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L’utilisation de l’oxygène pour améliorer les qualités du vin : la micro-oxygénation

micro-oxygénation

5.3.1 Introduction

Il est reconnu que les grands vins rouges de grande qualité peuvent prétendre à un élevage en

barriques (Hernández-Orte, 2009). La perméabilité du bois de chêne favorise une perméation

naturelle de l’oxygène. Les valeurs de perméation se situent entre 1,66 et 2,5 mL/L/mois pour

des barriques de chêne Français (Nevares et del Álamo, 2008). Cette « entrée d’air » naturelle

conduit à l’amélioration de l’intensité et de la stabilité de la couleur des vins par le biais de la

formation de pigments polymérisés résistants à l’effet décolorant ou de blanchissement du

dioxyde de soufre SO

2

(Atanasova et al., 2002; Fourie, 2005), comme les pigments

FéthylA

+

(Atanasova, 2003; Boulet et Moutounet, 1998; del Carmen Llaudy et al., 2006).

5.3.2 Principe de la micro-oxygénation

L’élevage en barriques de chêne reste encore aujourd’hui un procédé onéreux. Pour remédier

à des coûts d’élevage importants, le principe de micro-oxygénation (MOX) a été mis en place.

La MOX consiste à introduire de petites quantités contrôlées d’oxygène via un flux continu

dans les cuves en inox dans lesquelles est stocké le vin (Moutounet et al., 2001). Cette

alternative permet de se rapprocher de l’effet désiré en élevage barriques mais aussi

d’accélérer le vieillissement du vin, aussi bien sur un plan chimique que sensoriel. L’ajout

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d’oxygène est stratégique et dépend essentiellement de l’objectif final, d’un point de vue

œnologique ; dans la mesure où l’oxygène peut être ajouté à n’importe quel moment du

procédé de vinification (Cottrell, 2004).

La technique de micro-oxygénation a été développée à Marinan, en France, en 1991 et résulte

d’essais menés par Ducornau et Lemaire au sein de la compagnie Œnodev. L’oxygène est

incorporé au vin à l’aide d’un système de diffusion branché à une source d’oxygène (Figure

23). Un système informatisé permet de régler avec précision la dose d’O

2

à envoyer, ce qui

règle le débit d’air envoyé dans la cuve. A la sortie du tube reliant la source d’O

2

au vin, le

diffuseur poreux en céramique convertit le flux de gaz en un mince filet de micro-bulles qui

vont s’incorporer rapidement au vin. La cuve inox dans laquelle la MOX est réalisée doit

atteindre au moins 2,2 mètres de haut pour optimiser la dissolution des bulles d’O

2

dans le vin

(Du Toit et al., 2006).

Figure 23 : Représentation schématique du système de micro-oxygénation.

5.3.3 L’ajout d’oxygène lors d’étapes clés de la fabrication du vin

A Solubilité de l’oxygène dans les vins

La solubilité maximale de l’oxygène dans un vin dépend de sa teneur en éthanol, de sa

concentration en composés, mais est essentiellement conditionnée par la température et la

composition du gaz auquel le vin est exposé. Elle est de 6 mL/L, soit environ 8,4 mg/L à

température ambiante et à pression atmosphérique (Singleton, 1987). Lorsque le vin est

exposé à de l’oxygène pur, comme c’est le cas lors d’une micro-oxygénation, la solubilité de

l’oxygène augmente d’environ 10 % avec une température de 5°C plus basse. Pour cette

raison, les vinificateurs prennent grand soin de la vendange lorsque des étapes de vinification

O

2

Cuve inox

Diffuseur pour

microbullage

Module de

pilotage

Apport en oxygène

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employant des températures basses sont mises en œuvre, telles que le foulage du raisin blanc

ou bien la stabilisation à froid (Waterhouse et Laurie, 2006).

