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L’inhibition

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1.2 Processus cognitifs et corrélats neuronaux

1.2.1 Fonctions cognitives impliquées dans le TOC

1.2.1.2 L’inhibition

L’inhibition est la capacité à inhiber une réponse prépondérante, c’est-à-dire, une réponse plus automatisée que les autres ou encore une réponse activée avant les autres réponses possibles. Ce processus a été largement étudié dans la population atteinte de TOC car il faisait écho aux symptômes cliniques décrits dans le TOC par le rapprochement de la réponse prépondérante, réponse la plus saillante d’une tâche d’inhibition, avec les composantes compulsives du TOC, répétitions d’actions comportementales les plus saillantes (Chamberlain, Blackwell, Fineberg, Robbins, & Sahakian, 2005). L’évaluation de l’inhibition se fait au travers de plusieurs tests neuropsychologiques dont la tâche de flanker.

La tâche de flanker

La tâche d’interférence dite « de flanker » ou dans sa version francisée « tâche des ailiers » consiste à présenter au participant un stimulus cible en présence de stimuli conflictuels ou incongruents (c’est-à-dire associés chacun à une réponse différente de la réponse cible), l’obligeant donc à inhiber ces stimulus interférents. Elle consiste à faire apparaitre un stimulus

cible que le sujet doit associer à une réponse comportementale. Par exemple, lorsque la lettre H est présentée à l’écran (stimulus cible), le sujet doit appuyer sur la flèche gauche du clavier (réponse comportementale).

La difficulté vient de la présence d’autres stimuli autour du stimulus cible. Ces stimuli « non cible » (Figure 7) sont alors soit identiques au stimulus cible (condition congruente), soit différents (condition incongruente ou encore appelée condition interférente).

Figure 7 : Différentes conditions dans la tâche de flanker.

HHHHH Essai congruent

HHFHH Essai incongruent

Lettre cible

35 Dans l’exemple cité au-dessus, une condition congruente consiste à afficher la lettre H, stimulus cible, entourée par d’autres lettres H, stimuli non-cible. Quand la lettre H cible, stimulus cible, est entourée de lettres R, le traitement de l’information est perturbé. L’hypothèse est que cette condition activerait deux circuits parallèles qui seraient en compétition et qui activeraient une région chargée d’inhiber le circuit lié aux stimuli interférents. Cette inhibition ralentirait le temps de réponse qui est observable expérimentalement.

Chez le sujet sain, conformément aux hypothèses, on observe une diminution des performances pour la condition incongruente par rapport à la condition congruente (Endrass, Klawohn, Schuster, & Kathmann, 2008; Fitzgerald et al., 2005) ainsi que des réponses plus lentes pour la condition incongruente que la condition congruente (Endrass et al., 2008; Fitzgerald et al., 2005). Ces résultats vont dans le sens de l’existence d’un processus supplémentaire et plus long que serait l’inhibition.

On n’observe pas de déficit lors de la condition incongruente chez les patients atteints de TOC par rapport aux sujets sains pour le TR (Endrass et al., 2008; Riesel, Endrass, Auerbach, & Kathmann, 2015) ou pour la performance (Endrass et al., 2008; Fitzgerald et al., 2005). Dans cette condition, on observe même de meilleures performances pour les patients et leurs apparentés par rapport aux sujets sains (Krikorian, Zimmerman, & Fleck, 2004; Riesel et al., 2015; Riesel, Endrass, Kaufmann, & Kathmann, 2011; Riesel, Kathmann, & Endrass, 2014).

Pour résumer, bien qu’un déficit des processus d’inhibition chez le patient TOC soit supposé, il n’est pas observé lors d’une tâche de flanker au niveau comportemental. Ces résultats contradictoires sont également retrouvés avec les autres tâches d’inhibition (Abramovitch, Abramowitz, & Mittelman, 2013; Abramovitch & Cooperman, 2015), impliquant la mise en place d’études complémentaires pour comprendre le mécanisme physiopathologique sous-jacent. Toutefois, il faut remarquer qu’en plus des processus d’inhibition, les processus de traitement du conflit sont aussi activés lors de la présentation d’un stimulus incongruent et un déficit au niveau de la gestion du conflit pourrait expliquer les résultats contradictoires. Des études ont montré que l’activité en Imagerie par Résonance Magnétique fonctionnelle (IRMf) lors de la présentation d’un stimulus conflictuel était similaire à celle d’un essai où le sujet effectuait une erreur (Ursu, Stenger, Shear, Jones, &

