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2.2 Gestion de classe

2.2.2 La gestion de classe en 5 dimensions

Afin de bien étayer la multidimensionnalité de la compétence à gérer la classe, le cadre développé récemment par Gaudreau et ses collègues (Gaudreau, 2015; Gaudreau, Fortier, Bergeron, & Bonvin, sous presse) a été retenu pour notre projet. Ces auteurs divisent ce concept en cinq dimensions distinctes, comme le suggère Garrett (2014), soit celles de la gestion des ressources, de l’établissement d’attentes claires, du développement de relations positives, du maintien de l’attention et de l’engagement des élèves sur l’objet d’apprentissage et de la gestion de l’indiscipline. Cette vision nous semble complète compte

tenu que chaque aspect vu par les auteurs recensés étudiant la gestion de classe (Dufour, 2009; Gaudreau, 2011; Hart, 2010; Macleod et al., 2012; Protsenko, 2012; Sabol & Pianta, 2012; Way, 2011) peut trouver place dans l’une ou l’autre de ces catégories. D’autres modèles théoriques, dont celui de Doyle (2006), auraient pu être convoqués pour réaliser cette étude. Le cadre de Gaudreau et al. (sous-presse) a été choisi parce qu’il nous permettait d’atteindre les objectifs de l’étude.

2.2.2.1 Gérer les ressources

La gestion des ressources est la dimension qui soutiendra le développement des quatre autres. En effet, il s’agit de planifier et d’organiser le temps, le matériel et l’espace dans l’optique de pouvoir établir des attentes claires, développer des relations positives, maintenir l’attention et l’engagement des élèves et gérer l’indiscipline. Dans le tableau 2.2, différents moyens à la disposition de l’enseignant pour gérer de manière efficace les ressources auprès de l’ensemble de la classe sont énumérés.

Tableau 2.2

Tableau synthèse des moyens pour la gestion des ressources

Temps Matériel Espace

- Planifier et informer les élèves du temps des activités d’apprentissage - Prévoir des moments consacrés au développement des relations interpersonnelles - Utiliser des repères temporels visuels variés (calendrier, horaire des cours, plan de la journée, plan de travail, horloge visuelle, sablier, etc.) - Rappeler fréquemment les - Assurer l’accessibilité du matériel scolaire par des méthodes de rangement efficaces - Choisir du matériel pédagogique attrayant, stimulant et adapté aux besoins des élèves - Préparer le matériel d’enseignement avant les cours (incluant les outils technologiques) - Superviser la gestion des - Disposer le bureau de l’enseignant pour faciliter la supervision de la classe - Disposer les pupitres des élèves pour favoriser l’écoute et la participation de chacun - Prévoir des espaces de travail commun - Utiliser l’affichage en soutien à l’apprentissage - Organiser la classe pour

échéanciers - Planifier le temps et encadrer les transitions aux devoirs et leçons (agendas et sacs d’école) permettre la circulation fréquente et fluide de l’enseignant (Gaudreau et al., sous presse)

Bien que les moyens suggérés ci-haut contribuent à une gestion efficace des ressources, l’hétérogénéité présente dans les classes montréalaises peut amener l’enseignant à faire quelques adaptations pour répondre aux besoins de certains élèves. Une gestion différenciée des ressources peut contribuer à la mise en place d’une pédagogie différenciée par la différenciation des structures expliquée précédemment. Par exemple, donner des listes de vérifications ou des aide-mémoire à certains enfants ayant besoin d’aide pour développer leur autonomie, ou encore prévoir des endroits dans la classe pour les élèves ayant besoin de bouger sont des moyens pour faire les premiers pas vers la différenciation pédagogique.

Autrement, la gestion des ressources contient aussi la gestion des ressources humaines disponibles pour l’enseignant et les élèves de la classe. La mise en place de pratiques collaboratives avec les collègues, les professionnels et les parents pour soutenir l’enseignant dans ses interventions auprès des élèves représente un moyen pouvant favoriser un climat de classe propice aux apprentissages.

2.2.2.2 Établir des attentes claires

Établir des attentes claires correspond principalement à faire respecter des règles de classe en étant constant et cohérent. Ceci permettra à l’enseignant de créer un cadre sécurisant et respectueux. Les élèves savent alors ce qu’ils peuvent faire ou non et quelles sont les conséquences à leurs actions. En plus des règles de classe, l’établissement d’attentes claires signifie aussi la mise en place de routines et de procédures pour les transitions qui font que le déroulement d’une journée de classe est prévisible. Ainsi, les élèves savent exactement ce qui est attendu d’eux. La clé du succès pour établir des attentes claires est la surveillance continue et active de l’enseignant ainsi que la constance

et la cohérence dans les interventions. Les attentes claires seraient un facteur déterminant de la bonne conduite des élèves. Pour prendre en compte l’hétérogénéité dans la classe, certaines adaptations peuvent être envisagées telles que l’utilisation de pictogrammes, une liste de vérification ou des interventions non verbales.

