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1.2 La représentation des hétérogénéités des cultures : des causes aux méthodes de

1.2.2 La représentativité spatiale des mesures et des modèles

1.2.2.1 L’interprétation de la mesure

L’interprétation de la représentativité de la mesure dans l’espace est avant tout fondée sur des hypothèses statistiques. Dans l’espace cette mesure est souvent considérée comme continue ce qui constitue en soi une hypothèse qui se traduit par une incertitude. Par ailleurs, la validité des hypothèses spatiales sont également fonction de leur représentativité temporelle.

1.2.2.1.1 La représentativité statistique

Il existe deux approches pour interpréter une mesure : soit la valeur mesurée est associée à une probabilité d’obtention soit les mesures sont considérées comme possédant une part constante et une part variable. En réalité la seconde approche n’est possible qu’en ayant connaissance de la probabilité associée à la mesure. En effet en connaissant la distribution des valeurs possibles il est possible de définir ou d’utiliser des lois statistiques permettant de décrire la distribution des probables. Communément, dans les différents domaines de la biologie, c’est la loi normale qui est souvent la plus adaptée pour décrire les variables. Avec cette loi il est alors possible de définir un intervalle de confiance (fonction de l’écart-type) autour d’une valeur fixe (la moyenne) pour une marge d’erreur que l’on impose. La qualité de la représentation d’une variable par une valeur moyenne et de sa part aléatoire, ou considérée comme aléatoire, va entièrement dépendre de la représentativité des valeurs qui ont servi à les établir. Autrement dit, un échantillon permettra de représenter une population dès lors que les deux ont la même distribution de probabilité de leurs

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valeurs à une marge d’erreur près. Dans le cas concret de la spatialisation, il s’agit de retrouver la distribution des valeurs grâce à un échantillon représentatif de même variance et de même espérance.

1.2.2.1.2 La mesure inscrite dans un espace continu

La translation de propriétés locales d’un échantillon représenté par une ou plusieurs mesures à un système plus large est majoritairement basé sur l’hypothèse d’une continuité du système sur ces 1, 2 ou 3 dimensions spatiales (Wang et al., 2012; Zaslavsky, 1968). Sur la base de cette hypothèse, il est possible d’interpréter une zone plus large par extrapolation dès lors que ce continuum peut être reproduit par des relations logiques. Dans le cas de l’interpolation, l’hypothèse de continuum est considérée entre plusieurs valeurs. Cette hypothèse de continuum permet donc d’appliquer des règles pour combler l’absence de données par extrapolation ou interpolation (Figure 24) ou encore par upscaling et dowscaling. Les différentes méthodes existantes (ex extrapolation/interpolation, agrégation/désagrégation), sont basées sur des a priori de la répartition spatiale de ces données ou par une reproduction empirique des patterns spatiaux observés.

Figure 24 Les méthodes d’interprétation de l’espace, tiré de Faivre et al. (2009)

Quelle que soit la manière de représenter la répartition spatiale d’une variable, l’enjeu est de comprendre la structuration de l’espace notamment en définissant des surfaces ou des volumes homogènes, ce qui ne peut être fait qu’en définissant une unité statistiquement homogène ou en assumant une erreur liée à l’hypothèse d’homogénéité. Statistiquement, un échantillon d’une population non représentatif a une variance et une moyenne différentes de la population entière pour une erreur assumée. Pour qu’un échantillon puisse être représentatif il faut qu’il soit de taille suffisamment importante (Figure 25). Ce volume peut se définir sous l’appellation VER ou Volume

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Elémentaire Représentatif (Bachmat and Bear, 1987; Skogerboe, 1984). Il s’agit d’un volume correspondant au nombre de mesures nécessaire pour avoir une moyenne et une variance représentatives. Dans le cadre de la spatialisation, il correspond à un volume ou à une surface réelle à échantillonner (Barralis et al., 1986; Bresler, E.S., Dasberg, D.R., Dagan, 1981).

Figure 25 : schéma conceptuel de la distribution de probabilité d’une valeur en fonction du volume échantillonné d'après Hillel (2013)

L’échantillonnage de l’espace ne se limite pas à définir un volume à échantillonner : il est également essentiel de définir une zone où effectuer ces mesures, un espacement entre les mesures adapté au besoin de représentation mais aussi d’avoir un volume échantillonné qui ne soit pas surdimensionné (Famiglietti et al., 2008; Grayson and Blöschl, 2001). En effet une mesure très intégratrice peut lisser l’interprétation de l’espace entre les mesures (Figure 26 c). L’espace entre les mesure peut être également déterminant dans l’interprétation de la continuité d’un système (Ii, 2014) car il va déterminer l’interpolation ou de l’extrapolation qui en est faite (Figure 26 a). Enfin la mesure elle-même n’est pas la seule limitation a l’interprétation spatiale : l’étendue de la zone d’échantillonnage va également limiter la représentativité de l’échantillonnage (Figure 26 b).

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Figure 26 : Schéma de la spatialisation et de l’interprétation du système continu (Grayson and Blöschl, 2001). Les points représentent les mesures ponctuelles dans l’espace et les carrés des mesures intégratrices d’un volume spatial important. Les courbes représentent l’espace à mesurer et les lignes la représentation de cet espace qui est déduit par les mesures.

