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3. LES CRIS D’EEYOU ISTCHEE ET LA CONSERVATION DU NORD QUÉBÉCOIS

3.4 La participation des Cris aux activités d’exploitation

3.4.2 L’exploitation minière

Le territoire de l’Eeyou Istchee-Baie-James représente également un fort attrait minier. On y retrouve plusieurs projets d’exploitation qui visent principalement l’or, le cuivre, le diamant et la kimberlite (CCEBJ, 2019a). Les plus importants dans l’Eeyou Istchee sont la mine d’or Eleonore à Wemindji, la mine de diamant Renard près de Mistissini et la mine Bracemac-McLeod, à Matagami (Rodon et Therrien, 2017). Ces activités peuvent avoir plusieurs impacts négatifs pour l’environnement. Les procédés d’extraction des mines et des gisements produisent plusieurs résidus qui peuvent contaminer les milieux aquatiques environnants, touchant directement la santé des communautés locales (CCEBJ 2019a). La participation des Cris est donc essentielle pour assurer le respect de leur milieu environnemental et social, ainsi que leur développement économique.

Historiquement, les Cris ont été exclus de toute participation aux activités minières. Cependant, grâce à la CBJNQ et à la Paix des Braves, les Cris peuvent maintenant participer au développement minier, notamment en négociant avec les compagnies minières des ententes sur les répercussions et les avantages (ERA). Ces ententes leur permettent d’obtenir des bénéfices en termes de formation, d’emploi et d’opportunité de contrats, qui leur permettent d’assurer leur développement économique. (GCC, 2013 ; Rodon et Therrien, 2017). En vertu de la Loi sur les mines, le gouvernement de la Nation crie et le GREIBJ peuvent aussi choisir de soustraire certaines parcelles des terres de catégories II et III aux claims miniers (Loi sur les mines, art 304.1.1). Une autorisation doit également être obtenue par les communautés cries concernées pour développer des projets miniers sur les terres de catégorie I (Gouvernement du Québec, 1998). Également, le gouvernement de la Nation crie soutient et favorise les activités minières de la Baie-James, grâce à la Politique minière de la Nation crie, établie en 2010. Elle vise à favoriser une approche normalisée, uniforme et efficace pour assurer la participation des Cris aux activités minières. (GCC, 2019f)

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3.4.3 L’exploitation forestière

Comme mentionné précédemment, la forêt boréale est l’écosystème le plus important du territoire de l’Eeyou Istchee. Elle permet notamment d’offrir de nombreux services écosystémiques, tels que le stockage du carbone, la purification de l’air et de l’eau, la régularisation du climat, la production de produits ligneux et non ligneux divers, etc. (Ressources naturelles Canada, 2019). Environ 92 % des forêts du Québec font partie des terres publiques, ce qui permet au gouvernement d’y établir des pratiques de récolte et d’aménagement du territoire grâce à diverses lois et politiques. (MFFP, 2017) Dans les années 1970, la diminution de la matière ligneuse au sud du Québec a entraîné l’expansion de l’industrie forestière vers le Nord québécois. Le régime de la CBJNQ s’est d’abord avéré insuffisant pour les Cris qui n’ont pas pu contrôler l’expansion des coupes forestières. (Lathoud, 2005) La foresterie a entraîné le développement d’infrastructures de transport, ce qui a rendu la région plus accessible à la population allochtone (A. Penn, courriel, 4 avril 2019). Dans les années 1990, les compagnies forestières ont récolté plus de 5 millions de m² de bois par la coupe à blanc. (GCC, 2019g) Conséquemment, en 1997, le déboisement réalisé correspondait à 10 % de la superficie des forêts boréales du territoire traditionnel des Cris. Certains terrains de chasse et de trappage ont été coupés à plus de 80 %. Les conséquences ont été nombreuses pour l’écosystème de la forêt boréale : destruction des habitats fauniques, déforestation, augmentation de l’érosion, dégradation de la qualité du sol et de l’eau, bouleversement des routes migratoires de la faune, etc. En plus, les Cris étaient exclus des bénéfices économiques de l’exploitation forestière, représentant moins de 1 % des employés engagés dans ce secteur. (Lathoud, 2005) Ces injustices menèrent vers de nombreux conflits, qui opposaient le gouvernement provincial et les communautés cries touchées par la déforestation de leur territoire. La signature de la Paix des Braves en 2002 a permis de régler les conflits liés à l’exploitation forestière. Son troisième chapitre met en place un nouveau régime forestier, adapté à la région ainsi qu’aux connaissances et au mode de vie des Cris, leur permettant une meilleure participation à la planification des activités forestières et l’accès à de meilleurs bénéfices économiques (Lathoud, 2005 ; Wyatt, Fortier et Hébert, 2010). Plusieurs mécanismes permettent aux Cris de gérer ces activités, tels que le Conseil Cris-Québec sur la foresterie et les groupes de travail conjoint. Ces organismes sont composés à parts égales de représentants du Québec et des communautés locales pour planifier l’aménagement forestier de leur territoire. (Conseil Cris-Québec sur la foresterie, 2018) De plus, les unités d’aménagement du territoire sont également divisées en fonction des terrains de trappage, qui doivent respecter un quota annuel maximal d’exploitation forestière. (Secrétariat aux affaires autochtones, s. d.a, art. 3.7.4, art. 3.8.4) Le régime permet également aux communautés cries et aux maîtres de trappe d’identifier des sites à intérêts particuliers, pour les soustraire à l’exploitation forestière ou pour les soumettre à un aménagement forestier qui respecte les peuplements écoforestiers (Secrétariat aux affaires autochtones, s. d.a, art. 3.9.1, 3.10.1 et 3.10.3). Le gouvernement du Québec reste cependant la principale autorité en matière de l’encadrement et de la gestion de l’exploitation forestière, excepté dans les terres de catégorie I (Simard, 2017). Le régime forestier adapté reste tout de même une avancée prometteuse et efficace, qui a permis de redonner une place importante aux autochtones dans la gestion forestière québécoise (Fortier et Wyatt, 2014). Quinze ans à la suite de la mise en place de la Paix des Braves, les récoltes forestières ont été réduites de 50 % par rapport aux années 1990 (GCC, 2019g).

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