• Aucun résultat trouvé

Chapitre 3 : MÉTHODOLOGIE

3.3 L’entrevue

La « préconstruction du champ par le chercheur » (Legrand, 1993, p.200), c'est-à- dire, l’élaboration des consignes d’entretien s’est articulée avec la théorie des parcours de vie ainsi qu’avec les notions de l’approche biographique. En effet, les thèmes ont été définis en lien avec les trois principes retenus de la théorie des parcours de vie : la

42

temporalité, l'interrelation et l'intentionnalité. On a bien remarqué que le développement de l’identité de la plupart des individus a été sujet à des changements au cours de leurs vies et ne s’est pas figée à 18 ans. La temporalité fut au cœur de l'outil utilisé avec les participants, lors des entretiens, puisque le souvenir ou la mémoire est basé sur la diachronie des événements. De plus, le principe d'interrelations a été abordé par les participants lors de leur récit de vie puisqu'il était question non seulement de leur histoire singulière, mais de tout ce qui les a affectés dans leurs réseaux sociaux respectifs. Finalement, l'intentionnalité a été observée à travers les stratégies adaptatives ou défensives utilisées afin de faire face aux situations de travail n'étant pas favorables.

Selon certains auteurs, il est difficile d’imaginer pouvoir recueillir un récit de vie en un seul entretien d’une heure. Puisque le récit de vie n’est pas qu’une simple transmission d’informations d’un narrateur à une autre personne, ce procédé peut prendre du temps. De plus, puisqu’il est question de thèmes personnels et parfois sensibles, le narrateur ne doit pas ressentir de pression à communiquer ces informations et doit pouvoir aller à son rythme afin de pouvoir atteindre une « épaisseur réflexive » (Legrand, 1993, p.201). Néanmoins, les entretiens ne doivent pas être trop nombreux afin de ne pas dépasser outre mesure la saturation théorique du thème à l’étude. Legrand (1993) explique que le nombre de séances doit rester relativement indéterminé, afin de disposer d’une marge de manœuvre au besoin.

Répondant à des limitations temporelles, nous avons fixé le nombre de rencontres à une seule par participant, en accordant une plus grande marge de manœuvre au niveau de la durée des entretiens afin de permettre au participant d’aller à son rythme. Nous avons fixé, pour la présente recherche, un temps d’une heure trente minutes pour l'entretien avec une possibilité de se rendre jusqu’à deux heures au besoin. Une pause de quelques minutes était possible durant l’entretien, si le participant le désirait. En effet, dans la littérature, il est question d’environ une heure à une heure et quart par rencontre (Legrand, 1993). Une fin d’entretien la plus naturelle possible est privilégiée afin que le participant ne se sente pas brimé dans le partage de son vécu.

43 En ce qui a trait au nombre de participants à rencontrer, la littérature sur le sujet n’est pas précise. En effet, certains affirment qu’un unique récit de vie ne donne pas matière à l’élaboration d’un travail à portée scientifique (Lejeune, 1980 dans Legrand, 1993). Cette opinion est nuancée puisque selon Legrand (1993), il peut y avoir une recherche pertinente basée sur le récit de vie d’un seul participant. Toutefois, selon lui, les études sur les récits de vie utilisent habituellement plusieurs récits donc impliquent de rencontrer plusieurs participants. Certains auteurs affirment que l’établissement à priori d’un nombre de récits à recevoir (c'est-à-dire le nombre de personnes à rencontrer) est difficilement prévisible et selon ses dires, le chercheur devrait plutôt fixer un nombre initial de participants et celui-ci pourra être augmenté ou diminué en cours de la recherche, selon l’atteinte ou non de la saturation théorique (Legrand, 1993). Cette dernière est présente lorsque les informations ajoutées par les participants ne permettent plus d’augmenter la compréhension de la problématique à l’étude (Savoie-Zajc, 1996). Aux fins de cette recherche et en réponse à des contraintes temporelles, nous avons établi à 20 le nombre de participants à rencontrer. Par contre, après la 17e entrevue, nous avons constaté que les nouveaux récits ne semblaient plus ajouter d’informations permettant une meilleure compréhension de la problématique. Deux autres entrevues ont tout de même été effectuées afin de valider cette saturation théorique. Avec l’accord de la chercheure et des codirecteurs, le nombre d’entrevues s’est donc arrêté à 19 répondants.

Le récit de vie est une méthode qui utilise la non-directivité lors des entrevues. Legrand (1993), affirme : « il n’est de récit de vie que lorsque le narrateur prend sur lui le récit » (p. 199). Toutefois, l’interlocuteur ne reste pas entièrement non directif, puisqu’il lui arrivera à l’occasion de poser des questions afin de mieux comprendre le discours. De plus, il peut également inviter le narrateur à aborder certains thèmes plus précis auxquels celui-ci ne se serait peut-être pas attardé autrement. Ainsi, la « préconstruction du champ par le chercheur » (Legrand, 1993, p.200) est constatée à travers la production d’un guide d’entretien. Dans la présente recherche, il s’agit plutôt de consignes d'entretien. Ces

44

dernières permettent de diriger l’entrevue de façon souple et dans l’unique but d’organiser le récit. Le chercheur adopte une position d'apprentissage envers le participant.

3.3.1 Le déroulement de l’entrevue

Le formulaire de consentement (Annexe B, p.113) a été lu avec le participant dans un premier temps. Ce dernier a été informé que s'il ressentait le besoin de recevoir du soutien à la suite de l'entretien, la chercheure pouvait le référer à des ressources pertinentes au sein de l’organisme ou à l’externe. Les consignes d'entretien ont été par la suite expliquées au participant. Ces consignes contenaient des informations pertinentes sur la façon de construire son récit de vie selon les trois lignes de vie. Ainsi, une grande feuille a été remise au participant sur laquelle il pouvait indiquer, à l’aide de crayons de couleur, les événements de sa vie selon les trois lignes retenues : l’histoire d’abus physiques et sexuels, l’histoire de consommation menant à la dépendance et l’histoire professionnelle.

Documents relatifs