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1.4 La régulation de la transcription

1.4.3 Les modifications post-traductionnelles des facteurs impliqués dans la

1.4.3.1 L’ubiquitination et la E3 ubiquitine ligase UBR5

Chez les espèces eucaryotes, la modification des protéines par ubiquitination joue un rôle important dans une multitude de processus allant de la division cellulaire, la présentation d’antigènes jusqu’à la transcription. La fonction biochimique la mieux caractérisée de cette modification est son rôle de substrat pour la reconnaissance par le protéasome, menant ainsi à la dégradation ciblée des protéines. Cependant, d’autres fonctions pour l’ubiquitination ont été identifiées dans des processus comme la signalisation cellulaire, le transport des protéines, l’endocytose, et la localisation subcellulaire (Hershko, 2005; Hershko and Ciechanover, 1998; Rotin and Kumar, 2009). Une séquence de trois réactions mène à l’ubiquitination des protéines. Dans une première étape, une enzyme activatrice E1 active une molécule d’ubiquitine de façon dépendante de l’ATP en formant un lien thioester entre le groupement carboxyle C-terminal de l’ubiquitine et un résidu cystéine de l’enzyme. L’ubiquitine activée est transférée dans une deuxième étape sur un résidu cystéine de l’enzyme de conjugaison E2 et, finalement, une enzyme E3 ubiquitine ligase

facilite la formation d’un lien isopeptide entre le groupement carboxyle C-terminal de la molécule d’ubiquitine activée et un résidu lysine du substrat ou la molécule d’ubiquitine précédente (Goldberg, 2003). Une chaine de polyubiquitines est formée lorsqu’une des sept lysines d’une molécule d’ubiquitine est liée à la glycine C- terminale d’une autre molécule d’ubiquitine. Les chaines de polyubiquitines les mieux caractérisées jusqu’à présent utilisent les lysines K48 ou K63. Les chaines de polyubiquitines qui utilisent la lysine K48 ciblent le plus souvent la protéine pour la dégradation, alors que celles qui utilisent la lysine K63 régulent les fonctions cellulaires des protéines, leur localisation cellulaire et les interactions protéine- protéine (Bernassola et al., 2008). L’ubiquitination est une modification réversible et plusieurs déubiquitinases (DUB) ont été caractérisées comme étant des enzymes capables de cliver les molécules d’ubiquitine (Reyes-Turcu et al., 2009).

Les ubiquitine ligases sont des enzymes hautement spécifiques qui transfèrent des molécules d’ubiquitine sur d’autres protéines en reconnaissant des structures caractéristiques, appelées degrons. Ceux-ci sont constitués de séquences riches en phosphosérine ou en hydroxyproline, ainsi que des acides aminés N-terminaux basiques (Tasaki et al., 2005). Les E3 ubiquitine ligases sont classées en fonction de l’homologie de leur domaine de liaison à l’enzyme E2 en trois sous-familles: les E3 ligases qui ont un domaine d’homologie à la E6AP C-terminal (HECT), celles qui ont un domaine RING et finalement celles qui possèdent une boîte U. Les propriétés de ces E3 ligases sont différentes. Ainsi, celles qui possèdent un domaine RING servent d’échafaudage pour le transfert de l’ubiquitine de l’enzyme E2 au substrat. En contraste avec cette famille, les E3 ubiquitine ligases à domaine HECT possèdent une activité catalytique intrinsèque. Le transfert de l’ubiquitine par cette famille d’enzymes comporte trois étapes : la liaison à la E2 ligase, le transfèrt de l’ubiquitine sur la E3 par la formation d’un intermédiaire ubiquitin-thioester avec le résidu cystéine catalytique situé dans la partie C-terminale du domaine HECT, et le transfert de l’ubiquitine sur le substrat (Bernassola et al., 2008). Le transfert de l’ubiquitine de E2 à E3 est initié par l’attaque nucléophylique du lien ubiquitine- thioester de E2 par le résidu cystéine catalytique de la E3 ligase. Chez l’humain, il

existe une vingtaine de protéines à domaine HECT dont certaines interagissent avec la E2 UbcH5, alors que d’autres interagissent avec UbcH7 (Schwarz et al., 1998)

UBR5 est une E3 ubiquitin ligase à domaine HECT qui est aussi connue sous le nom de EDD1 (E3 identified by Differential Display). Ce gène code pour l’orthologue humain du gène suppresseur de tumeur “hyperplastic discs” (HYD) chez D. melanogaster. Il a été classé initialement parmi les E3 ubiquitin ligases suite à l’identification du domaine catalytique HECT situé dans sa région C- terminale (Callaghan et al., 1998). Ce même groupe a montré que la protéine traduite in vitro lie de façon spécifique l’ubiquitine, alors que la version ayant une mutation ponctuelle de la cystéine catalytique dans le domaine HECT perd cette capacité.

