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L’interprétation autonome de la notion de jugement par défaut en droit

DE JUGEMENT PAR DÉFAUT EN DROIT EUROPÉEN

20. Jugements par défaut et injonctions de payer. L’Union Européenne ne dispose pas de

compétence générale pour régir la procédure civile des États membres et sa règlementation ne s’impose à la procédure de l’instance directe que de façon très sporadique. Le droit européen ne peut donc pas définir ce qui constitue une décision par défaut, ou même simplement une décision en droit national, mais simplement indiquer au juge de l’État requis quelles décisions entrent dans le champ d’application de chaque instrument européen de droit international privé. L’étude des instruments européens de droit international privé et de la jurisprudence de la Cour de justice montre qu’en droit européen les décisions par défaut sont les décisions prises à l’encontre d’un défendeur défaillant, c’est-à-dire un défendeur n’ayant pas participé à la procédure (Section I). Si cette absence de participation du défendeur perturbe le déroulement d’une procédure contradictoire typique, le demandeur peut également l’anticiper en recourant à une procédure d’injonction de payer. Pour la Cour de justice, une injonction de payer non contestée est donc un type particulier de jugement par défaut (Section II).

SECTION I : UNE DÉCISION PRISE À L’ENCONTRE D’UN

DÉFENDEUR DÉFAILLANT

21. Défaillance et comparution. Le point de départ de cette étude est le suivant : depuis la

Convention de Bruxelles de 1968, le droit international privé européen prévoit une règle particulière applicable à la reconnaissance des décisions rendues à l’encontre d’un défendeur défaillant132. Ces décisions sont également qualifiées de décisions par défaut, tant par la Convention de Bruxelles133 que par les règlements lui ayant succédé134. En plus de ces deux expressions de défendeur défaillant et de décision rendue par défaut, les textes européens se

132 L’article 27(2) de la Convention de Bruxelles prévoit ainsi que les décisions ne sont pas reconnus « si l’acte

introductif d’instance ou un acte équivalent n’a pas été signifié ou notifié au défendeur défaillant, régulièrement

et en temps utile, pour qu’il puisse se défendre ».

133 Article 46 de la Convention de Bruxelles.

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réfèrent souvent aux situations dans lesquelles le défendeur comparaît ou ne comparait pas, principalement lorsqu’ils règlementent la compétence internationale135.

Aucune de ces notions n’est définie par les textes européens ou par la jurisprudence de la Cour de justice. En effet, le mécanisme du recours préjudiciel prévoit que la Cour de justice réponde de façon précise à des questions posées par les tribunaux des États membres ayant une influence réelle sur l'issue du litige se déroulant devant eux136. En conséquence la Cour de

justice ne définit jamais complètement un concept de façon abstraite et il en va de même pour le jugement par défaut. En revanche, elle a répondu à plusieurs reprises à des questions préjudicielles demandant si telle ou telle situation rentrait dans le champ d'application des articles de la convention ou des règlements relatifs aux jugements par défaut. Plusieurs éléments ont donc été donnés par la Cour permettant de circonscrire le domaine du jugement par défaut en droit international privé européen.

Le but de cette première section est donc de clarifier l’utilisation de ces trois terminologies afin de comprendre ce qu’est une décision par défaut en droit européen. Nous commencerons donc par examiner le sens du mot décision en droit européen (§1) avant d’examiner le sens des notions de défaillance et d’absence de comparution (§2).

§ 1 La notion de décision en droit européen

22. Une définition tautologique de la décision. Avant d’examiner le sens de la notion de

décision par défaut en droit européen, il faut commencer par comprendre ce qu’est une décision selon les instruments européens de droit international privé. En effet, au-delà des difficultés classiques relatives au champ d’application137 de toute norme juridique, la convention, comme les règlements ne permettent le recours à la procédure simplifiée de reconnaissance et d’exécution que pour les décisions138 rendues dans les États membres. Il s’agit donc de circonscrire cette notion générale avant d’envisager un type de décision particulier, la décision par défaut.

135 Article 18 et 20 de la Convention de Bruxelles ; 24 et 26 du Règ. 44/2001 ; 18 du Règ. 2201/2003 ; 5 et 11 du

Règ. 4/2009 ; 9 et 16 du Règ. 650/2012 ; 26 et 28 du Règ. 1215/2012.

