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L’ETAT D’URGENCE AU PRISME CONTENTIEUX

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L’état d’urgence au prisme contentieux : analyse transversale de corpus Stéphanie Hennette Vauchez

Maria Kalogirou Nicolas Klausser Cedric Roulhac Serge Slama Vincent Souty

Sommaire du chapitre :

Prolégomènes : L’état d’urgence comme phénomène juridique I - Profils de requérants

II - Typologie des mesures

III - Niveaux de contrôle juridictionnel

IV - Impact des choix procéduraux sur la garantie des droits V - L’état d’urgence dans la toile du pouvoir de police Conclusion

Prolégomènes: l’état d’urgence comme phénomène juridique

Si l’état d’urgence proclamé le 14 novembre 2015 et qui a pris fin le 1er novembre 2017 a été, pour les citoyens et acteurs sociaux, une réalité bien peu tangible (il ne se voit guère), c’est qu’il s’est agi principalement d’une réalité juridique627. Mais alors que l’état d’urgence de la fin de l’année 2005 n’avait donné lieu à aucune mesure individuelle et à une poignée d’arrêtés préfectoraux, cet état d’urgence 2015-2017 s’est incarné durant ces 715 jours sous état d’urgence628 dans plus de 10 000 mesures administratives prononcées sur le fondement de la loi du 3 avril 1955. Concrètement, ont été adoptées 4 444 perquisitions administratives, 754 arrêtés d’assignation à résidence, 656 interdictions de séjour, 59 zones de protection et de sécurité (ZPS), 39 interdictions de manifester, 29 fermetures de salles ou débits de boisson, 6 remises d’arme et 5 229 arrêtés autorisant des contrôles d’identité, fouilles de bagages et de véhicules629. Les statistiques existantes ne permettent pas de connaître le nombre de personnes concernées par ces mesures (une même personne peut en effet avoir fait l'objet de plusieurs arrêtés d'assignation mais aussi d'une ou plusieurs perquisitions voire d’interdictions de séjour), ni a fortiori le sexe ou le profil des personnes concernées par ces mesures (v.

cependant quelques éléments infra), ni encore leur ventilation par département ou commune.

627 D’où, certainement, comme on le lit dans l’avis rendu par la CNCDH le 26 janvier 2017 : « la difficulté éprouvée par la CNCDH et divers acteurs mobilisés en France et en Europe à être entendus sur la question des dangers que fait courir pour les droits de l’Homme l’inscription dans la durée de ce régime d’exception » ; en effet, l’état d’urgence ne produit que des effets bénins, neutres sur « la vie quotidienne de la très grande majorité ».

628 Maud Lena, « 715 jours sous l'état d'urgence », AJ Pénal, 2017 p. 464. Voir aussi la Une du Monde et le cahier spécial « Sortir de l’état d’urgence : Un an, 11 mois et 18 jours d’urgence », 1er – 2 novembre 2017 (qui évoque 719 jours d’état d’urgence).

629 Statistiques établies en agrégeant, non sans difficulté, les tableaux statistiques du contrôle parlementaire de l’état d’urgence

http://www2.assemblee-nationale.fr/15/commissions-permanentes/commission-des-lois/controle-parlementaire-de-l-etat-d-urgence/controle-parlementaire-de-l-etat-d-urgence

167 On sait uniquement que le rythme de l’état d’urgence a évolué dans le temps. Ainsi, s’agissant des perquisitions administratives, alors que 3 427 perquisitions avaient été effectuées au cours de la phase I de l’état d’urgence (du 14 novembre 2015 au 25 février 2016), dont 2 700 au cours du premier mois630, leur nombre a décru dans la phase suivante (du 26 février au 25 mai 2016) avec 167 perquisitions. Les perquisitions ont même été interrompues lors de la phase III de l’état d’urgence (du 26 mai au 21 juillet 2016), la 3ème loi de prorogation n’ayant pas autorisé le recours à l’article 11 de la loi du 3 avril 1955, du fait notamment d’une décision rendue par le Conseil constitutionnel en QPC et censurant partiellement le dispositif légal631. Dans la phase IV (22 juillet – 21 décembre 2016), la mesure a connu un regain d’intérêt avec 591 perquisitions ordonnées632 —avant de décroître à nouveau au cours de la dernière année (186 perquisitions au cours de la phase V de l’état d’urgence, du 22 décembre 2016 au 15 juillet 2017, et 73 dans la dernière phase, du 16 juillet 2017 au 1er novembre 2017).

