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Depuis quelques décennies, la recherche sur l’orientation entrepreneuriale (OE) s’illustrait

comme une piste de grande importance. Couramment utilisée dans la littérature de

recherche en stratégie et en entrepreneuriat, l’OE apparaît comme un construit scientifique

rigoureux et solide à partir duquel a pu s’élaborer un corps de connaissances cumulé et

stable. En attestent les nombreuses conférences sur le sujet et sa forte présence dans les

meilleurs journaux scientifiques des domaines de la stratégie et de l’entrepreneuriat

(Strategic Management Journal, Management Science, Journal of Management Studies, Academy of

Management Journal, etc.), explicitement consacrés à cette thématique depuis plus de vingt ans

(Rauch et al.2004).

Dans cette recherche, le concept d’OE est utilisé pour se référer à un mode particulier de la

stratégie, dans lequel l’entreprise montre une certaine attitude entrepreneuriale. Cela est

aussi cohérent avec la littérature sur l’entrepreneuriat organisationnel et le management

stratégique qui considère que le processus de la prise de stratégie entrepreneuriale est un

mode spécifique de la prise de stratégie (cf. Dess et al. 1997; Dess et Lumpkin, 2001).

Dans ce qui suit, nous essayerons d’introduire le concept de l'entrepreneuriat

organisationnel et d’expliquer son importance pour la survie et la croissance dans un

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environnement changeant. Ensuite, la notion d’OE sera expliquée avec une discussion sur

ses différentes conceptualisations. Cela nous permettra de présenter les mérites de ce concept

qui a pu avoir une place conceptuelle centrale en entrepreneuriat comme en management

stratégique et en aborder certains aspects sujets de controverses dans le débat scientifique.

Sous-section 1- La réintégration de l’entrepreneuriat dans les débats du management

stratégique

Les domaines de la stratégie et l’entrepreneuriat semblent être concernés par des questions

de recherche différentes. Alors que le management stratégique est principalement concerné

par les performances via la construction de l’avantage concurrentiel (Barney, 1991), la

recherche sur l’entrepreneuriat se concentre sur la nature des opportunités entrepreneuriales

et les entrepreneurs qui les découvrent ou les créent (Davidsson, 2004). Néanmoins, les deux

domaines partagent le même objectif ultime qui est la compréhension de la croissance et la

création de richesses (cf. Irlande, Hitt, et Sirmon, 2003).

Sur le plan pratique, des facteurs comme l’incertitude, le caractère changeant de

l’environnement et l’impératif innovation, ont justifié l’intégration de l’entrepreneuriat aux

débats de stratégie. Les chercheurs du management stratégique semblent utiliser de plus en

plus d'éléments du domaine de la recherche en entrepreneuriat afin de mieux expliquer la

performance des entreprises. Le rapprochement entre les deux domaines a donné lieu à des

concepts nouveaux, comme l’entrepreneuriat stratégique, l’entrepreneuriat organisationnel,

stratégie entrepreneuriale, orientation entrepreneuriale, posture entrepreneuriale, etc.

L’entrepreneuriat stratégique désigne la complémentarité des domaines (Hitt et al, 2001; 2002

et Irlande et al, 2003.). L’entrepreneuriat stratégique se définie comme «une action

entrepreneuriale avec une perspective stratégique » (Hitt et al, 2001 : p. 480). En outre, il peut être

considéré comme « l’intégration des perspectives entrepreneuriale (i.e. opportunity-seeking

behaviour) et stratégique (i.e. advantage-seeking behaviour) dans le développement des actions

organisationnelles » (Hitt et al, 2001: p. 481). Guth et Ginsberg (1990) voient dans

l’entrepreneuriat organisationnel un aspect de l’entrepreneuriat étudiant l’identification et

l’exploitation des opportunités par les entreprises existantes dans un but de renouvellement

organisationnel et stratégique.