136 Article 267 TFUE. Voir aussi FENGER (N.) et BROBERG (M.), Le renvoi préjudiciel à la Cour de Justice

de l’Union Européenne, Larcier, 2013, p.205 et s.

137 CACHARD (O.), Droit international privé, 3ème éd., Larcier, 2014, p.46 et s.; GAUDEMET-TALLON et

ANCEL, p.59 et s.

138 Article 25 de la convention de Bruxelles ; 32 du Règ. 44/2001 et 26 de la Convention de Lugano concernant

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Il faut tout de suite préciser que le droit international privé européen ne définit pas le concept de décision en tant que telle. Bien que certains règlements contiennent un article intitulé « définition » contenant une définition de la décision139, celle-ci ne vaut que pour savoir si ces décisions entrent dans le champ d’application de l’instrument de droit international privé européen et peuvent donc bénéficier de la procédure d’exécution simplifiée140. Les définitions données diffèrent donc en fonction de chaque instrument et ne sont, de plus, pas très utiles pour notre étude. Si l’on prend en exemple le règlement 1215/2012, celui-ci dispose qu’est une décision, « toute décision rendue par une juridiction d’un État membre, quelle que soit la dénomination qui lui est donnée telle qu’arrêt, jugement, ordonnance ou mandat d’exécution, ainsi qu’une décision concernant la fixation par le greffier du montant des frais du procès »141. Il faut donc que la décision ait été rendue par une juridiction et son appellation en droit national est indifférente. La nature partiellement tautologique de la définition empêche cependant d’établir une définition précise du concept de décision.

23. Participation du défendeur et implication du juge. Nous n’avons pas l’intention ici de

définir précisément ce qui constitue une décision au sens du droit international privé européen ni d’en établir son champ d’application exhaustivement. Nous ne nous concentrerons que sur deux questions qui auraient pu remettre en cause la qualification de certains jugements par défaut en tant que décision. Aucune de ces deux hypothèses ne s’est réalisée et les instruments européens adoptent une définition large du concept de décision qui permet d’englober l’ensemble des jugements par défaut et des injonctions de payer, rendues par les États membres. Nous tenons cependant à préciser que l’absence de participation du défendeur ne remet pas en cause la qualification de décision (A), pas plus que la faible implication du juge (B).

139 Article 2 4) du Règ. 2201/2003, Article 4 1. du Règ. 805/2004, Article 2 1) 1. du Règ. 4/2009, Article 3 1. g)

du Règ. 650/2012 et Article 2 a) du Règ. 1215/2012

140 Ce qui explique d’ailleurs que la définition donnée par le règlement 1215/2012 se trouvait, dans la

Convention de Bruxelles et dans le règlement Bruxelles I, au début de la partie sur la reconnaissance et l’exécution des jugements.

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(A) Une décision malgré l’absence de participation du défendeur

24. Le critère posé par l’arrêt Denilauler. La controverse sur la qualification de décision en cas

d’absence de participation du défendeur résulte de l’arrêt Denilauler142refusant de faire entrer

dans le champ d’application de la Convention « les mesures conservatoires prises à l’issue

d’une procédure non contradictoire ». Cette affaire de la Cour de justice portait sur une mesure conservatoire française dont la reconnaissance et l’exécution étaient demandées en Allemagne. Une cour d’appel allemande demanda à la Cour de justice si de telles mesures, adoptées sans que la partie adverse ait été entendue, pouvaient bénéficier de la procédure d’exécution simplifiée prévue par la Convention de Bruxelles. La Cour répondit que les articles 27(2), 46(2) et 47(1) de la Convention n’ont pas été conçus pour être appliqués à des décisions judiciaires unilatérales et que le caractère libéral de la Convention en matière d’exequatur ne se justifie que par l’assurance que les décisions à exécuter ont été prises après qu’un débat contradictoire ait eu lieu ou ait pu avoir lieu. La Cour nota, de plus, qu’en vertu de l’article 24, des mesures conservatoires peuvent être demandées au juge de n’importe quel État contractant dans lequel le débiteur a des biens, indépendamment de la juridiction compétente au fond. Elle en conclut que « les décisions judiciaires autorisant des mesures

provisoires ou conservatoires, rendues sans que la partie contre laquelle elles sont destinées ait été appelée à comparaître et destinées à être exécutées sans avoir été préalablement signifiées, ne bénéficient pas du régime de reconnaissance et d'exécution prévu par le titre III de la convention. »