S’agissant des assignations à résidence, leur rythme a été sensiblement différent, avec 350 arrêtés édictés dans première phase de l'état d'urgence (dont 268 encore en vigueur au 25 février 2016), 72 dans la phase II (68 étaient encore en vigueur au 25 mai 2016), 82 arrêtés dans la phase III (75 arrêtés encore en vigueur au 21 juillet 2016), 112 arrêtés dans la phase IV (91 encore en vigueur au 21 décembre 2016)633, 89 arrêtés dans la phase V (64 en vigueur au 15 juillet 2017) et moins d’une cinquantaine dans la phase V634 (41 encore en vigueur au 30 octobre 2017). Au 2 juin 2017, un total de 439 personnes auraient été assignées à résidence, pour un total de 708 arrêtés pris depuis le 14 novembre 2015635.

630 Rapport n° 220 (2016-2017) de M. Michel Mercier, fait au nom de la commission des lois, Sénat, 14 décembre 2016.

631 CC, n° 2016-536 QPC du 19 février 2016.

632 Chiffre issu des tableaux du contrôle parlementaire accessibles sur le site de l’Assemblée. Mais les chiffres varient d’un rapport à l’autre. Ainsi, le rapport Mercier évoque le chiffre de « 612 perquisitions administratives ont été ordonnées entre le 22 juillet et le 21 décembre 2016 » (Sénat, Rapport n° 591 de Michel Mercier, 2016-2017, Commission des lois, 28 juin 2017). Mais l’étude d’impact du projet de la loi sécurité intérieure et terrorisme (SILT) rapporte que le « nombre de perquisitions administratives, mesures qui constituent une source précieuse de renseignement ciblé, s'est élevé à 628 au cours de la quatrième phase de renouvellement (du 22 juillet au 21 décembre 2016) et a atteint 137 (au 26 mai) depuis le dernier renouvellement fin décembre dernier, portant ainsi le total de ces mesures à plus de 4 300, depuis le début de l'état d'urgence. Au total, 30 procédures judiciaires ont été ouvertes par la section anti-terroriste du parquet de Paris des chefs d'association de malfaiteurs avec une entreprise terroriste ou d'entreprise individuelle terroriste à la suite d'une perquisition administrative, que cette mesure ait ou non permis à elle seule de justifier l'ouverture de la procédure » (Etude d’impact, projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, NOR : INTX1716370L/Bleue-1, 20 juin 2017).

633 L’étude d’impact de la loi SILT évoque pour sa part « 115 arrêtés signés en phase IV (22/07/2016-21/12/2016) » dont « 88 arrêtés en vigueur à la fin de la phase IV ». Mais le tableau reproduit dans cette étude d’impact comporte des erreurs de date sur les différentes phases de l’état d’urgence…

634 Aucun rapport consulté ne comprend le nombre exact d’assignations dans cette seconde phase. Si on retient le chiffre (incertain) de 754 arrêtés d’assignation pour l’ensemble de l’état d’urgence, on peut évaluer à 49 le nombre d’arrêtés pris dans cette dernière phase.

635 Etude d’impact préalable au projet de loi sur la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, op. cit., p.

37.

168 Nombre total de personnes ciblées durant la première phase de l’état d’urgence636 Selon le rapport du contrôle parlementaire, ces sont au total 563 personnes qui ont fait l’objet d’une proposition d’assignation adressée par les préfets à la direction des libertés publiques et des affaires juridiques du ministre de l’Intérieur sur ce sujet. Dans le cadre de la COP21, la DLPAJ [direction des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l’Intérieur] en a rejeté 76 pour n’en garder finalement que 27, dont 15 n’ont pu être notifiées par les services aux personnes concernées.

