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4. Discussion

4.3. L’observance des prescriptions : une question centrale

Résoudre le problème de la non-observance thérapeutique (non adherence en anglais) représenterait un progrès plus important que n’importe quelle découverte biomédicale selon l’Organisation Mondiale de la Santé. (21)

La notion d’observance en médecine revêt une importance toute particulière, du fait de ses conséquences médicales et économiques, et se définit comme l’adéquation entre les comportements des patients et les prescriptions ou recommandations médicales. Des études récentes (22) ont montré que l’observance était associée à une optimisation des résultats, indépendamment du traitement assigné (actif ou placebo). Plusieurs essais cliniques validés (CHARM, BHAT...) ont mis en évidence, quel que soit le traitement reçu, de meilleurs résultats concernant la mortalité, en cas de bonne observance.

4.3.1. Déterminants de l’observance

Cette dernière reste un processus complexe, global (ne se limitant pas aux seules prescriptions médicamenteuses) et multifactoriel.

Plusieurs facteurs influencent et déterminent le niveau d’observance (22):  Des facteurs dépendants du médecin :

La simplicité de la prescription et la fréquence des visites de suivi sont des facteurs positifs. Le taux d’observance est inversement proportionnel au nombre de prises journalières et à la complexité de la prescription (21) (23). Les consultations régulières permettent de « relancer » l’observance.

La qualité de la relation thérapeutique et de l’information apportée est primordiale : expliquer les modalités du traitement en détail, les effets secondaires éventuels, les attentes et les bénéfices espérés, savoir établir un lien de confiance avec le patient et répondre à ses interrogations.

 Des facteurs liés à la maladie :

Une pathologie perçue comme dangereuse et grave entraînera une meilleure observance qu’une maladie silencieuse ou l’existence de facteurs de risque. L’efficacité du traitement, le déni éventuel rentrent en jeu également.

 Des facteurs liés au patient et à son environnement :

Une bonne image de soi et une autonomie satisfaisante sont des facteurs positifs. Les croyances inappropriées (véhiculées parfois par l’entourage proche), les troubles du comportement concourent à une mauvaise observance. Un entourage avec une attitude positive, compréhensif et facilitant joue un rôle prépondérant également. L’âge du patient intervient de manière significative dans le suivi des consignes.

4.3.2. Comment améliorer l’observance ?

Application à la pratique de SOS Médecins Grenoble

Les méthodes efficaces sont multiples et doivent être associées, une approche unique étant rarement satisfaisante (22). Les grands axes retenus pour viser une meilleure observance sont :  La facilitation de la prise médicamenteuse, en adaptant les prescriptions à la situation du patient, à son âge, à ses possibilités et à ses besoins. Les médicaments sont-ils tous indispensables ? La posologie, la forme, les horaires de prises sont-ils adaptés ?

Sur ce plan, SOS Médecins présente un taux de prescription de médicaments en deçà des médecins généralistes de ville et n’apparaît pas un prescripteur outrancier.

 Le développement de l’éducation du patient et/ou de sa famille. Dans la pratique quotidienne, les médecins de SOS sont amenés à prendre en charge un grand nombre de pathologies bénignes, concernant des patients jeunes, et qui normalement ne devraient pas nécessiter de nouvelle consultation.

La régulation des appels via le standard téléphonique occupe ici une grande importance, de même que les conseils prodigués par les médecins eux-mêmes. Les consignes de suivi à l’issue de la consultation doivent permettre, en cas d’affections peu graves, d’éviter au maximum les nouvelles consultations inutiles, facteurs d’engorgement des structures de soins dans leur ensemble. Il faut parvenir à rassurer et responsabiliser les patients et les parents des jeunes enfants, en leur fournissant de manière explicite tous les éléments propres à prendre une décision justifiée de nouvelle consultation.

 L’importance du suivi. La fréquence des visites est un facteur positif d’observance. Se dessine derrière cette notion le rôle primordial d’une coordination entre les différents acteurs de soins sur le terrain. Notre étude retrouvait un faible taux d’appel à un autre professionnel pendant la visite (5%), rendant compte d’une collaboration insuffisante entre SOS Médecins et le médecin traitant notamment, ne serait-ce que pour maintenir une continuité de soins ou de suivi après la visite initiale. Plus le patient est encadré, par un réseau de prise en charge réactif et harmonisé, son médecin adhérent à son projet de soins, plus l’observance est grande

(13).

SOS médecins doit développer un réseau d’interaction plus solide avec les services de pédiatrie notamment, mais également avec le réseau des généralistes installés, pour pallier à ce « nomadisme » médical de certains groupes de la population.

 Le renforcement de la relation médecin malade. Les travaux d’Assal (22) (24) ont permis d’évaluer les étapes nécessaires à l’amélioration de la prescription des traitements, auprès de généralistes de ville et d’urgentistes. Reformuler les problèmes du patient, établir un lien entre les symptômes et le diagnostic, bien expliquer les modalités du traitement en termes simples, évoquer les principaux effets secondaires, apparaissent comme des points essentiels dans la relation liant un médecin à son patient. Le praticien devra tenir compte des croyances et sentiments du malade et s’inspirer des stades de changement de comportement selon le modèle de Prochaska (23) pour améliorer sa façon de prescrire. Pour 85% de nos patients, nous prescrivons un traitement alors que le patient ne se sent pas concerné (précontemplation) ou est encore ambivalent (contemplation) (23). Finalement, il est impérieux de renforcer constamment l'importance du traitement et de ses effets bénéfiques auprès du patient.

SOS Médecins, en tant que structure ambulatoire dédiée au premier recours et n’effectuant pas de suivi de patient, voit sa tâche bien plus ardue, l’établissement d’une relation de

94 confiance réciproque avec le malade prenant souvent du temps. Ses médecins doivent, en un minimum de temps, parvenir à la compréhension par le malade de son affection et le faire adhérer au projet de soins mis en place. Le contact étroit avec les médecins traitants et les autres professionnels de santé prenant en charge le malade, doit permettre de renforcer cette relation de confiance et faire progresser les pratiques.