Ce qu’il faut retenir de cet arrêt, et qui constituera la véritable règle pour savoir si un jugement pourra bénéficier de la procédure simplifié d’exécution de la Convention, est la question du moment de la possibilité du débat contradictoire. En effet, comme la Cour le précise au point 13 de l’arrêt Denilauler et comme l’a expliqué Gilles Cuniberti143, une décision ne pourra bénéficier de la procédure du titre III de la Convention que si un débat contradictoire a eu lieu, ou a pu avoir lieu, avant que la décision n’acquière son caractère exécutoire. À ce titre, la possibilité de faire appel de la décision n’a pas d’incidence, car il a été admis que celle-ci ne constituait pas une voie équivalant à une défense préalable à la

142 CJUE, 21 mai 1980, Denilauler c. SNC Couchet Freres, C-125/79, Rec. 1980 p. 1553 ; JDI 1980.939, note

HUET (A.); RCDIP 1980.787, note MEZGER (E.) ; voir également CUNIBERTI (G.), Les mesures

conservatoires portant sur des biens situés à l’étranger, L.G.D.J., 2000, p.190 et s.

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décision144. Pour les mesures provisoires ou conservatoires, la règle établie par l’arrêt

Denilauler a été retranscrite dans le règlement 1215/2012 qui précise que le terme décision « ne vise pas une mesure provisoire ou conservatoire ordonnée par une […] juridiction [compétente au fond] sans que le défendeur soit cité à comparaître, à moins que la décision

contenant la mesure n’ait été signifiée ou notifiée au défendeur avant l’exécution; »145

25. La confirmation du critère dans l’arrêt Maersk. Cette nécessité de donner la possibilité au

défendeur de participer au débat contradictoire pour que la décision entre dans le champ d’application du droit international privé européen a été confirmée en 2004 dans l’arrêt

Mærsk146 au sujet d’une décision portant création d’un fond limitatif de responsabilité en droit néerlandais. Les juridictions danoises demandèrent à la Cour si ce type de jugement constitue une décision au sens de l’article 25 de la Convention et la Cour a répondu par l’affirmative en notant qu’une telle décision ne devient exécutoire qu’après notification aux créanciers qui peuvent contester la décision et que donc « l'ordonnance de la juridiction néerlandaise

pouvait faire l'objet d'un débat contradictoire avant que soit posée la question de sa reconnaissance ou de son exécution au titre de la Convention147».

26. L’application du critère dans l’arrêt Gambazzi. Enfin, la jurisprudence Gambazzi148 a

confirmé que les jugements par défaut, même ceux que rendent par les juges anglais étaient également des décisions au sens de la Convention. Dans cette affaire assez complexe149, la question posée à la Cour de justice par la Cour d’appel de Milan reposait sur la compatibilité du jugement par défaut prononcé contre le défendeur sur le fondement des règles de procédure civile anglaise avec l’ordre public italien selon la procédure prévu aux articles 27 et 34 de la Convention de Bruxelles. Or, bien qu’aucune question à ce sujet n’ait été posée par la juridiction italienne, l’avocat général150 puis la Cour de justice ont d’abord commencé par

144 CJUE, 12 novembre 1992, Minalmet GmbH c. Brandeis Ltd, C-123/91, Rec. 1992, I, p. 5661 §19 ; JDI 1993,

p. 468, obs. HUET (A.) ; RCDIP 1993, p. 81, note DROZ (G.A.L.)

145 Article 2 a) du règlement 1215/2012, voir aussi CUNIBERTI (G.), La réforme du règlement Bruxelles I,

Droit et procédures n°2, février 2013, p.26

146 CJUE, 14 octobre 2004, Mærsk Olie & Gas A/S contre Firma M. de Haan en W. de Bœr, C-39/02, Rec. 2004,

I, p.9657 ; RCDIP 2005.118, note PATAUT (E.) ; Rev. Europe n°12, Déc. 2004, comm. 435, note IDOT (L.)

