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L’enseignement et l’apprentissage implicite de la grammaire

2. L’ ENSEIGNEMENT ET L ’ APPRENTISSAGE DE LA GRAMMAIRE DE L ’ALS

2.3 L’enseignement et l’apprentissage implicite de la grammaire

Ce type d’enseignement porte sur l’apprentissage plus naturel et authentique grâce à l’utilisation du contexte dans lequel les structures grammaticales apparaissent dans une communication naturelle, sans tenir compte des règles de grammaire, sans explications métalinguistiques, et même sans enseignement. L’enseignant devient un modèle et sa compétence linguistique suffit. Les étudiantes et étudiants sont immergés dans la langue de façon naturelle et les mécanismes de la langue sont découverts ou non par eux — mêmes. La théorie n’est pas nécessaire. La communication et l’information compréhensible (« compréhensible input ») constituent la seule base de l’apprentissage (Krashen, 1991).

Legendre (2005) définit la grammaire implicite comme suit :

[…] type de grammaire issue d’un enseignement dans lequel les élèves, conduits par l’enseignant, procèdent par manipulations de phrases, par des jeux sur/avec la langue de façon à ce qu’ils se forgent une règle dans leur tête sans que celle-ci ne soit énoncée ni expliquée par l’enseignant. (p. 719 — 720)

Nous pouvons constater que ce type d’apprentissage s’approche le plus de la théorie de l’acquisition naturelle de Krashen (1991) et Krashen et Terrell (1988). L’accent est mis dans ce cas sur l’identification des éléments qui font l’objet d’un apprentissage dans le contexte où ils apparaissent et dans ce cas le métalangage linguistique n’est pas nécessaire (Elder, Erlam et Philp, 2007). D’ailleurs, Ellis (2010) voit l’apprentissage implicite comme spontané, sans utilisation du métalangage linguistique et dans le contexte d’une tâche d’apprentissage qui conduit l’étudiante ou l’étudiant à l’acquisition involontaire d’une certaine structure.

L’apprentissage implicite d’une langue se produit en action, dans un contexte d’immersion et pendant une période de temps plus étendue. C’est le cas de l’apprentissage de la langue maternelle dans les premières années de vie d’un individu. Les enfants acquièrent le langage de façon spontanée, dans l’action et par la découverte, mais ils ne sont pas capables d’expliquer comment la langue fonctionne (Ellis, 2011). Ce processus d’acquisition de la langue maternelle peut être expliqué par la théorie de la période critique de développement de Chomsky (1959) selon laquelle un enfant acquiert le langage et divers éléments langagiers à des moments bien établis de sa vie.

Toutefois, les apprenantes et apprenants adultes utilisent d’autres habiletés mentales que celles des enfants pour apprendre une langue, telles que la résolution de problèmes et les habiletés métalinguistiques, et ce notamment parce qu’ils ne peuvent plus accéder à leur habileté innée d’acquisition d’une langue (Lightbown et Spada, 2010). Ainsi, pour un adulte, l’apprentissage implicite d’une langue seconde dans le contexte de l’approche communicative est très limité et l’enseignement nécessite des explications métalinguistiques de la langue seconde visée (Ellis, 2011). C’est ainsi que, dans le contexte d’un cours d’ALS au collégial, où la majorité des étudiantes et des étudiants ont atteint l’âge adulte et le temps est limité à 45 heures d’apprentissage, l’enseignement implicite est insuffisant pour l’atteinte de l’objectif du cours qui est en général de communiquer en anglais avec une certaine autonomie pour les niveaux débutants et avec aisance pour les niveaux avancés. Dans ces conditions, pour le niveau intermédiaire — avancé de l’ALS, qui correspond au niveau III au collégial, où les étudiantes et étudiants ont déjà acquis l’ALS de façon soit implicite ou explicite, l’enseignement et l’apprentissage implicites offrent très peu de support pour peaufiner la langue et pour comprendre les mécanismes plus fins de sa structure afin de permettre aux étudiantes et étudiants un niveau plus élevé d’autonomie langagière. Dans ce cas, le rôle de moniteur — éditeur de la grammaire explicite (voir Krashen, 1991, dans les pages précédentes) revêt une grande importance. D’ailleurs, à tous les niveaux de compétence dans un cours d’ALS au collégial, l’enseignement implicite de la

grammaire de l’ALS devrait être combiné à l’enseignement explicite de la grammaire. Selon Lantolf (2011), les connaissances explicites doivent être complémentaires à la communication afin de les procéduraliser. D’ailleurs, dans sa recherche antérieure sur l’effet de l’enseignement implicite et explicite, MacWhinney (1997) était du même avis :

Les psychologues ont démontré plusieurs fois que l’apprentissage des concepts avec des organisateurs et des indices préalables est toujours mieux que l’apprentissage sans indices. Les étudiants qui reçoivent de l’enseignement explicite, et en même temps une exposition implicite aux formes, semblent recevoir le meilleur des deux mondes (p.278).

Lantolf (2011) fait la distinction entre les connaissances spontanées et les connaissances conceptuelles ou scientifiques. La première catégorie porte sur les connaissances acquises de manière involontaire et en général, elles ont une qualité empirique, et sont souvent limitées, voire même erronées. Par contre, les connaissances conceptuelles ou scientifiques résultent d’un apprentissage théorique volontaire et ont l’avantage d’être transférables grâce à la généralisation et l’abstraction des concepts observés.

L’effort cognitif conscient et volontaire effectué par les apprenantes et apprenants de l’ALS pour comprendre les connaissances déclaratives explicites de grammaire conduit à la transformation de ces connaissances déclaratives explicites en des connaissances implicites par la procéduralisation, la pratique guidée, le transfert des connaissances antérieures. Cela conduit à l’acquisition et à la production automatisée de la langue (Ellis, 2007). De plus, la comparaison intentionnelle de la langue maternelle à l’ALS pourrait décourager la généralisation erronée des formes grammaticales et la fossilisation des erreurs. Cette comparaison peut être faite seulement dans le cadre d’un enseignement explicite de la grammaire de l’ALS. Pourtant, l’enseignement explicite pourrait amener une étudiante ou un étudiant à être démotivé à cause de l’effort cognitif soutenu nécessaire à la compréhension des structures grammaticales différentes de sa langue maternelle acquise de façon naturelle.

3. L’effet de l’intégration des TIC dans l’enseignement et