36 Carter, 2003). En EEG, lors d’une erreur, le signal est appelé ERN pour Error-Related Negativity (Figure 8). De plus, après une erreur, on observe un ralentissement de la réponse à l’essai suivant : le « post-error slowing ». Ce serait un mécanisme compensatoire pour améliorer ses performances après une erreur (Gehring & Fencsik, 2001). La conséquence lors d’une tâche avec plusieurs essais consécutifs serait une incapacité à traiter l’essai suivant, le traitement de l’erreur interfèrerait avec le traitement de l’essai suivant. Un patient qui est perturbé lors de la génération d’une erreur pourrait être ralenti plus fortement qu’un sujet sain lors de l’essai suivant. Le mécanisme compensatoire pour améliorer les performances suite à une erreur serait moins efficace chez un patient et l’essai suivant serait ainsi plus fortement perturbé.

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La génération d’une erreur

Indépendamment du type d’essai, lors d’une erreur, le TR est plus rapide chez le sujet

sain ou le patient atteint de TOC (sans différence significative entre eux) comparé à celui d’une réponse correcte. En revanche, après une erreur, les résultats sont plus nuancés car ils montrent soit un ralentissement après une erreur plus important pour les patients atteints de TOC comparé aux sujets sains (Fitzgerald et al., 2005), soit une absence de différence entre les deux groupes (Endrass et al., 2008; Riesel et al., 2011). Néanmoins, en électroencéphalographie (EEG), le signal enregistré au niveau de FCz (situé au niveau de l’Aire Motrice Supplémentaire (AMS)), est différent lors d’une erreur entre les patients et les sujets sains (Riesel et al., 2015, 2014) suggérant un dysfonctionnement de la région de l’AMS ou des régions sous-jacentes (Figure 8). De plus, ce dysfonctionnement est également retrouvé lors d’un essai correct et également chez les apparentés aux patients atteint de TOC (Riesel et al., 2015, 2011, 2014) impliquant une meilleure compréhension des réseaux neuronaux à l’origine du TOC lors de tâches cognitives.

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Error Related-Negativity (ERN)

La condition incongruente dans la tâche de flanker a été étudiée pour comprendre le fonctionnement de l’erreur par le biais de l’ « error-related negativity » (ERN). En électroencéphalographie (EEG), on observe une augmentation de la négativité lors de la génération d’une erreur (Scheffers, Coles, Bernstein, Gehring, & Donchin, 1996). Celle-ci a été observée comme plus importante pour les patients atteints de TOC (Gehring, Himle, & Nisenson, 2000).

Une hypothèse est que le système de détection d’erreur serait hyperactif dans le TOC. Ainsi, lors d’une erreur, le comportement visant à corriger l’erreur ne serait pas suffisant pour régler le désaccord perçu, obligeant donc le patient à répéter son comportement (Pitman, 1987; Schwartz, Stoessel, Baxter, Martin, & Phelps, 1996).

La comparaison de l’ERN entre les sujets sains et les patients lors d’une tâche de flanker montre une plus grande amplitude pour ces derniers (Endrass et al., 2008; Riesel et al., 2015, 2014) ainsi que pour la fratrie (Riesel et al., 2011).

Le signal enregistré lors d’une bonne réponse s’appelle le Correct Related Negativity (CRN). On a observé une plus grande amplitude du CRN chez des patients atteints de TOC comparé à des sujets sains (Riesel et al., 2015, 2014) ou pas différente (Grützmann et al., 2014). De plus, le CRN est corrélé positivement avec le score à la Y-BOCS indiquant que plus la sévérité de la maladie est élevée, plus l’amplitude négative au CRN est grande (Endrass et al., 2008) suggérant un processus cognitif déficitaire commun aux bonnes réponses et aux erreurs.

Signal EEG après une bonne réponse (trait pointillé) ou une erreur (trait plein) chez des sujets

sains (vert) et des patients (jaune)

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1.2.2 Corrélats neuronaux de la mémoire de travail, de l’inhibition et de la détection

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