cellules

phagocytaires ou phagocytes. Ce sont principalement des cellules du système immunitaire telles les

macrophages, les polynucléaires, les cellules de Langherans et les cellules dendritiques; qui participent

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opsonines à la surface de la particule à phagocyter. Ces opsonines sont des protéines circulantes du

milieu biologique telles que les immunoglobulines, les protéines du complément, les protéines du

sérum, les protéines du surfactant, qui en se fixant à la surface de la particule, vont la rendre visible

par des récepteurs spécifiques à la surface des cellules phagocytaires (exemple: récepteurs du

complément, récepteurs de fragments Fc, récepteurs au mannose, récepteurs Scarvenger…).

La fixation de la particule opsonisée sur le récepteur entraîne l’activation de celui-ci, qui va initier une

cascade de réactions entraînant l’internalisation de la particule à l’intérieur d’une vésicule appelée

phagosome. La particule phagocytée sera digérée après fusion du phagosome avec les lysosomes.

Figure 9. Phagocytose d’une particule (Desjardins, 2003). LE : late endosome ; EE : early

endosome ; Ly : llysosome

Les phénomènes d’endocytose participent à la régulation cellulaire. Nous avons décrit plusieurs

mécanismes d’endocytose médiés par récepteurs; c'est-à-dire initiés par la fixation d’un ligand

extracellulaire sur un récepteur membranaire. Toutefois, l’endocytose de phases fluides joue

également un rôle important dans la signalisation cellulaire et la régulation de la composition

membranaire (Damke et al., 1995). L’endocytose est un mécanisme extrêmement régulé qui décide du

devenir des molécules internalisées. Ce contrôle passe par une succession d’étapes, la première étant

la fixation du ligand sur son récepteur. La fixation du ligand entraîne une activation des parties

membranaire et cytoplasmique du récepteur, lui permettant de recruter des partenaires moléculaires

appelés adaptateurs (lipides, protéines, cytosquelette…) (figure 10).

Figure 10. Schéma d’une vésicule d’endocytose montrant les différents acteurs moléculaires

responsables de sa formation et sa destination.

Le type de partenaire recruté dépend de la nature du récepteur. Ainsi, les vésicules de clathrines

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d’autres destinations. A ce niveau, trois destinations s’offrent à elles : elles peuvent être renvoyées à

l’extérieur des cellules (exocytose, transcytose), envoyées dans le cytosol, ou bien dirigées vers

d’autres endosomes (lysosomes, noyau, corps multi-vésiculaires, appareil de golgi…). Les modalités

de tri et d’adressage sont déterminées par la composition de la vésicule d’endocytose et les

caractéristiques de l’endosome précoce : composition lipidique de la membrane, nature des protéines

(GTPases Rab), géométrie tubulo-vésiculaire… (Mayor and Pagano, 2007; Parkar et al., 2009). Par

exemple, les protéines vésiculaires liant la GPI sont connues pour favoriser le transport vers l’appareil

de golgi (Doherty and McMahon, 2009; Martin and Pagano, 1994). La multiplicité des acteurs

moléculaires et la complexité des interactions font que plusieurs destinations différentes peuvent être

associées à une même voie d’entrée. De la même manière, des molécules qui sont internalisées par des

voies différentes peuvent avoir une même destination finale. L’idée selon laquelle : « une voie, une

destination » n’est donc pas exacte.

Figure 11. Destination des vésicules d’endocytose médiée par récepteur (Mayor and Pagano,

2007)

Par ailleurs, le fait qu’une même molécule puisse intervenir dans plusieurs voies d’endocytose, rajoute

à la complexité de la régulation de l’endocytose. Ainsi, la déplétion du cholestérol des membranes

inhibe la formation des vésicules de cavéoles dans les cellules. Cependant, des études montrent qu’en

fonction du type cellulaire et du degré de déplétion, elle peut également inhiber d’autre voies telles que

la macropinocytose, la voie des clathrines et la voie Rho-A (Grimmer et al., 2002; Mayor and Pagano,

2007). Enfin, la machinerie de l’endocytose peut être régulée en fonction de l’état physiologique de la

cellule. Ainsi, l’Epidermal Growth Factor (EGF) est internalisé sous une forme fonctionnelle par la

voie des clathrines, tandis que son internalisation par la voie des cavéoles inhibe son activité (Park et

al., 2000). De plus, la présence en forte concentration de l’EGF à l’extérieur des cellules entraîne

également son internalisation par macropinocytose (Orth et al., 2006). De façon similaire, des études

montrent que l’endocytose du récepteur à l’EGF (EGFR) par la voie des clathrines entraine son

recyclage alors qu’une endocytose par des mécanismes indépendants des clathrines entraîne sa

dégradation dans les endosomes acides (Sigismund et al., 2008). Ces études illustrent la complexité de

la régulation des phénomènes d’endocytose, et l’importance des conditions environnementales dans

cette régulation.