Pour les autres assignations, la DLPAJ a rejeté 86 demandes, pour en garder au total 374 sur l’ensemble de la période. Au soir du 25 février 2016, cependant, 271 d’entre elles étaient en vigueur. Cette différence s’explique par le fait que 16 assignations ont été suspendues ou annulées par le juge administratif, 57 ont été retirées ou abrogées en cours de période, 24 bloquées avant même leur notification ; 6, enfin, n’ont pas été notifiées aux intéressés.

Moins médiatisés, les 5 229 arrêtés préfectoraux autorisant, par période de 24 heures, des contrôles d’identité, fouilles de bagages et visites de véhicules pour des motifs indéterminés ont, à l’inverse, été particulièrement utilisés dans la dernière année d’état d’urgence –à partir de leur légalisation par la loi du 21 juillet 2016 modifiant l’article 8-1 de la loi de 1955637. Les préfets ont dès lors multiplié ces arrêtés, avec 1 974 pris dans la phase IV (22 juillet 2016 au 21 décembre 2016), 2 327 arrêtés dans la phase V (22 décembre 2016 –15 juillet 2017) et 928 dans la phase VI (16 juillet 2017 au 1er novembre 2017) –donnant lieu à un nombre de contrôles individuels indéterminés638. Pourtant, ces contrôles, comme bien d’autres dispositifs issus de la loi de 1955 modifiée, se sont en définitive avérés contraires aux droits et libertés que la Constitution garantit : le Conseil constitutionnel a en effet invalidé les dispositions législatives les prévoyant, dès lors qu’elles ne font pas référence à des

« circonstances particulières » qui permettraient d’éviter « la pratique de ces opérationsde

636 Assemblée nationale, Rapport d’information n°4281 au nom de la Commission des lois sur le contrôle parlementaire de l’état d’urgence présenté par MM. Dominique Raimbourg et Jean-Frédéric Poisson, 6 décembre 2016.

637 Art. 8-1 loi de 1955 : « Dans les zones mentionnées à l'article 2 de la présente loi, le préfet peut autoriser, par décision motivée, les agents mentionnés aux 2° à 4° de l'article 16 du code de procédure pénale et, sous leur responsabilité, ceux mentionnés à l'article 20 et aux 1°, 1° bis et 1° ter de l'article 21 du même code à procéder aux contrôles d'identité prévus au huitième alinéa de l'article 78-2 dudit code, à l'inspection visuelle et à la fouille des bagages ainsi qu'à la visite des véhicules circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public ». Ces arrêtés, d’une durée de 24 heures maximum, s’enchaînent dans certaines préfectures sans discontinuer (V. par ex. à Paris : Arrêtés n°2017-00673 du 14 juin 2017, n°2°17-00668 du 13 juin 2017, n°2017-00666 du 12 juin 2017, n°2017-00660 du 11 juin 2017, etc., tous intitulés « autorisant les officiers de police judiciaire à procéder à des contrôles d’identité, à l’inspection visuelle et la fouille des bagages ainsi qu’à la visite des véhicules dans certains lieux de Paris ») … témoignant de l’effet d’aubaine que constitue, pour les autorités administratives, l’état d’urgence. En temps normal, de tels contrôles ne peuvent avoir lieu que sur réquisition du procureur (art. 78-2 du Code de procédure pénale) ; sous l’état d’urgence, c’est toute une palette de mesures de « sécurisation » qui sont édictées, sans souvent entretenir quelque lien direct que ce soit avec la lutte contre le terrorisme.

638 Aucune statistique officielle ne permet de savoir combien de contrôles d’identité, fouilles de bagages et inspections de véhicules ont été réalisés sur le fondement de ces arrêtés préfectoraux. Le rythme s’est accéléré depuis l’attentat de St Pétersbourg dans la mesure où le Préfet de Police a adopté d’avril à juin 2017, presque chaque jour (même le 17 avril 2017, jour où il a lui-même eu un accident de Vélib’) un arrêté avec des périmètres d’application variables mais souvent très étendus :

https://www.prefecturedepolice.interieur.gouv.fr/Nous-connaitre/Salle-de-presse/Arretes/Liste-des-arretes