2.2.2.3 Maintenir l’attention et l’engagement des élèves

Le maintien de l’attention des élèves et de leur engagement sur les tâches proposées est une dimension importante de la gestion de classe qui propose d’agir sur l’aspect pédagogique de l’enseignement. En effet, pour y parvenir, l’enseignant doit s’assurer de répondre aux besoins et aux intérêts des élèves dans les activités d’apprentissage qui sont proposées. Ainsi, une approche différenciée, une variété de stratégies pédagogiques et des groupements diversifiés sont autant de moyens à utiliser pour garder les élèves attentifs et engagés. Il est donc possible de penser qu’un enseignant utilisant fréquemment des pratiques de différenciation pédagogique obtiendra une attention et un engagement plus soutenu de la part de ses élèves et sera ainsi confronté à moins d’indiscipline.

2.2.2.4 Développer des relations positives

Les relations qui se développent entre les élèves et leur enseignant sont déterminantes du climat qui règnera dans la classe. En effet, plusieurs auteurs se sont penchés sur l’importance de cette relation dans l’enseignement et de ces diverses facettes (de Jong et al., 2014; Lemire, 2011; Macleod et al., 2012; Martineau & Gauthier, 1999; Protsenko, 2012; Sabol & Pianta, 2012; Way, 2011). L’utilisation de l’humour, un accueil chaleureux tous les jours et s’intéresser à la vie personnelle des élèves sont des exemples permettant de créer et de fortifier le lien qui uni un élève et son enseignant. Les élèves apprécieraient les enseignants qui se montrent stricts mais cohérents, qui interviennent de manière équitable et avec humour. Une relation positive ainsi développée avec les élèves favoriserait l’émergence de comportements responsables chez les élèves et une diminution des comportements perturbateurs (Gaudreau et al., sous presse).

2.2.2.5 Gérer l’indiscipline

Les quatre dimensions de la gestion de classe précédentes visent toutes à prévenir l’émergence de comportements perturbateurs et à favoriser une bonne conduite chez les élèves. Ainsi, dans la mesure où l’enseignant investit dans la gestion des ressources, l’établissement d’attentes claires, les relations positives et le maintien de l’attention et de l’engagement, la gestion des écarts de conduite sera moins fréquente. Cependant, malgré une gestion de classe efficace, certains élèves peuvent avoir besoin d’un enseignement plus explicite et systématique des comportements à adopter, et de renforcements positifs plus fréquents sur leurs bons comportements pour réduire ceux qui sont inappropriés. L’ignorance intentionnelle et l’application des conséquences logiques en lien direct avec le comportement sont aussi des interventions permettent de prévenir et de diminuer la fréquence de l’indiscipline dans la classe, alors que l’application de punitions ne serait pas efficace et aurait plutôt tendance à alimenter la frustration chez l’enseignant et chez l’élève (Gaudreau et al., sous presse). 2.2.2 L’importance des caractéristiques intrinsèques de l’enseignant pour la gestion de classe La compétence à gérer la classe par l’intermédiaire des cinq dimensions proposées ci-haut est développée à différents niveaux par les enseignants. En effet, les formations et les expériences diffèrent d’un professionnel à l’autre ce qui crée une inégalité entre leur niveau de compétence en gestion de classe. Outre la formation et l’expérience, d’autres facteurs entrent en jeu pour développer la capacité de gérer une classe. (Lacourse, 2012) mentionne que la gestion de classe est une compétence de gestion organisationnelle et interrelationnelle qui dépend des techniques employées et qui sont souvent tacites. Mcdonald (2010) préfère plutôt parler d’un code de conduite général chez l’enseignant qui se base sur des assises philosophiques, éthiques et théoriques. Quant à lui, Richoz (2009) adopte un point de vue plutôt intéressant sur la manière de l’enseignant de s’imposer face aux élèves par sa présence en classe. Il souligne qu’il est difficile de définir ce concept de présence, mais que celui-ci peut être développé et travaillé par les enseignants.

«La présence est une manière d’être, d’exister devant la classe, qui s’impose par la force intérieure d’être là. La présence est le petit quelque chose qui fait la différence entre un enseignant que les élèves écoutent et respectent et un autre enseignant qui se fait chahuter, qui n’arrive pas à s’imposer et à motiver ses élèves pour sa matière d’enseignement.» (p.327)

Ce point de vue nous permet de faire un lien avec la vision de Chouinard (2001) mentionnée précédemment qui associe l’approche de gestion de classe d’un enseignant à son profil personnel selon l’importance qu’il accorde aux composantes qui la constituent.

Ainsi, bien que plusieurs variables influencent l’instauration et le maintien d’une gestion de classe efficace, il semblerait qu’un aspect central du développement de la compétence à gérer la classe soit l’enseignant, son profil personnel, ses valeurs et sa présence.

2.3 Le sentiment d’efficacité personnelle (SEP) à gérer la classe

Comme mentionné précédemment, les caractéristiques personnelles de l’enseignant font partie des éléments qui influencent grandement sa compétence à mettre en place une gestion de classe efficace. L’un de ces aspects intrinsèques à l’enseignant est son sentiment d’efficacité personnelle (SEP). Ce concept a été proposé et approfondi par Albert Bandura ce qui explique l’importance que nous accordons à ses écrits dans cette section, bien que cet objet d’étude ait été repris et étudié par plusieurs chercheurs sur lesquels nous reviendrons ultérieurement. Dans cette partie, nous décrirons ce concept et son influence sur les actions telles que Bandura (2007) l’a développé.