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Bases physiques de l’IRM

1.2. L’expérience RMN

Comme évoqué précédemment, on attribue la première mesure du phénomène RMN à I.Rabi en 1938, mais c’est en 1946 que deux équipes indépendantes menées par F.Bloch et E.M.Purcell [12], [13] vont mesurer à seulement un mois d’intervalle le phénomène de RMN dans la matière condensée. Ces travaux seront distingués par un prix Nobel commun en 1952 et vont former la base de l’expérimentation RMN puis, par la suite, de l’IRM.

On peut décomposer l’expérimentation RMN (pulsée) en 3 phases :

• Phase initiale de repos : C’est l’état dans lequel l’aimantation macroscopique M se trouve lors de l’application d’un champ magnétique B0 à une population de spin, aussi appelé état d’équilibre. Cette aimantation M est colinéaire à B0

(axe z) et est très petite devant ce dernier ce qui la rend impossible à mesurer dans l’axe z. Le but de l’expérimentation RMN est de perturber cet état d’équilibre afin de pouvoir mesurer cette aimantation dans le plan xy. C’est ce qu’on appelle la phase de mise en résonance.

• Phase de résonance : Aussi appelée phase d’excitation ou encore de perturbation. Elle consiste à apporter de l’énergie au système en y appliquant un champ magnétique B1 tournant à la vitesse angulaire (fréquence) de Larmor perpendiculaire à B0. Comme vu précédemment, la fréquence de Larmor dépend du champ B0 (1.3) et (1.4) ; ainsi, la fréquence de Larmor d’une population de spin de proton d’hydrogène est de 64Mhz à 1,5T et de 128 Mhz à 3T14. Le champ B1 est généré par une bobine placée perpendiculairement à l’axe du champ B0 (dans l’axe xy donc). Le système représenté par M entrera alors en résonance et en cohérence de phase et entamera une précession autour de B1 dans le repère laboratoire (Figure 1-3). Dans le repère tournant, on observera une bascule de M vers l’axe xy. Ainsi, on pourra constater une diminution de la composante Mz de M et une augmentation de la composante Mxy. L’angle formé par l’axe de M et l’axe z à l’arrêt de l’application de B1 est appelé l’angle de bascule ou l’angle α. Cet angle de bascule dépend de l’intensité de B1 et de sa durée d’application tb :

𝜶 = 𝜸 ⋅ 𝑩𝟏⋅ 𝒕𝒃 (1.7)

Ainsi, à l’application d’un champ B1 d’angle bascule de 90° ( /2) on aura une bascule totale de M dans le plan xy ce qui signifie une valeur maximale de Mxy

(égale à M) et Mz = 0. De la même manière l’application d’un angle α de 180° ( ) aboutira à l’obtention d’une aimantation M = -Mz avec Mxy = 0.

14 T : Tesla. 1,5T et 3T sont les valeurs de champs magnétiques B0 les plus communs en IRM clinique à ce jour

• Phase de relaxation : Immédiatement après l’arrêt de l’application du champ B1, le système qui n’est soumis à aucune autre force que celle de B0 va revenir à son état d’équilibre thermique initial. Le retour à l’état d’équilibre qui se caractérise par une variation du champ magnétique dans le plan xy est mesurable sous forme de variation de courant d’après la loi de Faraday-Lenz15, sur une antenne réceptrice ou une bobine (Figure 1-4). Ce signal sera appelé signal de précession libre ou FID16. Il est caractérisé par un sinus amorti de la forme :

𝑭𝑰𝑫(𝒕) = 𝒔𝒊𝒏(𝝎𝟎𝒕)ⅇ−𝒕∕𝑻𝟐∗ (1.8)

Avec T2* le temps de relaxation transversale soumis aux inhomogénéités de champ.

15 Cette loi décrit les phénomènes d’induction électromagnétique i.e. l’apparition d’une tension électrique ou force électromotrice e dans un circuit (type bobine) lorsque celui-ci est immobile et soumis à un champ magnétique ou flux magnétique Φ variable tel que𝑒 = −𝑑Φ

𝑑𝑡.

16 FID = Free Induction Decay.

Figure 1-3 : Schéma de la bascule d'aimantation M dans le repère laboratoire à gauche et représentation dans le repère tournant à droite.