169 manière généralisée et discrétionnaire »639. Autrement dit, des dizaines de milliers de contrôles d’identité, fouilles de bagages et inspections de véhicules, donnant lieu à un nombre indéterminé de procédures pénales ou administratives (éloignement d’étrangers en situation irrégulièrement principalement), ont ainsi eu lieu durant 18 mois en toute impunité…alors même qu’ils reposaient sur des fondements inconstitutionnels. A notre connaissance, hormis la QPC déposée par la Ligue des Droits de l’Homme, qui a eu la présence d’esprit de demander immédiatement l’annulation devant la TA de Paris du premier arrêté de ce genre pris par préfet de Police de Paris640, aucune contestation contentieuse de ces arrêtés, ou des décisions individuelles subséquentes, n’a eu lieu.

On évalue donc, sur la période concernée par la présente étude (14 novembre 2015 – 31 janvier 2017), à un peu plus de 7 500 le nombre d’actes administratifs pris sur le fondement de la loi du 3 avril 1955 - parmi lesquels, approximativement 2 000 arrêtés permettant fouilles, palpations et contrôles individuels. Il faut encore compter, pour appréhender dans sa globalité l’état d’urgence comme phénomène juridique, et du fait d’un effet de halo ou de contamination, avec plusieurs centaines d’autres décisions administratives des autorités publiques adoptées formellement en dehors de l’état d’urgence (ie. Sans avoir la loi du 3 avril 1955 comme base légale), mais justifiées par celui-ci ou son contexte.

Ce corpus d’environ 7 500 décisions individuelles est matériellement et juridiquement impossible à connaître directement. Ces quelques milliers de décisions constituent, en effet, des actes administratifs souvent individuels, souvent défavorables et pris dans le cadre d’une activité de police administrative pour des raisons tenant à l’ordre et la sécurité publics. Ils sont à ce titre non publics et non accessibles aux chercheurs du temps présent. Tout au plus aurait-il été possible d’accéder à un échantaurait-illon, pas nécessairement représentatif de ces décisions, en consultant les dossiers détenus par les principales associations de défense des personnes concernés par l’état d’urgence (à l’instar, notamment, du CCIF641 et de ADM642) et de leurs avocats. Mais il aurait été difficile, dans ces conditions, de prétendre proposer une étude de l’état d’urgence comme phénomène juridique saisi dans sa globalité et la diversité de ses manifestations. Seule la consultation des dossiers individuels détenus par le service juridique du ministère de l’intérieur permettra aux historiens, dans de nombreuses décennies, de le faire.

Dans ces conditions, le travail proposé ici, qui repose sur l’analyse exhaustive du contentieux administratif (à défaut d’avoir pu accéder aux décisions rendues par les juridictions pénales) généré par l’état d’urgence entre novembre 2015 et janvier 2017. Certes,

639 CC., décision n° 2017-677 QPC du 1er décembre 2017, Ligue des droits de l'Homme [Contrôles d'identité, fouilles de bagages et visites de véhicules dans le cadre de l'état d'urgence]. Cette censure est purement platonique dans la mesure les effets de l’abrogation de ces dispositions ont été reportés, sans motivation, au 30 juin 2018 (sur ce point, V. dans le présent volume : Véronique Champeil-Desplats, « L’état d’urgence devant le Conseil constitutionnel, ou quand l’Etat de droit s’accommode de normes inconstitutionnelles », supra).

640 V. la décision du Conseil d’Etat de renvoi de cette QPC du 22 septembre 2017 (n° 411771) qui évoque la demande de la Ligue des droits de l’Homme « tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 6 avril 2017 du préfet de police autorisant les officiers de police judiciaire à procéder à des contrôles d'identité, à l'inspection visuelle et la fouille des bagages ainsi qu'à la visite des véhicules dans les transports en commun de voyageurs par voie ferrée de Paris ».

