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II- INTERETS DE L’INTERVENTION DU PSYCHOMOTRICIEN

II.1. L’intervention auprès du bébé

L’un des objectifs de la prise en charge d’un bébé présentant un trouble du tonus est de l’accompagner dans ses acquisitions posturo-motrices en lui proposant

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plusieurs expériences sensori-tonico-motrices. Le psychomotricien se fonde sur les élans de l’enfant vers son environnement pour le solliciter, et son action diffère en fonction du trouble de l’enfant : hypertonie ou hypotonie.

a) Une mise en jeu du corps

J’ai très vite remarqué à quel point l’adhésion de l’enfant, quel que soit son âge, était importante en séance de psychomotricité. Ainsi, le psychomotricien prend en compte les manifestations et élans de l’enfant vers un jouet, une comptine, un son, etc. pour organiser et ajuster sa prise en charge. « Le psychomotricien a un savoir-

faire du jeu »67, la séance de psychomotricité est donc un moment où l’enfant va jouer.

J’ai ainsi pu observer tout au long de mon stage que les bébés, comme les parents, savent, en nous voyant arriver chez eux ou en entrant dans le cabinet, qu’ils vont prendre du plaisir. Awa, Nadia et les autres bébés que nous avons pris en charge nous accueillent presque toujours avec de grands sourires, et certains boudent lorsque la séance touche à sa fin. Dans le jeu, tous les niveaux d’interactions comportementales (cf. page 25) sont sollicités et le psychomotricien, qui a une fonction de symbolisation pendant la séance, donne du sens au jeu. Lors de cette mise en mot, le bébé reçoit une interprétation de ses expériences, ce qui lui permet de mieux intégrer celles-ci pour pouvoir, progressivement, se les représenter et les prévoir (cf. page 17).

En jouant, nous favorisons également les explorations toniques et corporelles des enfants, car « ces jeux sont en lien direct avec leur sensorialité, leur psychomotricité qu’ils découvrent. Jouer, alors, c’est faire l’expérience de Soi, explorer ses contours, ses limites, ses possibilités, de mouvements en émotions. Jouer, c’est

agir. C’est être »68. Les jeux sont en lien direct avec la sensorialité de l’enfant, qui y

67 POTEL C., 2010, Être psychomotricien, Paris: Eres, p. 352

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découvre son corps et son environnement avec plaisir. Lors d’une séance où je propose à Nadia, en décubitus dorsal, de me repousser avec ses jambes que j’ai préalablement fléchies pour poser ses pieds contre moi, celle-ci rit aux éclats dès que je m’exclame « Tu es trop forte je suis encore tombée ! ». Sa poussée entraîne ma « chute » et mon exagération la fait rire : nous jouons en travaillant, elle prend donc plaisir à mobiliser le bas de son corps initialement désinvesti. Ici, le jeu a été moteur de la mise en mouvement de Nadia.

b) En cas d’hypertonie : Awa

L’hypertonie représente un frein à l’accès aux différents NEM, mais aussi à l’autorégulation (cf. page 22). La première action du psychomotricien va être d’amener le bébé à sortir de sa position en hyperextension en lui proposant des postures et installations dans lesquelles l’enfant peut se regrouper et s’enrouler. « C’est sur cette posture regroupée qu’il construit ses schémas moteurs de base, ses coordinations sensori-motrices, en particulier la coordination main-bouche, ses interactions avec le milieu humain, et qu’il réalisera plus tard une première unification de ses sensations

corporelles »69. C’est ce que nous avons fait avec Awa via les exercices décrits dans

la partie clinique, mais aussi en initiant sa mère à des installations et portages en schéma d’enroulement. Si, au début de la prise en charge, Awa accepte peu ces postures regroupées et s’agite, la « mise en jeu » de leur répétition a permis leur intégration progressive. Lors des dernières séances, Awa adopte volontairement ces postures et peut les maintenir longtemps. Sa mère nous a également confié qu’elle s’apaise plus aisément lorsque portée en enroulement.

Parallèlement au travail en enroulement, Awa acquérait de plus en plus de

69 VASSEUR, R. & DELION, P., 2010, Périodes sensibles dans le développement psychomoteur de l’enfant de 0 à

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fluidité dans ses mouvements, et a pu accéder à d’autres NEM. L’accompagnement de ces enchaînements, que nous décomposions pour qu’elle puisse expérimenter au mieux les différentes postures et déséquilibres qu’ils engendrent, a favorisé les schémas d’enroulement et les attitudes exploratoires. Awa cherche à découvrir non seulement l’environnement, mais aussi les autres, qu’elle sollicite de plus en plus dans ces jeux et mouvements, pour le plus grand plaisir de sa mère.

c) En cas d’hypotonie : Nadia

L’hypotonie, comme l’hypertonie, affecte le développement psychomoteur de l’enfant (cf. page 20) qui, du fait de son déficit musculaire, ne peut expérimenter librement et peut sembler passif. « Plus l’enfant renforce cette tonicité axiale, plus il va

pouvoir avoir des désirs et les réaliser, investir sa curiosité et l’agir »70, les stimulations

proposées par le psychomotricien ont donc pour objectif de renforcer le tonus musculaire de l’enfant ou de mettre en place des stratégies pour combler ce manque de tonus. Avec Nadia, nous effectuons un travail sur les NEM afin de stimuler ses chaînes musculaires. Lorsque nous initions avec elle un changement de posture, nous sommes attentifs à la contraction des muscles sollicités, et faisons en sorte qu’elle soit le plus possible génératrice du mouvement. Ces sollicitations sont proposées ludiquement et Nadia, motivée par les jouets, participe d’autant plus à celles-ci. Au fur et à mesure de la prise en charge, elle parvient à recruter suffisamment son tonus pour changer de posture seule (retournements), et elle est de moins en moins fatigable lors des propositions. Progressivement, elle parvient à se mettre en mouvement volontairement et à maintenir les postures, sous les encouragements de ses parents. Les stimulations des membres inférieurs de Nadia ont également permis à celle-

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ci de redécouvrir les possibilités de mouvement de ses jambes. Cela participe à l’évolution de sa motricité, puisqu’elle peut mobiliser ses membres inférieurs consciemment lorsqu’elle veut changer de posture.

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