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II.2 L A NEUROPHYSIOLOGIE DE LA SENSIBILITE CUTANEE DU PIED

II.2.1. L’histologie de la peau

La peau est le terme commun pour désigner l’organe recouvrant l’ensemble du corps

humain. Cette interface entre le monde extérieur et l’homme se renouvelle en permanence et

présente une structure histologique semblable quelle que soit la partie du corps. Elle est

composée de trois couches : l’épiderme (couche superficielle), le derme (couche

intermédiaire) et l’hypoderme (couche profonde).

Il existe deux grands types de sensibilité cutanée : la sensibilité vibrotactile et la

sensibilité de protection ou sensibilité à la douleur (Spicher, 2003). La sensibilité de

protection, assurée par les nocicepteurs ne sera pas traitée. Nous n’aborderons pas non plus

les sensations cutanées relatives à la température ou au sens haptique. Nous nous

intéresserons uniquement à la sensibilité vibrotactile et aux récepteurs qu’elle implique à

savoir les mécanorécepteurs cutanés. Contrairement à la vision ou à l’audition pour lesquelles

les récepteurs sont localisés et regroupés dans un même organe, la modalité tactile englobe

des récepteurs dits « superficiels » et « profonds » qui sont répartis sur toute la surface

corporelle. L’innervation sensorielle de la peau est très riche, mais elle varie énormément

selon la région corporelle. Cette différence est due à une répartition et à une densité inégales

des mécanorécepteurs cutanés. Par exemple, la peau glabre de la face palmaire de la main est

beaucoup plus sensible que d’autres territoires cutanés (Frey von, 1910).

L’historique des découvertes des mécanorécepteurs cutanés

Le XIX

ème

siècle fut le siècle des grandes découvertes histologiques. Les principaux

mécanorécepteurs cutanés ont été découverts à cette période :

• 1741 : Abraham Vater et Filippo Pacini donnent leurs noms aux plus gros

mécanorécepteurs cutanés qui ont un diamètre d’environ 0,5 mm.

• 1852 : Wagner et Meissner découvrent les corpuscules de Wagner-Meissner

que nous appelons communément corpuscules de Meissner.

• 1880 : découverte des corpuscules de Merkel.

• 1893 : découverte des corpuscules de Ruffini.

La connaissance de ces récepteurs s’est affinée au XX

ème

siècle grâce aux progrès des

techniques d’investigation. Quelques chercheurs ont largement contribué à ces découvertes :

• 1957 : Pease et Quilliam ont étudié pour la première fois les corpuscules de

Pacini au microscope électronique.

• Années 60 : les travaux de Cauna ont porté sur la morphologie des récepteurs

cutanés.

• Depuis les années 70 : Johansson s’est intéressé aux différents types d’unités

sensitives, Hsiao et Johnson ont analysé l’implication des récepteurs dans la

discrimination tactile et Jean-Pierre Roll a différencié la sensibilité cutanée et la

sensibilité musculaire (Figure 11).

Figure 11 : Répartition des récepteurs cutanés dans l'épiderme, le derme et l'hypoderme

(d'après Roll, 1994).

Les spécificités et l’innervation des mécanorécepteurs cutanés de type I et II

Les premières études sur la sensibilité cutanée ont d’abord été réalisées sur la main. A

la fin des années 70, la technique microneurographique a permis à Roland Johansson et Ake

Vallbo de dénombrer jusqu’à 17 000 mécanorécepteurs cutanés au niveau de la peau glabre de

la main (Johansson & Vallbo, 1979b) et de décrire quatre types de ces récepteurs retrouvés à

la fois chez l’homme et le singe (Tableau 2). Chaque variété de mécanorécepteurs cutanés est

sensible aux déformations mécaniques de la peau et code des caractéristiques spatiales et

temporelles spécifiques du stimulus. Le classement a été établi selon la taille de leur champ

récepteur (type I : petit champ récepteur bien délimité ou type II : champ récepteur large et

mal défini) et leur adaptation (SA : slow adapting ou adaptation lente et FA : fast adapting ou

adaptation rapide). Les récepteurs à adaptation lente codent l’intensité et la durée du stimulus,

ceux à adaptation rapide ne répondent que lors de l’application et de la suppression d’un

stimulus, quelquefois à ses variations notamment en termes de vitesse d’application (Figure