Plusieurs domaines fonctionnels de UBR5 ont été identifiés ultérieurement (Fig. 14), suggèrent que UBR5 est une protéine qui lie l’ubiquitine et qu’elle est impliquée dans des processus d’ubiquitination. Ainsi, UBR5 présente dans sa région N-terminale un domaine UBA (Ubiquitin-Associated) et il a été montré par mutagenèse dirigée que ce domaine lie l’ubiquitine, deux de ses résidus étant requis : Val196 et Leu224 (Kozlov et al., 2007). Le domaine PABP-C est impliqué dans la spécificité de liaison aux substrats qui sont régulés par ubiquitination. La structure cristallographique de ce domaine et des essais d’interaction in vitro ont montré que le domaine PABP-C de UBR5 lie la protéine Paip2 (PABP-interacting protein 2) (Deo et al., 2001). Paip2 interagit et régule l’activité de la protéine PABP qui possède tout comme UBR5 un domaine PABP-C. L’interaction entre Paip2 et PABP se fait aussi par le domaine PABP-C, de façon analogue à l’interaction entre Paip2 et UBR5. Cette analogie d’interaction a une signification fonctionnelle importante. Il a été démontré que UBR5 lie et ubiquitine Paip2 en fonction des niveaux d’expression de son autre partenaire d’interaction, la protéine PABP : lorsque les niveaux de PABP sont diminués par atténuation de l’expression, Paip2 lie UBR5, ce qui mène à son ubiquitination et sa dégradation par le protéasome (Yoshida et al., 2006). En contrôlant les niveaux de la protéine Paip2, UBR5 est

impliqué dans la régulation de l’initiation de la traduction des ARNm, processus dans lequel Paip2 joue un rôle central (Khaleghpour et al., 2001; Svitkin et al., 2001; Yoshida et al., 2006).

UBR5 possède trois domaines putatifs de localisation nucléaire (NLS ou “Nuclear Localization Sequence”). Le premier est situé dans la région centrale et n’est pas fonctionnel pour l’import nucléaire. Les deux autres sont situés dans la région N- terminale et leur présence simultanée est requise pour l’interaction avec l’importin α, tel qu’observé lors d’essais d’interaction in vitro (Henderson et al., 2002). En accord avec cette observation, l’analyse de la localisation cellulaire de UBR5 a indiqué une localisation principalement nucléaire.

Figure 14. Représentation schématique des domaines fonctionnels de UBR5. Les domaines UBA (ubiquitin-associated), trois NLS putatifs (nuclear localization sequence), zfUBR1 (domaine d’homologie avec le motif à doigts de zinc de la N- recognin) PABP-C (poly(A)-binding protein) et HECT sont représentés. La cystéine catalytique est indiquée. Adapté de (Henderson et al., 2002)

Des homologues de UBR5 ont été identifiés chez les espèces eucaryotes supérieurs de C. elegans jusqu’à l’humain, avec une identité de séquence variable. Par exemple, entre les homologues chez l’humain et D. melanogaster, il y a 46% d’identité de séquence. L’homologue chez D. melanogaster, appelé HYD a été impliquée dans la terminaison de la prolifération. Un rôle de suppresseur de tumeur a été proposé pour cette protéine car des mutations spécifiques ont entrainé des défauts de développement et des phénotypes tumoraux (Mansfield et al., 1994). Un

UBA NLS NLS zfUBR1 PABP-C HECT

1 2799

UBR5

Cystéine conservée

rôle dans la progression tumorale a été avancé par plusieurs études chez l’humain qui ont montrées que UBR5 est fréquemment surexprimé dans différents types de cancers, tels que les cancers ovarien, du sein, les carcinomes hépatocellulaires et d’autres (Chin et al., 2007a; Clancy et al., 2003; O'Brien et al., 2008).

UBR5 est aussi impliqué dans la réponse cellulaire aux dommages de l’ADN et un premier indice a été son interaction avec la protéine TopBP1, qui a une fonction connue dans la réponse aux bris double brin de l’ADN (Topoisomerase IIbeta- Binding Protein) (Honda et al., 2002; Makiniemi et al., 2001; Yamane et al., 2002).

En conditions normales, cette interaction mène à l’ubiquitination de TopBP1 et sa dégradation protéosomale. Suite à l’induction des dommages à l’ADN, TopBP1 est phosphorylée, modification qui inhibe l’ubiquitination par UBR5. UBR5 interagit également avec d’autres protéines impliquées dans la réponse aux dommages de l’ADN, telle que CIB/KIP (Calcium and Integrin-Binding Protein), qui à son tour interagit avec des protéines avec des fonctions connues dans ce processus, comme la protéine kinase dépendante d’ADN (Wu and Lieber, 1997), PLK-1 et PLK3 (Polo- Like Kinase-1 et 3) (Winkles and Alberts, 2005). Une interaction directe a été rapportée entre UBR5 et CHK2 (Checkpoint Kinase 2), une kinase qui phosphoryle de nombreux substrats en réponse aux dommages de l’ADN et induit l’arrêt du cycle cellulaire (Henderson et al., 2006). Cette interaction stimule l’activité kinase de CHK2, cependant on ne sait pas si une ubiquitination de CHK2 est impliquée.

La délétion de HYD est létale chez Drosophila dans les stades de développement précoces. Chez la souris, l’ablation génique de UBR5 est létale, causant des défauts dans le développement extraembryonnaire, alors que les héterozygotes générés par ciblage du gène UBR5 ne démontrent pas de phénotype (Saunders et al., 2004).

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