L’entrepreneuriat consiste pour une entreprise en l’ensemble des processus de poursuite de

l’opportunité sans tenir compte des ressources contrôlées (Stevenson et Jarillo, 1990) ou

encore l’ensemble des comportements organisationnels basés sur une posture stratégique de

! ! ! &(!!

poursuite des opportunités (Covin et Slevin, 1991; Lumpkin et Dess, 1996; Zahra, 1993).

Ainsi, les opportunités deviennent objet des stratégies entrepreneuriales des organisations.

À une époque où les cycles de vie des produits se raccourcissent, où les frontières de

l'industrie sont en continuelle transformation et où les avantages concurrentiels deviennent

de moins en moins durables, l’OE semble être un concept utile qui répond à un besoin tant

théorique que pratique. Il permet de comprendre pourquoi et comment certaines entreprises

sont capables de se renouveler régulièrement via de nouvelles trajectoires de croissance

tandis que d'autres n’y arrivent pas (Morris, Kuratkoet Covin, 2011).

La nature continue de l’OE ou de ses dimensions permet d’analyser l’intensité de l’activité

entrepreneuriale au niveau de l’entreprise. Ainsi, l'existence d’un construit comme l'OE

donne aux chercheurs un indicateur commun ou un ensemble de mesures à travers

lesquelles les niveaux d'entreprenariat pourraient être évalués. Ceci est important du fait que

les actes entrepreneuriaux observés dans la pratique varient considérablement d'une

entreprise à une autre.

Par voie de conséquence, l’OE a pu combler une lacune importante dans la littérature sur

l'entrepreneuriat organisationnel en offrant la possibilité d’examiner et de comparer les

entreprises en termes d’actes entrepreneuriaux. Dans un article sur l’OE dans la revue

« Entrepreneurship Theory and Practice », Covin et Lumpkin(2011) font référence à une

recherche thématique

12

sur l'expression «orientation entrepreneuriale» révélant que jusqu’à

la fin de 2010, le concept a été mentionné dans 256 articles de revues scientifiques. 109 de ces

256 articles ont été publiés entre Janvier 2008 et Décembre 2010. De même, sur la même

période, l'expression «Corporate entrepreneurship » a été mentionnée dans 242 articles, dont 66

publiés entre Janvier 2008 et Décembre 2010. Cela montre que la recherche se développe à un

rythme croissant sur l’OE, considéré ainsi comme un construit de grande valeur dans le

débat scientifique en management stratégique et en entrepreneuriat organisationnel.

Malgré l’attention qu’a reçu l’OE et les progrès conceptuels et empiriques qui ont été

accomplis grâce aux nombreuses recherches, il est clair que le débat sur les antécédents, les

conséquences et la mesure de l’OE est loin d’être conclu (Walter, Auer, et Ritter, 2006 ;

Cherchem et Fayolle, 2008; Rauch et al, 2009 ; Miller, 2011).

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Les chercheurs reconnaissent souvent les différences et les difficultés de conceptualisation et

d’opérationnalisation du construit de l’OE (Covin, Green et Slevin, 2006; Lumpkin et Dess,

1996) comme en témoigne l'absence de consensus sur des questions telles que la nature du

construit, sa définition, ses dimensions ou encore ses déterminants et ses répercussions.

Dans un article retraçant l’histoire d’évolution du concept, Basso et Fayolle (2009) stipulent

que l’OE couramment utilisée dans la littérature de recherche en stratégie et en

entrepreneuriat, semble constituer l’un des rares exemples de concept stabilisé en sciences de

gestion mais une relecture attentive du corpus des principaux textes de références appelle à

un examen rigoureux de la notion même. Néanmoins, comme le soulignent Covin et

Lumpkin (2011), il est aussi facile de trouver des chercheurs tant à l'intérieur qu'à l'extérieur

de la communauté des chercheurs s’intéressant à l’OE et qui expriment régulièrement leur

inquiétude quant à la signification perçue (soit théorique ou pratique) de la recherche

"typique" sur le concept.

Sous-section 2- La genèse du concept

Après avoir été limitée à un niveau individuel, incarné en l’entrepreneur et la création

d’entreprise, la recherche en entrepreneuriat s’est développée depuis les années 80 en

abordant le phénomène entrepreneurial à un niveau organisationnel et en donnant plus

d’importance aux processus entrepreneuriaux.