147 CJUE Mærsk Olie & Gas, précité n.146, § 50

148 CJUE, 2 avril 2009, Marco Gambazzi c. DaimlerChrysler Canada Inc., CIBC Mellon Trust Company, C-

394/07, Rec. 2009, I, p.2563 ; RCDIP 2009, p.685, note CUNIBERTI (G.) ; IPRax 2010, p.148, note CUNIBERTI (G.) ; Gaz. Pal. 28 novembre 2009 n°332, p.22 note NIOCHE (M.) et SINOPOLI (L.)

149 Voir RCDIP 2009, p.685, note CUNIBERTI (G.), op.cit. n.148 pour un détail des faits. 150 Conclusion de l'avocat général Kokott dans l'affaire Gambazzi, op.cit. n.148.

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répondre à la question du défendeur à l’exequatur sur le caractère de décision, au sens de l’article 25 de la Convention, du jugement par défaut anglais.

Le requérant avait deux arguments à faire valoir à l’encontre de la qualification en tant que décision au sens de la Convention du jugement par défaut anglais. Le second argument portait sur l’absence d’implication d’un juge dans l’adoption de la décision151. Le premier grief du requérant tenait au fait que la décision rendue dans l’affaire Gambazzi n’avait pas été précédée d’un débat contradictoire. Cette critique peut être faite à l’encontre de toute décision par défaut et il est donc important de comprendre pourquoi l’avocat général, puis la Cour, l’ont rejeté. Pour eux, la décision par défaut est qualifiée de « décision » tant qu’elle est issue « [d’]une procédure civile qui, en principe, suit le principe du contradictoire »152. Il suffit donc que la décision ait fait, ou ait été susceptible de faire, l’objet d’une instruction contradictoire, avant que sa reconnaissance ou son exécution ne soit demandée dans un autre État153. Le raisonnement adopté se rapporte en réalité à la distinction entre contradictoire et contradiction154 et le fait que le défaut du défendeur ait empêché que la contradiction ait eu lieu ne remet pas en cause le caractère contradictoire de la procédure par défaut, qui n’est donc pas une procédure unilatérale.

27. La possibilité d’un débat contradictoire. Ces jurisprudences montrent donc clairement que

les jugements rendus en l’absence du défendeur sont des décisions au sens de la Convention de Bruxelles ou des règlements de droit international privé car ils ont suivi une procédure contradictoire, c’est-à-dire au cours de laquelle le défendeur a eu la possibilité de s’exprimer avant qu’une décision exécutoire au fond ait été rendue. Le fait que le défendeur ne se soit pas effectivement exprimé ne remet pas en cause cette qualification et ce quelle que soit la raison de son absence de participation. De façon peut être plus surprenante, le fait que le juge ne se soit que faiblement impliqué dans l’élaboration de la décision ne remet pas non plus en cause la qualification de celle-ci en tant que décision.

151 Voir infra, §28

152 §24 des conclusions de l’avocat général et §25 de l’arrêt Gambazzi, précité n.148. 153 §23 de l’arrêt Gambazzi, précité n.148

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(B) Une décision malgré la faible implication du juge

28. Le critère posé par l’arrêt Solo Kleinmotoren. Cette problématique est au cœur du second

argument soulevé par le défendeur dans l’affaire Gambazzi qui soutenait que l’absence d’implication du juge anglais dans l’élaboration du jugement par défaut empêchait que celui- ci puisse être reconnu en tant que décision selon la Convention de Bruxelles. Son argument trouvait son fondement dans l’arrêt Solo Kleinmotoren155 rendu par la Cour de justice en 1994. Dans cette affaire, le Bundesgerichtshof156 demanda à la Cour si une transaction entre

les parties pouvait être considérée comme une décision au sens de la Convention. La Cour répondit que la transaction a un caractère essentiellement contractuel et que, même si elle est intervenue devant un juge et qu’elle met fin à un litige, elle n’émane pas d’un organe juridictionnel « statuant de sa propre autorité sur des points litigieux entre les parties »157.

Cette réflexion, doublée du fait que la Convention prévoit des dispositions particulières en son article 51 pour l’exécution à l’étranger des transactions, justifie que ces dernières ne sont pas couvertes par la définition de l’article 25.

