• Aucun résultat trouvé

L’hyperesthésie dentinaire cervicale

Figure 27 : exemple de SAM1

7. Indications des résines composites fluides

7.3. Lésions cervicales

7.3.4. L’hyperesthésie dentinaire cervicale

7.3.4.1. Généralités

L’hyperesthésie dentinaire cervicale (HDC) est un syndrome douloureux initié au niveau des collets des dents dites « sensibles » en liaison avec l’exposition de la dentine cervicale dans le milieu buccal. L’exposition dentinaire peut résulter d’une perte d’émail au cours de processus incluant l’érosion, l’attrition ou l’abrasion, ou d’une dénudation de la surface radiculaire due à une récession gingivale ou à un traitement parodontal (Vreven et Van Nieuwenhuysen, 1996).

Elle se manifeste en réponse à :

 une stimulation mécanique (brosse à dents, ongles),  une stimulation thermique (aliments, chaud ou froid, air),  une stimulation chimique (acide),

 ou une stimulation osmotique (sucre). Une douleur vive caractéristique survient alors.

D’après les études épidémiologiques, la prévalence de l’HDC dans la population adulte oscille entre 10 et 20% (Hefti et Stone, 2000) et touche davantage les femmes. Même si l’exposition dentinaire augmente avec l’âge, ce sont les adultes entre 20 et 40 ans qui sont les plus touchés (Flynn et coll., 1985). Les chiffres diffèrent un peu dès lors que l’on étudie une population suivie pour maladie parodontale, avec un pic situé vers 50 ans et aucune distinction de sexe (Addy et coll., 2000).

7.3.4.2. Mécanismes – Différentes théories

Différentes théories participent à l’explication du phénomène d’HDC.

La théorie hydrodynamique de Brännström est la plus vraisemblable et la plus acceptée (Brännström, 1963). On sait que les odontoblastes et les fibres nerveuses sont contigües au niveau de la limite pulpo-dentinaire. Les stimuli thermiques, le fraisage (vibration, pression, déshydratation), les variations osmotiques sont à l’origine de mouvements des liquides intersticiels intracanaliculaires. Ces mouvements stimuleraient les fibres Aδ qui seraient déplacées, étirées ou comprimées par le flux intracanaliculaire (Brännström et Aaström, 1972).

112 Il n’est pas exclu que les irritants externes appliqués sur le tissu dentinaire activent les terminaisons nerveuses périphériques sensitives avec en retour, une libération de neuropeptides (substance P) ce qui augmente la perméabilité vasculaire et favorise l’activation des fibres nociceptives (Taylor et Byers, 1990). La réaction inflammatoire et le phénomène hydrodynamique pourraient s’additionner. Ceci suppose la présence d’un troisième élément, sans lequel le phénomène ne peut se produire : la présence de canalicules dentinaires perméables.

Dans les zones hyperesthésiques, la dentine présente huit fois plus de canalicules ouverts que sur une dentine exposée de dents non sensibles. De plus, le diamètre de ces canalicules serait deux fois plus important (Absi et coll., 1987). Une dentine peu perméable constitue une réelle protection en limitant le risque d’agressions et de transmission des irritations (Pashley et coll., 1989).

La perméabilité dentinaire étant un facteur prépondérant dans l’explication du phénomène douloureux dans les HDC (Pashley, 1994), les thérapeutiques vont dans le sens d’une limitation de la perméabilité de la zone dentinaire exposée.

7.3.4.3. Diagnostic

Le diagnostic repose sur la mise en évidence au cours de l’entretien et de l’anamnèse des caractéristiques symptomatiques de l’HDC, à savoir des douleurs aiguës et brèves, déclenchées par des stimuli mécaniques, chimiques, thermiques ou osmotiques. Un examen minutieux, à la fois clinique et radiographique, est nécessaire pour écarter toute autre cause à la douleur, telle que carie, fracture ou fêlure. L’examen permettra également de déterminer la zone dénudée. On peut chercher à reproduire les symptômes par des tests type passage d’air, d’eau ou d’une sonde, en cas de difficulté à localiser la zone douloureuse.

