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CHAPITRE 2 : SPECTROMÉTRIE DE MASSE ET DÉTECTION DE LA MATIÈRE

2.2 L A MISSION R OSETTA

2.2.4 L’expérience COSIMA

COSIMA est une expérience de spectrométrie de masse d’ions secondaires à temps de vol (TOF-SIMS) dont la vocation est de déterminer la nature chimique des grains éjectés par la comète 67P/CG. Elle est située sur l’orbiteur.

Le principe de cette expérience est d’exposer à la coma de la comète 67P/CG des cibles métalliques (Or, argent, platine…) sur lesquelles devraient venir s’impacter des grains cométaires à une vitesse de l’ordre de 100 m/s. Ces grains seront ensuite localisés à l’aide d’un microscope optique, puis analysés par le TOF-SIMS dont la gamme de travail est de 1 à 3500 Da et dont la résolution en masse est de 2000 à la FWHM du pic à m/z = 100 Da (Kissel et al., 2007). Un des objectifs principaux de COSIMA est d’identifier la composante organique des particules récoltées.

La Figure 23 représente un schéma de principe de l’instrument. COSIMA est constitué de plusieurs modules. Il comprend i) une aire de stockage pour 72 cibles, ii) un bras robotique permettant de déplacer les cibles entre chaque module, iii) une position de collecte où les cibles métalliques seront exposées à la coma et où les grains pourront venir s’impacter sur celles-ci, iv) un microscope optique (COSISCOPE) pour localiser les grains sur les cibles, v) un canon à ions dont le faisceau est pulsé et focalisé (canon à ions primaires ou PIBS (Primary Ions Beam System)), vi) un analyseur en masse (temps de vol) et aussi vi) une station chimique dans laquelle les cibles métalliques peuvent être chauffées jusqu'à 403 K.

Figure 23 : schéma de principe de COSIMA. Cette illustration est adaptée de Kissel et al (2007)

Afin de maximiser le nombre des grains cométaires collectés, certaines des cibles métalliques (or, argent, platine et palladium) de 1 cm2, ont été spécifiquement conçues pour

que leur surface soit poreuse et ainsi mieux retenir les particules qui viendront les heurter. Sur ces cibles de 0,5 mm d’épaisseur a été déposée une fine couche (~10 µm) de particules (du même métal que la cible) soit par évaporation à faible pression d’argon pour l’or et l’argent, soit par électrodéposition pour le platine et le palladium. Ces cibles, dont l’état de surface a été modifié, sont communément appelées noir d’or, noir d’argent etc. COSIMA contient 72 cibles, regroupées par 3, qui sont principalement des noirs d’or et d’argent. Le canon à ion primaire ou PIBS a été conçu et réalisé par le LPC2E. Son objectif est de produire un faisceau d'ions positifs d’indium. Pour cela il délivre : i) un faisceau modulé (impulsions d'ions de 3 ns avec 2000 ions par impulsion) et focalisé (30 µm) sur l'échantillon pour analyse, ii) un faisceau quasi continu pour le nettoyage de la surface des grains cométaires avant analyse si nécessaire.

Le choix de l’indium pour la source d’ions primaires s’est fait sur plusieurs critères :

- l’indium est un métal compatible avec une utilisation dans une source d’ions à effet de champ (principe choisi pour le PIBS).

- sa température de fusion (156°C) est suffisamment élevée pour garantir un état solide à température ambiante (ceci afin que la source d’ions ne soit pas détruite par les vibrations de la fusée lors du décollage). Cette température de fusion est également suffisamment basse pour être atteinte avec un chauffage électrique modeste (0,5 W) compatible avec une utilisation dans l’espace.

- il est chimiquement inerte (minimisation des problèmes de contamination). - il a une tension de vapeur faible pour qu’il ne s’évapore pas trop vite sous vide. - La source utilisée est quasiment mono-isotopique sous la forme enrichie en isotope

115 par rapport à la forme naturelle et est constituée de 99,9% de 115In (Kissel et al., 2007). Il n’y aura donc pas de dédoublement des pics du spectre de masse. En effet, si l’indium 113 était présent en quantité non négligeable dans la source. Etant donné qu’ils ont des masses différentes, les ions 113In+ et 115In+, présenteraient des temps de vol différents. Ceci entrainerait donc deux séries d’émissions d’ions secondaires à des temps différés et donc un dédoublement de tous les pics du spectre de masse.

Comparé aux spectromètres de masse embarqués sur les précédentes missions, COSIMA devrait nous apporter des informations plus précises quant à la nature des composés qui constituent les grains cométaires. En effet, sa résolution en masse est 10 fois meilleure que celle des spectromètres embarqués à bord des missions Stardust, Giotto et Vega. De plus, le matériau cométaire devrait être moins altéré par la vitesse d’impact comparée aux précédentes missions. En effet, elle était de l’ordre de 6, 69 et 78 km/s respectivement pour les missions Stardust, Giotto et Vega (Langevin et al., 1987; Brownlee et al., 2006).

2.3 Conclusion

COSIMA est l’un des instruments les plus adaptés pour l’étude de la matière organique carbonée réfractaire, d’intérêt notable en planétologie et exobiologie, présente dans les grains cométaires. En effet, contrairement aux autres spectromètres de masse à bord de Rosetta, il permettra de déterminer sans altération thermique préalable la nature des composés analysés.

L’objectif de ce travail de thèse est de préparer l’interprétation de la composante organique des spectres de COSIMA. Pour cela, des analogues de matière organique cométaire, notamment synthétisés au LISA et un grain de la météorite Murchison, seront analysés à

l’aide d’un spectromètre développé au LPC2E et semblable à l’instrument COSIMA. Pour faciliter l’interprétation de ces spectres, l’analyse de composés organiques purs sera dans un premier temps réalisée. Les échantillons analysés seront notamment préparés dans des conditions voisines de celles de la collecte par l’instrument en vol (impacts de grains solides sur des cibles métalliques).

L’identification de manière non-équivoque de substances particulières dans les spectres de masse de COSIMA ne sera pas évidente. La matière organique ne sera probablement pas la composante unique de ces grains. Elle sera probablement intégrée dans une matrice minérale. De ce fait, leurs signatures dans les spectres de masse ne seront pas forcément les plus intenses. De plus, si les grains cométaires sont constitués d’une multitude de composés, le problème d’identification de molécule particulière parmi une multitude d’autres signatures se posera, ainsi que ceux liés aux interférences en masse compte tenu de la résolution en masse de l’instrument. Il est donc intéressant de rechercher des méthodes, par exemple statistiques, permettant de déterminer la présence de molécules constituées d’atomes particuliers.

Le dernier volet de cette étude portera sur la capacité de COSIMA à détecter un composé d’intérêt particulier pour l’explication de la source distribuée du formaldéhyde : le polyoxyméthylène.

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