Depuis, l’entrepreneuriat ne se réfère pas seulement à la création de nouvelles entreprises,

mais aussi au lancement de nouvelles activités innovantes (développement de nouveaux

produits/services, nouvelles technologies, nouvelles techniques administratives, etc.) et

l’orientation vers des actions compétitives effectuées d’une manière agressive et proactive

pour rivaliser avec les concurrents (Covin et Slevin, 1991; Lumpkin et Dess, 1996).

Alternativement à l’entrepreneuriat, la notion de l’OE est conçue alors comme une

disposition ou un comportement favorisant l'activité entrepreneuriale dans une entreprise

établie. L’OE représente pour Lumpkin (2011) ce que signifie pour une entreprise d'être

entrepreneuriale au niveau le plus fondamental.

Permettant ainsi de se prononcer par rapport à l’intensité de l’activité entrepreneuriale dans

une entreprise, l’OE semble combler une lacune importante dans la littérature sur

l'entrepreneuriat organisationnel et répondre à un besoin pratique. L’OE est le concept qui

renferme théoriquement ces facteurs nécessaires (Miller, 1983) ou pertinents (Lumpkin et

Dess, 1996) pour marquer une entreprise comme entrepreneuriale. Ceci dit, l’entrepreneuriat

! ! ! &*!!

n’est pas simplement positionné comme un acte discret qui peut ou non se produire au sein

des entreprises, mais comme un attribut des entreprises en soi.

En fait, il y a un large accord sur le fait de considérer l’OE comme une variable continue ou

composée d’un ensemble de variables continues (en fonction de la conceptualisation

adoptée) sur laquelle toutes les entreprises peuvent être représentées. L’OE reflète une

propension de prise de décision organisationnelle (organizational decision-making) favorisant

les activités entrepreneuriales (Lumpkin et Dess, 1996), et représente une variable continue

(ou un ensemble de variables) permettant de placer toutes les organisations tout au long d'un

continuum conceptuel allant de conservatrices (the “low” end) à entrepreneuriales (the “high”

end)(Barringer et Bluedorn, 1999; Covin et Slevin, 1988). Ceci est important parce que les

actes entrepreneuriaux observés dans la pratique varient considérablement d'une entreprise

à une autre. L’OE permet de distinguer une organisation entrepreneuriale comme étant

opposée à une organisation bureaucratique et partant de là, c’est un concept qui peut

répondre à des besoins plus pratiques (Randerson et Fayolle, 2012). Covin et Wales (2012)

estiment que le caractère répandu du concept de l’OE dans les recherches antérieures

s’explique par le fait que l’orientation vers les activités entrepreneuriales a été objet d’analyse

des organisations indépendamment de leurs âges, leurs tailles, leurs caractères publics ou

privés, etc.

Les travaux de l’école canadienne constituent l’origine du concept. Depuis le travail séminal

de Miller (1983) « The correlates of entrepreneurship in the three types of firmes » (publié dans la

revue Management Science, 1983), la recherche sur l’OE a connu une progression considérable.

Pendant ces trois décennies, il y a eu des efforts de clarification (notamment de Lumpkin et

Dess, 1996) distinguant l’entrepreneuriat de l’OE. Ainsi, l’entrepreneuriat se réfère au

contenu des résultats telles que la création d’une entreprise, la conquête d’un nouveau

marché, le lancement d’un nouveau produit/ service ; alors que l’OE se réfère, quant à elle,

au processus menant à ces résultats. Il s'agit alors d'une avancée importante séparant le

«Quoi» (the What) du «Comment» (the how). Depuis, la plupart des recherches traitent l’OE

comme le processus comportemental des entrepreneurs pour créer une "nouvelle entrée"

(qui peut être soit une nouvelle entreprise, un nouveau produit, une technologie ou un

nouveau marché). Wiklund (1998) la réfère à une orientation stratégique des dirigeants,

reflétant la volonté de l’entreprise à s’engager dans un comportement entrepreneurial.