7.3.4.4. Approche thérapeutique globale

Les principes de base concernant le traitement de l’HDC sont assez simples et reposent sur les exigences répertoriées par Grossman en 1935 (Bohin et coll., 2001) et toujours applicables de nos jours, à savoir :

 ne pas irriter la pulpe, en utilisant pour se faire des agents chimiques ou des matériaux biocompatibles avec l’organe dentaire,

 ne pas provoquer la douleur (par exemple le mordançage à l’acide orthophosphorique dans l’éventualité d’une restauration composite doit se faire sous anesthésie),

113  rechercher l’efficacité à long terme et surtout de manière reproductible,

 ne pas colorer les tissus dentaires.

Toutefois, à l’heure actuelle, aucune technique ne satisfait totalement à ces exigences, même si certaines s’en rapprochent. Nous ne détaillerons pas les différentes approches dans le traitement de l’HDC. Toutefois, il est à savoir que l’approche se fait en plusieurs temps.

 1ère intention : le traitement étiologique. On cherchera à identifier et à agir sur les différents facteurs de risque (Nemcovsky, 1996). On sait que les dénudations radiculaires peuvent dépendre des parodontites, des techniques de brossage inadéquates, d’un traumatisme chronique ou des récessions gingivales dues à l’âge (Vreven et Van Nieuwenhuysen, 1996). Les habitudes alimentaires néfastes ainsi qu’un défaut d’hygiène bucco-dentaire sont aussi à prendre en considération, l’étiologie de ces HDC étant multifactorielle (Levitch et coll., 1994).

 2e intention : le traitement ambulatoire. Les traitements proposés visent à limiter la perméabilité dentinaire pour réduire les mouvements hydrodynamiques, à l’origine de la sensibilité. Ils peuvent aussi viser à augmenter le seuil d’excitation des fibres nerveuses pour les rendre moins sensibles aux stimuli extérieurs. On pourra préconiser l’utilisation de pâtes dentifrices (Elgyfluor®, Sensodyne®), de gels dentaires (Sensigel®), de solutions dentaires (Elmex Sensitive®) mais il faudra d’emblée prévenir de la possibilité d’échec et envisager d’emblée des solutions alternatives.

 3e intention : le traitement au fauteuil. Il s’agit de l’application au cabinet dentaire d’agents désensibilisants, vernis ou films adhésifs protecteurs en systèmes polymérisants ou non. De nombreux produis sont à notre disposition notamment des principes actifs non polymérisants (Fluor Protector®, Duraphat®, Protect®), des primers désensibilisants (Systemp desensitiver®), des primers adhésifs et principes actifs polymérisants (Seal and protect®, MS coat®)

7.3.4.5. Traitement restaurateur en cas d’échec

En cas d’échec, on ne cherchera pas à multiplier les applications. On préfèrera recouvrir la zone exposée par un biomatériau adhésif.

114 7.3.4.5.1. Choix des matériaux

On peut utiliser des agents de scellement comme les résines composites et les ciments verres ionomères. On reconstituera d’emblée la dent lorsque l’hyperesthésie dentinaire est due à une perte importante de substance dentinaire. Les CVIMAR et les résines composites possèdent chacun leurs indications comme décrit précédemment, et le choix se fait surtout en fonction du contexte clinique (Decup et Miller, 2001 ; Tassery et coll., 2001).

Si la perte de tissu est minime, les résines composites fluides apparaissent comme particulièrement bien adaptées. L’étape du conditionnement tissulaire et du collage se doit d’être particulièrement rigoureuse sachant que l’isolation de la zone à traiter est difficile à obtenir dans cette région de mise à nu de la dentine. Au-delà de son rôle dans le collage, le système adhésif jouera aussi un rôle important dans la diminution des HDC puisque par essence le système adhésif vient pénétrer les tubuli dentinaires et donc en assurer la perméabilité. Le frottement du système adhésif à l’aide de microbrosse sur les surfaces dentinaires hyperesthésiques au moment du collage est important pour assurer la majoration de la pénétration du produit dans les canalicules.

Suite à un traitement restaurateur traitant une HDC, la prescription d’une pate dentifrice faiblement abrasive peut être intéressante afin de ne pas accélérer le processus d’usure de ces matériaux.

7.3.4.5.2. Protocole opératoire

Les principes de restauration sont identiques à ceux développés précédemment dans le paragraphe 7.3.3.4.4.

115