641 Collectif contre l’Islamophobie en France.

642 Action droit des Musulmans.

170 il souffre sans aucun doute d’un biais contentieux dont on mesure l’importance ; mais ce dernier est inévitable, en ce sens qu’il est apparu impossible de procéder autrement. Charles Vautrot-Schwartz peut bien, en ce sens, appeler à « dépasser le tropisme contentieux »643 en rappelant les mots de Rivero644 ; reste qu’on voit mal quelles autres options s’offrent à l’analyste dans l’état actuel du droit s’agissant de l’accès à un myriade de décisions individuelles de police et des défaillances de la statistique publique relative à l’état d’urgence.

Le présent travail est donc présenté en pleine conscience du biais induit par le fait que l’état d’urgence dont il est question ici ne correspond en réalité qu’à cette petite part de l’état d’urgence qui a suscité des recours contentieux devant le juge administratif. En l’occurrence, le corpus analysé pour les besoins de la présente étude est constitué de 775 décisions. On estime qu’il correspond à environ 10% des mesures prises dans le cadre de l’état d’urgence dans la période considérée.

A - Présentation du corpus d’analyse

Le corpus d’analyse a été constitué grâce à une convention de mise à disposition de la base de jurisprudence interne (non anonymisée) aux juridictions administratives signée entre le CREDOF en charge de l’étude et le Conseil d’Etat645. Plusieurs visites au Centre de recherche et de documentation juridique (CRDJ) nous ont donc permis, via la base Ariane Archive, de collecter juridiction par juridiction, une par une, toutes les décisions disponibles sur cette base en les identifiant d'une part par le mot-clef « loi n°55-385 » (qui, normalement, figure dans tous les visas des décisions rendues sur le fondement de la loi du 3 avril 1955), et d'autre part les mots-clefs « état d'urgence SANS loi n°55-385 », qui nous ont permis de collecter plus largement des décisions rendues dans le contexte de l'état d'urgence ou par la justification de celui-ci, mais sans que le recours ainsi ajouté à notre corpus ait été, stricto sensu, formé contre une mesure prise sur le fondement de la loi de 1955. De cette manière, nous avons pu intégrer à l’étude des mesures telles que des décisions de retrait de carte professionnelle, des interdictions de sortie de territoire du territoire (IST), de gel des avoirs, de placement sous vidéosurveillance 24h/24 d’un détenu ou des arrêtés d’expulsion d’étrangers, de même que, par exemple, des interdictions de déplacements de groupes de supporters... autant de mesures administratives qui, sans trouver leur fondement juridique dans les dispositions de la loi du 3 avril 1955, ont été justifiées par l’autorité administrative par référence à « l’état d’urgence » ou même, parfois, ont été contestées par l’invocation du contexte de l’état d’urgence.

La période retenue pour notre étude s'étend des décisions rendues par les juridictions administratives générales (tribunaux administratifs, cours administratives d’appel et Conseil

643 Charles Vautrot-Schwartz, « L’état d’urgence et la science du droit administratif », AJDA, 2017, p. 833.

644 Jean Rivero écrivait ainsi : « seul le hasard du recours amène à la lumière la situation sur laquelle celui-ci porte : la résolution d'un plaideur, son humeur, tiennent en suspens, en définitive, la réflexion de la doctrine, ainsi condamnée à ne s'exercer que sur des cas limites, de caractère pathologique, et à ignorer le plerumque fit. Une matière sans contentieux risque fort de demeurer, pour la science du droit administratif, terre inconnue. Aussi ne peut-on parfois se défendre du sentiment que, sous la mince pellicule du contentieux, le flot de la vie administrative continue de couler, et que l'effort de l'analyse doctrinale risque de bâtir une sorte de citée irréelle, cependant que la vraie cité des hommes s'édifie sans elle », cité par Charles Vautrot-Schwartz, ibid.

645 Nous saisissons l’occasion de la rédaction de la présente étude pour exprimer notre vive gratitude à M.

Martinie pour la confiance ainsi témoignée vis à vis de notre équipe de recherche, ainsi qu’à l’ensemble des membres du CRDJ du Conseil d’Etat leur aide et leur accueil.