Bien qu’il ait fait l’objet principal de plusieurs recherches durant les trois dernières

décennies, l’entrepreneuriat organisationnel souffre encore de l’absence d’un paradigme

! ! ! &+!!

unificateur, voire même d’une définition commune. De ce fait, l’orientation de l’entreprise

vers l’activité entrepreneuriale a été définie de différentes manières, et les chercheurs lui ont

associé plusieurs labels

13

et ont tous plus ou moins attiré l’attention. Cogliser et al. (2008)

montrent dans un travail de synthèse que, sur une période d’environ 25 ans, pas moins de 19

labels différents ont été utilisés pour étudier ce que désigne OE, lesquelles recherches se sont

explicitement rattachées à plus d’une douzaine de corpus théoriques. Toutefois, si le label de

l’OE a été introduit par Lumpkin et Dess (1996), la conceptualisation tridimensionnelle de

l’OE, largement adoptée aujourd’hui, trouve ses origines dans le travail de Miller (1983).

Compte tenu des différents labels associés au phénomène, il n’est peut-être pas surprenant

que les chercheurs aient du mal à se mettre d’accord sur une définition largement acceptée

de l’OE. Le tableau 1 – élaboré par Covin et Wales (2012) - repère un ensemble de définitions

de l’OE proposées dans certaines recherches. Le tableau démontre bien les diverses

distinctions subtiles dans les interprétations données au concept.

Tableau 1-1: Analyse comparée des principales définitions de (ou se rapportant à) l'OE

Auteurs Définition de l’OE

Mintzberg (1973) “In the entrepreneurial mode, strategy-making is dominated by the active

search for new opportunities” as well as “dramatic leaps forward in the face of

uncertainty” (p. 45).

Khandwalla

(1976/1977)

“The entrepreneurial [management] style is characterized by bold, risky,

aggressive decision-making” (p. 25, [ ] added).

Miller et Friesen

(1982)

“The entrepreneurial model applies to firms that innovate boldly and regularly

while taking considerable risks in their product-market strategies” (p. 5).

Miller (1983) “An entrepreneurial firm is one that engages in product-market innovation,

undertakes somewhat risky ventures, and is first to come up with ‘proactive’

innovations, beating competitors to the punch” (p. 771).

Morris et Paul

(1987)

“An entrepreneurial firm is one with decision-making norms that emphasize

proactive, innovative strategies that contain an element of risk” (p. 249).

Covin et Slevin

(1998)

“Entrepreneurial firms are those in which the top managers have

entrepreneurial management styles, as evidenced by the firms’ strategic

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

13

Les différentes appellations qui ont été utilisées sont par exemple : entrepreneurial mode (Mintzberg,

1973), entrepreneurial style (Khandwalla, 1977), entrepreneurial model (Miller & Friesen, 1982), firm level

entrepreneurship (Miller, 1983), strategic behavior (Burgelman, 1983), entrepreneurial behavior (Covin &

Slevin, 1986), entrepreneurial management style (Covin & Slevin, 1989), entrepreneurial strategy making

(Dess, Lumpkin & Covin, 1997) et entrepreneurial mindset (Ma & Tan, 2006).

! ! ! &,!!

decisions and operating management philosophies. Non-entrepreneurial or

conservative firms are those in which the top management style is decidedly

risk-averse, non-innovative, and passive or reactive” (p. 218).

Merz et Sauber

(1995)

“…entrepreneurial orientation is defined as the firm’s degree of proactiveness

(aggressiveness) in its chosen product-market unit (PMU) and its willingness

to innovate and create new offerings” (p. 554)

Lumpkin et Dess

(1996)

“EO refers to the processes, practices, and decision-making activities that lead

to new entry” as characterized by one, or more of the following dimensions: “a

propensity to act autonomously, a willingness to innovate and take-risks, and a

tendency to be aggressive toward competitors and proactive relative to

marketplace opportunities” (pp. 136–137).

