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Chapitre I Revue bibliographique

I.2. Les modèles mis en œuvre pour rendre compte des flux de gènes

I.2.1. L’approche écologique : une approche intégrée pour prédire les taux de

L’approche écologique des flux de gènes consiste à estimer une loi de probabilité bivariée qui décrit « la probabilité qu’un grain de pollen émis par une source située à la position (0,0) féconde un ovule en tout point (x,y) » (Klein et al., 2003). Plusieurs lois de probabilité, ou noyaux de dispersion, existent. Par exemple Klein et al. (2006) en proposent huit en les comparant selon des critères statistiques. Le noyau de dispersion est estimé à partir de mesures expérimentales de fécondation croisée à l’échelle d’une parcelle à la fin de la saison de pollinisation. La force de l’approche est d’estimer les noyaux de dispersion en prenant en compte la disposition spatiale et les surfaces des parcelles donatrice et réceptrice de pollen. Le noyau de dispersion estimé représente une probabilité de fécondation moyenne par plante et sa robustesse pour la prédiction dépend de la taille du jeu de données utilisé.

Cependant, les mesures de fécondation croisée à partir desquelles est estimé le noyau de dispersion ne dépendent pas seulement de l’agencement et des surfaces des parcelles. En effet, de nombreux autres facteurs biophysiques interviennent comme la synchronisation de floraison, les quantités absolues émises, la vitesse et la direction du vent ou encore l’utilisation de distances d’isolement. Ainsi, le domaine de validité du noyau de dispersion est donné par les conditions expérimentales. Par exemple, Angevin et al. (2008) estiment que la fonction de dispersion proposée est seulement valide pour des couverts continus et une floraison synchronisée entre parcelles réceptrice et donatrice.

Pour pallier les limites empiriques de cette approche, des noyaux de dispersion « quasi- mécanistes » ont été proposés, leurs paramètres pouvant être reliés à des paramètres physiques de la dispersion aérienne de pollen (Tufto et al., 1997). Dans ce cas, le noyau est dérivé des équations d’un mouvement Brownien en trois dimensions qui décrit les trajectoires individuelles des grains de pollen dans l’atmosphère. L’équation du noyau est établie en faisant une hypothèse sur la loi de probabilité du temps d’arrêt du pollen ou temps de fécondation, i.e., le temps nécessaire pour arriver à la hauteur de l’épi femelle. En fonction des différentes hypothèses du temps de fécondation, différents noyaux existent dont les paramètres sont reliés avec la vitesse et la direction du vent, la différence de hauteur entre les panicules et les épis ainsi que les paramètres statistiques de la turbulence (écarts-types de la vitesse du vent). Klein et al. (2003) comparent plusieurs noyaux de dispersion et estiment qu’une loi NIG (« Normal Inverse Gaussian ») à 5 paramètres est la plus adaptée aux données expérimentales. Cependant, les paramètres estimés par déconvolution et ceux estimés en

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utilisant les paramètres physiques moyens sur la période montrent certaines divergences. Les auteurs supposent qu’un déficit de connaissance sur les paramètres statistiques de la turbulence peut être à l’origine de ces divergences.

Dans le but de mieux prendre en compte les facteurs biophysiques de la fécondation croisée, Angevin et al. (2008) proposent le modèle MAPOD dérivé du noyau de dispersion développé par Klein et al. (2003). Premièrement, le noyau est étendu à d’autres vitesses et directions de vent ainsi qu’à d’autres différences de hauteur entre panicules et épis que celle rencontrées dans l’étude de Klein et al. (2003) en utilisant des relations de proportionnalité. Deuxièmement, les taux de fécondation croisée sont simulés sur un pas de temps journalier en utilisant un modèle d’émission. Ce dernier est basé sur une courbe d’émission de pollen moyenne prédisant le taux de pollen par jour relativement à la quantité totale. Le modèle présente l’avantage de pouvoir prendre en compte un décalage de floraison ainsi qu’un déséquilibre entre les productions totales de pollen des parcelles donatrice et réceptrice en plus des paramètres physiques que sont la vitesse et la direction du vent. Cependant, Beckie et

al. (2008) soulignent la nécessité d’approfondir la validation du modèle avec un jeu de

données plus robuste.

Depuis les noyaux de dispersion statistiques estimés à l’échelle de la saison d’émission jusqu’au modèle MAPOD fonctionnant sur un pas de temps journalier et prenant en considération des variables biophysiques, l’approche des flux de gènes tend à concilier l’approche intégrée initiale avec une description plus mécaniste du phénomène. Cette approche a été bien utilisée pour les études de coexistence car elle permet d’estimer directement les taux de fécondation croisée. De plus, bénéficiant de travaux antérieurs sur la dispersion de graines à l’échelle du paysage et requérant un type de données limité, cette approche a été la plus immédiate à mettre en œuvre. Elle a été utilisée pour étudier les risques d’introduction de parcelles OGM au sein de paysage agricole pour différents scénarios d’agencement de parcelles (Viaud et al., 2008) ou de stratégies d’isolement spatial et temporel selon différents scénarios météorologiques (Angevin et al., 2008). Cependant, cette approche garde un certain degré d’intégration d’un point de vue temporel, e.g., les dynamiques horaires des processus impliqués ne sont pas prises en compte, et biologique, e.g., les noyaux sont ajustés sur des mesures de fécondation croisée à la fin de la saison, intégrant les variations de la viabilité du pollen ou de la réceptivité des soies. De ce fait, cette approche intégrée n’est pas adaptée pour prendre en compte les caractéristiques locales de l’interface agroécosystème-atmosphère et est préférentiellement utilisée à l’échelle régionale pour estimer des risques globaux.

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I.2.2. L’approche biophysique : une approche mécaniste pour prédire la

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