A ces contraintes peut s’ajouter l’acquisition de mesure elle-même et l’incertitude autour de son acquisition. Certaines mesures peuvent être très contraignantes avec une faible représentativité spatiale comme les mesures de biomasse destructives ponctuelles ou les mesures sur des profils de sols entiers. Dans d’autres cas, la mesure peut être plus simple à acquérir mais intègre une surface importante avec une plus faible représentativité des hétérogénéités locales (exemple imagerie satellite). Enfin de nombreuses mesures sont indirectes ce qui nécessite d’avoir un modèle interprétatif comme pour l’interprétation du signal des sondes d’humidité (Gaudu et al., 1993; Ii, 2014) ou encore les mesures géophysiques pour lesquelles il est nécessaire de différencier les sources d’interaction avec le signal (Friedman, 2005). Dans le cas de l’imagerie, l’interprétation se fait après traitement du signal qui ne représente pas directement l’objet de la mesure (exemple LAI, biomasse, densité de racines…). Il convient donc d’établir le lien entre le signal mesuré et l’objet dont on souhaite qualifier l’état (NDVI, densité de pixels etc.).

Quelle que soit la mesure, celle-ci intègre une incertitude, liée au protocole, qui peut être d’autant plus importante qu’elle n’est pas effectuée de manière directe et sujette aux erreurs d’interprétations. Sur le plan statistique, cette précision de la mesure va varier suivant le niveau d’agrégation de la donnée ou de sa représentativité (Levin, 1992). Comme vu précédemment, pour représenter un système homogène isotrope, il faut que l’échantillonnage ait atteint une taille critique (VER) pour qu’il soit représentatif. Or, tant que ce volume n’est pas atteint, la moyenne et la

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variance de cet échantillon peuvent varier. Par conséquent, une part de variance non expliquée dépendra du volume échantillonné. Ce volume échantillonné peut se décliner par un volume intégré par la mesure important (Figure 27, carré rouge), ou par un nombre de réplicas suffisamment important (Figure 27, carré bleu) pour compenser le manque de représentativité et l’incertitude de la mesure. D’autre part, si le volume que l’on souhaite représenter n’est pas homogène, alors l’agrégation des mesures est également susceptible de changer la variance et la moyenne.

Figure 27 : Répétitivité en fonction du volume échantillonné dans différentes études en écologie du journal Ecology de 1980 à 1986. Tiré de Levin (1992).

C’est par exemple le cas d’indice de végétation (NDVI) qui varie suivant l’échelle (Friedl et al., 1995) mais aussi des mesures des variables de sol qui sont nécessairement intégrées à un volume minimum échantillonné et dont la répétitivité est limitée par la contrainte de la mesure (Hillel, 1998; Nielsen, 1973). En effet, certaines mesures ne sont pas faites avec des a priori sur la structure spatiale à échantillonner et peuvent se retrouver dans trois cas possibles : échantillonner un volume hétérogène, échantillonner un volume homogène mais la mesure seule n’est pas suffisamment représentative ou encore la mesure est bien représentative. En effet, l’échantillonnage représentatif d’une zone homogène étant un idéal rarement atteint par une seule mesure.

Cela a conduit à développer des méthodes afin de comprendre la représentativité de différentes variables qu’elles soient biophysiques (Burrows et al., 2002; Kravchenko et al., 2005), des synusies (Barkman, 1989) ou encore des variables liées aux sol (Nielsen, 1973; Trangmar et al., 1986). Chaque méthode et outil sont plus ou moins adaptées selon les variables étudiées puisque celles-ci ont un comportement qui leur est propre même si le volume échantillonné est strictement le même (Fox, 1982).

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La qualité de la représentation de l’espace dépend donc :

- de la représentativité statistique de la mesure par le volume échantillonné

- de l’échantillonnage spatial

- de la délimitation de l’espace qui est échantillonné (étendue)

- la précision de la mesure et de son interprétation

Quelle que soit la méthode d’interprétation de l’espace, interpolation, extrapolation, agrégation ou désagrégation, il est nécessaire de trouver un compromis entre chacune de ces 4 contraintes dans la stratégie de spatialisation.

1.2.2.1.3 Le cas particulier de la dimension temporelle

A bien des égards, la représentativité temporelle des mesures impose les mêmes contraintes que celle de leur représentativité spatiale. La dimension temporelle peut s’interpréter, comme pour l’espace, à partir de l’hypothèse de continuité. Les problématiques d’interpolation ou d’extrapolation sont dans ce cas équivalentes. Toutefois l’échelle temporelle doit être prise en compte conjointement à l’échelle spatiale (Bloschl and Sivapalan, 1995; Turner et al., 1989) pour représenter les variables. En effet, l’échantillonnage spatial est systématiquement associé à une représentativité temporelle. Celle-ci peut être attribuée à un moment qui est soit instantané soit lié à une durée. Une homologie avec l’échelle spatiale est que la représentativité temporelle d’une mesure va dépendre de l’échelle de temps regardée (étendue spatiale), de l’espacement entre les mesures et de l’intégration temporelle (instantané, durée).