Zahra et

Neubaum (1998)

EO is “the sum total of a firm’s radical innovation, proactive strategic action,

and risk taking activities that are manifested in support of projects with

uncertain outcomes” (p. 124)

Voss, Voss, et

Moorman (2005)

“…we define EO as a firm-level disposition to engage in behaviors [reflecting

risk-taking, innovativeness, proactiveness, autonomy, and competitive

aggressiveness] that lead to change in the organization or marketplace” (p.

1134, [ ] added).

Avlonitis et

Salavou (2007)

“EO constitutes an organizational phenomenon that reflects a managerial

capability by which firms embark on proactive and aggressive initiatives to

alter the competitive scene to their advantage” (p. 567).

Cools et Van den

Broeck

(2007/2008)

“Entrepreneurial orientation (EO) refers to the top management’s strategy in

relation to innovativeness, proactiveness, and risk taking” (p. 27).

Pearce, Fritz, et

Davis (2010)

“An EO is conceptualized as a set of distinct but related behaviors that have

the qualities of innovativeness, proactiveness, competitive aggressiveness, risk

taking, and autonomy” (p. 219).

Source : Covin et Wales, 2011 ; p. 3

La conceptualisation originale de l’OE proposée par Miller a été fondée sur les travaux de

certains théoriciens de la stratégie (comme Khandwalla, 1977 ; Mintzberg, 1973 ; Collins et

Moore, 1970) et de l'entrepreneuriat à l’époque (comme Cole, 1946; Hartman, 1959; Knight,

! ! ! '-!!

1921; Redlich, 1949; Schumpeter, 1934 Shapero, 1975)

14

. Le travail de Miller (1983) avait pour

objet de montrer les mérites de l’approche configurationnelle, à partir de l’étude d’un

ensemble de variables décrivant le processus d’élaboration de la stratégie (strategy making

process). En ajoutant la dimension de «proactivité», Miller (1983, p. 771) postule que

l’entreprise entrepreneuriale réunit la triple capacité d’innovation, de prise de risque et de

pro-activité. Cela faisant qu’en tant que telle, l’OE a été conçue par Miller (bien qu'il n’ait

jamais utilisé l'expression orientation entrepreneuriale dans ce travail initial) comme un

construit renfermant les dimensions de l'innovation, la prise de risque et la proactivité.

Dans les travaux de Mintzberg sur « strategic decision-making », le mode entrepreneurial de

stratégie désigne une disposition managériale caractérisée par la recherche active de

nouvelles opportunités dans des environnements incertains. Les travaux de Khandwalla

(1976/1977) sur les dispositions managériales ne restent pas moins importants pour

caractériser l’OE. Khandwalla décrit le concept du style managérial comme l’ensemble de

croyances, normes dont disposent les dirigeants dans une entreprise… traduites en actions,

permettent de construire les stratégies de survie et de croissance d’une entreprise

15

”. Selon ce

dernier, un style de management entrepreneurial se réfère à une approche de prise de

décision audacieuse, risquée et agressive, contrairement à une approche plus prudente,

orientée vers la stabilité.

Les travaux de ces théoriciens de la formulation stratégique de la stratégie constituaient alors

le sous-bassement théorique par lequel l’OE se présente comme une disposition stratégique

enracinée dans la prise de décision. Cette conception a été largement adoptée dans des

études scientifiques ultérieures plus pointues sur le construit (par exemple, Miller et Friesen,

1982 ; Covin et Slevin, 1989; Lumpkin et Dess, 1996). Néanmoins, l’introduction de la notion

de l’entrepreneuriat au niveau d’entreprise (firm-level entrepreneurship) par Miller et ses

collègues a été derrière l’apparition de toute une école de pensée qui considère que l’OE se

manifeste comme un ensemble de comportements organisationnels. Miller et Friesen (1982,

p. 5) postulent que la firme entrepreneuriale "innove audacieusement et régulièrement en prenant

des risques considérables dans ses stratégies produit-marché."

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14

Danny Miller (2011), « Miller (1983) Revisited: A Reflection on EO Research and Some Suggestions for the

Future », Numéro spécial de la revue académique Entrepreneurship Theory and Practice. Septembre 2011,

volume 35, issue 5, pages 855-1103

15

“Operating set of beliefs and norms about management held by the organization’s key decision makers . . .