L’exposition du vin à l’oxygène est plus ou moins importante selon les étapes de vinification

(Tableau 2) (Vidal et al., 2001, 2003, 2004a). Le pompage du vin d’une cuve à l’autre est

l’opération qui est responsable de l’ajout en O

2

dissous le plus faible (0,1 à 0,2 mg/L), tandis

qu’un remontage avec aération favorise la dissolution de 7,4 mg/L, une valeur qui frôle la

capacité de solubilité maximale de l’O

2

dans un vin.

Tableau 2 : Apport d’oxygène dans les vins suite aux différentes étapes de vinification.

Étape de vinification Apport d’oxygène dissous (mg/L)

Transvasement cuve à cuve 0,1 à 0,2

Centrifugation 1

Remontage sans aération 2,2

Remontage avec aération 7,4

Une étude a montré que, dans des cuves remplies de vin, l’oxygène est distribué en couches :

la saturation maximale du vin est quasiment atteinte à l’interface entre la cuve et la surface du

vin, tandis que la valeur d’oxygène dissous avoisine le zéro dans les 10 à 20 premiers

centimètres tout en bas de la cuve (Moutounet et Mazauric, 2001; Waterhouse et Laurie,

2006).

B Intérêt de la micro-oxygénation

De nombreuses études ont démontré l’intérêt de la micro-oxygénation, qu’elle soit utilisée en

début de processus de vinification et/ou en cours d’élevage. Singleton (1987) a calculé qu’un

vin rouge pouvait tolérer jusqu’à 30 saturations (soit 180 mL/L d’O

2

dissous) avant de

montrer un caractère oxydatif. Dans son étude il ressort qu’une dose équivalente à 10 fois la

valeur de saturation (60 mL/L d’O

2

dissous) peut améliorer la qualité d’un vin. Cependant,

cette valeur ne peut pas être appliquée à tous les vins, du fait de la différence liée à la

composition phénolique initiale du cépage, du mode de vinification et d’élevage.

Lors de l’étude bibliographique sur la MOX, les travaux de synthèse de Anli et Cavuldak

(2012) ainsi que les lectures postérieures amènent à constater que l’oxygène peut être ajouté à

quatre moments-clés : tout d’abord à la fin de la fermentation alcoolique (FA) juste avant la

fermentation malolactique (FML) (Cano-López et al., 2008; Cejudo-Bastante et al., 2011a,

2011b; González-del Pozo et al., 2010; Kovačević Ganić et Gracin, 2016; Hernández-Orte,

2009; Pérez-Magariño et al., 2009; Rayne et al., 2011; Sánchez-Iglesias et al., 2009) ; ensuite

après la FML (Arfelli et al., 2011; Cano-López et al., 2010; McCord, 2003; Rudnitskaya et

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al., 2009) ; pendant l’élevage (Canas et al., 2009; Castellari et al., 2000; Nevares et al., 2009) ;

et enfin, lors du stockage (Castellari et al., 2004; Tao et al., 2007).

5.3.4 Une variabilité dans les concentrations utilisées

Il n’existe pas encore de méthode pour estimer avec précision si un vin a besoin d’un apport

en oxygène et en quelle quantité. C’est pourquoi l’étude bibliographique menée ici montre

une importante variabilité de la concentration en O

2

utilisée pour les essais de

micro-oxygénation. Les taux varient de 2 mL/L/mois à 90 mL/L/mois sur une durée d’ajout allant de

quelques minutes à 7 mois de traitement. Les concentrations en O

2

les plus utilisées sont 5 et

10 mL/L/mois, car ce sont des niveaux d’oxygénation suffisamment représentatifs pour

pouvoir traiter un vin sur une longue période sans altérer ses caractéristiques : par exemple,

une dose de 5 mL/L/mois pendant 7 mois (Atanasova et al., 2002). Plus la dose d’O

2

est

élevée, plus court sera le temps de traitement : par exemple, une dose de 90 mL/L/mois mais

seulement pour une durée de trois jours (González-del Pozo et al., 2010).

6 PARAMÈTRES AYANT UNE INCIDENCE SUR LA

COMPOSITION PHÉNOLIQUE DES VINS

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