5.3. L’endocytose des nanoparticules

Comme les macromolécules biologiques et les virus, les nanoparticules pénètrent dans les cellules par

des mécanismes d’endocytose. Etudier et caractériser ces mécanismes est nécessaire pour concevoir

leur meilleure utilisation comme vecteurs intracellulaires de molécules. Plusieurs voies d’endocytose

ont été décrites pour l’internalisation des nanoparticules. Elles dépendent des caractéristiques

physicochimiques des nanoparticules (taille, forme, charge de surface, hydrophobicité…), du type

cellulaire impliqué mais aussi de l’état physiologique de la cellule (Cartiera et al., 2009).

- La taille des nanoparticules joue un rôle majeur dans l’endocytose, capable d’influencer aussi

bien la cinétique d’endocytose que la voie d’endocytose empruntée. Contrairement aux

microparticules, l’endocytose des nanoparticules implique surtout des mécanismes de pinocytose

(Chaudhuri et al., 2011). Les études montrent qu’en dessous de 250nm, les particules sont de moins en

moins sensibles aux mécanismes de phagocytose (Hillaireau and Couvreur, 2009). Les études

suggèrent que la taille des nanoparticules pourrait influencer leurs voies d’entrée dans les cellules.

Cela tient en partie au fait que les vésicules formées possèdent des échelles de tailles spécifiques, en

fonction de chaque voie (macropinocytose : 0,5-5µm ; clathrines : 100-200nm ; cavéoles : 50-100nm ;

lipid raft : ~100nm). Ainsi, des particules de taille >100nm seront plus facilement internalisées par la

voie des clathrines, la macropinocytose et la phagocytose. En revanche, des nanoparticules de petite

taille (< 50nm) sont plus souvent internalisées par des mécanismes plus particuliers. Ainsi, Lai et ses

collaborateurs ont montré qu’en réduisant la taille des nanoparticules on augmente progressivement

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- La charge de surface influence également l’endocytose, et notamment la capacité des

nanoparticules à interagir avec la surface des cellules. En général les nanoparticules cationiques se

fixent plus facilement à la surface des cellules, grâce à leur capacité à interagir avec les récepteurs

anioniques présents à la surface des cellules (héparane sulfate protéoglycannes, glycosamino

glycannes). Cela se traduit de façon générale par une endocytose plus rapide et plus importante des

nanoparticules cationiques par rapport aux nanoparticules anioniques et neutres (Kumari and Yadav,

2011). Par ailleurs, certaines données de littérature suggèrent que la charge de surface peut influencer

la voie d’endocytose, en fonction du type cellulaire. Des études avec des cellules Hela montrent par

exemple une endocytose de nanoparticules cationiques de PLGA par la voie des clathrines tandis que

les nanoparticules anioniques de PLGA emprunteraient d’autres voies (Harush-Frenkel et al., 2007).

Des travaux similaires sur les cellules MDCK montrent que malgré une endocytose de nanoparticules

cationiques et anioniques de PLGA par la voie des clathrines, seules les nanoparticules cationiques

étaient capables de transcytose à travers les cellules (Harush-Frenkel et al., 2008). Perumal et ses

collègues observent également une endocytose de dendrimères anioniques dans des cellules alvéolaires

A549 par la voie des cavéoles, et une endocytose indépendante des clathrines et des cavéoles pour des

dendrimères cationiques (Perumal et al., 2008). Enfin, la densité semble avoir son importance, et des

études montrent que des nanoparticules de forte charge de surface (cationiques ou anionique) sont plus

fortement opsonisées et éliminées par phagocytose (Chonn et al., 1991).

- D’autres paramètres physicochimiques peuvent également influencer les mécanismes

d’endocytose des nanoparticules. Par exemple, Champion et ses collaborateurs ont montré qu’en

modifiant la forme et la géométrie des nanoparticules de polystyrène, on modifiait significativement

leur endocytose par les macrophages alvéolaires (Champion et al., 2007). Par ailleurs les propriétés de

surface comme la réactivité, l’hydrophobicité, et l’agrégation sont connues pour jouer des rôles

dans l’endocytose. 2

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Considéré séparément chacun de ces paramètres est capable d’influencer de façon significative

l’interaction des nanoparticules avec les cellules et leur voie d’endocytose. Cependant, une

nanoparticule se définit par un ensemble de caractéristiques physicochimiques susceptibles

d’influencer ses propriétés. Les concentrations utilisées, l’environnement biologique et les conditions

expérimentales influencent également ces propriétés (agrégation, forme, interactions de surface,

hydrophobicité). Des études récentes montrent en effet que l’association de protéines à la surface de

nanoparticules de polyethyleneimine (PEI) modifie leurs mécanismes d’endocytose par les cellules

endothéliales de la barrière hémato-encéphalique (Chang et al., 2009; Chang et al., 2012; Georgieva et

al., 2011).

VI. DEVELOPPEMENT DES NANOPARTICULES COMME VECTEURS DE

MEDICAMENTS A TRAVERS LES VOIES RESPIRATOIRES

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