171 d’Etat)646 du 14 novembre 2015, date d'entrée en vigueur de l'état d'urgence proclamé par le décret du même jour647, et le 31 janvier 2017, date correspondant à la publication d'un bilan officiel chiffré de l’état d’urgence, transmis par le Conseil d'Etat à la CNCDH et publié par cette dernière dans son avis du 26 janvier 2017 sur le suivi de l'état d'urgence648.

Le corpus ainsi constitué rassemble un total de 775 décisions de justice, dont 703 jugements ou ordonnances de tribunaux administratifs, 25 arrêts de Cours administratives d’appel et 47 arrêts ou ordonnances rendus par le Conseil d’Etat649. Il importe de préciser que la base Ariane archive n’est pas pleinement exhaustive et qu’elle n’est pas toujours bien alimentée par les juridictions administratives. Elle n’est pas exhaustive car ne doivent y être versées que les décisions rendues à l’issue d’une audience (ordonnances de juge des référés ou jugements ou arrêts rendus en formation collégiale) –à l’exclusion des ordonnances dites de « tri » rendues, hors audience, par les présidents en raison d’une irrecevabilité650. Elle est également mal alimentée par les juridictions administratives, ou parfois alimentée avec un décalage temporel. Nous avons d’ailleurs pu nous-même nous rendre compte du fait que certaines décisions étaient manquantes. Ainsi, par exemple, interrogés par des journalistes sur certains dossiers, nous avons pu constater que les décisions qu’ils avaient obtenues directement par les avocats des intéressés (par exemple : TA de Lille, 1er décembre 2016, n°1606191651 et CE, réf., 7 décembre 2016, n°404984652) n’avaient pas été versées sur la base Ariane archive alors qu’elles auraient dû l’être653. Nous avons également pu constater que le rythme d’alimentation de la base varie d’un TA ou d’une CAA à l’autre, de sorte qu’il nous a été impossible de garantir qu’à une date d, toutes les décisions étaient effectivement rassemblées dans notre corpus. Nous avons, cependant, tenté de pallier cet aléa au mieux, en complétant régulièrement notre corpus par plusieurs visites jusqu’au printemps 2017654 afin d’intégrer les décisions qui, rendues avant le 31 janvier 2017, auraient été versées à la base de données avec retard. Ces visites complémentaires nous ont également permis d’insérer à

Le corpus ainsi constitué rassemble un total de 775 décisions de justice, dont 703 jugements ou ordonnances de tribunaux administratifs, 25 arrêts de Cours administratives d’appel et 47 arrêts ou ordonnances rendus par le Conseil d’Etat649. Il importe de préciser que la base Ariane archive n’est pas pleinement exhaustive et qu’elle n’est pas toujours bien alimentée par les juridictions administratives. Elle n’est pas exhaustive car ne doivent y être versées que les décisions rendues à l’issue d’une audience (ordonnances de juge des référés ou jugements ou arrêts rendus en formation collégiale) –à l’exclusion des ordonnances dites de « tri » rendues, hors audience, par les présidents en raison d’une irrecevabilité650. Elle est également mal alimentée par les juridictions administratives, ou parfois alimentée avec un décalage temporel. Nous avons d’ailleurs pu nous-même nous rendre compte du fait que certaines décisions étaient manquantes. Ainsi, par exemple, interrogés par des journalistes sur certains dossiers, nous avons pu constater que les décisions qu’ils avaient obtenues directement par les avocats des intéressés (par exemple : TA de Lille, 1er décembre 2016, n°1606191651 et CE, réf., 7 décembre 2016, n°404984652) n’avaient pas été versées sur la base Ariane archive alors qu’elles auraient dû l’être653. Nous avons également pu constater que le rythme d’alimentation de la base varie d’un TA ou d’une CAA à l’autre, de sorte qu’il nous a été impossible de garantir qu’à une date d, toutes les décisions étaient effectivement rassemblées dans notre corpus. Nous avons, cependant, tenté de pallier cet aléa au mieux, en complétant régulièrement notre corpus par plusieurs visites jusqu’au printemps 2017654 afin d’intégrer les décisions qui, rendues avant le 31 janvier 2017, auraient été versées à la base de données avec retard. Ces visites complémentaires nous ont également permis d’insérer à

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