12). A cette spécialisation fonctionnelle s’ajoute une « bande passante » limitant leur

sensibilité à un stimulus donné. Tous les récepteurs constituent donc des filtres sélectifs qui

font que « la perception ne peut être une réplication du réel mais seulement une représentation

réduite et utile de celui-ci » (Roll, 1994).

Figure 12 : Classification des

mécanorécepteurs cutanés selon leur

adaptation et la taille de leur champ

récepteur. Illustration de la taille du

champ récepteur des A : corpuscules de

Meissner et B : corpuscules de Pacini au

niveau de la peau palmaire (adaptée de

Vallbo & Johansson, 1984; tirée de

Vibert et al., 2005).

Les récepteurs de type I, en particulier les SA I (disques de Merkel) sont très actifs

lorsqu’un objet ou un stimulus coupe le bord de leur champ récepteur, ce qui démontre une

aptitude particulière au codage de la forme et du contour de l’objet. En revanche, leur

sensibilité est plus faible lorsque le stimulus est appliqué à l’intérieur du champ récepteur

(Figure 13). Ces propriétés expliquent certainement l’importante résolution spatiale de la peau

glabre de la main (Johansson & Vallbo, 1983; Roll, 1994; Vallbo & Johansson, 1984).

Figure 13 : Sensibilité des

récepteurs SA I aux contours d'un

objet. A : réponses des récepteurs

SA I aux déplacements d’une sonde

appliquée perpendiculairement à la

peau. A gauche (« no edge »), la

stimulation délivrée par la sonde se

situe à l’intérieur du champ

récepteur. A droite (« edge »), la

stimulation coupe le bord du

champ récepteur : la réponse est

alors plus importante. B :

Représentation spatiale des

réponses d’un groupe de récepteurs

SA I lorsque la peau est stimulée

par un objet (tirée de Johansson &

Vallbo, 1983).

Les récepteurs de type II représentent 36 % des mécanorécepteurs cutanés de la peau

glabre de la main et sont sensibles aux vibrations et à l’étirement de la peau mais aussi aux

mouvements articulaires (Johansson & Vallbo, 1983). En effet, une grande partie d’entre eux

répondent à des mouvements de la main même s’il n’y a pas de stimulation directe de ces

récepteurs.

Type de

récepteur

Localisation Champ

récepteur

Qualité perceptive Vitesse

d’adaptation

Fibres sensitives

associées

Corpuscules

pileux

Autour des

follicules

pileux

Mouvements des poils

Vibrations cutanées

superficielles

Lente C, Aδ

SA I ou

Disques de

Merkel

Epiderme

(récepteur

superficiel)

Petit

(2 à 8mm)

Pressions cutanées,

vibrations

Lente Aβ

FA I ou

Corpuscules de

Meissner

Derme

(récepteur

superficiel)

Petit Vitesse d’établissement

du stimulus, vibrations

cutanées superficielles

Rapide Aβ

SA II ou

Corpuscules de

Ruffini

Derme Grand

(2 à 8mm)

Pressions cutanées,

vibrations

Lente Aβ

FA II ou

Corpuscules de

Pacini

Derme et

hypoderme

(récepteurs

profonds)

Grand Vibrations cutanées

profondes, indentations

transitoires

Rapide Aβ

Tableau 2 : Les différents types de mécanorécepteurs cutanés (d'après Roll, 1994)

II.2.2. Les spécificités de la peau du pied (peau dorsale et peau

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