[that] when translated into action, constitute the organization’s strategy for survival and growth”

(Khandwalla, 1977 ; p. 22).

! ! ! '$!!

Des efforts importants ont été également déployés pour l’évaluation et la vérification de ses

propriétés statistiques de l’OE (Cf. Covin et Slevin, 1986, 1989; Lumpkin et Dess, 1996; Stetz,

Stewart, Howell, Blair, et Fottler, 2000), de sa généralisation interculturelle et de ses

différentes opérationnalisations (Cf. Knight, 1997; Kreiser, Marino et Weaver, 2002;

Ramachandran et Ramnarayan, 1993).

Les déterminants et les conséquences de l’OE ont eu aussi une place importante dans les

recherches sur le concept. Sur la question des antécédents de l’OE, un nombre considérable

d’études a examiné l’effet des caractéristiques individuelles, à travers le profil psychologique

du dirigeant (par exemple, Begley et Boyd, 1988; Poon, Ainuddin, et Junit, 2006), et

l’influence des caractéristiques environnementales et organisationnelles (par exemple,

Becherer et Maurer, 1997; Lumpkin et Dess, 2001). D’autres auteurs se sont intéressés au

contexte stratégique de l'OE (Covin, Green et Slevin, 2006; Covin et Slevin, 1991) ou ses liens

avec les ressources et les capacités de l’entreprise (Dess, Lumpkin, et Covin, 1997; Smart et

Conant, 1994). Le deuxième niveau de questionnement qui a fait couler énormément d’encre

est celui relatif à la relation OE-performance. Ainsi, cette association a été examinée comme

étant directe (selon les prémisses de contingence environnementale et/ou stratégique) ou

comme étant modérée par d’autres diverses conditions (Covin et al; Dess et al; Poon et al;

Rauch, al. 2009; Richard et al. 2004; Wiklund et Shepherd, 2003, 2005).

Sous-section 3- Une conception tridimensionnelle de l’OE

Malgré la diversité des labels, force est de constater que la plupart des chercheurs ont adopté

la conception à trois dimensions de l’entrepreneuriat au niveau organisationnel proposées

par Miller (1983): une entreprise est caractérisée par l’innovation, la prise de risque et la proactivité.

Cette conceptualisation a été aussi adoptée et clarifiée par d’autres auteurs (Covin et Slevin,

1989; Lumpkin et Dess, 1996). Le tableau 1.2 recense les définitions utilisées par Miller et ses

coauteurs dans différents articles.

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Tableau 1-2: Définitions des trois dimensions de l'OE

Source : Olivier Basso et al. 2009, p.179

Nous définissons dans ce qui suit ces trois dimensions, à savoir l’innovation, la prise de

risque et la proactivité.

1. L’Innovation

La caractéristique discriminante de l’entreprise entrepreneuriale est l’engagement dans la

création de nouveaux produits, particulièrement avant les concurrents (Zahra, 1993).

Schumpeter (1934, 1942) a été sans doute l'un des premiers chercheurs à considérer la place

centrale de l'innovation dans les processus entrepreneuriaux. Le concept de « la création

destructive » désigne le processus économique induisant la création de richesse associée à la

perturbation des structures existantes des marchés par l’introduction de nouveaux produits

ou procédés. Ainsi, L'innovation joue un rôle important dans la présence ou l'absence de

Variables Définition Source

Product-market

innovation

Does the firm seem particularly innovative in terms of

the number and novelty of new products and services

which are introduced, and the new markets which are

entered?

Miller et Friesen

(1977, 1978, 1983)

Aggregate innovation combines:

- Innovation in production/service methods

- Product R&D and technological leadership

- New product introduction frequency

- Degree of change in product line.

Miller et al. (1982)

Miller and Friesen

(1982)

Proactiveness

of decisions

Does the firm react to trends in the environment or does

it shape the environment by introducing new products,

technologies, administrative techniques, etc.?