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Discussion/Conclusion générale

2) L’estradiol traitement du SAOS ou de ses conséquences systémiques ?

2.1) Estradiol et apnées du sommeil

Le stress oxydatif est l’une des caractéristiques majeures du SAOS chez l’homme (Barceló et al., 2000; Lavie et al., 2004) et chez les modèles animaux exposés à l’HI (Prabhakar et al., 2007b, 2015, Peng et al., 2014, 2006; Morgan et al., 2016b). Nos résultats rapportent que le traitement avec de l’estradiol réduit le stress oxydatif en stimulant les défenses antioxydantes (SOD et GPx), en réduisant l’activité de la NOX et en régulant la chaîne respiratoire mitochondriale. Ces résultats sont en accord avec le rôle de l’estradiol comme puissant

129 antioxydant qui a été trouvé chez l’animal (El Habachi et al., 2014; Moorthy et al., 2005) et chez l’homme (Bellanti et al., 2013; Signorelli et al., 2006). La première hypothèse de cette thèse était de montrer qu’en réduisant le stress oxydatif induit par l’HI, on réduirait les conséquences associées, c’est-à-dire l’augmentation de la réponse ventilatoire à l’hypoxie et l’élévation de la pression artérielle systémique. Notre traitement réduit bien ces deux variables et suggèrent fortement que cet effet dépend de la baisse du stress oxydatif comme déjà mentionné dans plusieurs études utilisant des antioxydants (Del Rio et al., 2010; Peng et al., 2009; Peng and Prabhakar, 2003). Notre traitement réduit également de façon assez drastique la survenue d’apnées (apnées post-soupir et spontanées) qui était augmentée par l’HI. L’augmentation du nombre d’apnées en réponse à un protocole d’HI est un phénomène connu (Edge et al., 2012), l’hyperventilation liée à l’augmentation d’activité des chémorécepteurs périphériques diminue la pression partielle en CO artérielle sous le seuil apnéique, induisant l’apparition d’apnées (Prabhakar, 2001). Il se produit un cercle vicieux, où l’HI qui est utilisée pour mimer les apnées du sommeil provoque une augmentation de la survenue d’apnées du sommeil (figure V.1A). L’estradiol permet de réduire l’augmentation des apnées induites par l’HI soit (i) par ses effets antioxydants ou (ii) en tant que stimulant respiratoire.

L’hypothèse la plus probable passe par les effets antioxydants de l’estradiol. En effet, notre première étude rapporte que l’estradiol réduit la réponse ventilatoire à l’hypoxie qui était augmentée par l’exposition à l’HI. De nombreuses preuves suggèrent que l’élévation de la réponse ventilatoire à l’hypoxie conduit à l’augmentation de l’activité sympathique causée par l’élévation du stress oxydatif dans le corps carotidien (Prabhakar et al., 2007b; Prabhakar and Kumar, 2010)

En réduisant l’activité sympathique, probablement par ses effets antioxydants, l’estradiol réduit l’élévation de la pression artérielle systémique et l’apparition des apnées. Par conséquent, l’estradiol est capable de couper le cercle vicieux créé par l’HI (figure V. 1B). Les études chez la femme ménopausée rapportent également que les femmes ayant la prévalence de survenue de SAOS la plus élevée sont celles ayant un niveau d’estradiol le plus faible dans le sang (Galvan et al., 2017; Netzer et al., 2003). Ces données soutiennent donc fortement l’hypothèse que la ménopause, par le déclin de l’estradiol, conduit donc bien à une augmentation de la survenue du SAOS qui par la suite aboutit à des conséquences cardiovasculaires, métaboliques et neurologiques (Bixler et al., 2001; Young et al., 2003). Ainsi, l’estradiol peut être une thérapie efficace contre l’apnée du sommeil d’une part et contre les conséquences de l’apnée du sommeil d’autre part.

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Figure V.1 : Cercle vicieux induit par l’exposition en hypoxie intermittente

2.2) Estradiol et activité sympathique

Toutefois, notre étude n’évalue pas directement l’activité sympathique, mais un reflet de l’activation des chémorécepteurs périphériques avec la réponse ventilatoire à l’hypoxie. Nous ne sommes pas en mesure de dire directement que dans notre modèle, l’augmentation des apnées induite par l’HI est la cause d’une augmentation de l’activité des chémorécepteurs périphériques et que le traitement à l’estradiol réduit l’activité du chémoréflexe et par conséquent les apnées et l’élévation de pression artérielle. La ménopause chez la femme se traduit par une augmentation de l’activité sympathique et de la pression artérielle (Burt et al., 1995). Le traitement estrogénique transdermique pendant 8 semaines réduit l’activité sympathique et l’élévation de pression artérielle (Vongpatanasin et al., 2001). L’association avec de la progestérone ne produit pas une plus grande diminution de la pression artérielle

(Seely et al., 1999) suggérant que l’effet protecteur contre l’augmentation de l’activité sympathique est liée seulement à l’estradiol.

L’hypoxie intermittente induit une altération du chémoréflexe qui conduit à l’augmentation de l’activité sympathique, à l’élévation de la pression artérielle et à l’apparition d’apnées (A). Ce cercle vicieux induit par l’HI peut être coupé par le traitement à l’estradiol (B).

131 Dans le tronc cérébral, des sites sympathoexcitateurs sont localisés dans le bulbe rostral ventrolatéral (RVLM) (Sunderram and Androulakis, 2012). Il a été rapporté que chez le rat, la micro-injection bilatérale d’estradiol dans la RVLM réduit la pression artérielle systémique par une diminution du tonus vasomoteur neurogène sympathique. Cette diminution est médiée par le récepteur de l’estradiol β (ERβ) et non α (ERα) (Shih, 2009). L’HI est connue pour augmenter l’activité des zones responsables de la sympathoexcitation localisées dans la RVLM (Greenberg et al., 1999). On peut penser que notre traitement estrogénique réduit totalement ou partiellement l’activité de ces zones sympathoexcitatrices qui se répercute par une diminution de la pression artérielle. Afin de valider cette hypothèse, des expériences évaluant l’activité des régions adrénergiques A1 et C1 de la RVLM pourraient être entreprises.

Le modèle que l’on peut suggérer lors de la ménopause est que le déclin du niveau d’estradiol aboutit à :

Une augmentation du stress oxydatif, qui augmente la sensibilisation des corps

carotidiens, qui se traduit par l’augmentation de l’activité sympathique (élévation de pression artérielle) et l’apparition d’apnées du sommeil.

Une augmentation de l’activité des zones sympathoexcitatrices dans la RVLM qui

conduit également à une augmentation de la pression artérielle.