Figure 1-4 : FID et lecture de FID par induction électromagnétique sur une bobine transversale à l'axe Z

On peut alors observer dans notre référentiel tournant une repousse de Mz et une décroissance de Mxy. Le phénomène de relaxation a été décrit pour la première fois dans l’article de Félix Bloch en 1946[12] à travers un système différentiel de 3 équations :

{

ⅆ𝑴𝒙 ⅆ𝒕

=

−𝑴𝒙 𝑻𝟐 ⅆ𝑴𝒚 ⅆ𝒕

= −

𝑴𝒚 𝑻𝟐 ⅆ𝑴𝒛 ⅆ𝒕

= −

𝑴𝒁−𝑴𝟎 𝑻𝟏 (1.9)

La résolution de ces équations conduit aux solutions :

{ 𝑴𝒙= 𝑴𝟎 𝒕 𝑻𝟐 𝑴𝒚 = 𝟎 𝑴𝒛= 𝑴𝟎(𝟏 − ⅇ −𝒕 𝑻𝟏) (1.10)

Les solutions des équations de Bloch permettent alors de décrire l’évolution dans le temps des composantes Mz et Mxy de M pendant la relaxation. On constate que deux constantes temporelles régissent la relaxation : T1 et T2.

• T1 : temps de relaxation longitudinale ou spin-réseau qui va déterminer la repousse de la composante Mz de M. On peut aussi trouver la représentation de ce phénomène par le taux de décroissance de T1 noté R1 avec R1 = 1/T1. On définit graphiquement la valeur de T1 comme le point de croisement en x entre la tangente à l’origine de la courbe de repousse de Mz et l’asymptote de valeur M0. En pratique on retiendra que le temps pour lequel 63% de la valeur initiale de Mz a été recouverte correspond au T1. Ce temps varie d’un tissu à l’autre essentiellement en fonction des interactions thermiques des spins d’hydrogène avec leur environnement proche. Il est dépendant du champ B0 et de la température et est de l’ordre de la seconde pour les tissus cardiaques.

• T2 : temps de relaxation transversale ou spin-spin qui va déterminer le temps de décroissance de la composante Mxy de M. On peut également le représenter sous forme de taux de repousse R2 avec R2 = 1/T2. T2 correspond au point de croisement en x entre la tangente à l’origine de la courbe de décroissance de l’aimantation transversale et l’ordonnée à l’origine. La valeur de T2 peut donc être mesurée comme le temps pour lequel il reste 37% de la valeur de Mxy immédiatement à l’arrêt de l’application du champ B1. Il est la manifestation des interactions des champs magnétiques microscopiques de spins entre eux et du phénomène de « déphasage » de la population de spins après excitation ou « phasage ». Le temps T2 est toujours plus court que le T1 et il est de l’ordre de la dizaine de ms pour les tissus cardiaques.

En IRM, l’échantillonnage du signal est réalisé pendant cette phase de relaxation. Un des principaux principes du contraste en IRM repose sur les différences de temps de relaxation entre les tissus et sur le choix de paramètres d’acquisition adéquats de sorte à faire apparaître le contraste souhaité entre les tissus en fonction de leur valeur de T1, T2

(Figure 1-5) ou simplement de par leur densité de protons d’hydrogène (DP).

Chaque groupe de tissus ayant une structure similaire, (comme au sein d’un même organe ou segment d’organe), aura théoriquement une valeur ou plage de valeurs de T1 et de T2 qui lui est propre. C’est cette différence qui permet de faire apparaître un contraste à l’image entre les différents tissus sains et pathologiques selon la pondération choisie. Une revue de littérature de référence réalisée par P. Bottomley et collègues en 1987 recense les premières mesures de temps de relaxation T1 et T2 des tissus humains sains et pathologiques [14]. Il serait réducteur de donner une valeur exacte de T1 et de T2 pour un tissu de quelconque nature sain ou pathologique. Ces valeurs variant selon un nombre important de paramètres physiologiques comme la température, l’âge, le sexe, de paramètres physiques comme la valeur du champ B0, de l’homogénéité du champ B1 ou encore de la méthode de relaxométrie utilisée et de son paramétrage. Cependant, il est admis de donner une plage de valeurs de T1 ou T2 à une valeur de champ donnée pour un tissu sain ou pathologique. Certaines valeurs de T1 et T2 sont données en exemple dans le Tableau 1, issue de Stanisz et al., MRM, 2005 [15].

Figure 1-5 : Illustration de la repousse de Mz à gauche et de la décroissance de Mxy à droite pour deux tissus différents A et B.

Tableau 1: Exemple de valeur de temps de relaxation longitudinal et transversal issue de Stanisz et al., MRM, 2015 [15] 1,5T 3T T1 (ms) T2 (ms) T1 (ms) T2 (ms) CŒUR 1030 ± 34 40 ± 6 1471 ± 31 47 ± 11 SUBSTANCE GRISE 1124 ± 50 95 ± 8 1820 ± 114 99 ± 7 SUBSTANCE BLANCHE 884 ± 50 72 ± 4 1084 ± 45 69 ± 3 REINS 690 ± 30 55 ± 3 1194 ± 27 56 ± 4 FOIE 576 ± 30 46 ± 6 812 ± 64 42 ± 3 MUSCLE STRIE 1008 ± 20 44 ± 6 1412 ± 13 50 ± 4 SANG 1441 ± 120 290 ± 30 1932 ± 85 275 ± 50