29. Le rôle du master dans les procédures par défaut anglaises. Il était donc concevable

d’appliquer le critère de l’arrêt Solo Kleinmotoren pour refuser de qualifier de décisions les jugements par défaut anglais158. En effet, il faut préciser que la procédure par défaut anglaise est un peu particulière, comparée aux autres droits européens, sur deux aspects. Le premier aspect est qu’il est possible d’obtenir un jugement par défaut en droit anglais, non seulement lorsque le défendeur n’a pas répondu à l’acte introductif d’instance159 ou s’est abstenu de conclure dans les délais160, mais aussi à titre de sanction quand celui-ci ne s’est pas conformé à un ordre du tribunal161. L’une des sanctions possibles dans une telle situation est d’interdire au défendeur de présenter sa défense et de transformer la procédure en procédure par défaut. C’est dans cette dernière situation que se trouvait Gambazzi à la suite de son refus de se plier

155 CJCE, 2 juin 1994, Solo Kleinmotoren GmbH contre Emilio Boch, C-414/92, Rec. p. I-2237, JDI 1995, p.466,

note HUET (A).

156 Cour Fédérale de Justice allemande, juridiction suprême en matière civile et pénale. 157 §17 de l’arrêt Solo Kleinmotoren, précité n.155.

158 Sur cette question, voir CUNIBERTI (G.), note sous Civ. 1ère, 17 novembre 1999, n°97-21576, RCDIP 2000,

p.786 et CUNIBERTI (G.), La reconnaissance en France des jugements par défaut anglais - A propos de

l'affaire Gambazzi-Stolzenberg, RCDIP 2009, p.685

159 Soit en renvoyant au tribunal un formulaire de réception de l’acte introductif d’instance (« acknowledgment

of service ») soit en renvoyant directement ses moyens de défense (CPR r. 12.3).

160 Dans la situation ou le défendeur a renvoyé l’accusé de réception de l’acte introductif d’instance

(« acknowledgment of service ») mais n’a pas envoyé ses moyens de défense dans le temps imparti (CPR r. 12.3)

161 CPR r. 3.4 et r. 3.5. Voir aussi ANDREWS (N.), English Civil Procedure, OUP, 2003 (réimpression en

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aux injonctions du tribunal anglais162. Le second aspect particulier de la procédure par défaut anglaise est que, devant la High Court163, elle n’implique pas un juge de la High Court mais

un master, c’est-à-dire un officier de justice responsable uniquement de la procédure, qui prononce la décision finale sans aucune appréciation quant au bien-fondé des prétentions du demandeur dans un jugement non motivé accordant l’intégralité des demandes au demandeur164. Il faut souligner dès à présent que Les masters anglais n’ont pas le titre de

juge165 mais exercent une fonction primordiale pour la procédure civile anglaise en étant à la

fois responsable du greffe et de l’ensemble de la mise en état. Leur fonction est donc administrative et juridictionnelle166, notamment lorsqu’ils délivrent des jugements par défaut.

30. Une décision malgré l’absence d’implication du juge. Dans l’affaire Gambazzi, l’argument

du défendeur en exequatur était donc que le jugement par défaut anglais n’impliquait pas un organe juridictionnel « statuant de sa propre autorité sur des points litigieux entre les

parties ». Cet argument fut rejeté explicitement par l’avocat général qui note, à notre avis à juste titre, que l’absence d’examen du fond de la décision n’implique pas une absence d’implication totale du juge quant à la procédure suivie. En effet, si le master ne se prononce pas sur le bien-fondé des prétentions du demandeur, il examine cependant que la procédure suivie répond aux conditions procédurales permettant l’adoption d’un jugement par défaut. Cette question n’est pas explicitement tranchée par la Cour de justice elle-même mais, en considérant le jugement par défaut anglais comme une décision au sens de la convention, elle donne implicitement raison à son avocat général sur cette question167. De façon plus générale, il semble que le critère établi par l’arrêt Solo Kleinmotoren sur le rôle actif du juge n'a été utilisé par la Cour que pour distinguer une décision de justice d’une transaction judiciaire et il n’est pas certain qu’il soit pertinent en dehors de cette hypothèse168.

162 Gambazzi avait été soumis à un « disclosure order » assorti d’un« unless order » lui enjoignant de dévoiler

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